Evaluation sociale et différence des sexes:

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Evaluation sociale et différence des sexes:
Annexe
Items du BSRI en Français. Le nombre
précédant chaque item indique l'ordre
de présentation
ITEMS MASCCLI1\S
1. Sûr(e) de soi
4. f)éfend ses croyances
2. Accomodant(e)
5. Gai(e)
7. Indépendant(e)
10. Vigoureux(se)
13. A toujours raison
16. A une forte personnalité
19. Fort(e)
22. Esprit d'analyse
8. Timide
11. Affectueux(se)
14. Flatteur(se)
17. f)évoué(e)
20. Féminin(e)
23. Toujours prêt(e) à écouter
les autres
26. SensihIe aux hesoins
des autres
29. Compréhensif(ve)
32. Compatissant(e)
35. Prêt(e) à consoler
38. 1\'élève pas la voix
41. Chaleureux(se)
44. Tendre
47. Crédule
50. 1\aïf(ve)
53. Ke parle pas grossièrement
56. Aime les enfants
59.GentiIOe)
25. A des capacités pour
commander
28. Prêt(e) à prendre des ri~ues
31. Prend facilement des décisions
34. Se suffit il soi même
37. f)ominant(e)
40. MasŒlin(e)
43. Prêt(e) ;1défendre son opinion
46. Agressif( ve)
49. Se comporte en leader
52. Individualiste
55. Esprit de compétition
58.Ambitieux(se)
1
ITEMS FEMIl\l1\S
STATUTS
ET IDENTITÉS
DE GENRE
ITEMS l\l:ù11ŒS
} Serviahle
6. f)'humeur
changeante
9. Consciendeux(se)
12. ThéatrJl(e)
15. Heureux(se)
18. Imprévisihle
21. f)igne de confiance
24. jaloux(se)
27. Authentique
30. RéservéCe)
33. Sincère
36. Vaniteux(se)
39. Aimahle
42. SolennelOe)
45. Amical(e)
48. IneffiC'Jce
51. Sait s'adapter
54. Sans méthode
57. A du tact
60. ConventionnelOe)
Evaluation sociale
et différence des sexes:
une étude socio-normative au sein
d'une organisation administrative
Abstract
Municipal employees of a
French town (Exp. 1), male
and female, completed the
BSRI (Bem, 1974) first providing a description of themselves (.self-description. instructions), and then giving a
presentation of themselves as
if to please their manager ("self-presentation" instructions). Result" showed that
in self-presentation both male
and female employees scored
high on the masculinity ."cale.
Secondly (Exp.2), their managers were asked to fill in the
BSRI in order to describe the
ideal collaborator either male
or female. These portraits
were identical to those the
employees drew in their selfpresentation. However, these
managers, when requested to
judge fictitious collaborators
whose answers appeared on
an abbreviated version of the
BSRI, attributed more value to
androgynous profiles than to
masculine
profiles.
These
results are discussed in relation to the anchoring on stereotypes and the anchoring
on normes in evaluative processes; these result" also
emphasized the role of both
masculine and androgynous
values in power relationships.
REVUE
Résumé
Des salariés (exp. 1) de la
municipalité de Nice (hommes et femmes) passent le
BSRI de Bem (1974) d'abord
pour se décrire (consigne
d'autodescription), puis comme s'ils devaient à tout prix se
faire apprécier par leur directeur (consigne d'autoprésentation). On constate, en autoprésentation, une augmentation des scores à l'échelle de
masculinité, chez les hommes
comme chez les femmes. Puis
leurs directeurs (Exp. 2) remplissent le BSRI pour faire le
portrait d'un collaborateur et
une collaboratrice idéal(e).
Les profils idéaux ainsi produits sont .identiques à ceux
des sujets précédent" en autoprésentation. Pourtant, lorsqu'ils doivent juger des collaborateurs fictifs connus par
leurs réponses à une version
abrégée du BSRI, ces mêmes
directeurs attribuent plus de
valeur aux profils androgynes
qu'aux profils masculins. Ces
résultat" sont discutés à partir
de fa distinction entre ancrage
sur des stéréotypes et ancrage
sur des normes dans les processus évaluatifs et soulignent
le rôle des valeurs masculines
et androgynes dans les rapport" de pouvoir.
