M. Parcours Se nourrir et arts de la table
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M. Parcours Se nourrir et arts de la table
Musée d’Aquitaine Parcours CANOPE QUE MANGEAIENT NOS ANCÊTRES ? - 3 500 000 ans Un régime essentiellement végétarien Lucy vivait en Afrique, dans un milieu de savane arborée. Elle grimpait aux arbres pour se nourrir et, par sécurité, elle y dormait également. Elle partageait son environnement avec d’autres animaux dont des carnivores pour lesquels elle était une proie potentielle. Une alimentation proche de celle des singes actuels Quand la saison n’était pas aux fruits, le régime alimentaire des australopithèques s’adaptait. Ils creusaient le sol à la recherche de racines, de tubercules. Ils devaient également se régaler de succulentes larves d’insectes, riches en protéines et en calcium. Lorsque l’occasion se présentait, ils n’hésitaient pas à chaparder quelques œufs dans des nids ou à tuer de petits animaux. Les australopithèques utilisaient probablement des objets trouvés dans leur environnement immédiat pour s’en servir comme outils : branches, bâtons, pierres, comme le font les singes actuels. Tous apprenaient en imitant leurs ainées. Les australopithèques ne possédaient pas de langage et ne maîtrisaient pas le feu. Ils avaient une croissance rapide et on peut considérer qu’à vingt ans, Lucy était à la fin de sa vie. Montre-moi tes dents, je te dirai ce que tu manges - Yves Coppens Les grosses molaires des australopithèques (- 3 500 000 ans) étaient adaptées à la mastication des végétaux (graines, racines, baies, fruits, feuilles). Leurs fortes incisives étaient parfaites pour éplucher et couper les fruits. Leurs dents étaient recouvertes d’un émail épais car l’alimentation était coriace. Quant à leurs canines, elles étaient plus utiles pour menacer que pour manger. Quand est-ce qu’on mange ? Les feuilles, les fruits et les racines sont abondants dans la nature mais peu nourrissants. Il faut en manger beaucoup pour se procurer l’énergie nécessaire. Les australopithèques devaient passer leur journée à chercher leur nourriture. Ils mangeaient de façon continue et irrégulière pendant la cueillette. - 2 000 000 ans Boire et manger au temps de l’Homo habilis Découverte d'une nouvelle saveur : la viande ... mais crue ! Confronté à un changement climatique, Homo habilis a évolué dans une savane plus sèche et moins arborée. Opportuniste, il se nourrissait de fruits, racines, œufs, petits reptiles ... Son alimentation sera complétée progressivement par un nouvel apport énergétique : la viande. Grande pourvoyeuse de protéines, elle a sans doute contribué à sa survie et à son développement. Nettoyeur de la savane… ou pique-assiette ? Homo habilis chassait à coup de pierres et de bâton de petits animaux de la savane. Il était incapable d’affronter les gros herbivores. Pour se nourrir suffisamment, il prélevait la chair des animaux morts : il pratiquait donc le charognage. Homo habilis ne consommait que des cadavres d’animaux morts depuis quelques temps : de faim, de soif ou tués par les grands fauves. Pourquoi se fatiguer à risquer sa vie alors qu’il suffisait d’attendre qu’une proie soit tuée. Une fois les grands fauves rassasiés, pour accéder à la carcasse, il ne restait plus qu’à tenir à distance les habituels charognards : hyènes, chacals ... Ses outils bien que rudimentaires lui permettaient cependant d’écraser les os pour récupérer la moelle, très nourrissante, et de découper en morceaux les carcasses afin de les transporter ailleurs. - 1 800 000 ans Boire et manger au temps d'Homo erectus Le temps des premières grillades Homo erectus était un chasseur-cueilleur qui a disposé de campements de plus en plus élaborés au fil de son évolution. Il construisait des cabanes ou occupait les entrées des grottes. Au cours de son déplacement vers l’Europe et l’Asie, il sera confronté à des climats parfois rigoureux. Les derniers d’entre eux ont domestiqué le feu et, avec lui, les hommes vont découvrir des saveurs inédites. Premier chasseur Homo erectus a commencé à chasser le petit gibier à l’aide de ses nouvelles armes, épieux et bifaces de plus en plus élaborés. Pour capturer de gros herbivores, il était obligé de recourir à des pièges naturels (défilés, marécages, promontoires). En France, on a retrouvé des traces d’éléphants, d’hippopotames et de rhinocéros ayant probablement été rabattus loin des transhumances vers des précipices ou des terrains marécageux jusqu’à ce qu’ils tombent. Il suffisait alors à Homo erectus d’achever l’animal. Pêcheur de grève Le littoral est un milieu lui offre une nourriture facile à attraper : bigorneaux, moules, huitres, coques, crevettes, crabes, poissons piégés par la marée, sans oublier les algues comestibles. Homo erectus s’en est régalé. Sur le site de Terra Amata près de Nice, on a ainsi découvert les restes de coquillages consommés. Des ancêtres en bonne santé Comte tenu de ce qui est nécessaire à l’homme pour sa survie et de ce qui était possible au Paléolithique, les hommes préhistoriques semblent s’être nourris convenablement. Sans cela, comment auraient-ils évolué ? La ration énergétique nécessaire devait être de 3 000 calories soit plus que les besoins actuels. Mais ces hommes sont actifs, sans moyens de locomotion, sans chauffage permanent. La ration doit couvrir leurs besoins en protides (viandes et poissons), glucides (baies et fruits), lipides (poissons, moelle, fruit secs,…), sels minéraux et vitamines. - 400 000 ans Le feu : naissance de la gastronomie préhistorique Le feu a été maitrisé par Homo erectus, il y a environ 400 000 ans. Avec lui, se produit une véritable révolution tant dans la vie sociale que dans l’arrière cuisine de la préhistoire. Grâce à lui, certains aliments toxiques ou indigestes à l’état cru deviennent comestibles. Il augmente ainsi la palette des saveurs. Mais attention : il peut aussi détruire certaines qualités nutritives si la cuisson se fait directement à la flamme. Les différents modes de cuisson préhistoriques La pierrade La pierrade est la technique la plus primitive consistant à griller les aliments sur une roche ou une pierre chauffée. Le rôti Les fouilles archéologiques ont livré de nombreux exemplaires de broches et d’extrémités