P24-34 Pommard 48 - Bourgogne Aujourd`hui
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Dégustation 24 25 BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 48 Touché par la crise Malgré sa notoriété mondiale, Pommard n’échappe pas à la crise qui affecte la Bourgogne. Profitez des derniers 99 -superbeset des bons 2000, à boire sur le fruit... L les 2001.” Conséquence également des difficultés rencontrées actuellement par les négociants pour commercialiser ces vins, et d’autres... Succédant à un millésime 99 superbe -des raisins sains et mûrs ont donné des vins de grande classe- 2000 et 2001 ne suscitent pas le même enthousiasme. Beaucoup de 2000 se révèlent mous et dilués. Un gros orage au début des vendanges a fait gonfler les baies, installant des foyers de pourriture. Les vins les plus réussis (32% d’échantillons sélectionnés par notre jury, contre 45% pour le millésime 99) présentaient de bons degrés naturels (11°5 à 12° souvent atteints). Souples, dotés d’une belle finesse de tanins, mais sans la fermeté habituelle des pommard, ils feront des bouteilles agréables, à consommer dans les cinq ou six ans. 2001, encore en fût, montre un profil plus classique. Malgré une maturité difficile, (déficit d’ensoleillement avant les vendanges), et un état sanitaire parfois dégradé, les meilleurs vins paraissent plus équilibrés que les 2000. À confirmer en bouteille... De plus le secteur jouxtant Volnay (premiers crus Jarollières, Poutures, Frémiets, Bertins, Cras, Clos-Micault, Combe-Dessus...) a été fortement touché par la grêle du 2 août 2001. Ce contexte délicat conduit la plupart des producteurs à accentuer les efforts qualitatifs entrepris à la fin des années 90. Mais il n’incite pas à ouvrir le débat sur un projet de classement en grand cru des Rugiens et des Épenots. “Cette question ne pourra être évoquée, si elle doit l’être, qu’au sein du futur syndicat de l’appellation*, qui se réunira dans le courant de l’hiver”, tempère Jean-Luc Joillot. Pour l’heure, on se contentera d’effectuer le marquage des lieux-dits dans le vignoble (par des plaques apposées sur les murets), et d’étendre la pratique de la confusion sexuelle à toutes les parcelles côté Beaune (Pézerolles, Saucilles...)**. En cours également, le “bouclage” du dossier hautes-côtes. Certains bourgognes produits sur le plateau, au-dessus du village, devraient obtenir le droit d’utiliser l’appellation bourgognehautes-côtes-de beaune. Une porte ouverte à la production d’un peu de blanc, dans cette commune vouée au rouge. Jean-Philippe Chapelon Photographies : Th. Gaudillère, L. Georgeot *Réunissant les producteurs de la commune et extérieurs à la commune. **Technique écologique de lutte contre deux papillons nuisibles. BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 48 Pommard es producteurs de Pommard ne craignent pas la confrontation : avec 273 échantillons présentés à notre dégustation, ils ont pulvérisé le record établi il y a deux ans (196 vins). Au-delà d’un goût certain de la compétition, on peut voir dans cette participation massive un effet des difficultés commerciales qui affectent la commune. Car en dépit de sa célébrité mondiale, Pommard n’échappe pas à la crise qui touche la Bourgogne, appellations régionales en tête, depuis plus d’un an. Les ventes en bouteilles se maintiennent bien, mais les cours du vrac continuent de baisser. Une situation d’autant plus préjudiciable que ce grand vignoble (337 ha de pommard et pommard premier cru) met en marché des volumes importants, dont la commercialisation est assurée pour moitié par le négoce. “Il n’y a pas de mévente à Pommard, mais des fluctuations sur les prix. Actuellement, nous traversons une période de déprime”, explique JeanLuc Joillot, président du syndicat. La pièce de pommard 1998 se négociait 2 743 €, il y a deux ans. Le même vin, millésimé 2000, ne se vend plus que 1981 €. J-L. Joillot se montre pessimiste pour les mois à venir : “Les cours vont encore baisser sur Dégustation Les terroirs de Pommard PLUS QU’UN NOM Cette commune à la renommée internationale couvre plus de 300 hectares dédiés au seul pinot noir. Comme souvent en Bourgogne, le vignoble est partagé 26 par une large combe Retrouvez nos notes de dégustation et la sélection des meilleurs producteurs dans la version papier du magazine. centrale qui fractionne en deux les terroirs du village. BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 48 A u nord du vignoble de Pommard, côté Beaune, on découvre Les Saussilles et les Boucherottes. Ils s’affirment dans un style aimable proche de celui du beaune Clos des Mouches. Regardant à l’est, sur la partie supérieure du coteau, les Pézerolles et en l’Argillière reposent sur un