Le capital-investissement: clé de la création d`emplois
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Le capital-investissement: clé de la création d`emplois
COMMUNICATION DE LA COMMISSION EUROPEENNE Le capital-investissement: clé de la création d'emplois dans l'Union européenne Avril 1998 SOMMAIRE Pages INTRODUCTION 1 I. L'importance du capital-investissement paneuropéen pour l'Union européenne 2 - 12 • Contexte Politique 2 • Création d'emplois: les preuves dans l’Union européenne et aux Etats-Unis 3 – 4 • Capital-investissement: les preuves dans l’Union européenne et aux Etats- 4 – 8 Unis • Conséquences des faiblesses structurelles de l’Union européenne 8 – 10 • Signes positifs d’évolution 10 – 12 • Exigences fondamentales pour les marchés du capital-investissement 12 II. Les barrières qui subsistent 13 - 25 • La fragmentation 13 – 14 • Les barrières institutionnelles et réglementaires 14 – 17 • L’imposition 17 - 20 • La pénurie de PME de haute technologie dans l’Union européenne 20 - 23 • Les ressources humaines 23 – 24 • Les barrières culturelles 24 - 25 III. Eléments pour un plan d'action 26 – 29 Annexe 1 Besoins successifs de financement par capitaux 30 propres des entreprises Glossaire 31 – 33 Acronymes 34 1 INTRODUCTION Le Conseil européen sur l'emploi de Luxembourg (des 20 et 21 novembre 1997) a reconnu au paragraphe 30 de ses conclusions “… l'importance du rôle que peuvent avoir sur la création d'emplois des marchés de capitaux à risque* paneuropéens de grande taille et demande à la Commission de faire rapport au Conseil européen de juin 1998 sur les entraves au développement de tels marchés dans l'Union”. Le présent document est une première suite donnée à ce mandat. Il expose les principales raisons pour lesquelles la mise en place d'une gamme complète dans l'Union européenne est essentielle pour la création d'emplois future. Au chapitre 1, il compare brièvement les performances de l'Union européenne avec celles des États-Unis et souligne au chapitre 2 les principaux obstacles qui empêchent une utilisation beaucoup plus large de ces instruments de financement dans l’Union européenne. Au chapitre 3, il émet certaines idées préliminaires à propos du contenu d'un Plan d'action qui devra finalement être arrêté en commun par le Conseil et le Parlement européen afin de lever les principaux obstacles. Le présent document sera soumis au Conseil Ecofin le 21 avril pour tester les réactions des États membres ainsi qu’au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions. Il sera ensuite remanié au besoin et soumis au Conseil européen dans le courant du mois de mai en tant que proposition formelle de la Commission en réponse au mandat qu’il lui a conféré. Le message politique de ce document est simple. Le développement du capital-investissement dans l’Union européenne, conduisant à l’expansion des marchés de capital-investissement paneuropéens est essentiel pour une importante création d'emplois dans l'Union européenne. L'union économique et monétaire et l'arrivée de l'euro créeront un environnement plus favorable et constitueront un important catalyseur du changement, mais il n’en subsiste pas moins un certain nombre de barrières pernicieuses – d’ordre réglementaire, économique, fiscal ou culturel – auxquelles il importe de s’attaquer d'urgence. Ce qui est en jeu, c’est essentiellement la création d'un nouvel esprit d’entreprise en Europe. Le véritable défi politique est de fournir les outils, les technologies et les instruments financiers nécessaires pour qu’une nouvelle génération d'entrepreneurs européens puisse se lancer et réussir, c’est-à-dire de créer les conditions de l’épanouissement de la diversité européenne. Les compétences et connaissances européennes pourront ainsi se traduire par des entreprises mondiales gagnantes, qui créeront des emplois durables et une nouvelle croissance dans l’Union européenne. La Commission considère que le développement de grands marchés de capitalinvestissement paneuropéens est indispensable pour atteindre cet objectif. * Cette expression, qui n’est pas complètement univoque, a été traduite dans le présent document par « capital-investissement ». Elle correspond au concept anglo-saxon de « risk capital ». 2 I. L'IMPORTANCE DU CAPITAL-INVESTISSEMENT PANEUROPÉEN POUR L'UNION EUROPÉENNE q Contexte politique Ces derniers mois, un consensus politique fort s’est dégagé sur l’idée que pour que l'Union européenne et les Etats membres puissent créer les emplois nécessaires pour abaisser sensiblement et durablement leurs niveaux de chômage, il faut que l'Union stimule fortement l’esprit d’entreprise. Cette conclusion a été confirmée lors du sommet sur l'emploi de Luxembourg, dans les Lignes directrices pour l'emploi de 1998 ainsi que lors de la récente réunion du G8 à Londres.1 L’esprit d’entreprise est l’un des quatre piliers des Lignes directrices pour l’emploi qui soulignent expressément la nécessité d’améliorer les conditions dans lesquelles opèrent les marchés de capital-investissement. En bref, cela signifie qu’il faut créer des conditions favorables pour que les petites et moyennes entreprises puissent naître, grandir et se développer et pour que celles qui ont les meilleures perspectives de croissance soient finalement cotées dans les bourses européennes. - La Commission est convaincue que l'encouragement de ce processus de croissance systémique créera de nombreux emplois dans l'Union. Deux conditions sont pour cela impératives. La première est que les entrepreneurs européens puissent accéder au bon financement, au bon prix, au bon endroit et au bon moment afin de pouvoir développer leurs entreprises et leurs idées. Cela signifie qu’ils doivent avoir accès au capital de démarrage; puis au capital intermédiaire et de développement à mesure que l’entreprise grandit, et enfin aux investisseurs institutionnels et privés en s’appuyant sur un marché européen secondaire actif et d’une taille suffisante où leurs actions puissent être négociées. Le présent document concerne toutes les étapes de ce processus : de l’amorçage au démarrage, puis de la première croissance à la croissance soutenue. Ce n’est que normal car, dans ce domaine, l'Union européenne est faible sur tous les fronts. La deuxième condition est que les investisseurs de capital-investissement disposent d’un flux continu de bonnes opportunités de placement et puissent escompter une juste rémunération du risque qu’ils prennent. Cela signifie qu’il faut à la fois créer une Europe plus entrepreneuriale et une nouvelle approche du partage du risque entre entrepreneurs et investisseurs européens sur la base d’un partenariat mutuellement profitable. Le présent document aborde à la fois les questions d'offre et de demande en rapport avec le développement d'un marché des capitaux paneuropéens. 1 L'une des recommandations de la conférence du G8 sur la croissance, l'employabilité et l'inclusion qu’il est proposé d'adopter lors du G8 des chefs d'État ou de gouvernement à Birmingham en mai est de “… stimuler l'esprit d'entreprise et créer un environnement économique favorable aux PME, particulièrement dans les entreprises nouvelles, y compris un meilleur accès au capitalrisque… ”. 3 q Création d'emplois: les preuves dans l’Union européenne et aux Etats-Unis De nombreuses preuves empiriques témoignent de l'importance cruciale des marchés du capital-investissement pour la création d’emplois et de richesse. Dans l'Union européenne, une enquête a révélé qu'au cours de la période 1991-95, l'emploi a augmenté de 15% l’an dans les entreprises qui ont bénéficié de capital-risque financé par des investisseurs, 60% d’entre elles déclarant considérer que cet investissement s'était avéré positif pour la création d'emplois. En fait, 80% de ces entreprises ont déclaré qu’elles n'auraient pas existé ou se seraient développées plus lentement sans une telle participation du capital-risque. Cette tendance est confirmée par d'autres enquêtes et par les informations provenant des petits marchés de capital-investissement de l'Union européenne (Euro-NM, EASDAQ etc.). 1-Création annuelle d'emplois aux Etats-Unis (1989-1993) 2- Création annuelle d'emplois en Europe (1991-1995) 30% 30% 25% 20% 25% 15% 15% 10% 20% 10% 5% 0% 5% -5% -5% 0% Sociétés bénéficiant de capital-risque 500 plus grandes sociétés Sociétés bénéficiant de capital-risque 500 plus grandes sociétés Source: National Venture capital Association: 'EVCA “The economic impact of venture capital in Europe Des preuves encore plus convaincantes nous viennent des Etats-Unis. Aux Etats-Unis, le développement d'une poignée d’entreprises à forte croissance a eu une incidence considérable sur la création d'emplois. Au cours des vingt années qui se sont écoulées entre 1975 et 1995, à peine deux douzaines d’entreprises américaines de biotechnologie et de technologie de l'information ont vu leur chiffre d'affaires plus que centupler pour atteindre près de 250 milliards de dollars. Près de 1,5 millions d'emplois ont été créés à la faveur de ce développement. Entre 1991 et 1995, 3% des entreprises, dites “gazelles”, ont représenté 80% de la création d’emploi, soit 6 millions sur les 7,7 millions d'emplois supplémentaires créés par l'économie américaine (source : Cognetics, Who’s Creating Jobs). Le marché américain NASDAQ se développe depuis plus de 25 ans et est devenu le marché de prédilection pour le financement des PME à croissance rapide aux Etats-Unis. Aujourd'hui, pas moins de 5.500 sociétés (dont un petit nombre de sociétés européennes) sont cotées sur ce marché. Ces sociétés emploient quelque 9 millions de personnes. L’étude de Cognetics de 1995 a révélé qu’entre janvier 1990 et juin 1994, les sociétés cotées sur le NASDAQ ont créé plus de 16% de l’ensemble des nouveaux emplois aux Etats-Unis. 4 Certes, il y a également eu des