osseuses carbonisées. La cuisson à l’étouffée La poterie n’existait pas encore au Paléolithique, les hommes ont inventé avec ingéniosité diverses techniques : La viande pouvait être cuite sous la braise. Comme les peuples d’Océanie, on peut tapisser un trou avec de grandes feuilles et y placer des galets incandescents. Les aliments sont posés dessus et pris en sandwich avec d’autres galets chauffés. En Ariège, on a ainsi retrouvé des ossements de perdrix des neiges mélangés à des galets qui avaient dû servir à leur cuisson. La dernière technique consiste à enfermer des aliments dans des organes d’animaux, par exemple dans la panse des ruminants tel le haggis écossais, ou dans une vessie avant de les faire cuire. Le bouilli De l’eau peut être portée à ébullition à l’aide de galets passés au feu et plongés dans une outre en peau imperméable. La révolution du feu : son rôle social Selon le sociologue Claude Lévy Strauss, le feu marque le passage de l’existence animale à l’existence humaine. C’est en cuisant devant le feu son morceau de venaison que l’être primitif cessant d’être une bête féroce est devenue un homme. Le foyer est un lieu de socialisation car les membres du clan s’y retrouvent. Il participe ainsi au développement du langage, stimulé par la nécessité de verbaliser les faits, les actes de tous les jours et les sentiments. Saveurs préhistoriques Le cru, le cuit et le pourri : qui l'eût cru ? L’aliment se présente à l’Homme dans trois états principaux : le cru, le cuit et le pourri. Le cuit est la transformation culturelle du cru ; le pourri sa transformation naturelle. Crudivorisme La découverte du feu n’a pas empêché les hommes de rester fidèles au cru. Cette pratique est d’ailleurs toujours d’actualité : que dire de notre goût pour le steak tartare ou les huitres ? Le pourri Neandertal et Cro-Magnon ont dû découvrir le pourri noble et l’apprécier dans l’estomac du renne. Les sucs gastriques du renne provoquent une fermentation lactique sur les mousses et lichens donnant un mélange acide comparable à la choucroute. Dès l’origine, les hommes ont testé les aliments putrides : d’abord par nécessité puis par goût. Faisaient-ils pourrir leurs proies, à l’instar des derniers nomades des régions polaires ? L’Arctique, c’est Lascaux vivant témoigne Jean Malaurie, spécialiste des Inuits. Les chasseurs du Groenland préféraient un phoque putréfié à toute viande crue. Ils suspendaient l’animal jusqu’à ce que la tête s’en détache. Ils raffolaient de mets douteux tel le Krongalouk : foies de gibiers enfermés avec de la graisse dans une outre en peau. Le tout ferment et se transforme en une mousse onctueuse dont le puissant fument rappelle celui de notre Roquefort national ! La recherche de saveurs fortes n’est pas étonnante chez ces peuples dépourvus d’épices et de boissons alcoolisées (elles n’apparaîtront qu’au Néolithique). Tous ces plats contiennent des substances toxiques et souvent euphorisantes : cependant, c’est un peu la roulette russe, comme les drogues, comme les drogues, ils peuvent tuer. Un plat bien assaisonné Les herbes aromatiques devaient parfumer les ragoûts : d’autant plus que certaines possèdent également des vertus médicinales. La saveur sucrée était connue des hommes du Paléolithique. Pas de sucre évidemment à cette époque, mais l’Homme récolte le miel sauvage. C’est peut-être en observant l’ours qu’Homo erectus a appris à dérober le miel aux abeilles. Le sel n’est pas utilisé au Paléolithique. Indispensable à l’organisme, les Inuits comme les hommes préhistoriques en trouvaient assez dans leur alimentation carnée. Le sel est présent dans l’eau de mer et dans l’écorce terrestre : le sel gemme. Les techniques d’extraction complexes n’ont pu se produire qu’à partir du Néolithique. - 150 000 ans Boire et manger au temps de Neandertal Grand chasseur et grand rôtisseur Maîtrisant parfaitement le feu, l’Homme de Neandertal vivait de chasse, de pêche et de cueillette. La viande devait être prépondérante dans l’alimentation lors des périodes froides. Au menu, on pouvait trouver, entre autres, du renne, du cheval, du bison et du mammouth. Peut-être récupéraient-ils comme leurs ancêtres, des animaux tués par les grands prédateurs. Mais ils chassaient sans doute eux-mêmes et pas seulement du petit gibier. On a retrouvé un épieu moustérien en bois d’if long de 2 m fiché dans le squelette d’un éléphant, à Lehringen en Allemagne, preuve d’une chasse qui s’était déroulée il y a 125 000 ans. L’Homme de Neandertal pratiquait la pêche de façon subsidiaire pour compléter la chasse. Les instruments de pêche ne semblant pas exister, il devait attraper les poissons à la main tels les saumons, particulièrement abondants lors des migrations saisonnières. Les Néandertaliens ont-ils pratiqué le cannibalisme ? Des ossements humains portant des traces de découpes ont été trouvés mêlés à des restes d’animaux dans des sites archéologiques comme la grotte de l’Hortus. A Krapina en Croatie, furent découverts des fragments broyés et éparpillés d’une douzaine de Néandertaliens, comme s’ils avaient été victimes d’un festin ! L’anthropophagie était-elle une nécessité alimentaire ou une pratique rituelle ? Nécessaire ? Difficile de l’admettre dans la mesure où la nature se montrait assez généreuse et où ces restes humains voisinaient avec des restes d’animaux. Rituelle alors ? Certains peuples mangent leurs ennemis pour les anéantir complètement ou pour s’accaparer leurs qualités ; d’autres consomment leurs proches afin de leur offrir une sépulture décente. Autre hypothèse : les traces de découpes pourraient être aussi la conséquence de pratiques funéraires sans consommation de la chair avec décarnisation du corps. - 30 000 ans Boire et manger au temps de Cro-Magnon Un régime alimentaire de plus en plus diversifié Mode de vie de Cro-Magnon Cro-Magnon vivait encore essentiellement de chasse, marquant une préférence pour certains gibiers comme le renne, à la fois abondant et relativement facile à chasser, mais aussi de cueillette et de pêche. Il habitait des abris sous-roche, des grottes bien exposées et intelligemment choisies, ou parfois même des campements aménagés. L’invention de l’arc fait de l’Homme de CroMagnon le plus redoutable chasseur de la