terroir plus caillouteux qui leur confère une grande pureté d’expression. Dans le prolongement, le vignoble vire au sud pour entrer dans la combe avec des terroirs comme les Platières, les Arvelets et la Chanière. Les vignes sont assises sur un terroir caillouteux qui leur confère une certaine finesse. La terre des Charmots est plus profonde et ouvre la voie à des vins plus corsés. À mi-coteau de cette partie nord, on découvre le fief des clos : Clos de Verger, Clos de la Commaraine, Clos Blanc, Clos de Cîteaux ou Clos des Épeneaux. Les murets de pierres qui les entourent favorisent la maturité du raisin et leur confère certainement en partie leur caractère généreux et puissant. Dans la même lignée, on retrouve également les Grands et les Petits Épenots qui reposent eux Carte extraite du livre les Vins de Bourgogne, de Sylvain Pitiot et Jean-Charles Servant, collection Pierre Poupon. aussi sur un mélange d’argiles et de calcaires. L’ensemble de cette bande de terrain offre des vins, certes solides à l’attaque en bouche, mais aussi d’une grande élégance en finale. Côté sud, on retrouve à mi-coteau les meilleurs terroirs. Rugiens du Bas en tête, mais aussi Chaponnières, Jarollières ou Croix Noires donnent naissance à des vins solides et trapus qui ont fait la réputation de Pommard. Empreintes d’une certaine rusticité dans les premières années, les meilleures cuvées possèdent un réel potentiel de vieillissement. L’origine en est simple. Un terroir fait d’argiles et de cailloutis calcaires où l’on trouve des oxydes de fer qui rendent la terre rougeâtre et les vins charpentés. Sur le haut du coteau, on découvre les Rugiens du Haut, et les Chanlins qui reposent sur un sol plus caillouteux. Les vins sont agréables et charnus, mais n’offrent pas la profondeur des vins issus du milieu de coteau. Les pommards villages se partagent en deux tendances. Ceux du haut de coteau où les calcaires bruns dominent et ceux du bas près de la route nationale qui reposent sur les alluvions de la combe. Les premiers se définissent dans un style élégant, alors que les seconds s’imposent avec davantage de mâche et de puissance. On notera toutefois le sol plus pierreux des Perrières et des Levrières qui présentent des vins charmeurs malgré leur situation de bas de coteau. François Laborier LES CHIFFRES Superficie et production annuelle Pommard premiers crus : 110 ha - 660 000 bout. Pommard village : 205 ha - 1 230 000 bout. Dégustation 28 29 BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 48 Patience, patience… Les premiers crus et les grands crus 2000 ne se goûtent pas tous très bien aujourd’hui. Mais on peut prédire un avenir radieux aux meilleures cuvées. Patience donc... A vouons-le : nous avons été un peu déçus par les résultats de la dégustation du millésime 2000. Auréolés d’une réputation flatteuse dès leur naissance, les chablis de la dernière année du siècle n’ont en effet pas crevé le plafond de la réussite : 38% de vins sélectionnés en 1er cru, et 39% en grand cru. Des scores honorables, mais pas exceptionnels... La (relative) tiédeur des dégustateurs s’explique par le cumul de deux phénomènes : l’hétérogénéité des vins, et le profil, aujourd’hui peu avenant, de nombreuses cuvées de qualité destinées à la garde. L’hétérogénéité ? Il y a longtemps que le mal affecte l’ensemble de la Bourgogne, et singulièrement le vignoble de Chablis. 1999 et 2000, années productives s’il en est, ont creusé le fossé existant entre les vins fidèles à l’expression de leur terroir, et les vins technologiquement corrects, mais marqués par une forte dilution. Ont-elles généré une prise de conscience des effets désastreux des excès de rendement ? C’est l’avis exprimé par plusieurs producteurs. “En 2001, on a enregistré un recul des excédents de production, et les relevés effectués par le B.I.V.B. m’incitent à penser que la situation s’améliorera encore en 2002”, constate avec satisfaction Jean-Bernard Marchive, président du Syndicat de Défense de l’Appellation. Benoît Droin, qui travaille avec son père sur le domaine familial de 22 ha, affiche la même confiance : “le Chablisien monte en puissance, beaucoup de producteurs ont pris conscience des excès du passé et redressé la barre...” Certains 2000, par ailleurs fort bien constitués, se goûtent difficilement aujourd’hui : fermés, avec une pointe d’austérité, ils n’expriment pas leur potentiel. Il faudra attendre les grands crus vinifiés dans une perspective de garde et mis en bouteille tardivement. Mais la confiance s’impose : le miel finira par percer la carapace minérale, signature des grands chablis. Car 2000 est bel et bien une excellente année, de garde. Pas aussi exceptionnelle que 90 ou 96, mais riche et