INTERNATIONALE
DE PSYCHOLOGIE
SOCIALE
1997 W 2
H. Masson-Maret*
Key words:
Femini()I,
masclllini()I,
social
evaillalion,
occllpational
roles
Mots clés:
.rëlninité, nlasclilinifé,
a ndro!{)lnie,
évaluation
sociale,
rôles prrifessionneL'i
• Laboratoire
de psychologie
expérimentale
et quantitative,
Université de Nice-Sopbia
Antipolis
1
Introduction
L'éVolution
de la société en matière de différenciation
sexuelle témoigne d'une diminution des facteurs politico-juridiques de catégorisation sexuelle caractérisée par une progression vers l'égalité des droits hommes/femmes (en matière de
vote, études, travail, responsabilité familiale et civique!). Parallèlement les femmes participent au monde du travail avec des statuts qui tendent à devenir similaires à ceux des hommes occupant des postes de responsabilité (31,9 % des cadres sont des
femmes même si elles exercent encore pour 44,66 % d'entre
elles des professions intermédiaires et représentent 76 % des
employés). Une telle situation laisse à penser que le pouvoir des
femmes s'accentue et que corollairement les valeurs traditionnellement considérées comme féminines se trouveraient renforcées
particulièrement en milieu professionnel. Si tel est le cas, les
femmes pourraient exprimer dans leurs rôles professionnels les
valeurs expressives considérées comme caractéristiques de leur
sexe et marquer par leur présence, à des niveaux hiérarchiques
divers, leur milieu de travail voire contribuer à une évolution de
la société vers des nouvelles utilités (ou valeurs) psychologiques. Les hommes en ce qui les concerne peuvent alors adopter ces nouvelles utilités psychologiques. C'est dans cette direction que semblent conduire des recherches récentes sur la désirabilité sociale des traits assertifs et des traits expressifs qUi
montrent une préférence en faveur de ces derniers (Tostain
1993).
~
D'un autre côté, force est de constater que les nombreux supports empiriques dont nous disposons aujourd'hui permettent
d'affirmer qu'on attribue généralement plus de valeur aux caractéristiques personnologiques supposées masculines (sphère de
l'instrumentalité) qu'aux caractéristiques supposées féminines
(sphère de l'expressivité) (cf Rosenkrantz, Vogel, Bee, Broverman et Broverman, 1968; Deaux, 1985, Lorenzi-Cioldi, 1988,
1994)2. Les notions même d'instrumentalité/expressivité, aussi
bien que l'importance de l'opposition vie privée/vie publique
dans les représentations des différences sexuées (Parsons, 1942 ;
Bem, 1993) donnent à penser que ce différentiel de valeur entre
les caractéristiques masculines et les caractéristiques féminines
doit se trouver considérablement augmenté dans le domaine du
1. L'INSEE (1995) dans sa préface • Quelques dates dans l'histoire des
femmes· communique un panorama très complet de cette progression.
2. Cet énoncé général n'exclut aucunement que dans certains contextes
(comme la préparation d'une fête pour enfants), ou dans certaines populations (étudiants et étudiantes), les caractéristiques de l'expressivité féminine
soient plus appréciées que les caractéristiques de l'instrumentalité masculine
(Lorenzi-Cioldi, 1994).
1
EVALUATION
SOCIALE
ET DIFFÉRENCE
DES SEXES
1
_
1
travail et des relations professionnelles. Il est d'ailleurs bien souvent avancé que les organisations sont restées, en dépit des évolutions sociales, des mondes d'instrumentalité, pour l'essentiel
masculins (Belle, 1991), dans lesquels, probablement plus
qu'ailleurs, le modèle masculin sert traditionnellement de point
de référence pour les jugements et les définitions de profils désirables (Kirchler, 1993)3.
Une question est alors de savoir dans quelle mesure les gens, les
femmes mais aussi les hommes, ont une connaissance opérationnelle de telles différences de valeur leur permettant de mobiliser les stéréotypes masculins et d'adopter des stratégies d'autoprésentation, ne serait-ce que dans les situations fortement évaluatives. C'est une chose en effet de savoir - ce que tout le
monde sait probablement et ce que la grande presse repère
régulièrement - que les hommes sont avantagés dans la vie
sociale et en particulier dans les organisations; c'en est une
autre d'être en mesure de mobiliser un stéréotype mas(:ulin afin
de • s'autoprésenter. comme ayant certaines caractéristiques qui
différencient les hommes des femmes et qui peuvent donner à
attendre certains avantages habituellement attribués à la masculinité et qui peuvent permettre d'éviter certaines discriminations
auxquelles expose la féminité.
La réponse à ces interrogations peut être fournie par l'usage du
paradigme expérimental d'autoprésentation4.
On demande aux
sujets de répondre à un questionnaire pour donner la meilleure
image possible de soi, quelquefois même de façon à donner la
pire image possible de s,?i. On peut en outre définir l'évaluateur
(supérieur, enseignant...) qui aura à apprécier cette image. Ce
paradigme, utilisé dans la validation des questionnaires de personnalité pour contrôler les effets virtuels de la désirabilité sociale (pour une application récente: Paulhus, Bruce et Trapnell,
1995) peut être utilisé pour tester des hypothèses sur l'intervention des normes et des stéréotypes dans les processus évaluatifs.