faillites aux Etats-Unis et le capital-investissement n’explique pas tous les succès. Cependant, il ne fait guère de doute qu’il a largement contribué au processus de croissance et de création d’emplois. Capital-investissement: les preuves dans l’Union européenne et aux Etats-Unis q Le NASDAQ est un marché actif dont le chiffre d'affaires quotidien est comparable à celui de la Bourse de New York. Selon les multiplicateurs normaux de l'économie, le nombre cumulé d'emplois directs et indirects créés aux Etats-Unis pourrait encore représenter au moins la moitié du chiffre susmentionné. L'Union européenne n'a rien de comparable ni en taille ni en volume (voir graphiques ci-après). Les données les plus récentes indiquent qu'en 1997, le NASDAQ a réuni plus du septuple du capital collecté sur les marchés EASDAQ, EURO-NM et AIM combinés. Quant au capital-risque, les investissements américains totaux ont représenté au moins le triple. Les chiffres à partir de 1996 montrent que les investissements totaux de capital-risque dans les PME des domaines de la technologie de l’information et de la biotechnologie aux Etats-Unis ont également été au moins 6 fois plus élevés que dans l'Union européenne. Cet écart s’est probablement creusé depuis lors. 3. Nombre d’entreprises cotées en bourse au 31/12/97 6.000 5.000 4.000 3.000 2.000 1.000 0 NA SD AQ NY SE NL EL E B DK D FIN IRL I P UK L F S A 5 4. Volume journalier moyen des transactions en décembre 1997 (million ECU) 25.000 20.000 15.000 10.000 5.000 0 NA SD AQ N S E NL EL E B DK D FI N IRL I P UK L F S A Source: FIBV, propres calculs. Ø 2 Le volume des investissements de capitaux de démarrage et de capital-risque aux Etats-Unis est également beaucoup plus élevé que dans la plupart des Etats membres de l'Union européenne, qu’il s’agisse de microcredit,2 private equity, Business angels, corporate venturing, etc.. Les Etats-Unis compteraient 250 000 investisseurs actifs investissant dans de 20 à 40 fois plus d'entreprises que le capital-risque proprement dit pour un volume 5 fois plus élevé. En outre, les investissements de départ dans les entreprises basées sur la technologie semblent s’intensifier aux Etats-Unis, particulièrement dans les jeunes entreprises qui offrent des services en rapport avec Internet, dans la technologie des communications et dans la biotechnologie. L'enquête Price Waterhouse sur l'investissement en capital-risque dans l'ensemble des Etats-Unis indique des résultats records en 1997 et, au cours du quatrième trimestre de 1997, un record pour la troisième fois consécutive [ 3,7 milliards de dollars de capital-risque investis dans 749 entreprises]. Aux États-Unis, les programmes de microcrédits sont très répandus. Ils aident les chômeurs ou les pauvres à lancer leur entreprise. Plusieurs États membres ont également développé des systèmes semblables, quoiqu'à une échelle plus limitée. 6 Comparaison, au 31/12/97, du NASDAQ et des nouveaux marchés européens de capitaux 6000 5500 5000 4000 3000 1674 2000 4,57 1000 23 0 NASDAQ EASDAQ 5,54 62 7,6 300 Capitalisation (en milliards d'ECU) Nombre d’entreprises cotées EURO NM AIM Source: NASDAQ, EASDAQ, EURO-NM, AIM, nos propres calculs. Ø Dans l'Union européenne, une plus grande proportion d'un volume plus modeste de capital-risque est investie dans les rachats d’entreprises par les cadres ou les restructurations de sociétés, qui ont dans un cas comme dans l’autre un impact plus faible sur la création d'emplois. Les coûts relativement importants d’investissement et de surveillance et la perception d’un risque élevé afférent au financement de départ, par comparaison avec les rachats par les cadres, sont d’autres facteurs qui y freinent le développement du capital-risque. Le problème en Europe semble être triple: (i) donner au capital-risque le dynamisme nécessaire durant tout le cycle de vie de l’entreprise. (ii) orienter davantage le capital-risque vers des risques plus élevés, des secteurs d'investissement de haute technologie, et particulièrement vers les démarrages d’entreprises. (iii) favoriser le démarrage d’entreprises de haute technologie capables d'exploiter les progrès de RDT. 6. Investissement des sociétés de capital-risque (1996, Md. ECU, à l’exclusion des rachats et du capital de remplacement) 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 Europe Source: EVCA, Venture One, propres calculs. US 7 7. Investissements de capital-risque dans des entreprises à leurs débuts 1996, Md ECU 3,0 2,5 2,0 1,5 1,0 0,5 0,0 Europe US Source: EVCA, Venture One, propres calculs. Une enquête récemment réalisée pour la Commission3 a confirmé ces constatations. Les PME à haute croissance fondées sur la technologie ou la R & D, en phase de démarrage ou à leurs débuts, étaient celles qui éprouvaient les problèmes de financement les plus difficiles. Ø 3 Une autre différence frappante tient à la mesure dans laquelle les fonds de retraite américains contribuent à la fourniture de capital-investissement aux Etats-Unis. Encouragés par ce qu’on a appelé “la législation du bon père de famille” adoptée à la fin des années 1970, les fonds de retraite américains ont fourni un volume de plus en plus important de capitaux pour les actions négociées ainsi que pour le financement du capital-risque. En outre, cette législation du bon père de famille a permis, par le processus de diversification, un rendement annuel total réel sensiblement plus élevé qui a augmenté les prestations de retraite dans les pays qui ont adopté une telle législation.4 L'expérience montre en effet qu'à long terme, le rendement de l’investissement en actions dépasse le rendement des obligations d'État ou de l’immobilier. Environ 50% des capitaux des fonds de retraite des pays appliquant une législation de bon père de famille sont investis dans des actions, contre 16% dans les pays qui limitent les placements de diverses manières. European Business Angels network: Report on the potential for Business angels investment and networks in Europe – février 1998. 4 Les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Irlande, les États-Unis, le Canada et l’Australie ont une législation semblable. 8 Rendement annuel total par catégorie de placements Bons du trésor américain Bons du trésor à moyen terme Bon du trésor à lon g terme Obligations de sociétés à long terme Actions de petites sociétés Actions de grosses sociétés 0 5 10 15 % Source: Morgan Stanley Dean Witter L’avantage est triple. Tout d'abord: la suppression d’inutiles restrictions aux investissements des fonds de retraite ou d'autres investisseurs institutionnels libère des capitaux supplémentaires pour l'injection de capital-investissement dans l'économie. Ensuite, les prestations des fonds de retraite augmentent, au bénéfice des retraités. Enfin, le coût du financement des cotisations de retraite diminue, ce qui se traduit par une compétitivité accrue. Les résultats préliminaires de l’étude de référence (benchmarking study) de l’Union européenne sur le financement de l’innovation indiquent que les taux de rendement des investissements en fonds propres d’origine privée et des fonds de capital-risque dans l’Union européenne sont également appréciables. Ø Un autre facteur important facilite la collecte de capital-risque et son investissement dans le démarrage d’entreprises de haute technologie aux Etats-Unis. C’est la dynamique du regroupement que l’on observe aux Etats-Unis dans plusieurs centres, tels que Silicon Valley, Seattle, New York, Boston, Austin-Texas. Ces endroits sont des concentrations de fournisseurs de capital-risque, chercheurs, spécialistes des technologies, marchands de biens immobiliers, avocats, comptables, écoles de commerce et universités – qui ont tous intérêt au développement des entreprises. Le résultat de ce regroupement et de cette fécondation croisée est l’encouragement de l'innovation et de l'esprit d'entreprise, ainsi que le développement et la commercialisation de nouvelles idées, trouvant leur source dans une communauté fertile d’investisseurs de capital-risque. A une ou deux exceptions près, l'Union européenne est, là encore, à la traîne. q § Conséquences des faiblesses structurelles de l'Union européenne Les entrepreneurs et les petites et moyennes entreprises d’Europe sont très loin de réaliser tout leur potentiel de création d'emplois. Ce potentiel inexploité peut probablement se mesurer en millions, plutôt qu’en milliers, d’emplois de valeur. Les emplois créés par les entreprises à haute croissance qui utilisent des capitaux à risques 9 aux Etats-Unis sont généralement de haute qualité et sont rémunérés à des niveaux bien supérieurs aux salaires moyens. § Beaucoup de bonnes idées européennes – qui sont elles-mêmes le résultat de coûteux investissements publics dans l'enseignement et la recherche – finissent par être exploitées aux Etats-Unis où les capitaux, le savoir-faire et l'environnement des entreprises sont plus propices à leur développement et à leur succès, et ce au prix de l’exode et de la perte de certains des meilleurs talents et des meilleures idées de l'Europe. La rapide augmentation du nombre d'Européens travaillant à Silicon Valley n'en est qu’un indice. A côté de cela, il apparaît également que d’importantes sociétés américaines “achètent” les dernières idées européennes de haute technologie sur le marché au moyen de “trésors de guerre” annuels ou d’instruments de capital-risque faits sur mesure pour accaparer les meilleures idées européennes qui se font jour. Ces pratiques commerciales n’ont rien de répréhensible ni d’illégal. Il importe cependant que ces investisseurs soient incités à exploiter ces idées à l'intérieur de l'Union européenne. Sinon, les effets négatifs à long terme sur l'emploi en Europe seront très lourds. Cela revêt une importance stratégique capitale pour l'Union. L’élément essentiel