équilibrée. “Je la rapproche de 1970, avec des rendements un peu plus faibles et une meilleure maturité”, estime Vincent Dauvissat. La vendange, saine, de raisins mûrs -12° fréquents dans les premiers crus et les grands crus- a donné des vins à la fois gras et purs. “Grâce à de beaux PH, on obtient des finales fraîches, un peu dans le style de 90, avec moins d’élégance”, poursuit Vincent Dauvissat. Les 99, lorsqu’ils ne sont pas entachés de dilution, se révèlent quant à eux flatteurs, tendres et frais. Ce sont des vins de plaisir, qui se goûtent bien (51,72% de réussite dans les grands crus 99, un résultat remarquable). Mais ils iront moins loin que les meilleurs 2000... Avec ses terroirs exceptionnels, ses “locomotives” tirant la qualité vers le haut (notamment la Chablisienne, qui vinifie un tiers des volumes), et sa “Charte des Grands Crus”*, Chablis possède de bonnes raisons de voir l’avenir en rose. D’ailleurs, la crise économique qui touche la Bourgogne du sud épargne le vignoble le plus septentrional... Quant au dossier d’extension et de reclassement de certaines parcelles (Bourgogne Aujourd’hui n°36), il semble actuellement au point mort... Jean-Philippe Chapelon Photographies : Th. Gaudillère, L. Georgeot *Elle impose à ses adhérents un cahier des charges, notamment pour la culture de la vigne. BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 48 Chablis 1er crus et grands crus Dégustation Les terroirs de Chablis, VOUÉS AU CHARDONNAY Campé dans la partie septentrionale de la Bourgogne, aux abords de la ville d’Auxerre, le vignoble chablisien s’étale sur plus de 4 000 hectares. La nature du climat 30 et des sols a fait de ce Retrouvez nos notes de dégustation et la sélection des meilleurs producteurs dans la version papier du magazine. secteur un ensemble totalement voué au chardonnay. BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 48 E xpositions, nature des sols et inclinaisons sont à l’origine d’une hiérarchie à quatre niveaux (petit chablis, chablis, chablis premier cru et chablis grand cru) qui est le reflet des nuances du terroir. Les étés chauds et secs ainsi que les expositions propices des meilleures parcelles assurent de bonnes maturités aux raisins. Mais les hivers sont rigoureux et le gel sévit régulièrement au printemps. Les viticulteurs ont appris à se jouer des caprices du temps en mettant en place des procédés de protection des bourgeons (chaufferette et aspersion). Les sols qui constituent cet ensemble de plusieurs milliers d’hectares se sont formés à l’ère du Jurassique, il y a 180 millions d’années. Premiers et grands crus prennent naissance sur une couche sédimentaire parsemée de coquillages fossiles. Épais de 40 à 100 mètres, ce sol est nommé Kimméridgien. Exposés sud/sud-ouest, les 7 climats, qui constituent l’appellation grand cru, couvrent une centaine d’hectares. Implantés sur la rive droite du Serein, ils dominent Chablis sur un coteau qui s’étale de 130 à 215 mètres Carte extraite du livre les Vins de Bourgogne, de Sylvain Pitiot et Jean-Charles Servant, collection Pierre Poupon. d’altitude. L’ensemble paraît assez uniforme. Pourtant, sédimentations différentes, érosion, inclinaisons ou encore profondeurs des sols sont autant de facteurs qui contribuent à créer des nuances gustatives entre les secteurs. Empreints de délicatesse les Blanchots, les Preuses et les Bougros sont souvent les premiers à se dévoiler. Le Climat des Grenouilles et surtout celui des Clos sont les deux terroirs qui offrent les vins les plus complets. Racés, ils demandent 6 à 8 ans pour révéler leur personnalité. Vaudésirs et Valmur restent des cas particuliers. Les différentes expositions au sein des parcelles peuvent donner des vins diamétralement opposés. Se répartissant de part et d’autre du Serein, les premiers crus couvrent 750 hectares. Côté droit, Fourchaumes, Montée de Tonnerre et Mont de Milieu sont dans le prolongement naturel des grands crus. Ils offrent à la fois complexité et subtilité. Côté gauche, les parcelles sont plus éparpillées. Montmains, Beauroy, Vaillons, Vaucoupin, Vosgros, Vaudevey ou encore Côte de Léchet offrent donc des styles différents en fonction de l’exposition, de la pente… Quelques secteurs d’A.O.C. chablis ainsi que la totalité de l’A.O.C. petit-chablis prennent appui sur des sols un peu différents dits du Portlandien qui datent également de l’ère du Jurassique. Les vins affirment un caractère frais, fruité et nerveux et s’épanouissent assez rapidement. François Laborier LES CHIFFRES Superficie et production annuelle Grands crus : 100 ha – 730 000 bout. Premiers crus : 750 ha – 6 000 000 bout. Chablis : 2 800 ha – 24 300 000 bout. Petit-chablis : 580 ha – 5 100 000 bout.