Utilisé dans cette perspective, après JeIlison et Green (981), par
les tenants de la théorie de la norme d'internalité, il a permis de
valider une proposition importante de cette théorie (cf Beauvois
et Dubois, 1988; Beauvois, 1994; Dubois, 1994), à savoir que
les explications internes sont en tant que telles porteuses de
valeur sociale, et que les gens ayant une clairvoyance de cette
valeur (l'y et Somat, 1991) peuvent adopter des stratégies
d'autoprésentation dans les situations d'évaluation. La première
expérimentation qui va être présentée repose sur l'usage de ce
3. L'examen de leur emploi du temps respectif montre d'ailleurs que les
femmes qui travaillent continuent à investir davantage la vie familiale et les
hommes la vie professionnelle (de Singly, 1987).
4. Pour ne pas alourdir l'expression nous n'utiliserons désormais plus que le
terme paradigme, mais le lecteur doit se souvenir qu'il s'agit là de paradigmes expérimentaux, au sens qu'a ce terme dans la méthodologie
expérimentale (cf I3eauvois, Roulin et Tiberghien, 1990).
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INTERNATIONALE
DE PSYCHOLOGIE
SOCIALE
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paradigme. Elle devait permettre de répondre à la question suivante: hommes et femmes mobilisent-ils une connaissance des
stéréotypes masculins et féminins à des fins d'autoprésentation ?
Expérimentation
1
Les sujets
Le groupe expérimental principal était composé de 78 techniciens supérieurs ou cadres moyens (41 hommes et 37 femmes,
entre 30 et 45 ans), salariés de la municipalité de Nice. A des
fins de comparaison, l'étude a également porté sur 85 étudiants
(35 étudiants et 50 étudiantes) de l'IUT de Nice, étudiants préparant un diplôme d'université de Gestion des Entreprises et des
Administrations et destinés à assurer des postes de responsabilité au cours de leur carrière.
La passation et les consignes
La passation était collective, tant auprès des étudiant(e)s
qu'auprès des salarié(e)s de la municipalité de Nice (réunis pour
cette occasion). Après avoir répondu à quelques questions
concernant la vie professionnelle et la vie privée dont il ne sera
pas fait état dans cet article, les sujets devaient dans un premier
temps se décrire, à l'aide du BSRI, • en tant que personne, dans
diverses situations de la vie, chez vous, dans votre famille, avec
vos amis, au travail et dans vos loisirs. (consigne d'autodescription générale). Les sujets remettaient les livret,>à l'expérimentatrice, puis ils devaient, dans un second temps, toujours à l'aide
du BSRI, se décrire dans le cadre de leur travail futur pour les
étudiant(e)s ou actuel pour les salarié(e)s. On précisait: • Vous
êtes devant un directeur, vous savez qu'il regardera vos
réponses et vous voulez à tout prix passer pour quelqu'un de
bien dans votre travail. (consigne d'autoprésentation-travail).
Résultats
Le Bem Sex-Roles Inventory (Bem, 1974)
On prévoyait d'utiliser, dans le paradigme d'autoprésentation,
un questionnaire permettant d'exhiber masculinité et/ou féminité. Au moins deux raisons ont conduit à choisir le BSRI5. Sa
conception d'abord: dans la mesure où masculinité et féminité
ne ressortent pas de deux pôles antonymes, mais de deux
dimensions orthogonales, le BSRI permet aux sujets (c'est
l'objectif de son élaboration) d'exhiber les deux schémas sans
être contraints d'en choisir un. Un second intérêt, d'importance
pour une étude sur l'autoprésentation, est que tous les items
masculins et féminins ont été testés sur des échantillons différents quant à leur désirabilité sociale et ne donnent pas lieu, de
ce point de vue, à d'importantes différences quantitatives entre
les deux échelles. Le questionnaire se compose en effet de 20
items connus pour être socialement désirables chez les hommes
(échelle masculinité: ambitieux, indépendant, dominateur ...), de
20 items connus pour être socialement désirables chez les
femmes (échelle féminité: gai, doux, crédule ...) et de 20 items,
certains de connotation positive (franc, serviable ...), mais dont la
désirabilité n'est pas propre à un sexe (items dits. neutres .).
Chaque item est accompagné d'une échelle d'appréciation (de
1 : jamais ou presque jamais vrai, à 7: toujours ou presque toujours vrai) permettant l'autodescription. On établit, par sommation des échelles d'appréciation, un score de masculinité et un
score de féminité, le score sur les 20 items neutres n'ayant pas
de signification théorique précise.