est que l'Union européenne doit constituer sa propre capacité financière et entrepreneuriale pour développer ses propres idées novatrices par le biais de nouvelles entreprises de haute technologie à l'intérieur de l'Union européenne. § Dans l'Union européenne, il peut falloir entre 10 et 40 ans pour qu’une entreprise soit cotée en bourse, tandis qu’aux Etats-Unis, les entreprises bénéficiant de capital-risque peuvent faire appel à l’épargne publique sur le NASDAQ quelques années après leur création – ce qui est une énorme incitation pour l'entrepreneur. En outre, les premières émissions en souscription publique de cette nature tendent en moyenne à réunir dix fois plus de capitaux aux Etats-Unis que les opérations équivalentes dans l'Union européenne. L'Union européenne n'a pas de bourse aussi active, ou de la même dimension, que le NASDAQ pour inciter les entrepreneurs européens à développer leurs entreprises. La conséquence inévitable en est l'inefficacité du marché. § Si le leadership sur le plan de la technologie et des affaires dans les secteurs les plus prometteurs de l'économie mondiale est abandonné aux principaux concurrents de l'Union européenne, on aboutira de facto à ce que d'autres tiendront les commandes des affaires et du commerce à l’échelle mondiale et donc au déclin de l'influence de l'Union . § La pénurie de capital-investissement nécessaire dans l'Union européenne signifie que les jeunes entrepreneurs et entreprises européens, particulièrement pour les produits de haute technologie, deviennent souvent trop dépendants des emprunts bancaires et des découverts pour leur premier financement. Ce type de financement est généralement moins souple, plus onéreux et moins sûr, en particulier en cas de difficultés. Il peut être particulièrement inadéquat pour les jeunes entreprises de haute technologie dont le cash flow est soit négatif soit limité dans la phase de démarrage. Or, ces jeunes entreprises jouent un rôle essentiel dans la création de nouveaux produits et industries et, partant, dans la génération d’une croissance créatrice 10 d’emplois. Le secteur des PME de l'Union européenne recourt bien davantage au financement par emprunts bancaires et par découvert qu’aux Etats-Unis. Ces résultats ont été confirmés par l'European Business Angels Survey (février 1998). Les sûretés exigées par les banques et le manque de crédit et de capital de démarrage ou de départ et d’apports des investisseurs privés étaient considérés par les PME interrogées comme les problèmes financiers les plus aigus. § Enfin, l’importance des aides d'État sectorielles qui sont toujours accordées dans l'Union européenne reste un élément préoccupant qui va largement à l’encontre des intérêts de l'esprit d'entreprise, des PME et de la cohésion en Europe. q Signes positifs d’évolution ♦ Bien qu’il ne faille pas y voir un remède miracle, le lancement de l’euro le 1er janvier 1999 facilitera considérablement l’émergence d’instruments financiers davantage paneuropéens, tout en favorisant progressivement une plus grande harmonisation des marchés financiers. ♦ Certaines bourses européennes commencent à coopérer plus étroitement - par exemple, par l’accès croisé aux cotations, l’harmonisation des systèmes de négociation, des procédures de règlement identiques, des logiciels et terminaux standardisés et un ensemble d’indices communs représentant le marché des actions pan-européen. Ces évolutions pourraient marquer le début d’un processus de grande portée qui pourrait contribuer à réduire la fragmentation du marché boursier européen. ♦ La suppression des risques de change entre les pays participants augmentera sensiblement la taille et la liquidité du marché financier européen – tant pour les émetteurs que pour les investisseurs. Cette évolution tient notamment au fait qu’à partir du 1er janvier 1999, les exigences actuelles de congruence monétaire entre les éléments de l’actif et du passif, qui laissent aux fonds de retraite et d’assurance une marge limitée d’investissement à l’étranger, seront dépassées. Elles ne seront plus nécessaires dans la zone euro, abstraction faite des règles prudentielles, ce qui donnera plus de liberté aux investisseurs institutionnels. ♦ Un autre effet positif de l’UEM est la prévention des déficits publics excessifs, que garantit à long terme le Pacte de stabilité et de croissance. Cette réduction durable du besoin de financement des administrations publiques diminuera son effet d’“éviction” et libérera des capitaux pour le secteur privé. Le mouvement commencera par les marchés obligataires, mais s’étendra sans doute rapidement aux marchés des actions. Le niveau durablement bas des taux d’intérêt qui est à prévoir en conséquence facilitera également des ajustements de portefeuille favorables aux actions. ♦ Bien qu’encore relativement modestes, l’EASDAQ, l’Euro-NM, etc. représentent des éléments positifs indiquant que le marché reconnaît la nécessité d’instruments de capital-investissement paneuropéens. ♦ Dans le cadre de l’Union monétaire européenne, les ministres des finances sont également plus conscients de la nécessité de progresser en direction de l’intégration 11 des services financiers. C’est ce qu’a montré clairement un premier échange de vues prometteur lors du Conseil Ecofin informel de York le 21 mars. Les Etats membres ont reconnu avec la Commission que l’euro offre de nouvelles possibilités et ont réclamé un cadre plus coordonné , y compris un niveau approprié de protection des consommateurs. ♦ On note également des signes positifs de développement du capital-investissement dans la plupart des Etats membres bien que, hormis le Royaume-Uni et, dans une moindre mesure, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Suède, ce développement reste relativement limité. En outre, un certain nombre d’Etats membres ont également procédé ces derniers temps à des réformes fiscales et réglementaires non négligeables afin d’encourager davantage l’emploi du capital-investissement dans leurs économies. ♦ Les fonds de retraite et les fonds d’assurance ne cessent de se développer en Europe, bien qu’au départ, leur niveau ait été inférieur à celui des Etats-Unis. Pour autant que soient arrêtées des règles prudentielles raisonnables concernant l’expansion de ces fonds, un volant de capitaux plus important sera disponible à l’avenir pour les investissements de capital-investissement (voir ci-dessous). ♦ La pression concurrentielle s’intensifie à mesure que les entreprises américaines se tournent de nouveau vers l’Europe, compte tenu, d’une part, des effets positifs attendus de l’euro et de l’élargissement et, d’autre part, des répercussions négatives de la crise financière en Asie. Selon les opérateurs américains, l’investissement en capital-risque dans une Union européenne en voie d’élargissement, qui constituera le plus grand marché unique du monde, représente une formidable occasion à ”exploiter” à l’aube du XXIème siècle. Les acteurs européens engagés dans le capitalinvestissement devraient en tirer les conséquences. ♦ Le développement d’Internet et du commerce électronique offrira aux PME de nouveaux débouchés commerciaux dans le monde entier. Dans un proche avenir, les nouvelles entreprises européennes pourront mettre en place leur site Web et opérer sur le plus grand marché unique du monde, et même à l’échelle planétaire, à un coût bien moindre que par le passé. ♦ De par sa taille, le marché unique constitue pour les entreprises européennes un solide point d’ancrage. La libéralisation récente des transports aériens, des télécommunications, des marchés de l’électricité et du gaz naturel créera des débouchés pour les nouveaux venus sur le marché. ♦ Les directives relatives aux services d’investissement ou au prospectus ont établi certaines règles de base pour la mise en place d’un marché paneuropéen des capitaux, qu’il faudra maintenant approfondir (voir ci-dessous). ♦ Ces derniers mois, l’Union européenne a elle-même lancé un certain nombre de nouvelles initiatives en matière de capital-risque à la suite du Conseil européen sur l’emploi, qui s’est déroulé à Luxembourg en novembre dernier. Le FEI investit déjà dans des fonds de capital-risque et le Conseil devrait bientôt adopter trois nouveaux instruments dans le contexte de l’Initiative pour la croissance et l’emploi, dont l’un est spécifiquement une initiative en matière de capital-investissement. La BEI a quant à elle mis au point un Mécanisme européen pour les technologies. 