Préhistoire. Les techniques de chasse et les armes devaient varier en fonction des espèces d’animaux. Grands observateurs de leur environnement, les hommes devaient avoir une connaissance approfondie des mœurs des différentes espèces. Ils choisissaient leur moment et leur technique de chasse qu’ils adaptaient en fonction du gibier. Le poisson, c’est bon pour la santé ! La pêche prend tout son essor à l’époque de Cro-Magnon grâce à l’invention du harpon et de l’hameçon. Le saumon, particulièrement abondant, est le plus prisé comme en témoignent les nombreux restes découverts lors de fouilles (vertèbres notamment). Certains paléontologues pensent que la consommation de poisson a été un élément important dans l’évolution humaine. C’est une nourriture riche en protéines et en éléments essentiels pour le développement du cerveau. Ceci a peut-être joué un rôle dans l’ascendant que CroMagnon a pris sur les Néandertaliens. En outre, son alimentation était plus variée, ce qui augmentait sa capacité d’adaptation aux changements environnementaux. Le menu du jour Pot au feu ou "Peau-au-feu" Imaginez un bon quartier de viande dans un récipient, fait d'une peau soutenue par un trépied de branches, dans lequel on immerge régulièrement des galets brûlants tirés d'un foyer voisin. Pour peu que Madame Cro-Magnon y ait ajouté quelques os à moelle concassés, cela devait donner un mets des plus raffinés. Ainsi Cro-Magnon inventa une des plus vieilles recettes du monde : les soupes grasses. Saumon fumé Le saumon fumé que l’on vous sert à Noël : c'est lui qui l'a inventé. Le séchage et le fumage avaient pour but de conserver le surplus de chasse et de pêche. Cette technique permettait une excellente conservation des viandes et pouvait assurer pendant un certain temps la subsistance du groupe et l’apport en protéines. Accompagnements et desserts fruits et légumes, selon arrivages saisonniers N’oublions pas que Cro-Magnon était omnivore et n’avait rien d’un féroce carnivore. Il avait appris de ses ancêtres combien les végétaux et les fruits lui étaient nécessaires. Fruits sauvages, tubercules, racines, champignons et jeunes pousses abondaient en fonction des saisons et apportaient les indispensables sucres, vitamines, fibres, sels minéraux et substances aromatiques. Telle était la vie de notre Cro-Magnon chasseur-cueilleur. Mais les grands froids du Würm laissent peu à peu la place au climat actuel. Rennes et mammouths sont remplacés par les cerfs et les sangliers : une autre cuisine se prépare ... Dans le renne tout est bon ! Le renne est l’animal qui a joué un rôle de première importance au Paléolithique supérieur. Toutes les parties de l’animal étaient utilisées. Le renne est à la fois le garde-manger, la boîte à outils et la boîte à bijoux Gilles Delluc, anthropologue et préhistorien La viande était utilisée fraîche ou fumée pour être conservée. Les bois entraient dans la fabrication de pointes, de sagaies, de harpons, de propulseurs ... Les dents étaient utilisées dans la confection de colliers. Les os plats étaient souvent gravés. Les os et les tendons servaient à la fabrication de nombreux outils, surtout des aiguilles et des poinçons. On les utilisait également pour la moelle qu’ils contenaient. Les tendons servaient de fil à coudre. Les peaux étaient assemblées pour faire des vêtements ou des abris (tipis, huttes). Des morceaux de choix Cro-Magnon ne mangeait pas n’importe quoi : les fouilles archéologiques ont prouvé qu’il préférait les jeunes rennes et savait sélectionner des morceaux de choix. Il semblait particulièrement apprécier les gigues, les épaules et les têtes (vraisemblablement pour se délecter de la cervelle et de la langue). L'art de la boucherie L’analyse des ossements de rennes ou de chevaux montre que les os étaient débités avec adresse. C’est avec précision et en des points judicieusement choisis que les couteaux de silex ont laissé leurs traces de découpes. Après la chasse ... Un renne, c’est lourd : comme le faisaient les Inuits, les chasseurs en consommaient un peu sur place, cru. Peut-être ouvraient-ils la panse de la bête pour récupérer les végétaux qu’elle contenait : une véritable purée verte. Peut-être fendaient-ils les mamelles des femelles pour en goder le lait, si gras et si riche ? On ne le sait pas mais les gens du Grand Nord le faisaient il n’y a pas si longtemps. Gilles Delluc - 8 000 ans Boire et manger au Néolithique Une révolution à la fois sociale, technique et alimentaire Désormais, l’Homme asservit la nature à ses besoins : le monde végétal par la culture et le monde animal par la domestication. L’agriculture est à l’origine de la sédentarisation des populations et de la construction des premiers villages. C’est au Proche-Orient, dans une zone appelée le crossant fertile qu’est née, il y a 8 000 ans, l’agriculture méditerranéo-européenne. Pour la première fois, l’Homme a planté les céréales qu’il avait coutume de ramasser et de consommer à l’état sauvage. Le blé et l’orge seront les premières céréales cultivées. Puis suivront les plantes légumineuses : pois, lentilles et fèves, qui avaient l’avantage de pouvoir se consommer fraîches ou séchées et être stockées. De la bouillie à la bière Les céréales, écrasées sur des meules à va-et-vient, vont dès lors permettre la confection de bouillies, de soupes et de galettes cuites sous la cendre ou sur des pierres. Le pain naîtra un jour de la cuisson d’une bouillie de céréales écrasées, préalablement oubliée à l’air libre et qui aurait fermenté naturellement. Le plus ancien spécimen de pain connu a été découvert dans une station lacustre suisse. Il est daté de 5 000 ans. C’est encore vraisemblablement une bouillie de céréales cette fois à base d’orge qui, ayant fermenté plus longuement, donnera naissance à la bière. Des chasseurs aux éleveurs Même si la chasse ne disparaît pas complètement au Néolithique, l’apport carné sera de plus en plus constitué par la viande provenant des premières domestications. Celles-ci vont se faire à partir d’espèces sauvages locales : la chèvre, provenant de la chèvre aegagre, le mouton issu du mouflon d’Anatolie, le bœuf descendant de l’aurochs et enfin le porc domestiqué à partir du sanglier. L’élevage permet d’introduire un aliment autrefois réservé