La variable dépendante soumise à l'analyse est la cotation
moyenne de chaque trait dans les différentes situations expérimentales. Les données d'un plan 2 (statut: salarié ou étudiant,
variable intersujet,» x 2 (sexe, variable intersujets) x 2 (consignes:
autodescription ou autoprésentation, variable intrasujets) x 3
(dimensions: masculin, féminin ou neutre, variable intrasujets)
ont été traitées par analyse de variance. Les résultats sont donnés dans le tableau 1. •
Deux effets primaires sont significatifs, celui de la variable
consignes (F(1,159)= 21,156 ; P < 0,00001) et celui d la va~iable
7
dimension (F,2318) = 28,451; P < 0,00001). La consigne d autoprésentation donne lieu à davantage d'attribution de trait,>que la
consigne d'autodescription (4,86 us 4,74). L'échelle masculinité
donne lieu à des scores plus élevés que ceux 'de l'échelle féminité (4,94 us 4,83), qui sont eux-mêmes plus élevés que ceux de
l'échelle neutre (4,62), toutes les comparaisons par paire étant
Etudiants
hommes
M
cr
femmes
M
cr
Salariés
hommes
M
cr
5. pour une étude
cf Gana, 1995.
1
EVALUATION
SOCIALE
de la fiabilité du BSIU dans la population
ET DIFFÉRENCE
DES SEXES
française,
femmes
M
cr
REVUE
Tableau 1 :
Score de
masculinité et de
féminité en autodescription et en autoprésentation
autodescription générale
autoprésentation travail
masculin féminin
neutre
masculin
féminin
neutre
4,73
0.48
4,61
0.53
4,66
0.47
4,96
0.61
4,56
0.37
4,70
0.38
5,17
0.59
5,11
0.54
4,75
0.62
5,09
0.48
4,69
0.53
4,66
0.31
5,03
0.60
4,65
0.62
4,74
0.44
4,92
0.47
4,63
0.36
4,64
0.25
5,24
0.54
5,00
0.66
4,70
0.47
4,79
0.05
4,58
0.35
4,50
0.26
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DE PSYCHOLOGIE
SOCIALE
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1
ici significatives au seuil p < 0,01. Trois interactions de premier
ordre sont significatives. L'interaction groupes x consignes
(Jh,159) = 11,271 ; P < 0,001) est le seul effet significatif différenciant le groupe des étudiant<; de celui des salariés. Dans la
mesure où elle n'implique pas le sexe, ni les dimensions, elle ne
montre qu'une chose, c'est que plus que les salariés, les étudiants ont tendance à s'attribuer un plus grand nombre de traits
dans la consigne d'autoprésentation. Cette conséquence de la
consigne n'étant pas l'objet de cet article nous n'en discuterons
pas davantage. L'interaction sexe x dimensions (Fe2318) = 12,293;
P < 0,00001) est conforme à ce qu'on pouvait' attendre: les
hommes sont plus masculins que les femmes, lesquelles sont
plus féminines que les hommes. L'interaction consignes x
dimensions enfin (Fe2318) = 32,018; P < 0,00001) indique que
seule l'échelle masculinité est sensible à la consigne, tous les
sujets ayant à cette échelle des scores bien plus élevés en autoprésentation qu'en autodescription.
Nous retiendrons donc, pour l'essentiel, qu'il vaut mieux, si l'on
en croit nos sujets, pour se faire apprécier par son directeur,
s'attribuer plus de traits qu'on ne le ferait spontanément, et surtout s'attribuer plus de traits masculins (on peut par contre faire
valoir tous les traits féminins et tous les trait<;neutres que l'on
s'attribuerait spontanément). Le premier de ces résultat<; est
entièrement conforme aux propositions de la théorie de la
norme d'internalité qui voit dans les attributions dispositionnelles la forme la plus valorisée de l'internalité (Dubois, 1994).
Le second constitue une réponse à notre interrogation. Il montre
que les gens, aussi bien les hommes que les femmes (l'interaction sexes x consignes x dimensions est loin d'être significative),
savent mobiliser le stéréotype masculin dans leurs stratégies
d'autoprésentation. Il ne s'agit pas là d'un phénomène en rapport avec la culture de la municipalité de Nice, des étudiant<;
non insérés dans des organisations adoptant la même stratégie.
On remarquera d'ailleurs que ce résultat rappelle fortement celui
obtenu en 1978 par Jones, Chernovetz et Hansson dans une
situation paradigmatique quelque peu différent. Ces chercheurs
avaient en effet demandé à leurs sujets, après autodescription,
de dire, pour chaque trait, s'ils souhaitent en être dotés un peu
plus ou un peu moins. Les souhait<;exprimés allaient nettement
dans le sens de la masculinité, chez des sujets féminins aussi
bien qu'androgynes.
