Dans presque toutes les procédures de candidature ou de

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Dans presque toutes les procédures de candidature ou de
Dans presque toutes les procédures de candidature ou de prospection, le traducteur se
trouve tôt ou tard confronté à la question "quelle est votre spécialité ?" (ou vos spécialités).
Cela semble être une question cruciale pour le donneur d'ouvrage...
Pourtant, j'ai souvenir que l'un des enseignements principaux des cursus de traduction (en
tout cas, de celui que j'avais suivi à l'ESIT) portait sur les recherches documentaires et
terminologiques. Recherches grâce auxquelles nous devions être en mesure de traduire
n'importe quel texte, ou presque, dès nos premiers pas dans la profession. On est bien loin
de la notion de spécialisation. L'un de nos professeurs de traduction technique nous disait
même "un traducteur, c'est le contraire d'un ingénieur". Elle précisait ensuite qu'un
"ingénieur sait tout sur une seule chose" alors que le "traducteur en sait un peu sur tout",
juste assez pour avoir la capacité de se plonger momentanément dans un sujet technique
et d'en appréhender les mécanismes, les concepts, la terminologie... Bref, tout ce qui
permet de comprendre les subtilités d'un texte et de le traduire correctement, c'est-à-dire
en prenant assez de distance avec l'original pour que le sens soit respecté avec précision
sans pour autant s'accrocher aux mots ni faire de calque. Elle disait aussi qu'une fois un
projet terminé, il fallait refermer le tiroir de notre cerveau contenant les connaissances
techniques accumulées au cours de ce travail et faire place nette pour passer à une autre
sujet. Juste se souvenir que ces informations sont rangées dans un tiroir de notre cerveau
pour les retrouver à la prochaine occasion...
Alors faut-il vraiment se spécialiser dans un domaine technique donné ?
Soyons clairs, un traducteur digne de ce nom peut traduire un texte relevant d'un domaine
technique dont il ignore quasiment tout, à condition qu'il prenne le temps de faire des
recherches, de se documenter, de questionner des spécialistes, etc. Ceci étant dit,
plusieurs éléments entrent en ligne de compte.
Tout d'abord, la spécialisation semble rassurer le donneur d'ouvrage qui la considère
comme un gage de qualité. Le traducteur qui connaît bien un domaine est mieux armé face
aux éventuelles ambiguïtés d'un texte. Il est plus à l'aise et le risque d'erreur est réduit.
Ensuite, être spécialisé dans le domaine traité permet de réduire, voire de supprimer, la
phase de recherche, donc de gagner du temps... Les donneurs d'ouvrage, surtout les
agences, travaillent souvent dans l'urgence et imposent des délais très courts. Ils se
fondent sur un nombre de mots par jour donné (souvent aux environs de 3000 en
traduction et de 10000 en relecture) et sur les exigences du client final. Il va sans dire que,
3000 mots par jour, cela permet d'assurer une qualité correcte, certes, mais pas de se
lancer dans des recherches complètes. C'est pourquoi un certain nombre de donneurs
d'ouvrage préfèrent faire appel à un traducteur spécialisé.
Côté traducteur, il est certain que traduire dans un domaine que l'on connaît bien assure
une certaine aisance et améliore la rentabilité et donc les gains potentiels. Mais qu'en est-il
de l'intérêt intellectuel ? Personnellement, j'apprécie particulièrement cette phase de
découverte, d'exploration que constituent les recherches de fond qui précèdent une
traduction. J'aime accepter des traductions portant sur un sujet que je n'ai jamais traité.
J'ai donc choisi de ne pas me limiter à mes spécialités, ce qui selon moi finirait par aboutir à
une certaine forme de routine. Bien sûr, l'acceptation de ce type de travail dépend des
délais et du tarif demandés, car il est hors de question de rogner sur la qualité.
N'oublions pas toutefois qu'un traducteur a souvent des choses à découvrir, même dans
ses domaines de spécialités...

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