aux enfants : le lait. Dès le Néolithique, avec les premières faisselles, apparaissent caillés et fromages. Récemment introduit dans notre alimentation, le lait n’est pas encore assimilé par toutes les populations. Une extraordinaire explosion démographique sera la conséquence de cette alimentation plus riche, plus équilibrée, plus variée. Des outils pour travailler la terre Recherche de nouvelles terres et pratiques agricoles vont voir se développer techniques et outils nouveaux : la hache pour déboiser, la houe pour travailler la terre, la faucille pour moissonner et vers – 2 000 ans av. J.C., l’araire attelé à des bœufs. Des poteries pour stocker Avec l’apparition de l’agriculture et de la sédentarisation, émerge le besoin de stocker en quantité et durablement : ce que va permettre la naissance de la poterie il y a 8 000 ans au Proche Orient. Les premiers récipients à fond rond excluent l’usage de tables. Leur forme était appropriée aux sols irréguliers des habitations. La constitution de réserves et donc de richesses est malheureusement à l’origine des premiers conflits. C’est au Néolithique qu’apparaissent les premières guerres. Que mangeaient nos ancêtres Les Gallo-Romains ? 1 - L’alimentation à l’époque gallo-romaine L'alimentation des gallo-romains est issue de la rencontre de deux cultures celte et gauloise d'une part et Latine d'autre part : deux façons bien distinctes de s'alimenter. Les Celtes et les Gaulois avaient plutôt une alimentation à tendance carnée (forte consommation de viande notamment du gibier). A l'opposé, les habitudes alimentaires du monde latin et des romains en particulier étaient basées sur une forte consommation de mets à base de céréale et notamment le pain. La romanisation de la Gaule amena graduellement un savant dosage de ces deux tendances alimentaires. Dans les villes, les gallo-romains prirent l'habitude de ne faire qu'un seul grand repas par jour, la cena romaine, qui avait lieu le soir. Dans les campagnes on continua de faire deux repas copieux. Voici quelques généralités sur les produits les plus couramment utilisés à cette époque. Les céréales Les céréales constituaient l'élément essentiel de 1 'agriculture et de l'alimentation de l'Antiquité. Les gallo-romains connaissaient de nombreuses espèces. Le maïs acquisition récente de l'agriculture européenne n'y figure pas. Le sésame et le riz sont connus mais exotiques (Indes). L'engrain et l'amidonnier (blés), de même que le millet et l'orge (en partie) étaient préparés sous forme de bouillies ou de galettes. En revanche le blé tendre/dur, le plus cultivé à cette époque, était moulu pour la confection du pain, la farine de ses grains étant riche en gluten, élément essentiel dans le processus de panification. L'orge, la céréale la plus semée, était à la base de la fabrication de la bière d'alors: la cervoise La vigne Après la conquête, la culture de la vigne se répandit en gaule et les vins gaulois ne tardèrent pas à concurrencer sévèrement ceux d'Italie. Au début, ces vins furent traités selon les méthodes romaines, c'est-à-dire poissés, aromatisés, fumés. Et ce, jusqu'au jour où quelque vigneron de génie eut l'idée pratique de le conserver et de le transformer comme la cervoise dans des tonneaux de bois, beaucoup plus grands et moins fragiles que les amphores de terre cuite. Le bois perméable à l'air, rendait possible le vieillissement naturel du vin pur qui devait devenir la boisson habituelle des habitants de ce pays. La viande L'alimentation carné était très importante chez les gallo-romains. Ceux-ci étaient réputés pour leur charcuterie dont ils étaient grands consommateurs. Par ailleurs le porc se préparait frais et salé. On consommait également du bœuf, des volailles de la basse-cour. Les viandes étaient bouillies ou rôties. Les poissons de rivière et de mer sont aussi consommés. Les crustacés et coquillages ne sont pas négligés non plus. Les plus appréciés sont les huîtres qui étaient exportées partout en Gaule dans des amphores pleines d'eau de mer. Les produits laitiers Le lait est important dans l'alimentation gauloise. Les fromages sont très courants dans l'Antiquité et notamment renommés en Gaule. Ils sont faits à partir de laits de vache, de brebis, voire de chèvre. Ils se consommaient souvent frais, parfois aromatisés ou fumés. Le beurre est connu dans l'antiquité, mais peu utilisé. Les œufs de poule, surtout étaient consommés L'Apiculture et la production de miel sont importantes, car c'est la source essentielle du sucre nécessaire à l'alimentation. Les légumes Les légumes utilisés pendant l'antiquité sont en général bien connus encore aujourd'hui. Les champignons, les radis, les carottes, les asperges, les brocolis, les artichauts, les salades, le choux, la bette, le poireau, les orties, le céleri, le concombre, calebasse, la mauve, l'arroche, la patiente sont consommés. Les racines alimentaires les plus courantes sont le RAVE et le NAVET à tel point que pour PLINE, la rave est par ordre d'importance la troisième culture après la vigne et le blé. L'oignon et l'ail sont également très utilisés. Les graines forment un autre groupe très important. Lin et chanvre sont consommés par l'homme, même si elles sont souvent cultivées pour le textile. Dans l 'Antiquité une place très importante est accordée aux épices et aromates de toutes sortes pour les préparations alimentaires. Les gaulois toutefois; en faisait une moins grande utilisation que les romains. Les fruits. La plupart de nos fruits sont connus des Romains et sans doute consommés en Gaule : pomme dont 2 variétés sont attestée", figue (région méditerranéenne), poire, coing, grenade, mûre, sorbe, raisin, olive, cerise, nèfle, melon. Les prunes et pêches parmi .sent rares en gaule avant le 2è siècle. D'autres fruits sauvages sont consommés prunelles, myrtille, arbouse, fraise des bois. Le fraisier cultivé n'est pas attesté. Il faut y ajouter les fruits secs et amandes : châtaigne, noix", noisette, amande, pignons, pistache, gland (éventuellement consommé par 1 'homme). 