Discussion
On peut avoir d'un tel résultat au moins deux interprétations qui
se différencient par l'autonomie qu'elles attribuent aux pratiques
évaluatives. On peut d'abord supposer qu'il existe, dans les cultures organisationnelles, des profils de collaborateurs idéaux
qu'appliquent les évaluateurs dans leurs jugement<; et qu'ont
•
EVALUATION
SOCIALE
ET DIFFÉRENCE
DES SEXES
appris à connaître les subordonnés, ce qui leur permet d'adopter
des stratégies adaptées d'autoprésentation. Il y aurait alors
accord entre ces stratégies, les idéaux des supérieurs et les jugements émis par ces supérieurs en situation d'évaluation. Mais on
peut aussi bien supposer que si supérieurs et subordonnés partagent un certain nombre de croyances concernant ce que doivent être des collaborateurs idéaux, de telles croyances ne rendent pas entièrement compte des jugements à l'oeuvre dans les
processus évaluati[<;.On sait en effet (Nisbett et Bellows, 1977;
Dubois et Le Poultier, 1991, Beauvois et Cambon, 1995) que,
bien souvent, les gens mettent en oeuvre dans leurs jugements
des critères auxquels ils n'ont pas accès, surtout lorsqu'ils travaillent. On peut s'attendre alors à ce que les stratégies d'autoprésentation des employés soient certes conformes aux profils
idéaux de leurs supérieurs, mais sans réelle efficacité dans les
situations d'évaluation. La seconde recherche, réalisée auprès
des supérieurs des salariés de l'expérimentation 1 était conçue
pour tester ces deux interprétations. On y a mis en œuvre le
paradigme d'identification (répondre comme répondrait X...) et
le paradigme des juges (évaluation de personnes connues à travers leurs réponses au questionnaire) (cf Dubois, 1994, pour
une présentation de ces paradigmes).
Expérimentation
2
Sujets
Dix-neuf cadres supeneurs (directeurs de département) de la
municipalité de Nice, supérieurs hiérarchiques (n + 1 ou n + 2)
des salariés de l'expérimentation 1 ont été vus en passation individuelle.
Matériel
Le BSRI a été utilisé à deux reprises, une premlere fois dans
une version abrégée (paradigme des juges), une seconde fois
dans sa version intégrale (paradigme d'identification: production
de profils idéaux). Pour la mise en œuvre du paradigme des
juges, on a retenu 6 items de l'échelle de masculinité, 6 items de
l'échelle de féminité et 6 items neutres à partir des autodescriptions de l'expérimentation 1. Sûr de soi dans ses affirmations,
aptitude au commandement, prêt à prendre des risques, prend
facilement des décisions, se comporte en leader et compétitif
ont été retenus pour une échelle abrégée de masculinité et
affectueux, va vers les autres, sensible aux besoins des autres,
parle d'une voix douce, tendre et doux ont été retenus pour une
échelle abrégée de féminité dans la mesure où ces 12 items
étaient ceux qui différenciaient le plus hommes et femmes dans
le sens attendu. On notera qu'ils opposent clairement la sphère
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DE PSYCHOLOGIE
SOCIALE
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instrumentale et la sphère expressive. Serviable, heureux, digne
de confiance, franc, aimable, amica1 sont les 6 items neutres
retenus: ce sont, des 20 items neutres, ceux qui différenciaient
le moins hommes et femmes. A partir de ce BSRIabrégé, 6 portraits ont été confectionnés (6 BSRI remplis par les expérimentateu(s), à savoir:
- un homme et une femme caractérisés par un profil essentiellement masculin
(~M = 36; ~F = 12; ~N = 22)
- un homme et une femme caractérisés par un profil essentiellement féminin
(~M = 12; ~F = 36; ~N = 22)
- un homme et une femme caractérisés par un profil androgyne
faisant cohabiter masculinité et féminité
œM = 36; ~F = 36; ~N = 22).
Evidemment, les deux profils de même type présentaient
quelques variations garantissant leur crédibilité.
Passation et consignes
L'expérimentatrice demandait d'abord aux sujets de se mettre en
position de juges. Elle leur remettait une chemise contenant les
6 portraits dans un ordre aléatoire et leur demandait de juger
chacun d'entre eux, sur une échelle en 7 points, quant à ses
qualités comme collaborateur virtuel. Ce travail terminé, les
sujets se voyaient remettre deux BSRI (version intégrale) avec
pour consignes d'indiquer, sur le premier, ce qu'il jugerait souhaitable pour un collaborateur idéal, et, sur le second, ce qu'il
jugerait souhaitable pour une collaboratrice idéale.
Résultats
La variable dépendante soumise à l'analyse est la cotation
moyenne de chaque trait dans les différentes situations expérimentales. Les données du paradigme d'identification,
(plan 2 (sexe du collaborateur, variable immsujets)
X
3 (dimensions,
1
SOCIALE
ET DIFFÉRENCE
DES SEXES
M
cr
coll. femme
M
cr
féminité
neutre
4,81
0.42
4,11
0.58
4,28
0.26
4,71
0.59
4,32
0.48
4,19
0.29
qu'il diffère significativement sur la dimension féminité (F(1.18)
10,15, P < 0,005).
Les données du paradigme des juges
(plan 2 (sexe
Tahleau 2 :
Profil d'un
collaborateur et d'une
collaboratrice idéale
=
de J'évalué, variable imrasujets)
X
3 (type de
profil, variable imrasujets»)
ont également été soumises à une analyse de variance (variable
dépendante: jugement sur l'échelle en 7 point<;). Les résultats
sont donnés dans le tableau 3.