12 ♦ Chose non moins importante enfin; le redressement actuel et la vitalité des marchés financiers dans toute l’Union européenne font que l’importance du capitalinvestissement, tant pour les entreprises que pour les investisseurs, se mesure plus aisément aujourd’hui.. En résumé, tous ces indicateurs sont positifs. Cependant, il demeure plusieurs barrières persistantes qu’il faut éliminer pour pouvoir développer une panoplie complète d’instruments paneuropéens de capital-investissement. Les principales barrières seront examinées dans la partie qui suit. Leur suppression peut être considérée comme un élément essentiel à la création d’emplois dans l’Union. q Exigences fondamentales pour les marchés de capital-investissement A l’heure actuelle, rares sont les pays dotés de marchés de capital-investissement développés : il s’agit pour l’essentiel des Etats-Unis et, dans une moindre mesure, du Royaume-Uni. Cela tient au fait que ces marchés ont des exigences élevées, auxquelles il faut, pour la plupart, satisfaire simultanément avant qu’ils puissent se développer vigoureusement. La première est la mise en place d’un grand réservoir d’entreprises se prêtant à des investissements. Même des entreprises à haut risque attireront les investisseurs si ceux-ci peuvent diversifier le risque et le répartir sur un nombre d’investissements suffisamment important et obtenir un rendement approprié sur les investissements performants, déduction faite des pertes liées à de mauvais investissements. Aucun pays de l’Union européenne ne compte un nombre suffisant d’entreprises de ce type. Actuellement, les entreprises européennes cherchent à se procurer du capital-investissement sur le marché américain, par exemple en se faisant admettre à la cote du NASDAQ, car il existe aux Etats-Unis un réservoir d’entreprises permettant une diversification appropriée du risque. L’autre solution, qui est d’investir en Europe, suppose un nombre suffisant d’entreprises qui se prêtent à l’investissement. Ceci n’est possible qu’à l’échelle européenne. Pour intéresser les investisseurs au capital-investissement, les entreprises doivent en outre satisfaire à des règles strictes concernant la publicité des comptes, la transparence et le gouvernement d'entreprise sur lesquelles tablent les investisseurs, que ces règles soient ou non respectées par des entreprises existantes et implantées dans les pays en question. Les investisseurs ont autant besoin d’information, de liquidité, de transparence et de règles claires concernant le gouvernement d’entreprise que les entreprises ont besoin d’apports sûrs de capital-risque. Les investisseurs, mais aussi les marchés qui réunissent investisseurs et entreprises à forte croissance doivent atteindre les niveaux de liquidité, de transparence et de gestion prudentielle qui caractérisent les bourses américaines. Les marchés de capitalinvestissement sur notre continent devront donc être des marchés paneuropéens appliquant des règles très rigoureuses, sans quoi ils seront condamnés à disparaître. II. LES BARRIÈRES QUI SUBSISTENT 13 La Commission a recensé six grandes catégories de barrières: q q q q q q La fragmentation. Les barrières institutionnelles et réglementaires. La fiscalité. La pénurie de PME de haute technologie. Les ressources humaines. Les barrières culturelles. La fragmentation q Capitalisation boursière des actions des entreprises nationales (en milliards d’écus) au 31.12.1997 8.000 7.000 6.000 5.000 4.000 3.000 2.000 1.000 0 NASDAQ NL NYSE EL E B DK D FIN IRL I P UK L F S A La libéralisation des marchés européens des capitaux, qui devrait s’accélérer avec l’introduction de l’euro, n’a pas encore permis de surmonter le cloisonnement des marchés nationaux. Au sens strict, l’Union européenne compte encore 33 marchés boursiers réglementés et 18 organisations de contrôle. Cette configuration réduit à la fois la capitalisation et la liquidité de chaque marché national et donc les possibilités de “sortie” pour l’investisseur de capital-risque. Les Etats-Unis ont trois grands marchés boursiers (dix en tout si on compte les marchés régionaux) et un organisme national de contrôle, qui couvre l’ensemble du territoire, la “Securities and Exchange Commission”. A la différence des PME et autres entreprises américaines, la plupart des PME européennes n’ont pas facilement accès aux marchés de capitaux des autres Etats membres: l’information et la transparence font défaut; la fiscalité, les règles comptables et le droit de la faillite ne sont pas les mêmes; la capacité d’évaluation du risque transfrontalier est limitée. Ce sont des facteurs supplémentaires expliquant que les entreprises européennes, notamment les PME, recourent davantage au crédit à court terme et moins aux fonds propres que leurs 14 homologues d’outre-Atlantique, ce qui est préjudiciable à la création d’emplois et à la croissance en Europe. En ce qui concerne les marchés primaires des actions pour les PME et les entreprises de haute technologie à forte croissance, deux tendances parallèles se dessinent en Europe. La première vise à créer un second marché financier paneuropéen – l’EASDAQ. La deuxième consiste en une coopération croissante entre certains marchés existants (comme Euro-NM) et, de plus en plus, entre différents marchés de valeurs mobilières et d’options (par exemple, entre la Société des bourses françaises, la Deutsche Börse et la Bourse suisse). Toutefois, certaines barrières réglementaires et institutionnelles gênent leur développement (voir ci-dessous). En outre, on relève avec inquiétude certains signes d’aggravation de la fragmentation dans l’UE - une pléthore de nouvelles initiatives diverses étant à l’étude. Enfin, on constate aussi une forte fragmentation régionale dans l’Union européenne, la préférence étant accordée aux actions “domestiques”. La Commission estime qu’il est essentiel d’arriver à consolider ces différentes initiatives et ces divers marchés afin que les futures entreprises européennes disposent d’un marché boursier actif et liquide à l’échelle paneuropéenne, qui produise des effets positifs comparables à ceux du NASDAQ aux Etats-Unis. q Barrières institutionnelles et réglementaires Le cadre institutionnel et réglementaire de l'Union européenne ne fournit pas les incitations nécessaires ni ne crée la transparence, la stabilité et la prévisibilité indispensables à l’expansion du capital-investissement paneuropéen. Le prix à payer est lourd: faible création d’emplois et croissance économique sous-optimale. La Commission conclut de son analyse que les lacunes du cadre réglementaire énoncées ci-dessous expliquent pour une très large part la médiocrité de ces résultats: • Fonds de capital-risque: absence de législation communautaire Il n’existe pas au niveau communautaire de structure harmonisée et transparente qui permette aux fonds de capital-risque de rassembler des capitaux en commercialisant leurs parts dans d'autres Etats membres. Actuellement, les Etats membres restreignent la commercialisation des titres des fonds de pays partenaires en invoquant abondamment “l’intérêt général” ou le principe de la diligence raisonnable. Cette situation empêche les fonds de capital-risque d'acquérir la masse critique qui assurerait leur viabilité. • Investisseurs institutionnels traditionnels (OPCVM, entreprises d'assurance, fonds de pension) À l’heure actuelle, les investisseurs institutionnels ne peuvent mettre une partie de leurs considérables ressources à la disposition des entreprises qui ont besoin de capital-investissement. La nature des restrictions sous-jacentes varie selon que les titres des PME sont ou non admis à la cote d’une bourse. Dans le premier cas, l’apparition de nouveaux marchés boursiers réglementés (comme l’EASDAQ, l’Euro-NM, l’AIM, etc.) devrait fournir aux PME la possibilité d’accéder à des fonds 15 propres, en permettant aux investisseurs de souscrire à une émission aux mêmes conditions que celles qui s'appliquent aux grandes sociétés. Les autorités de surveillance et les décideurs doivent veiller à ce que les conditions d’admission et les autres critères encouragent les PME à exploiter pleinement ces nouvelles possibilités. Dans le cas des valeurs non cotées, qui sont considérées comme illiquides, les investisseurs institutionnels sont soumis à des restrictions plus rigoureuses, voire à une interdiction d’investir. Dans la pratique, la législation communautaire sur les OPCVM dissuade les gestionnaires de fonds d’investir dans des actifs non liquides, parce que les investisseurs peuvent exiger à tout moment le rachat de leurs parts. Etant donné ces contraintes, il est nécessaire, pour canaliser une partie significative des importantes masses d'investissement institutionnel vers les titres non cotés des PME, de mettre en place des fonds de capital-risque spécialisés qui soient autorisés à investir dans des actifs illiquides. À mesure que les PME prospéreront et acquerront une taille suffisante pour pouvoir obtenir l’admission de leurs titres à la cote des nouveaux marchés réglementés, elles seront en mesure de susciter de l'intérêt auprès d'autres investisseurs institutionnels. Dans le cas des fonds de retraite (pour lesquels la législation n'a pas été harmonisée au niveau de l'Union européenne) et des entreprises d'assurance, les restrictions abondent en ce qui concerne le placement des fonds par catégorie d'actifs. Cela fausse gravement l'affectation optimale des ressources sur le marché unique. En particulier, les investisseurs institutionnels ne peuvent généralement pas incorporer dans leurs portefeuilles les quantités optimales de capital-investissement et de fonds propres. Ces restrictions réglementaires sont aggravées par l'attitude prudente qu’adoptent les gestionnaires de fonds dans nombre d’Etats membres en ce qui concerne la congruence entre les éléments d’actif et de passif. Dès lors, de nombreux gestionnaires de fonds de l'UE n'exploitent pas pleinement la marge de manœ uvre dont ils disposent pour investir en fonds propres ou en actifs illiquides. Il convient donc d’élaborer des règles prudentielles raisonnables qui permettront aux fonds de pension d'optimiser la structure de leurs portefeuilles en procédant à une répartition équilibrée entre titres paneuropéens, titres internationaux, biens immobiliers et placements à revenu fixe. La disparition des restrictions liées à la congruence monétaire pourrait ouvrir des horizons nouveaux aux gestionnaires de fonds et les encourager à augmenter la part des valeurs mobilières dans leurs portefeuilles, tout en assurant la protection des bénéficiaires des fonds de pension par des règles de gestion “en bon père de famille”. Il est essentiel que les Etats membres fassent en sorte que les restrictions à l'investissement que le Traité autorise en vertu de considérations prudentielles ne soient pas utilisées pour instaurer une discrimination à l’encontre des actifs étrangers ni ne servent de prétexte pour privilégier le financement des administrations nationales, régionales ou locales. • Directive sur les services d'investissement Le directive sur les services d'investissement n'est entrée en vigueur que récemment et n’a pas