2 – La cuisine gastronomique D’APICIVS (1er siècle ap.J.C.) Une cuisine savante, raffinée et singulière, témoin de l'innovation et de l'art culinaires développés sous les règnes des empereurs Auguste et Tibère (1er après J.C.). "Reflets des conquêtes territoriales et alimentaires, la cuisine gastronomique de l'empire romain se diversifie et s'élabore à l'excès requérant, pour certaines recettes, une grande dextérité culinaire. Elle se caractérise par un mélange de salé/sucré, des saveurs aigresdouces, un usage important et varié de plantes aromatiques et d'épices qui conférant aux mets une surprenante palette de saveurs. La plupart des recettes se composent d'ingrédients de base tels que miel, huile d'olive, poivre, vin, vinaigre, garum (sauce aux poissons, tenant lieu de sel). Le mariage des épices et herbes aromatiques utilisées, la chaleur des vins employés, assurent à chaque plat, une personnalité propre, étonnante, parfois déroutante... Les recettes romaines, parvenues jusqu'à nous sous la forme d'une compilation faites aux environs de l'an 400, le "De re coquinaria", constituent l'un des plus anciens recueils culinaires connus ; cet ouvrage composite rassemble les recettes d'Apicius et de ses émules ainsi que des prescriptions d'ordre médical ou diététique : à cet ensemble de 468 recettes (réparties en 10 livres) s' (ajoutent 31 recettes extraites par Vinidarivs aux V-VIè siècles d'une autre édition d'Apicius... Marcvs Gavivs Apicivs (né aux environs de 5 avant J.C. - mort vers 30/37 après J.C., simple citoyen romain, acquit sous les règnes d'Auguste et de Tibère, richesse, gloire et renommée grâce à son talent, ses raffinements et sa créativité culinaires. Il inventa des plats singuliers et de nombreuses sauces ; ses exigences culinaires le poussaient sans cesse à la recherche de mets provenant de tous les pays, se disputant avec d'autres gastronomes les meilleurs produits sur le marché de Rome. Ses extravagances, débauches et excès en tous genres lui attirèrent de la part de ses contemporains, des témoignages défavorables voire malveillants. Célèbre, riche, viveur et très en vue, il consacra et dépensa au faste de la table des sommes folles. Quand il entreprit de faire ses comptes, il s'aperçu qu'il ne lui restait que 10 millions de sesterces (somme énorme pourtant) et plutôt que de réduire son train de vie, il s'empoisonna.. Apicius est demeuré célèbre puisque encore au IIIème siècle après J.C. on disait un "Apicius" pour dire un cuisinier ... Céramique sigillée La céramique sigillée est une céramique fine destinée au service à table caractéristique de l'Antiquité romaine. Elle se caractérise par un vernis rouge grésé cuit en atmosphère oxydante, plus ou moins clair et par des décors en relief, moulés, imprimés ou rapportés. Certaines pièces portent des estampilles d’où elle tire son nom, sigillée venant de sigillum, le sceau. Ce type de poterie rencontra un très grand succès dans le monde méditerranéen à partir du règne d'Auguste. Plusieurs grands centres de production sont connus et il est possible d'en retracer l'histoire, en particulier celle de leur déplacement vers les provinces romaines en liaison avec le déplacement des zones de diffusion de cette céramique. Facilement identifiables et datables, les tessons de céramique sigillée constituent un important fossile directeur dans les fouilles archéologiques et sont de précieux indices pour dater des stratigraphies. Céramique sigillée rouge Origine La céramique à vernis rouge, recouverte d'un engobe grésé cuite en atmosphère oxydante est très en vogue dès le IIe siècle av. J.-C. dans le Proche-Orient hellénistique, de même que les décors en relief moulés ou à la barbotine (bols hellénistiques à relief). Ce sont très probablement les nombreux commerçants italiens et les légionnaires romains présents dans cette région qui introduisent la mode en Italie. Les potiers d’Arezzo C’est en Italie que la production de sigillée proprement dite apparaît aux alentours de 40 av jc. Le centre de production le plus important se trouve à Arezzo (Aretium) en Étrurie. Cette production céramique se situe dans la continuité des précédentes céramiques italiennes du point de vue de son succès et de sa diffusion. À partir du IIe siècle av. J.-C., en effet, les productions céramiques italiennes et romaines connaissent un succès commercial sans précédent et une diffusion jusqu'alors inégalée en Occident. L'introduction de la production en Gaule La conquête romaine de César, puis l’organisation augustéenne des provinces a déplacé le centre de gravité de l’occident romain vers le nord. La présence, au tournant de notre ère, de très nombreuses légions au nord de la Gaule sur le Rhin a entraîné l’émergence rapide d’un important marché pour des biens de consommation romains dans ces régions. À cette installation de consommateurs romains puis romanisés a répondu un déplacement ou un renforcement des axes commerciaux le long de l’axe Rhône-Saône, puis vers le Rhin. Les producteurs de sigillée n’ont pas tardé à ouvrir des filiales de leurs officines dans des régions plus proches de ces nouvelles régions de consommation. Le déplacement initial de potiers italiens a rapidement entraîné une très importante production par des potiers gaulois. Ces nouveaux centres de productions qui ont d’abord produit des imitations de céramique arétine ont ensuite développé leur propre répertoire de forme et de décoration. Tous n’ont pas eu non plus la même zone de diffusion. Que mangeait-on au Moyen Age ? Au Moyen Age, l'alimentation avait une grande importance, car les famines étaient fréquentes : une mauvaise saison, une guerre, et s'en était fini de la récolte. De cette importance est née une grande disparité sociale : la table du seigneur ne ressemble en rien à celle du métayer. Cette différence se caractérisait surtout par l'utilisation d'épices dans les préparations culinaires. L'alimentation était principalement composée de viandes, de pain et des dérivés de pâtisserie. Sauf pour les nobles, la cuisine médiévale est souvent une cuisine d'économie comme celle de nos grands-mères. Une cuisine faite de plats en sauce, de ragoûts et de pâtés. La cuisine médiévale est épicée mais ce n'est certainement pas pour masquer la piètre qualité des mets. Oubliez donc bien vite l'idée commune selon laquelle les épices masquaient le goût de la viande avariée ! Le Moyen-âge témoigne d'une perpétuelle quête dans la maîtrise de l'harmonie des épices