Les deux effets primaires sont significatifs. L'effet du sexe de
l'évalué (F(118) = 5,18; P < 0,04) indique que les juges notent
mieux les femmes que les hommes. L'effet du type de profil
(F(z 36) = 55,45; P < 0,00000 est massif et d'interprétation plus
commode: les juges préfèrent les collaborateurs androgynes6,
puis les collaborateurs masculins, puis les collaborateurs féminins; l'analyse des contrastes montre que la masculinité diffère
de la féminité (F(l, 18) = 24,037; P < 0,0001 et que l'andro,~ynie
diffère des deux autres. (F(1 18) = 100,385, P < 0,00001). L mteraction entre les deux varfabies est également significative (F(z36)
= 3,43 ; P < 0,05). Cette interaction s'explique par le fait que les
profils diffèrent significativement quel que soit le profil de l'évalué, le profil androgynique est significativement moins évalué
chez les femmes que chez les hommes (FO,18) = 5,86, P < 0,03).
Evalué homme
M
cr
proîtl
masculin
protù
féminin
proîtl
androgyne
3,68
1.49
2,15
1.06
4,47
1,38
3,47
1,17
2,42
0,96
5,21
1,03
Tableau 3 :
Jugement d'un
collahorateur
masculin, féminin ou
androgyne.
variables int"'''SUjets~
ont été traitées par analyse de variance. Les résultat<;sont donnés dans le tableau 2.
On note un effet très significatif de la variable dimension (F(z,36)
= 19,46 ; P < 0,00001), les collaborateurs idéaux étant nettement
plus masculins que féminins ou neutres. L'interaction entre les
dimensions et le sexe du collaborateur est également très significative (F(z 36) = 9,79; P < 0,0005), l'écart entre la dimension masculine et la dimension féminine devant être bien plus important
pour un homme que pour une femme. L'étude des effets
simples permet de constater que le collaborateur idéal, homme
ou femme, ne diffère pas sur la dimension masculinité alors
EVALUATION
coll. homme
masculinité
Evaluée femme
M
cr
6. On pourrait avancer qu'en raison de la constitution de notre matériel, au
profil androgyne est associée une attrihution de traits plus nomhreux et que
c'est cet aspect-là des profils androgynes qui détermine le choix des juges.
On sait que d'une façon générale s'attrihuer plus de traits est une façon de
s'attrihuer de la valeur, cette interprétation trouve néanmoins sa limite dans
le fait que lorsque les juges ont eu à décrire un collaborateur idéal ils ne lui
ont pas attrihué plus de traits que n'en impliquaient, toutes proportions gardées, les profils masculins et féminins qu'ils avaient à évaluer en tant que
juges.
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INTERNATIONALE
DE PSYCHOLOGIE
SOCIALE
1997
W 2
1
Discussion
Sans être véritablement contradictoires, les résultats issus du
paradigme d'identification et ceux issus du paradigme des juges
présentent des variations intéressantes. Lorsqu'ils brossent le
portrait idéal d'un collaborateur et d'une collaboratrice, les
sujets construisent des profils finalement très semblables à ceux
que mettaient en avant leurs subordonnés en situation d'autoprésentation. Le collaborateur idéal, qu'il soit homme ou femme,
présente surtout les caractéristiques masculines que s'attachaient
à présenter les sujets de l'expérience 1, hommes et femmes7. Il
est de toute façon bien plus masculin que féminin. Par contre,
lorsqu'ils sont en position de juges-évaluateurs, exerçant ainsi
l'une des prérogatives essentielles des positions de pouvoir
délégué (Beauvois, 1994), ces mêmes cadres supérieurs semblent faire fonctionner une logique quelque peu différente. Ils
évaluent en effet cette fois de façon nettement positive les collaborateurs androgynes, autant masculins que féminins, et ceci
d'autant plus qu'il s'agit de femmes. Ils vont alors quelque peu à
l'encontre de leurs propres schémas idéaux et, peut-être conséquemment, des stratégies d'autoprésentation de leurs subordonnés. On peut en effet penser que les cadres moyens et techniciens de l'expérimentation 1 partagent ou ont acquis dans
l'interaction professionnelle les mêmes schémas sexualisés
idéaux que leurs supérieurs.
Discussion générale
L'intérêt de ces recherches est d'avoir été conduites dans un
contexte organisationnel relativement homogène, celui du personnel d'une municipalité, permettant de disposer de couples
évaluateurs-évalués ordinaires. C'est aussi leur limite, des effets
de culture(s) spécifique(s) pouvant être à l'œuvre (le groupe
d'étudiants de l'expérimentation 1 ne nous garantissant pas
complètement contre de tels effets). On pourrait en particulier
supposer que dans un contexte plus sensible à la concurrence, à
la lutte pour l'obtention des marchés, l'utilité des valeurs masculines reste plus forte que dans le contexte administratif où la
recherche s'est déroulée. Les conclusions générales que nous
pouvons en tirer sont donc quelque peu spéculatives.
