Les Zurichois se méfient des Allemands mais pas de leur bière

Les Zurichois se méfient des Allemands mais pas de leur bière
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Les Zurichois se méfient des Allemands
mais pas de leur bière
By Kaouther
Created 10/09/2010 - 23:32
Suisse
Grüezi, une Stange bitte! «Was?»... Aïe, vu la tête que me fait la solide serveuse de la
Züri-Wiesn, je dois avoir fait un faux pas. Je viens pourtant de commander une bière
de 33centilitres dans mon meilleur allemand, avec forme de politesse en suisse
allemand.
Mais Ingrid - son prénom est gravé sur une petite plaquette de bois accrochée à son
sein gauche - n'a pas l'air contente. «Une Stange? Demande la Resi. Ici, on n'a pas de
ces trucs sans alcool. On est Bavarois, donc c'est une Mass ou rien!» Traduction: la
Resi, c'est une serveuse, et une Mass, c'est un litre. Elle hurle. C'est normal, avec la
Schlagermusik à fond et le bruit que produit le millier de clients présents sous cette
immense tente dressée dans l'enceinte même de la gare de Zurich.
Il est 19 h 30 ce mercredi. Chauffée à blanc, une partie de la foule s'est mise debout
sur les bancs et chante. Les Zurichois ont attrapé la fièvre de l'Oktoberfest.
La capitale économique suisse aurait-elle été annexée par la Bavière voisine? Depuis
un peu plus d'une semaine, c'est ce qu'on pourrait croire en y débarquant. Banquiers
de la Paradeplatz, étudiants de l'uni toute proche, touristes de passage, amateurs de
bière et immigrés allemands en mal du pays se retrouvent chaque soir à la
Hauptbahnhof dans une beuverie organisée: la Züri-Wiesn.
Le nom fait directement référence à la Theresienwiesn (prairie de Thérèse), du prénom
de la princesse de Saxe-Hildburghausen à laquelle le futur Louis Ier de Bavière dédia
l'Oktoberfest en 1810. Mais ça, c'est une autre histoire.
La Züri-Wiesn existe depuis quatre ans, elle est venue concurrencer l'Oktoberfest
donnée depuis quinze ans sur la petite île du Bauschänzli, située en pleine ville. Cette
dernière manifestation s'est ouverte vendredi et devrait accueillir 40'000 visiteurs en un
peu plus de deux semaines.
1000 de plus par mois à caser
Dites, les Allemands, les Zurichois ont plutôt tendance à s'en méfier, non? Car le
canton a vu déferler ces dernières années une vague de travailleurs germaniques
hautement qualifiés. Le nombre d'arrivées en provenance du pays voisin a atteint un
pic en 2008 en passant de 5200 en 2007 à 14'100.
Plus de 1000 Allemands de plus par mois à caser. La population totale des Germains
dans le canton avoisine les 70'000 têtes, soit plus du double d'il y a dix ans. Un choc
culturel qui n'a pas manqué de poser problème. L'UDC, la presse et le Café du
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11.10.2010
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Commerce se sont acharnés contre ces nouveaux venus, leur bon allemand arrogant
et leurs diplômes complexant.
Alors pourquoi cet engouement soudain pour la bière allemande? «Vous n'avez rien
compris, les Zurichois adorent les Bavarois», dit Jens-Rainer Wiese. Cet originaire de
la Ruhr habite depuis neuf ans en Suisse et tient un blog hilarant sur sa vie à Zurich.
«Les Bavarois sont des voisins, des montagnards qui parlent également un dialecte.
Ce sont les Allemands du Nord, leur beau langage et leur carrure qui posent problème
ici!»
Sous la tente de la gare centrale de Zurich, on est loin des 6,4 millions de visiteurs de
la Fête de la bière munichoise 2010. L'Oktoberfest, la vraie, a pris fin le week-end
dernier avec l'impressionnant bilan de 7 millions de litres de bière, 30'000 poulets, 117
boeufs et 59 veaux consommés en 17 jours.
«Durant une bonne soirée, on n'écoule ici que 4200 litres de bière», révèle Karsten
Hormann, organisateur de l'événement pour Candrian Catering. Cette société familiale
détient un empire de la gastronomie avec, notamment, l'essentiel de la restauration
des gares centrales de Zurich et de Bâle.
4200 litres divisés par 1100 clients, ça fait tout de même près de 4 litres par personne,
avalés en quatre heures à peine.
L'Oktoberfest devient corporate
Même les entreprises s'y mettent. Fini la Metzgete (équivalent de notre Saint-Martin)
avec les collègues de bureau ou la saucisse de l'OLMA en automne, voici la corporate
Oktoberfest!
Jürg Stucki, Zurichois de souche, est venu ce soir boire une Mass ou deux. Il travaille
pour une entreprise informatique. Pour remercier ses clients, l'équipe a eu la bonne
idée d'organiser une fête de la bière privée avec tente, serveuses allemandes,
Weisswurst (saucisse munichoise). Gros succès jusque tard dans la nuit.
«C'est un phénomène nouveau à Zürich, confirme Claudio Bieri, directeur opérationnel
de Candrian Catering. De plus en plus d'entreprises nous demandent un service
traiteur lié à l'Oktoberfest.»
«Resi, une deuxième Mass, Bitte!» Ingrid, cette fois, est revenue avec le sourire à ma
table. Ich bin auch ein Müncher!
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