dont le nombre est réellement impressionnant. Certaines épices telles le poivre long d'Insulinde sont même oubliées aujourd'hui. Rappelons enfin que les épices ne sont pas non plus à portée de toutes les bourses ! Elles constituent un critère de distinction sociale. Plus classiques comme le safran, la cannelle ou encore le gingembre. Le peuple ne se refuse pas non plus le plaisir des épices et les plus humbles sont comblés lorsqu'ils détiennent du poivre, épice devenue un peu trop accessible pour les plus riches. Pourquoi cet engouement pour les épices ? Les médecins de l'époque leur confèrent des qualités digestives. La provenance des épices apporte aussi une part de rêve, L'Orient est assimilé à une sorte de paradis...etc. Elles assureraient longévité ? Dans tous les cas, la cuisine du Moyen-âge fait preuve d'une certaine diététique : assez peu de corps gras, pas de sucre (le sucre était plus considéré comme une forme de médication que comme un réel agent gustatif). Un souci diététique aussi, dans le déroulement des repas. En effet, les grands repas démarraient par des salades assaisonnées ou des fruits frais, destinés à ouvrir l'appétit. Ensuite venaient les potages ou brouets puis les viandes rôties accompagnées de sauces diverses. Les sauces étaient bien souvent liées à la mie de pain ou encore avec du jaune d'œuf mais absolument sans matière grasse (ex : sauce au raisin noir). Puis venait l'entremets, sorte de distraction entre les mets... ballade chantée par quelque barde, jongleries, pitreries de bouffon, voire même plats pastiches tels que des « pâtés d'oiseaux vivants » afin d'étonner ses invités. Tout le monde profitait du spectacle en grignotant de petites préparations salées (petits beignets par exemple). Le repas reprenait alors son cours avec « la Desserte », qui correspond à notre dessert et enchaînait sur « l'issue de table » composée de fromages, fruits ou gâteaux légers. Des vins légèrement sucrés accompagnaient à merveille ces derniers plats qui visaient à fermer le repas, à accélérer la digestion. Enfin, pour terminer complètement le repas, les invités étaient conviés dans une autre pièce et chacun pouvait purifier son haleine et faciliter sa digestion en absorbant des dragées, des épices confites ou naturelles, le tout proposé à grands frais par le seigneur. C'était ce que l'on nommait le « boute-hors ». Ces petites gâteries de fin de repas s'accommodaient parfaitement des vins de claret et d'hypocras. L'hypocras est un vin blanc doux dans lequel on a laissé macérer de nombreuses plantes et épices (cannelle, gingembre, cardamome...). Les viandes Lorsque c'est possible : En Europe la viande la plus courante à l'époque médiévale était le porc et ses dérivés de charcuterie (jambons, saucisses, saucissons, pâtés, lard, etc.). Les gaulois s'étaient déjà fait une renommée dans la production de charcuterie à l'époque le l'empire romain. Les gros gibiers (sanglier, cerf et chevreuil) étaient réservés aux nobles, le petit peuple se contentait de lièvres et lapins de garenne. Les oiseaux de prestige (faisans, cygnes, aigles, paons) revêtus de leurs plumes, avec le bec doré, entourés de bannières et disposés sur des socles de pâte en forme de château fort etc., figuraient sur les tables de festins seigneuriaux. Les nobles consommaient également des poulardes, oies, dindes, canards (pas de pintades ni de dindes). Le peuple se contentait de perdrix, pigeons, bécasses, cailles, et de petits oiseaux (merles, grives, ortolans…). La poule, la vache et le mouton étaient servis qu'occasionnellement, sur les tables médiévales (en ragoûts, farcis, en croûte, en terrines) mais ces gibiers étaient habituellement conservés pour les œufs, le lait, la laine. Le bœuf étant l'animal de trait le plus répandu au Moyen Âge était peu servi à table. Notes diverses sur les viandes Parmi les viandes, nombre de recettes comprennent du bœuf, du poulet, du mouton, du chevreau, du porc, du cygne aussi. Pour ce qui est de l'élevage au Moyen-âge, on distingue les animaux qui ne fournissent que des produits morts comme le porc (lard, viande...) des animaux qui fournissent aussi des produits vifs comme le mouton avec sa laine ou les poules avec leurs œufs. Cette distinction est importante... on mange surtout la viande des animaux fournissant des produits morts. Elle explique par exemple que l'on consomme assez peu de vaches car elles produisent des bœufs pour le labour. De la même manière le bœuf ne sera consommé qu'après des années de labeur... pardon de labour ! Pour ce qui est des produits vifs, on attend toujours que l'animal soit moins rentable pour le consommer. Si l'on trouve aussi beaucoup de pigeons, c'est plus pour leur fumier (la colombine) très riche que pour leur viande ou leurs œufs. Vers 1050, à Charavines (38), pour 3 familles, on consomme 17 porcs par an, 2 bœufs, 10 chèvres et moutons, des poules. Cela fait environ, 16,6 kg de viande par an et par personne. En 1307, à Francfort sur Oder, on mange 100 kg de viande de bœuf /h/an. En 1397, à Berlin, on mange 1,3 kg de viande/j. En 1394, à Paris, on consomme : 30300 bœufs, 19600 veaux, 108500 moutons, 30800 porcs. En 1450, à Paris, on consomme : 12500 bœufs, 26000 veaux, 208000 moutons, 31500 porcs. A Carpentras, en 1450, on consomme 26 kg de viande/h/an, plus du porc. Le total des viandes devait représenter 40-50 kg/h/an. Au 15ème siècle: 50% de la viande mangée est du mouton, 30 % du bœuf. Les ouvriers aux services des Dominicains reçoivent 600/700 gr de viande/j. En 1990, on consomme 45 kg de viande par an par personne. Une famille de 5-6 personnes mange en 1 an 1 porc et quelques poulets. Cuisson à la broche chez les nobles et en sauce, en ragoût ou en pâté pour le peuple. En principe, tous les gibiers étaient rôtis à la broche, souvent après avoir été bouillis pour être plus tendres. Ou encore, ils étaient découpés en morceaux et cuits dans une sauce au vin épaissie de pain grillé broyé ou de purée de féculents, en sorte de civets ou de hochepots. On pouvait aussi mélanger plusieurs sortes de viandes pour utiliser les restes ou les abats, coupés en morceaux et mis à la sauce (épicée), ou broyés avec des herbes fines pour faire des pâtés ou des tourtes (avec de la pâte). Les épices pour changer