encore produit ses pleins effets. Néanmoins, l'article 11 ménage dès aujourd’hui une marge de manœ uvre substantielle aux autorités de surveillance du pays d'accueil en ce qui concerne l'application des règles de comportement commercial aux sociétés de gestion qui négocient des valeurs mobilières. Alors que, 16 sous l'impulsion de l'UEM, le rythme de l'intégration des marchés des actions s’accélère, il serait peut-être nécessaire de reconsidérer le rôle joué par les autorités de surveillance du pays d'accueil dans la définition de règles locales de comportement commercial. Si l’on ne procède pas à une adaptation dans ce domaine, il restera difficile de négocier sur d'autres marchés de l'Union européenne les services et produits financiers qui sont acceptés dans un Etat membre. La fragmentation de la réglementation a une incidence particulièrement néfaste sur les marchés de capitalinvestissement Les investisseurs ne seront sans doute pas disposés à effectuer des transactions transfrontières tant que des règles communes d’un niveau élevé n’auront pas été fixées. Il convient, par conséquent, de renforcer les mécanismes favorisant une collaboration plus étroite entre les autorités de surveillance. A cet égard, la création du FESCO (Forum des commissions européennes de valeurs mobilières), à la fin de l’année 1997, a constitué une démarche positive. Cet organisme se concentrera sur l'établissement de procédures pour le traitement de questions quotidiennes liées à la surveillance des opérations transfrontières. Ses travaux viendront compléter ceux du comité des autorités de surveillance des marchés des valeurs mobilières (auquel se substituera le comité des valeurs mobilières dès que la directive concernée aura été adoptée), qui se concentre sur les questions réglementaires. • Prospectus Jusqu'à présent, les prospectus ont été peu utilisés dans le cadre des transactions transfrontières. Les émetteurs n'ont pas manifesté beaucoup d’intérêt pour les émissions ou les cotations transfrontières. Le lancement de la monnaie unique et l'intégration des marchés des valeurs mobilières qui en résultera dans la Communauté pourraient modifier cette situation de façon spectaculaire. L'expérience (limitée) acquise jusqu’à présent semble indiquer que, dans la pratique, les grandes sociétés et les PME doivent encore parfois engager de longues et coûteuses procédures lorsqu’elles veulent faire coter une valeur mobilière dans plusieurs bourses de la Communauté ou lancer une émission publique simultanément dans plusieurs Etats membres. De plus, les PME qui souhaitent réunir des capitaux par le biais d’une première offre publique de souscription (IPO) avant d’introduire leurs titres en bourse ne profitent pas nécessairement des procédures automatiques dont disposent les grandes sociétés. Cette discrimination involontaire provient du fait qu’à l’époque de l'adoption de la législation, on ne prévoyait pas que les PME demanderaient en grand nombre la cotation de leurs actions dans les bourses des valeurs officielles. Il est urgent d'adapter la réglementation aux réalités du marché. • Règles comptables Idéalement, toutes les entreprises de l'Union européenne qui recherchent des fonds propres devraient pouvoir le faire sur la base d'un ensemble de comptes unique. Cela leur épargnerait les coûts résultant de la publication de plusieurs ensembles de comptes différents et cela faciliterait également la cotation simultanée dans plusieurs bourses de l'UE, ou sur les marchés de pays tiers. Ce n’est cependant pas la situation qui prévaut aujourd’hui. 17 Jusqu’à présent, l’obligation d’établir plusieurs ensembles de comptes différents a affecté principalement les grandes entreprises de l'Union européenne souhaitant lever des capitaux sur les marchés internationaux. Toutefois, désormais, le problème touche aussi les PME, étant donné que les bourses des valeurs spécialisées dans les actions à haut risque exigent des PME qu’elles établissent un ensemble de comptes supplémentaire sur la base des normes comptables internationales (IAS) ou des principes comptables généralement admis aux Etats-Unis (US GAAP). L'introduction de l'euro exigera un réexamen des règles comptables. Les comptes des sociétés ne sont pas aisément comparables en raison des nombreuses options que contiennent les directives comptables, des divergences qui subsistent concernant les principes comptables de base (comme le principe de prudence) ou de l’absence d’harmonisation sur un certain nombre de questions importantes, telles que l'imposition différée, les engagements au titre des retraites, etc. Cela décourage l'investissement privé et institutionnel paneuropéen. A long terme, il est souhaitable d’instituer en Europe un ensemble unique de règles de comptabilité, fondées sur les normes internationales, afin de répondre aux exigences des investisseurs internationaux. q Imposition– Barrières fiscales L’imposition du capital-investissement et des fonds propres (tant publics que privés) revêt une importance primordiale pour ce qui est du recours à cette forme de financement. Elle intéresse à la fois la demande [PME à forte croissance recherchant des financements] et l’offre [investisseurs institutionnels et particuliers]. La stabilité et la prévisibilité de l’environnement fiscal dans son ensemble sont importantes aussi pour les investisseurs. Comme on peut l’imaginer, la situation dans l’Union européenne est très complexe - elle varie considérablement d’un Etat membre à l’autre. Mais les questions cruciales qu’il faut garder à l’esprit sont les suivantes : Le système fiscal dans son ensemble favorise-t-il (ou entrave-t-il) l’innovation et le développement des investissements de capitaux à risques ? D’autres instruments financiers sont-ils soumis à une imposition plus favorable que le capital-investissement ? S’il est difficile de porter un jugement d’ensemble bien tranché, tout semble néanmoins indiquer qu’un certain nombre de questions et de problèmes requièrent l’attention immédiate des Etats membres pour faire en sorte que les incitations adéquates existent dans l’économie tout en veillant à ce que le traitement fiscal favorable soit dûment réservé aux investisseurs qui prennent de véritables risques. Parmi les principales questions à examiner figurent notamment : (i) L’imposition relative des capitaux empruntés (intérêts) et des capitaux propres [dividendes, bénéfices non distribués] 18 Une analyse générale rapide de l’ensemble des pratiques existant dans les Etats membres montre que les taux d’imposition marginaux appliqués aux capitaux d’emprunts (revenus d’intérêts) semblent, d’une manière générale, nettement moins élevés que ceux qui frappent les revenus du capital social (dividendes et bénéfices non distribués) – encore que cette différence puisse parfois être atténuée par divers crédits d’impôt. Les taux d’imposition diffèrent aussi selon qu’ils frappent les particuliers ou les sociétés. On constate également que dans l’UE les dividendes d’origine étrangère sont en général imposés à un taux plus élevé que les dividendes de source locale. Le fait que l’UE soit beaucoup plus tributaire que les Etats-Unis du financement par l’emprunt accroît l’importance de toute mesure fiscale favorisant de l’emprunt, même si, à bien des égards, l’UE et les Etats-Unis ont des structures fiscales similaires. Tout bien considéré, des structures fiscales de ce type, si elles sont confirmées, ne fourniront pas les incitations ou les signaux économiques adéquats pour encourager les investissements de capital-investissement qui sont si importants pour créer des emplois. De fait, l’effet fiscal négatif de structures fiscales de cette sorte peut être d’autant plus fort que pour attirer les investisseurs devrait exister une “prime” attrayante pour des investissements plus risqués par comparaison avec des placements, sans risque, rémunérés par des intérêts. Certains Etats membres ont commencé à introduire des incitations fiscales ciblées pour encourager les investissements à risques, par exemple des réductions d’impôt pour les investissements réalisés par des particuliers dans des entreprises qui se créent, etc. Dividendes étrangers perçus - dividendes intérieurs perçus 9. Imposition des revenus du capital Ecarts d’imposition de différentes sources de revenus du capital (taux d’imposition en 40 D FIN 30 I 20 F A DK E 10 LUX IRL UK NL S B 0 -10 -20 -10 0 10 20 30 40 50 60 Dividendes intérieurs perçus - intérêts intérieurs perçus Source: Economie européenne (décembre 1997): Vers l’intégration financière; sur la base d’une étude réalisée par la Confédération Fiscale Européenne en 1996/97. [Explication du graphique] Les revenus d’intérêts issus d’instruments d’emprunts (comptes bancaires et valeurs à revenu fixe) sont généralement soumis à des taux d’imposition plus faibles que les participations directes dans des sociétés (revenus de dividendes). Cela ne cadre pas avec l’objectif général d’encouragement de l’esprit d’entreprise et de création d’emplois. La mise en place d’un marché paneuropéen des capitaux est entravée aussi par les différences d’imposition des dividendes selon qu’ils sont de source étrangère ou au contraire locale. Le graphique qui précède montre la différence d’imposition entre dividendes et intérêts et entre dividendes de source étrangère et dividendes de source intérieure. Il présente une image d’ensemble sur la base des dispositions générales concernant les taux marginaux 19 d’imposition (taux maximum ou prélèvement libératoire selon les cas) applicables aux intérêts et aux dividendes de source intérieure et de source étrangère perçus par des personnes physiques résidentes. En ce qui concerne les dividendes, le taux d’imposition calculé prend en compte l’imposition au niveau de la société, celle au niveau de l’investisseurs et, s’il