7. Une analyse typologique a été conduite sur les données de l'expérimentation 1. Dans trois populations sur quatre résultant du croisement sexe x statut, le type androgyne a tendance à être un peu plus fréquent en situation
d'autoprésentation,
quoiqu'aucune
augmentation
ne soit statistiquement
significative, et de loin. Les seules évolutions typologiques statistiquement
significatives concernent la réduction drastique du type féminin en situation
d'autoprésentation
(de 15,95 % à 2,45 % sur l'ensemble de la population:
X2(1 N = 163) = 17,76, P < 0,001).
•
EVALUATION
SOCIALE
ET DIFFÉRENCE
DES SEXES
Remarquons d'abord que ce n'est pas la première fois que des
sujets mis en position de juges-évaluateurs ont tendance à adopter des stratégies différentes (et donc des critères évaluatifs différents) de celles qu'ils avaient mises en oeuvre dans d'autres
paradigmes. Dans une recherche récente non publiée, Dubois
constate ainsi que certains sujets placés en situation d'autoprésentation adoptent, devant un questionnaire d'internalité, une
stratégie d'autocomplaisance (self-serving) en sélectionnant des
explications internes pour les événements positifs et des explicationsexternes
pour les événements négatifs. Or, ces mêmes
sujets, placés en position de juges-évaluateurs attribuent plus de
valeur aux personnes ayant rempli le même questionnaire de
façon strictement interne (cf Beauvois, 1995, pour une évocation et une discussion de ces résultats). Il est important de
constater que lorsqu'ils sont juges, ces sujets adoptent un point
de vue plus normatif que lorsqu'ils se livrent à de l'autoprésentation. Peut-être est-on là confronté à un phénomène assez
général qui pourrait être décrit en trois propositions: 1) les
normes sociales de jugement (comme la norme d'internalité)
peuvent différer de façon significative des stéréotypes de personnes (homme interne/femme externe) ou des schémas de
désirabilité supposés satisfaire quelque besoin de défense du
Moi (attributions complaisantes ou self-serving bias) ; 2) dans les
stratégies d'autoprésentation, les gens peuvent tabler sur de tels
schémas stéréotypiques ou égologiques (attributions auto-complaisantes) ; 3) par contre, la mise en position de juge-évaluateur
incite à l'adoption de points de vue normatifs (attribution de
valeur aux internes). En' résumé, ce phénomène oppose pour
l'essentiel l'ancrage sur des stéréotypes à l'ancrage sur des
normes de jugement8.
Si ces propositions ont quelque valeur, restituées dans le contexte du présent travail, elles conduiraient à supposer que les sujet,>
de l'expérimentation 1 ont ancré leur stratégie d'autoprésentation sur un stéréotype sexualisé du collaboratèur idéal, un collaborateur présentant de façon prépondérante les caractéristiques
masculines de l'instrumentalité, stéréotype que restituent
d'ailleurs leurs supérieurs dans le paradigme d'identification.
Ce primat des valeurs masculines témoigne qu'hommes et
femmes dans l'exercice de leur rôle professionnel se sentent
désavantagés face au pouvoir par les valeurs féminines. Celles-ci
ne correspondent pas à la représentation qu'ils considèrent que
les gens ont des utilités sociales dans le monde du travail. Ce
primat laisse également supposer que les femmes qui possèdent
effectivement ces valeurs féminines dbivent s'en cacher si elles
ont pour volonté d'être bien appréciées. Peut-on aller jusqu'à
penser que le désir des femmes d'obtenir des statut,>identiques
8. Le terme d'ancrage dénote ici un point de référence dans les jugements,
sa signification est donc celle qu'il a en cognition sociale par exemple quand
on parle d'heuristique, d'ancrage-ajustement.
REVUE
INTERNATIONALE
DE PSYCHOLOGIE
SOCIALE
1997 N" 2
•
à ceux des hommes, ou leur accession effective à ces statuts,
puissent les conduire à adopter des attributs masculins voire
jusqu'à vivre un phénomène de dépersonnalisation (Turner &
Gilles, 1981). Elles adopteraient alors une identité sociale. souhaitable. au profit des valeurs masculines et au détriment de
leurs siennes propres.
Il reste que le stéréotype de la masculinité ne serait pas cependant le plus normatif, c'est-à-dire à la fois le plus utile socialement et le plus susceptible de susciter des attributions de valeur
(cf Dubois, 1994, pour une discussion du concept de norme de
jugement). Le type androgyne serait plus normatif, ce que
confirment les mêmes supérieurs lorsqu'ils doivent attribuer de
la valeur dans le paradigme des juges. Une première interprétation conduit à penser que la normativité de l'androgynie chez
les chefs de service correspond à une internalisation dans le
champ professionnel des idéologies managériales axées sur la
valorisation des relations humaines et qui dirige leurs jugements sur des utilités propres à une forme moderne de management.
