maghreb - Département d`information et de communication
Transcription
maghreb - Département d`information et de communication
239 Le Maghreb (mot arabe signifiant « le Couchant ») regroupe quatre pays à l’extrémité nord-ouest de l’Afrique, soit l’Algérie, le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie. Trois de ces pays sont membres officiels de la Francophonie et participent à ce titre aux Sommets de la Francophonie. Ils ont tous pour langue officielle l’arabe. Le Maroc, ancien protectorat français (1912-1956), comprend une bonne proportion de francophones. C’est le 4e pays francophone au monde pour le nombre de locuteurs. La Tunisie, ancien protectorat français (1881-1956), a une population pour près d’un tiers francophone. La Mauritanie a un pourcentage de francophones moins important que dans les autres pays du Maghreb. L’Algérie, française de 1830 (prise d’Alger) à 1962, n’adhère pas aux structures officielles de la Francophonie et ne participe donc pas aux Sommets. L’arabe est la seule langue officielle. L’Algérie est le second pays francophone au monde pour le nombre de francophones. Les 30 % de francophones réels et les 30 % de francophones occasionnels, auxquels s’ajoutent les émigrés francophones, représentent un total d’environ 18 millions de personnes. Ces quatre pays accordent une place importante au français dans l’enseignement, les médias écrits et électroniques, ainsi que dans diverses productions culturelles (musique, théâtre, cinéma et littérature). ON PEUT CONSULTER MAHER ABDELMOULEH et Guy FEUER : Partenariat Euro-méditerranéen. Promotion ou instrumentalisation des Droits de l’Homme. L’Harmattan, Paris, juin 2010, 235 pages, 22€ KARIMA BERGER : Eclats d’islam. Albin Michel, Paris, mars 2009, 263 pages, 15€ MOKHTAR LAKEHAL : L’Emancipation contrariée du Maghreb. L’Harmattan, Paris, décembre 2009, 258 pages, 24€ ABDELWAHAB MEDDEB : Pari de civilisation. Le Seuil, Paris, août 2009, 209 pages, 16€ JEAN-MARIE MIOSSEC et Christian JAMBET (dir) : Terrains et échelons de la gouvernance. Expériences en France et au Maghreb. L’Harmattan, Paris, septembre 2009, 414 pages, 36€ L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 MAGHREB 240 MAGHREB Algérie Maroc Mauritanie Tunisie Nom officiel République algérienne démocratique et populaire Royaume du Maroc République islamique de Mauritanie République tunisienne Superficie km2 2.381.741 446.550 1.030.700 163.610 Alger Rabat Nouakchott Tunis Oran, Constantine, Annaba Casablanca, Fès, Marrakech, Tanger Nouâdhibou, Adel Bagrou, Rosso, Bogué Sfax, Gabès, Sousse, Kairouan, Bizerte République présidentielle Monarchie constitutionnelle République présidentielle Régime parlementaire Chef d'Etat depuis le Abdelaziz Bouteflika 28/04/1999 Roi Mohammed VI 30/07/1999 Mohamed Ould Abdel Aziz 05/08/2009 Moncef Marzouki 12/12/2011 Chef de gvt Abdelaziz Bouteflika Abdelilah Benkirane 28/04/1999 29/11/2011 Moulaye Ould Mohamed Laghdaf 14/08/2008 non membre - membre 1981 membre 1980 Capitale Principales villes Régime depuis le Statut à l'OIF depuis Langue(s) off. Hamadi Jebali 14/12/2011 membre 1970 arabe arabe arabe arabe Locuteurs français 11.200.000 est. 10.366.000 429.000 6.639.000 Fête(s) nationale(s) 1er novembre/5 juillet 30 juillet 28 novembre 20 mars/7 novembre 35.406.303 32.309.239 3.359.185 10.732.900 Moins de 15 ans 24,2% 27,8% 40,4% 23,2% Plus de 65 ans 5,2% 6,1% 3,5% 7,5% Indice de fécondité 1,74 2,19 4,22 2,02 Mortalité infantile pour 1000 naissances 24,90 26,49 58,93 24,98 Espérance de vie 75 ans 76 ans 62 ans 75 ans Population urbaine 66% 58% 41% 67% Alphabétisation 69,9% 52,3% 51,2% 74,3% Tél. mobile % hab. 92,58% 98,82 