y a lieu, les crédits d’impôts (avoir fiscal). Le graphique ne prend pas en compte les dispositions spécifiques qui concernent des montants limités ou des types particuliers d’investissements et qui peuvent, dans certains cas, alléger la charge fiscale. Il ne reflète pas les modifications fiscales intervenues depuis décembre 1996/janvier 1997. (ii) Impôt sur les plus-values L’impôt sur les plus-values importe à un double titre. Premièrement, parce que cet impôt s’applique lors la cession d’actifs et qu’il a donc une incidence sur le taux de rendement des investissements. Il influence aussi les décisions des investisseurs privés, des institutions financières et des investisseurs de capital-risque qui veulent investir dans des sociétés en cours de création. Deuxièmement, l’impôt sur les plus-values peut affecter certains éléments de la rémunération du personnel constitués par des actifs ou de futurs actifs. Il s’agit là d’une considération de poids pour des entreprises nouvelles qui, généralement, ne sont pas en mesure de payer des salaires élevés à leur personnel, mais qui peuvent proposer des options d’achats d’actions - en d’autres termes, promettre, aux cadres et au personnel, des primes alléchantes s’ils prennent le risque d’entrer dans une entreprise qui démarre. Ce type de rémunération sous la forme d’actions et les systèmes de participation proposés au personnel jouent un rôle essentiel aux Etats-Unis dans le développement des entreprises dynamiques à forte intensité de connaissances. Les investisseurs de capital-risque dans l’Union européenne sont convaincus que l’actuel régime fiscal réservé aux options d’achats d’actions dans la plupart des Etats membres décourage beaucoup le développement d’entreprises nouvelles et, par conséquent, la diffusion du capital-investissement. Cet effet dissuasif est évident lorsque certains Etats membres opèrent un prélèvement fiscal avant même la vente des actions par le titulaire de l’option. Les autres questions qui doivent être examinées avec soin sont les régimes généraux d’imposition applicables aux entreprises nouvelles (lorsque des incitations sont nécessaires); le traitement fiscal applicable aux bénéfices non distribués des entreprises de haute technologie récemment créées; les diverses formes d’allégement de l’impôt sur le revenu pour le capital-investissement investi à long terme - en accordant une attention particulière aux besoins des entreprises à haute technologie. (iii) Imposition des fonds de capital-risque Les fonds de capital-risque seront un élément essentiel du dispositif européen d’instruments de capital-investissement disponibles dans l’UE à l’avenir. Il est extrêmement important que les Etats membres apportent davantage de clarté à l’environnement fiscal - améliorant ainsi la transparence et la prévisibilité pour les fonds et ceux qui y investissent. Le traitement fiscal réservé à ces fonds devrait être aussi favorable que possible, cohérent avec les autres éléments des régimes fiscaux applicables au capital-risque et de nature à stimuler leur développement général dans l’UE. 20 q Pénurie de PME de haute technologie dans l'UE • Le développement des marchés paneuropéens de capital-investissement passe par l’existence d’un flux régulier de bonnes occasions d’investir. En Europe, la création nette d’entreprises est à la traîne, particulièrement dans les secteurs de haute technologie qui comportent des risques plus élevés. Les instituts de recherche européens réalisent d’excellents travaux de recherche et de technologie mais il se crée beaucoup trop peu d’entreprises nouvelles et dynamiques en mesure d’exploiter leurs résultats. Si les projets régionaux ou nationaux (par exemple les parcs scientifiques, les centres d'innovation) sont parfois efficaces pour stimuler la création d’entreprises axées sur les nouvelles technologies et présentant un taux moyen de survie supérieur à la moyenne, ces entreprises tendent le plus souvent à rester de petite taille (dix employés en moyenne, après dix ans d'existence). • La rareté des réseaux accentue cette pénurie: En Europe, contrairement aux Etats-Unis, il existe peu de concentrations géographiques de PME de haute technologie implantées en “grappes”. Ces ensembles européens ne sont pas non plus aussi étoffés et aussi intégrés qu'aux Etats-Unis. La mise en réseaux des PME semble également moins facile dans l'UE. Or, la capacité des entreprises à tirer le meilleur parti des compétences et des ressources disponibles grâce à des modèles de coopération souples constitue un atout majeur pour l’innovation et la concurrence. L’absence de réseaux reliant les secteurs de la recherche et les milieux financiers européens est particulièrement dommageable. Elle est à l’origine d’une incompréhension et d’une méconnaissance généralisées des choix de financement offerts, elle retarde l’accès à ces financements et crée une asymétrie de l'information, qui contribuent à accroître les coûts. • En outre, l'environnement juridique et réglementaire des entreprises européennes ne favorise pas pleinement l'innovation5 et la création d’entreprises. De nombreuses dispositions peuvent avoir un effet dissuasif pour les chercheurs et les entrepreneurs qui envisagent de prendre le risque de créer une nouvelle entreprise. C’est manifestement le cas des règles en matière de propriété intellectuelle et des exigences administratives lors de la création d’entreprises. Un exemple frappant est celui du système général de brevet européen, qui est particulièrement peu satisfaisant.6 À côté des brevets nationaux, qui subsistent, il existe un brevet européen, lequel, lorsqu’il est accordé par l'Office européen des brevets à Munich, fonctionne en fait à tous égards comme un brevet national. Malheureusement, ce système est complexe et coûteux et ne fournit pas un brevet unitaire pour tous les Etats membres, sous la forme d’un brevet communautaire. Les résultats récents sont décevants. Par exemple, plus de 640 000 inventions sont brevetées chaque année dans le monde, contre 220 000 dans les années 1960. Pour l’essentiel, cette croissance est le fait du Japon et des Etats-Unis. Au cours des sept dernières années, le pourcentage des demandes de brevet européen émanant d’Europe a diminué de 11 %, alors que durant la même période, la part des déposants des Etats-Unis a augmenté de 32 %. L’industrie européenne dépose moins de 43 % du 5 6 Livre vert sur l’innovation COM (95) 688 Livre vert sur le brevet communautaire et le système de brevets en Europe COM (97) 314 21 nombre total de demandes de brevet européen. On estime que les deux tiers des 170 000 PME européennes qui produisent des inventions ne présentent pas de demande de brevet. Or, un système de protection efficace de la propriété intellectuelle est indispensable pour mener des activités innovatrices, créer des entreprises de haute technologie et investir dans ce secteur, ainsi que pour assurer une protection efficace dans l’ensemble du Marché unique. Par conséquent, une réforme urgente s’impose. Ø Le lancement d’une PME destinée à exploiter une innovation doit souvent être très rapide si l’on veut gagner du temps sur la concurrence. Un retard excédant trois mois peut être fatal à l'introduction de nouveaux produits ou services sur le marché. Néanmoins, dans beaucoup d’Etats membres la création d’entreprises est encore soumise à des procédures longues et complexes qui constituent autant d’entraves. En Europe, les régimes d’immatriculation de sociétés les plus favorables sont ceux du Royaume-Uni, de l’Irlande, de la Suède, du Luxembourg et du Danemark où les conditions préalables à l'immatriculation d’une société sont peu nombreuses, le coût de cette immatriculation limité et les délais minimaux. 22 10. Nombre total de procédures à effectuer pour immatriculer une entreprise Nombre de procédures Autriche Belgique Danemark Finlande France Allemagne Grèce Irlande Italie Luxembourg Pays-Bas Portugal Espagne Suède Royaume-Uni Etats-Unis 0 5 10 15 20 25 30 Source: “Comparaison internationale des dispositions juridiques et des procédures administratives requises pour la création de PME d’une forme juridique quelconque dans l'Union européenne et dans d'autres grands pays”, projet EIMS 96/142, rapport final (par Logotech), page 45. données: 1996. 11. Rapport entre le nombre de procédures et le délai d’immatriculation d’une entreprise 30 ES 25 DE 20 IT 15 ND 10 BE PO, AU FI GR FR 5 SW LU DK 0 0 JP IR US UK 5 10 15 20 25 30 Number of procedures (verticalement : “délai en semaines”) Source: “Comparaison internationale des prescriptions de forme et des procédures administratives requises pour la création de PME, quelle que soit leur forme juridique, dans l'Union européenne et d'autres grands pays”, projet EIMS 96/142, rapport final (par Logotech), page 49. données: 1996. 23 Dans 10 des 15 pays de l'UE, le capital minimum dont doit disposer une société à responsabilité limitée dépasse 8000 écus, ce qui est un montant très important pour une société constituée par de nouveaux entrepreneurs qui n'ont pas accumulé de capital. Pour ce qui est notamment des projets issus de recherches universitaires, d’entreprises créées par de jeunes entrepreneurs ou par des personnes qui ne disposent pas d’une mise de fonds importante, cette exigence de capital sera déterminante dans la décision d’un entrepreneur d’exploiter une innovation ou de renoncer purement et simplement à tenter cette exploitation. 