le goût Les épices sont rares et chères en Europe, car elles sont importées d'Orient. Les grandes tables d'Europe rivalisent par la finesse des épices utilisées. Les épices connues à l'époque sont : le gingembre, la cardamome, la cannelle, le poivre, les clous de girofle, la muscade, le cumin, les amandes, le sucre, le safran... On utilise également des épices de nos contrées : feuilles de laurier, oignons, ciboulette, ail. Il est à noter que le sel n'est pas considéré comme une épice. On prête souvent à ces plantes des vertus thérapeutiques utilisées par les guérisseurs. Les gibiers étaient souvent préparés faisandés et pour en masquer, en changer le goût ou par plaisir ou snobisme, on les accommodait avec des épices venues d'orient et mises à la mode par les croisés (voire connues depuis plus longtemps) et aussi avec des oranges et des citrons dont le jus était utilisé pour parfumer certaines sauces. Les épices fortes communes (thym, laurier, ail, oignon, échalote, persil, ciboulette) aromatisaient les nombreux plats en sauce : au vin, au vinaigre ou au verjus (jus de raisin vert). L'abondance des épices fortes dans tous les plats s'explique également par l'absence d'excitants (thé et café n'étant pas encore apparus en Europe) en dehors du vin et des alcools. Les sauces Acides et aigres. Les sauces étaient servies à part : froides, l'été, à base de vinaigre ou de verjus additionné de fines herbes hachées (sarriette, menthe, ciboulette) ; chaudes et épaissies avec du pain, du jaune d'œuf ou des foies de volailles, l'hiver, pour accompagner venaisons et viandes. Les poissons En période de carême, la viande, les œufs et le beurre étant interdit, on les remplaçait par : Les poissons frais (soles, turbots et tous les poissons "nobles") Les carpes, anguilles, perches, brochets - nombreux dans les étangs des couvents et des châteaux. Les truites et saumons gardés dans des viviers, étaient le privilège des nobles. Les poissons salés ou fumés (morues, maquereaux, harengs, baleine). Les escargots, les grenouilles, les écrevisses. Cuisson Les poissons frais étaient cuits au court-bouillon fortement aromatisée, ou frits, ou accompagnés d'une sauce au vin ou présentés en gelés, ou encore, mêlés et broyés en pâtés (escherois réalisés avec des salsifis) ou en tourtes. Présentation, ordonnance et diversité des mets Le goût des plats "en croûte" s'explique par l'absence de couverts à table et la commodité de les manger. Il n'existait pas la même "ordonnance" dans le service des mets. Des fruits et des salades diverses pouvaient très bien être servies en début. Le sucré et salé cohabitaient constamment soit à l'intérieur d'un même plat, soit en se suivant. L'ordre des plats n'avait, en fait, aucune importance ! Chaque convive n'était pas invité à prendre de chaque plat, d'où l'extrême diversité et le nombre étonnant de mets sur la table ! On choisissait ce qui plaisait ou ce qui était à la portée. Pouvaient donc se mêler pâtés de viande en croûte, tourtes de poisson aux amandes et au vin blanc, jambons ou gibiers enrobés de pâtes croustillantes et dorées, gâteaux rustiques (à base de pâte à pain, de fromage blanc, colorés de safran ou épicés de cannelle, de cumin, d'anis, de gingembre), pains d'épice, bretzels salés, fougasses sucrées (sortes de brioches), gaufres, beignets, crêpes, pets-de-sœurs, etc. Les desserts et douceurs En fin de repas, apparaissaient des desserts : Tartes au flan, rissoles aux fruits secs et au miel, pain perdu, riz "engoulé" aux amandes et au miel, blancs-mangers colorés et parfumés de fleurs d'oranger. Dans les repas de fête, on aimait croquer des "douceurs" qui ressemblaient à nos actuels petits fours, sucré au miel - le sucre étant un luxe venu des croisades ! Des dragées faites de grains de coriandre ou de genièvre, des fruits secs enrobés de sucre ou pilés et malaxés avec du miel (pignons de pin, pistaches, amandes, noix, noisettes), des fruits confits, ou cuits dans le vin ou le sirop, les pâtes de fruits, les massepains parfumés à la rose… Ces "épices de chambre" faisaient l'objet de cadeaux de bienvenue, de remerciement, et étaient très appréciés ! Le "pain quotidien" du paysan Donnez nous notre pain quotidien : Le pain était avec les fromages, les racines et les fruits, la base de la nourriture paysanne. Il se présentait en grosses miches rondes, en couronnes, en petits pains individuels. Au début du Moyen Age, le pain était fabriqué à partir de farines de seigle, d'avoine ou d'orge, car en cette époque troublée, on privilégiait les céréales les plus rentables. Au XIIe siècle pourtant, on est revenu à la farine de froment (blé), plus digeste. Ils étaient saupoudrés de cumin ou d'anis, voire de marjolaine ! Les boulangers et les ménagères en fabriquaient de toutes sortes ; on raconte que même les pains "ratés" étaient vendus sur le parvis de NotreDame pour faire des liants de sauce ! De grosses tranches épaisses, un peu rassies, nommées "tranchoirs", servaient d'"assiettes" ou de supports aux viandes en sauce. A la fin du repas, soit on les mangeait, soit on les donnait aux pauvres, soit on les jetait aux chiens avec les restes. Les fruits Moins consommés par les nobles que par le peuple, les fruits étaient exclusivement ceux de la région et de la saison (fraîcheur oblige) (à part les dattes, figues, oranges, citrons, abricots, pêches, mis à la mode par les croisés, et ensuite implantés dans les régions les plus chaudes). Pommes, prunes, raisins, poires étaient récoltés dans les jardins, alors que fraises, framboises, mûres étaient cueillies sauvages en forêts. Les légumes C'est sans doute parmi les légumes qu'il y a beaucoup de différences. Les légumes sont essentiellement des racines. Leur forme diffère grandement de ce que l'on connaît maintenant ! La carotte, par exemple, est loin d'avoir la couleur orangée et la belle forme conique qui nous est aujourd'hui si familière, c'est plutôt une racine blanchâtre tordue et assez proche du panais. Le riz a été rapporté par les croisés mais il n'est véritablement donné qu'aux malades... Chez les moins fortunés, on consomme aussi beaucoup de petit épeautre. Il s'agit d'un « blé vêtu » ou « blé engrain » dont la culture se satisfait de conditions médiocres et qui est surtout - peu ou pas taxée -. Ce blé se consomme en bouillie mais il sert aussi pour cuire le pain. Les légumes peuvent être classés sous trois sortes principales : les racines (carottes, navets, betteraves, salsifis), les féculents (pois, haricots, fèves), et les légumes verts (choux, salades, bettes, cardons, pinards). Les herbes fines étaient utilisées surtout comme condiment à la place du sel sur lequel pesait un impôt très lourd : la gabelle. Boissons et breuvages La boisson principale était le vin : en effet, l'eau pouvait souvent être contaminée et rendre malade (dysenterie). Avec le vin, pas de problème. Le vin de l'époque avait un plus faible titrage et ne se conservait guère plus d'une année. On consommait également une boisson appelée piquette, fabriquée à partir de raisin, d'eau et de sucre. Au XIe siècle, on consommait surtout du vin blanc, mais à partir du XIIe siècle, la préférence est allée au vin rouge, du moins dans les pays du Sud de l'Europe. Le vin de l'époque était très acide et il était souvent coupé à l'eau et agrémenté d'épices, de miel ou d'herbes (claret et hypocras). En dehors du vin et des alcools servis pendant les repas, la bière (Cervoise) et le cidre étaient aussi appréciés - selon la région - que les bourgognes rouges et blancs. Pour faciliter la digestion, on servait des breuvages aux herbes (vin d'anis, d'absinthe, de romarin, de sauge) ou aux épices, tels l'hypocras, le clairet. Avec les sucreries on servait des vins très généreux (malvoisie) et des vins doux. Les jours maigres La religion imposait de nombreux jours maigres, aussi bien pour des raisons religieuses que de santé publique. L'Eglise imposait de ne manger ni viande ni graisse animale les vendredis et samedis de chaque semaine... Ajoutez à cela des périodes de jeûne comme celle du carême qui démarrait 40 jours avant Pâques... et vous obtenez en gros 150 jours dans l'année où l'église interdisait de toucher à de la viande ou à des dérivés... Même le lait était interdit, on le remplaçait alors par du « lait d'amande », très digeste et permettant des liaisons extrêmement onctueuses. Comme jours "maigres" on avait : les Mercredi et Vendredi, 40 jours de carême avant Pâques, avant Noël et après la Pentecôte. Boire et manger au XIXe siècle Salles du musée d’Aquitaine « Bordeaux port(e) du monde : 1800-1939 » Un espace dédié à la tourmente révolutionnaire assure la transition avec les salles ouvertes en 2009 : « Bordeaux au XVIIIe siècle, le commerce atlantique et l’esclavage ». Bien que très touché au début du siècle par la perte de Saint Domingue et les guerres maritimes de la Révolution et de l’Empire, les relations intercontinentales vont reprendre progressivement. Le port devient le moteur de l’économie bordelaise, avec les grands aménagements, le développement du négoce, l’âge d’or du chemin de fer et de l’industrie navale … Le négoce bordelais renforce ses activités vers les Amériques et l’Europe du Nord et multiplie les échanges avec les colonies : Afrique du nord et subsaharienne, Antilles, Indochine, NouvelleCalédonie et Chine. Ce dynamisme a un effet considérable sur l’économie bordelaise et le développement des industries alimentaires grâce aux produits coloniaux. Les rues de la ville sont animées par tout un monde de marchands ambulants, colporteurs, artisans. La population ouvrière est très importante du fait des installations portuaires et ferroviaires et de la diversification des industries qui attirent aussi des populations immigrées. Bordeaux, site naturellement propice aux échanges par sa localisation sur les bords de la Garonne, est un port en pleine mutation au XIXe siècle avec la construction de nombreux équipements: entrepôts, passerelle métallique, chantiers navals, bassins à flot, débarcadères, grues, rails et wagons… Les quais verticaux succèdent à la simple grève des bords de Garonne, facilitant l’accès des navires et des paquebots de plus en plus rapides, aux capacités de tonnage de plus en plus importantes. Les frais d’embarquement et de débarquement effectués jusqu’alors par des allèges se voient ainsi grandement diminués. L’introduction du moteur à vapeur transforme la navigation fluviale comme maritime, les voiles laissant progressivement place aux cheminées. La « Garonne », premier navire fluvial français à vapeur est construit à Lormont en 1818. Sur le port de Bordeaux se côtoient quantité de marchandises venues des colonies, arachide pour les huileries, cacao pour les chocolateries, bois coloniaux pour la construction, café, vanille, fruits tropicaux et rhum, tout particulièrement depuis la crise de l’oïdium qui décime le vignoble français dans les années 1850, entraînant la suppression des taxes d’entrée sur ce produit. La morue quant à elle est consommée verte sur place puis réexpédiée séchée aux Antilles. L’importance de ce commerce entraîne l’installation de 30 sécheries à Bègles sur les 31 existantes en France en 1907. Les relations étroites entre Bordeaux et les colonies finissent par dépasser le plan strictement commercial pour s’illustrer dans l’émergence d’un goût pour l’orientalisme. On le retrouve dans des demeures privées comme celle des frères Bonie ou dans les pavillons des expositions universelles organisées par la Société Philomathique de Bordeaux, comme celle de 1895 sur la place des Quinconces. A la fin du second Empire, Bordeaux de par sa vocation maritime est propice aux échanges entre le Nord et l’Orient, les Indes orientales, les pays méditerranéens. Bordeaux devient le centre morutier français avec certaines années une centaine de morutiers dans la rade. Les sécheries de morue vont avoir des localisations géographiques différentes à Bordeaux selon les périodes, de Bacalan, elles seront implantées à Bruges, Pessac, Talence puis Bègles. Les transports ferroviaires facilitent ce commerce. L’industrie alimentaire à Bordeaux au 19ème siècle Épicerie reconstituée du début des années 1930 Je reste à votre disposition pour toute information complémentaire concernant ces pistes de travail, le lundi et le mardi de 9h à 12h et de 13h à 16h30 ainsi que le mercredi après-midi de 13h30 à 16h30 au Musée d’Aquitaine. Téléphone 05 56 01 51 02. Patrick Rabau, enseignant mis à disposition au Musée d’[email protected]