81,72 103,55 Usagers internet 13,27% 40,89% 2,23% 32,61% IDH (rang /169) 96 130 159 94 POPULATION L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 ECONOMIE PIB en Mds USD 183,4 101,8 4 48,9 PIB par hab. USD 7.200 5.100 2.200 9.500 Monnaie dinar dirham ouguiya dinar tunisien Valeur d'1 ¤ été 2012 99,13 11,01 355 1,98 % croissance 2,9% 4,6% 5,1% 0% % inflation 4% 1,9% 6,5% 3,7% % chômage 10% 8,9% 30% (est. 2008) 18% 12% 56,5% 31,5% 16,6% 32,2% 51,2% 17,8% 37,6% 44,7% 10,6% 34,6% 54,8% Etats-Unis, Italie, Espagne, Canada, France France, Espagne, Italie, Royaume-Uni Chine, France, Italie, Espagne France, Italie, Allemagne, Espagne, Libye Principaux fournisseurs France, Italie, Chine France, Espagne, Italie, Etats-Unis France, Chine, Espagne, Etats-Unis France, Italie, Allemagne, Espagne, Libye Site officiel www.elmouradia.dz www.pm.gov.ma www.mauritania.mr www.ministeres.tn STRUCTURE ÉCONOMIQUE Agriculture Industrie Services Principaux clients Sources : Organisation internationale de la Francophonie, The World Factbook 2012, MAE et www.xe.com MAGHREB 241 INTRODUCTION GENERALE VINGT ANS DE VIE MAGHREBINE AVEC L’AFI Avec cette édition de l’Année Francophone Internationale, cela va faire vingt ans que j’assume la chronique maghrébine dans ces pages, d’abord tout seul, en remplacement de Jean Déjeux, mort en octobre 1993, puis avec l’aide précieuse de mes collègues et amis Hamid Nacer Khodja pour l’Algérie et Ahmed Ismaïli pour le Maroc. Si bien que cet annuaire est aujourd’hui, sans aucun doute, le seul instrument permettant de mesurer année après année, à l’aune des événements politiques, économiques et culturels survenus dans cette région, son évolution de tout au long du dernier quart de siècle. Or, de la «décennie noire» en Algérie (19932003) à la toute récente «Révolution de jasmin» en Tunisie, en passant par la disparition du Roi Hassan II au Maroc (1999), des événements politiques d’une extrême importance ont touché le Maghreb durant ces vingt dernières années - et à travers ce qui s’y est passé et s’y passe encore - ont considérablement affecté les relations bi ou multilatérales avec le monde arabo-musulman, bouleversant la diplomatie dans l’espace méditerranéen, redéfinissant les formes et les directions de la Coopération et plaçant la France, ancien colonisateur et BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE MAGHREB 1-Romans, nouvelles, poésie: AMROUCHE, Jean, Chants berbères de Kabylie, Paris-Alger, L’Harmattan, Editions Zyriab, 2011, 266 p. Préface de Mouloud Mammeri, édition bilingue de Tassadit Yacine AMROUCHE, Jean, Sous le feu la cendre, Paris, Non Lieu, 2012. Poèmes. Préface de Tassadit Yacine. BEL Hadj Yahia, Emna, Jeux de rubans. Tunis, Elyzad, Comar d’Or, 2012 BELLIL Dalila, Nos pères sont partis, Paris, Encres d’Orient, 2011. Roman épistolier. L’émigration vue par deux femmes, Soltana et Dahbia. . BENHASSEN, Souhayr et Bessis, Sophie, Bourguiba. Tunis, Elyzad, 2012. BENMALEK, Anouar, Tu ne mourras plus jamais, Paris, Fayard, et Alger, Casbah Editions, 2011, 179p. Un roman pathétique dédié à sa défunte mère. BOUCHAREB Rachid, La troisième moitié de soi, Paris, Editions L’Harmattan 2011 Recueil de 23 nouvelles sur les dernières années de l’Algérie. BOURAOUI, Nina, Sauvage, Alger, Barzakh, 2012.Roman BRAHIMI Denise, La Dernière rencontre Camus-Sénac, Paris, Marsa, 2011. Théâtre. premier partenaire économique, dans une position inédite et souvent inconfortable - il n’est pour en juger que d’apprécier les tâtonnements du gouvernement Fillon au tout début de la révolution en Tunisie, ou encore le malaise qui durant cette dernière année, a entouré la célébration du