12. Exigence de capital minimum pour les sociétés à responsabilité limitée Exigences de capital minimum en Autriche Belgique Danemark Finlande France Allemagne Grèce Irlande Italie Luxembourg Pays-Bas Portugal Espagne Suède Royaume-Uni EtatsUnis 0 10 20 30 40 Source: “Comparaison internationale des prescriptions de forme et des procédures administratives requises pour la création de PME, quelle que soit leur forme juridique, dans l'Union européenne et dans d'autres grands pays”, projet EIMS 96/142, rapport final (par Logotech), page 44. données: 1996. q Ressources humaines Pour que les marchés paneuropéens de capital-investissement puissent se développer suffisamment vite et prendre une ampleur satisfaisante dans l’UE, il faudra pouvoir compter sur un nombre suffisant d’entrepreneurs et d’experts qualifiés. Les données de l'EVCA7 suggèrent que l'Europe dispose tout au plus de 3 000 investisseurs en capital-risque équivalent plein temps, ce qui est moins que les Etats-Unis. C’est là un élément important parce que le rôle de l’expert en capital-risque va au-delà du simple apport de financement et s’étend souvent à l’expertise de la gestion et à l’accès à des réseaux de spécialistes. Les possibilités d’enseignement ou de formation permettant d’acquérir les compétences nécessaires dans ce domaine sont faibles, notamment en ce qui concerne la phase de lancement d’entreprises innovatrices et axées sur la technologie. Trop peu de diplômés se lancent dans la création de leur propre entreprise. Les systèmes d’enseignement n’accordent pas une très grande place à l'esprit d'entreprise, en dépit de certaines mesures récentes visant 7 European Venture Capital Association . 24 à l’encourager au niveau national. Il est également nécessaire d’offrir des occasions d’entreprendre aux membres les moins nantis de la société, en leur permettant d’accéder à des financements à des conditions favorables. Aux Etats-Unis, les systèmes de rémunération par prise de participation et d’actionnariat des salariés ont contribué très activement à stimuler la création et le développement d’entreprises dynamiques. Ils ont notamment permis à des salarié d’accumuler un capital pour lancer leur propre entreprise, ils ont associé les salariés au développement et à la prospérité de l’entreprise (en contribuant à promouvoir la participation et l’esprit d'entreprise) et ont facilité la transmission des entreprises. L'Union européenne devrait tirer des leçons de cette expérience. Le troisième point faible est la pénurie de spécialistes multilingues capables d’assister les teneurs de marchés et les opérateurs spécialisés, ainsi que le manque de capacité et de données analytiques, notamment en ce qui concerne les projets novateurs de haute technologie. La mobilité des personnes qualifiées dans l'Union européenne est également loin d’être d’optimale. En effet, en général, il y existe trop peu de teneurs de marché ou d’équipes d’experts qualifiés dans l'Union européenne pour animer un marché secondaire pan-européen suffisamment liquide. q Barrières culturelles La création d’une Europe désireuse d’entreprendre passe par un changement des mentalités, dès les premières années d'enseignement, et par la suite, au niveau du secondaire, de l’enseignement professionnel supérieur et de l’université. Une nouvelle “approche” du risque, de la création de richesses, de l'esprit d'entreprise, de la mobilité professionnelle et de la collaboration entre les universités et les entreprises doit être encouragée. L'Union européenne compte trop peu d'entrepreneurs. Les taux de création d’entreprises y sont trop faibles, incontestablement en raison d’un accès insuffisant à des fonds d’amorçage. D’autres raisons moins tangibles, à la fois culturelles, sociales, historiques, juridiques et économiques interviennent, freinant la formation d'une nouvelle génération d'entrepreneurs européens. Pour rapprocher les besoins des investisseurs européens de ceux des entrepreneurs européens, un réel effort d’amélioration de la transparence des entreprises et des marchés est nécessaire. Parmi les raisons les plus importantes figurent: Des sanctions excessives de “l'échec”. Les législations européennes en matière d'insolvabilité et de faillite empêchent souvent une deuxième tentative. Aux Etats-Unis, “le droit d'échouer” est considéré comme un élément de l'apprentissage du monde des affaires. Une conception étroite des avantages de la prise de participation. La crainte de perdre “le contrôle” d'une entreprise. Le peu d'importance attachée au gouvernement d’entreprise. 25 Le comportements des investisseurs à l’égard du risque et des systèmes d’option d’actions. L’absence d'une culture d'entreprise dans les écoles, les universités etc.. 26 III. ÉLÉMENTS POUR UN PLAN D'ACTION La Commission considère qu'il importe à présent de convenir d’un plan d'action et d’un calendrier pour éliminer les obstacles décrits dans la partie II et améliorer ainsi les conditions de développement du capital-investissement dans l'Union européenne. Ces éléments nécessitent une réaction politique différenciée, certains au niveau de l'Union européenne, mais bon nombre de la part des Etats Membres eux-mêmes. Cette approche exige une compréhension parfaite des besoins du marché et l'intensification du dialogue avec les autorités réglementaires de l'Union européenne. Des efforts fragmentaires et sporadiques ne permettront pas de résoudre les problèmes qui ont été identifiés. Ce qu’il faut, c’est une approche coordonnée et systématique dans tous les domaines essentiels et la volonté politique d’aller de l’avant. La Commission estime que la somme des éléments de ce plan favorisera la croissance du capital-investissement dans l'Union - et la création d'emplois suivra. [ Les priorités sont en caractères gras ] q Fragmentation Mesure Responsables Calendrier Table ronde: L'impact de la fragmentation du marché européen sur la fourniture de capitalinvestissement “Vers un consensus pour le changement” Commission, Etats membres, Experts du marché Deuxième semestre de 1998 Surveillance du marché et développement de l'information et des statistiques sur tous les niveaux de capital-investissement dans l'UE Examen détaillé du coût du financement par l’emprunt et par fonds propres en Europe pour les entreprises Commission, EVCA Rapport fin 1998 Commission (cf. Ecofin - réunion informelle) Automne 27 q Obstacles Institutionnels et réglementaires Mesure Les fonds de capital-risque: législation communautaire concernant les fonds spécialisés de type fermé Investisseurs institutionnels traditionnels (OPCVM, fonds de retraite, entreprises d'assurance): Adoption de règles prudentielles pour faciliter l’investissement dans le capital-investissement; suivi du Livre vert sur les retraites complémentaires dans le marché unique Renforcement de la coopération pour encourager les prises de participation transfrontalières et convergence de la réglementation Modification de législation en vigueur - Prospectus – procédures simples / automatiques de “passeport unique” pour les grandes entreprises et les PME (Un prospectus ou document d'offre approuvé dans un Etat membre doit pouvoir être utilisé dans tous les EM – facilitant la concurrence entre les bourses des valeurs et les investisseurs) - Apprécier les règles de comptabilité et d’audit existantes compte tenu des préoccupations spécifiques des PME afin de leur faciliter l’accès au capital-investissement paneuropéen) Transposition et mise en œ uvre de toutes les directives sur les services financiers Responsables Calendrier Commission, Proposition, Conseil, PE Etats membres, Conseil, PE 1998-99 1998-99 Commission 1998 ð FESCO, associations de PME, EVCA Commission, 1998 Proposition, Conseil, PE Commission, Proposition 1999 Commission, en cours (utilisant le tableau de bord du Marché unique) 1998 28 q Fiscalité Mesure Impôt sur les plus-values (CGT) - Evaluation de l'impact de l’impôt sur les plusvalues sur le capital-risque - Examen du traitement fiscal des options de souscription offertes aux salariés pour encourager le démarrage d’entreprises de haute technologie Régimes fiscaux préliminaires pour le démarrage d’entreprises - Evaluation comparative des performances - Définition des meilleures pratiques Imposition des fonds de capital-risque - Clarification de l'environnement fiscal Examen de l'imposition emprunt / fonds propres q Responsables Calendrier Etats membres 1998 Etats membres Commission 1998 Etats membres 1998 Etats membres 1998 Rareté des PME de haute technologie Mesure Développer la mise en réseau et le regroupement des universités, des centres de recherche, de la recherche de partenaires, des moyens de financement, des spécialistes, de la notation des marchés et des entreprises… Simplifier les formalités administratives pour la création d’entreprises sur la base des meilleures pratiques des Etats membres Réduire les exigences de capital pour la création d’entreprises Stimuler la création et la croissance des entreprises de haute technologie - création d’un club “paneuropéen” de haute technologie, entreprises à forte croissance servant d’exemples, contacts avec les investisseurs… Suite à donner au livre vert : Réformer le système de brevet européen Développer des modules de commerce électronique “sur mesure” pour les PME Responsables Calendrier Etats membres, Programmes communautaires En cours Etats membres, Commission, pour l’identification des meilleures pratiques Etats membres 1998-99 Commission, Etats membres 1998-99 Commission, Propositions Programmes pilotes de la Commission Etats membres, Secteur privé 1998 1998-99 29 Ressources humaines q Mesure Promouvoir les systèmes d'éducation et de formation favorisant l'esprit d'entreprise et l'innovation [multidisciplinarité, créativité, gestion de portefeuille et des risques… ] Déterminer les besoins de formation des entreprises européennes de capital-risque et des teneurs de marché de haute technologie Examiner les mesures visant à stimuler les réseaux de “Business Angels” Evaluer les avantages des régimes de rémunération par prise de participation et d’actionnariat des salariés q Responsables Etats membres Calendrier En cours Commission 1998-99 Commission, Etats