L'androgynie psychologique pourrait aussi représenter une nouvelle voie permettant à l'homme comme à la femme d'être porteur de masculinité, de féminité ou d'une complémentarité
androgynique, celle-là même qu'Herbert Marcuse appelait de
ses voeux souhaitant que l'antithèse masculin-féminin se trouve
transférée en une synthèse qu'exprime le mythe antique de
l'androgyne9. L'hypothèse selon laquelle l'androgynie psychologique, en dépit des aléas du concept en psychologie et dans les
mouvements féministes, serait socialement plus normative que
tout schéma uni-sexualisé ne manque pas d'argument" théoriques. Le lien qu'entretient l'androgynie avec les positions de
domination et les groupes collections (Lorenzi-Cioldi, 1994) en
est un. Le fait qu'elle constitue un mode de réalisation de la
valeur d'autosuffisance psychologique, si essentielle pour l'idéologie libérale américaine (Sampson, 1977), en est un autre. C'est
vrai enfin que de nombreux contextes appellent aujourd'hui les
caractéristiques féminines autant, sinon plus, que les caractéristiques masculines (Eagly et Mladinic, 1994). L'androgynie psychologique pourrait représenter une valeur substitutive à la masculinité en valeur de pouvoir. Il n'est pas du projet d'un tel
article de multiplier de tels arguments. Il nous semble néanmoins que l'hypothèse d'un ancrage différentiel dans les stratégies d'évaluation ou de mise en valeur, tantôt normatif, tantôt
stéréotypique, peut justifier des recherches futures.
Arrivé le 10. 10. 96
Accepté le 20. 02. 97
9. Le Monde du 9 mai 1974
1
EVALUATION
SOCIALE
ET DIFFÉRENCE
DES SEXES
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Soc·lai Stereotypes About Female
an d Ma 1e Ent repreneurs 1
_
R-
Ab Stra Ct
This study investigates gender
stereotypes
and
opinions
about successful entrepreneurs
in business organizations. Ove..
raIl, 150 participants ( ma1e
and female employers of
small enterprises, male and
female employees and male
managers) were asked to indicate typical characteristics of
successful male and female
entrepreneurs. When asked
directly, only a few differences between male and female
entrepreneurs were reported.
Thus, it would seem that gender stereotypes no lqnger
exist. However, an effect of
asymmetry was discovered
which supports the hypothesis
that male entrepreneurs are
not perceived just like female
entrepreneurs.
When male
subjects were asked to describe a typical successful male
entrepreneur first and subsequently a typical successful
female entrepreneur, a significant number of participants
ment that she is like he is. On
the other hand, when first
female entrepreneurs were to
be described and then males,
a much smaller number of
participants indicated that he
is like she is. This asymmetry
1
1. 1 gratefully acknowledge
of data.
EVALUATIONSOCIALEET DIFFÉRENCEDESSEXES
1 _
1
-
eswne
Cette recherche a pour objet
les stéréotypes de sexe et les
opinions qu'on a sur les chefs
d'entreprise dans le milieu des
ff .
A
1 150
a alfes.
u tota,
personnes (chefs d'entreprise des
deux sexes, employés des
deux sexes et cadres de sexe
masculin) ont été invitées à
indiquer les caractéristiques
typiques des hommes et des
femmes chefs d'entreprise
ayant réussi. Un questionnement direct ne fait apparaître
que peu de différences entre
les portraits des chefs d'entreprise des deux sexes. Cela
pourrait laisser penser qu'i!
n'y a plus de stéréotypes de
sexe. Toutefois, il a été observé un effet d'asymétrie qui
conforte l'hypothèse d'une
certaine différence dans les
façons
de
percevoir
les
hommes et les femmes chefs
d'entreprise. Quand les sujets
de sexe masculin sont invités
à décrire en premier l'homme
chef d'entreprise et la femme
seulement dans un deuxième
temps, une grande partie
d'entre eux disent qu'" elle est
cOmme lui". En revanche,
quand c'est la femme chef
d'entreprise qui a été décrite
en premier, un beaucoup plus
the assistance
of Helga Passauer \Vith collection
REVUE INTERNATIONALEDE PSYCHOLOGIESOCIALE1997 N" 2
·
•.
E . K 1rehl er
Key words:
Social stereo~ype~
gender stereo~yp~s,
entrepreneurship,
leadership, cognitive
aS)lmmetries
.
Mots clés:
sté~é~ypes sociaux,
stehre::ydP,es
d~exe,
c eJs en tre. ~nse
exercice du comman~
dement, a.,ymétries
cognitives
• Department of
Psychology, University
of Vienna,
Austria
1

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