membres Etats membres Commission 1998 1998-99 Obstacles culturels Mesure Revoir la législation en matière d'insolvabilité et de faillite pour éviter “une sanction excessive” de l'échec Exposer les avantages du capital-risque / de la prise de participation et promouvoir l’esprit d’entreprise dans la société Gouvernement d’entreprise - Examen de la pratique européenne Responsables Etats membres Calendrier 1998 Etats membres, Commission, Collectivités locales, Chambres de commerce, Secteur privé, ECVA Commission 1998-99 1998-99 30 Annexe 1 Besoins successifs de financement par capitaux propres des entreprises Besoins de capitaux Croissance Cotation en bourse Capital-risque : développement Capital-risque : amorçage Business Angels Apports personnels et familiaux Développement de l’idée Création de Développement de l’entreprise PME Production industrielle Production à grande échelle Grande entreprise Besoins successifs 31 GLOSSAIRE Bourse des valeurs (marché boursier) : Marché sur lequel des titres sont achetés et vendus. Sa fonction essentielle est de permettre aux entreprises, aux pouvoirs publics et aux collectivités locales de réunir des capitaux en vendant des titres aux investisseurs. Business Angels : Particuliers qui investissent directement dans des entreprises nouvelles et en expansion qui ne sont pas cotées. Les Business Angels apportent généralement des financements en échange d’une participation en actions dans l’entreprise, mais peuvent également procurer d’autres financements à long terme. Ces capitaux peuvent compléter l’industrie du capital-risque* en apportant des sommes plus faibles (généralement inférieures à 150 000 écus) à un stade plus précoce qu’à celui où la plupart des entreprises de capital-risque sont capables d’investir. Capital-développement : Financement pour la croissance et l’expansion d’une entreprise. Capital-investissement : Marchés fournissant des financements en actions à une entreprise pendant sa première croissance (démarrage* et développement*). Dans le cadre de la présente communication, trois types de financement sont concernés : - Investissement informel par les Business Angels*; - Capital-risque∗; - Marchés boursiers spécialisés dans les PME et les entreprises à forte croissance. Capital-risque : Les investissements effectués dans des entreprises non cotées en bourse par des entreprises de capital-risque qui, agissant pour leur compte propre, gèrent des capitaux de particuliers, d’institutions ou leurs propres capitaux. On recense quatre grandes étapes de financement correspondant aux étapes du développement d’une entreprise à base de capital-risque : départ*, expansion*, remplacement* et rachat*. Aux Etats-Unis, la notion de “capital-risque” n’englobe pas la plupart des opérations de rachats de sociétés par leur encadrement. Capital d’amorçage (Seed capital) : Le financement fourni pour chercher, évaluer et développer un concept de base. Capital de démarrage (Start-up capital) : Fourni aux entreprises pour le développement de leurs produits et la commercialisation initiale de ceux-ci. Capital de départ (Early stage capital) : Financement accordé aux entreprises avant qu’elles ne commencent la fabrication commerciale et les ventes et avant qu’elles ne fassent des bénéfices. Englobe le financement d’amorçage* (seed) et de démarrage* (start-up). Capital de remplacement : Achat d’actions détenues dans une entreprise par une autre société de capitalrisque ou par un ou plusieurs autres actionnaires. Capitalisation boursière : Le prix d’une action multiplié par le nombre total d’actions en circulation. L’évaluation boursière totale d’une société par actions. Par extension, l’évaluation totale des sociétés cotées sur une place boursière. Capitaux propres : Valeur des actions et bénéfices non distribués d’une société. Comité des autorités de surveillance des marchés des valeurs mobilières Groupe consultatif informel créé en 1985 par la Commission et les autorités nationales de l’UE chargées de réglementer les marchés des valeurs mobilières afin de traiter de la coopération et des questions transfrontalières. Il sera ∗ Terme défini dans le glossaire ou dans la liste des acronymes. 32 remplacé par le comité des valeurs mobilières. Comité des valeurs mobilières A créer. Il aura à la fois un rôle consultatif et de comitologie et remplacera le Comité des autorités de surveillance des marchés des valeurs mobilières. Dans le secteur des valeurs mobilières, il aura le même rôle que le comité bancaire et le comité des assurances dans leurs domaines respectifs. Commerce électronique : Commercialisation ou vente directes par l’intermédiaire d’un ordinateur ou d’un écran de télévision. Corporate venturing (prise de participation par une entreprise) : Apport de capital-risque d’une entreprise à une autre. Directive comptable : Directives 78/660/CEE et 83/349/CEE. Directive concernant les services d’investissement : Directive 93/22/CEE. Elle prévoit un “passeport” européen pour les fonds d’investissement (courtiers, contrepartistes, etc.) et donne le droit aux bourses électroniques d’installer leurs terminaux dans d’autres Etats membres. Fonds de capital-risque : Fonds de type fermé créés pour apporter du capital-risque. Gouvernement d’entreprise : La façon dont sont gérées les organisations, en particulier les sociétés à responsabilité limitée, et la nature de la responsabilité des dirigeants vis-à-vis des actionnaires. Ce thème a pris de l’importance depuis le début des années 1990, les bailleurs de fonds extérieurs à une entreprise tenant à s’assurer que la direction n’agit pas à l’encontre de leurs intérêts. Investisseurs institutionnels : Ce terme fait principalement référence aux compagnies d’assurance, aux fonds de retraite et aux sociétés d’investissement qui collectent l’épargne et fournissent des fonds aux marchés, mais aussi à d’autres types d’institutions, telles que les fonds octroyant des dotations, les fondations, etc. IPO (Initial Public Offering) : Première offre publique de souscription (mise sur le marché, ouverture du capital au public) : processus consistant à lancer une société sur le marché en invitant le public à souscrire ses actions. Marché de capitaux : Un marché dans lequel des capitaux à long terme sont réunis par l’industrie et le commerce, les pouvoirs publics et les collectivités locales. Les bourses des valeurs font partie du marché des capitaux. Marché primaire : Marché sur lequel est lancée une nouvelle émission de valeurs mobilières. Marché secondaire Marché où les titres sont achetés et vendus à la suite d’une émission initiale. L’existence d’un marché secondaire florissant et liquide crée les conditions propices à un marché primaire sain. Marchés réglementés : Marchés organisés où se réunissent acheteurs et vendeurs pour opérer selon les règles et procédures convenues. Ce sont des marchés remplissant les conditions énoncées à l’article 1er, point 13), de la directive concernant les services d’investissement*. Microcredit : Prêts de très faible montant, accordés par des établissements spécialisés. Option d’achat d’actions : Option proposée aux employés et/ou aux cadres d’acheter des actions à prix fixe. Private equity : S’oppose à “public equity”; prise de participation, par des investisseurs privés, dans des sociétés qui ne sont pas cotées en bourse. 33 Prospectus (directive) : Documents rédigés selon les règles établies par les directives 89/298/CEE (offres publiques) et/ou 80/390/CEE (prospectus). Prospectus : Offre écrite formelle de vente de titres qui énonce le programme d’activité d’une entreprise, ou les faits concernant une entreprise existante dont l’investisseur doit être informé pour prendre une décision en toute connaissance de cause. Rachat d’entreprises par les cadres (Management buy-out) : Rachat par les cadres (ou d’autres investisseurs) de leur entreprise ou d’une ligne de produits de celle-ci. Règle du bon père de famille (Prudent-man regulation) : Obligation faite aux gestionnaires des fonds de retraite d’investir en bon père de famille, notamment en diversifiant raisonnablement leur portefeuille, la répartition de celui-ci n’étant soumise à aucune limite si ce n’est celles sur l’auto-investissement pour les fonds de retraite finançant des plans à prestations définies. Les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Irlande, les Etats-Unis, le Canada et l’Australie ont une législation de ce type. Valeurs mobilières : Actifs financiers négociables comprenant actions, obligations, certificats d’investissement et titres participatifs. 34 ACRONYMES AIM : Alternative Investment Market [Londres] BEI : Banque européenne d’investissement DSI : Directive concernant les services d’investissement (93/22/CEE) EASDAQ : European Association of Securities Dealer Automated Quotation [Bruxelles] ERISA : Employee Retirement Income Security Act; (Loi américaine de 1974 sur les régimes de retraite qui a défini les responsabilités en matière fiduciaire, fixé les normes minimales de financement et les règles concernant les droits acquis, et qui a mis en place un système d’assurance garantissant les prestations). EURO NM : Nouveau Marché (Paris) + Neuer Markt (Francfort) + Nouveau Marché (Bruxelles) + Nieuwe Markt (Amsterdam) EVCA : European Venture Capital Association FEI : Fonds européen d’investissement FESCO : Forum of European Securities Commission IAS : Normes comptables internationales NASDAQ : National Association of Securities Dealers Automated Quotation Systems OPCVM : Organisme de placement collectif en valeurs mobilières; (fonds d’investissement) OSCE : Office statistique des Communautés européennes PME : Petites et moyennes entreprises RDT : Recherche et développement technologique TI : Technologies de l’information US GAAP : Principes comptables généralement admis aux États-Unis