Cinquantenaire de l’Indépendance en Algérie. Les révolutions qui ont récemment touché la Tunisie, l’Egypte et la Lybie, les tentatives de récupération salafiste par la voie démocratique dans ces mêmes états, ou de manière plus violente dans le sud Soudan et au nord du Mali, le fait qu’en dépit de certaines prédictions le Royaume du Maroc et la République algérienne n’aient été atteints, sinon de façon très marginale, ni par des troubles populaires, ni à travers les résultats de certaines élections - cela ne peut être compris qu’en tenant compte de cette évolution au Maghreb durant le dernier quart de siècle: statut de la monarchie au Maroc et expérience douloureuse d’une guerre civile et de religion dans l’Algérie de la fin du XXème siècle. Faisant allusion aux élections à venir en Tunisie comme en Algérie (et aussi en Egypte d’où sont venus depuis plus d’un siècle, la plupart des courants sociaux et culturels qui ont agité le Maghreb et le Machrek), mon introduction à la chronique de l’année précédente était intitulée «L’Année de tous les espoirs et de toutes les craintes». On mesurera dans les articles consacrés à chaque pays la justesse et l’actualité de cette prédiction. } CANESI, Michel et Rahmani, Jamil, Alger sans Mozart, Paris, Naïve, 445 p. Roman. Une histoire d’amour sur fond de soixante-ans d’histoire algéro-française. DJELFAOUI Abderrahmane, La mer vineuse (disait l’aveugle), Alger, L. de Minuit, 2012, préface de Hamid Nacer-Khodja. Poésie. FILALI, Azza, Ouatan. Tunis, Elyzad. Comar d’Or 2012 GRINE, Hamid, Camus dans le narguilé, Paris, Après la Lune, 2011. Roman. (réédition sous un autre titre de Parfum d’absinthe, Alger, Alpha, 2010). KHADRA, Yasmina, L’Equation africaine, Paris, Grasset et Constantine, Medias Plus, 2011, 327 p. Un médecin allemand est prisonnier de pirates somaliens. KHADRA, Yasmina, Les Chants cannibales, Alger, Casbah Editions, 2012. Recueil de 12 Nouvelles. KHEN Amine, Arabian Blues, Editions MLD, Saint Brieuc, 2012. Poèmes. Préface de René Depestre, 80 p LAROUI Fouad, La Vieille dame du Riad, Julliard, 2011. LEFTAH Mohamed, Le Dernier Combat du capitaine Ni’mat, Editions de la Différence, 2012 MANAÏ, Yamen, La Sérénade d’Ibrahim Santos. Tunis, Elyzad, 2012 MERAHI, Youcef, La pétaudière, Alger, Casbah Editions, 2011. Roman sur les mœurs électorales sur fond de violence islamique dans un village de Kabylie. L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 Guy DUGAS Université Montpellier 3, directeur de l’IRIEC [email protected] 242 MAGHREB MAGOUDI, Ali, Un Sujet français, Albin Michel, Paris 2011, roman. Un homme à la recherche de son père. M’RABET Fadéla, Le café de l’imam, Alger, Délimen, 2011, 122 p. Récit nostalgique d’une féministe NEDALI, Mohamed, Triste jeunesse, Casablanca, Le Fennec, 2012. Roblès Emmanuel, Les Hauteurs de la ville. Paris, Le Seuil, 2012 (rééd). SANSAL, Boualem, Rue Darwin, Paris, Gallimard, 2011, Sixième roman de l’auteur sur l’histoire durant un demisiècle d’une famille algérienne, de la guerre d’Algérie à nos jours. 2-Essais: AMEYAR, Hafida, Annie Fiorio-Steiner. Une vie pour l’Algérie, Alger, Association Les Amis de Abdelhamid Benzine, 2011, 190 p. AMHIS-OUKSEL, Djoher, L’exil et la mémoire’’, une lecture des romans de Taos Amrouche, Alger, Casbah Editions, 2011, 123 p. BOUIGNANE, El Mostafa : Des Houris et des hommes, Editions Marsam, Rabat, 2010. BRUN Catherine et Penot-Lacassagne Olivier, Engagements et déchirements, Les Intellectuels et la guerre d’Algérie, Paris, Gallimard-IMEC, 2012, 260 p. Catalogue de l’exposition produite par l’Imec et présentée à l’abbaye d’Ardenne du 16 juin au 14 octobre 2012. DUGAS, Guy, Emmanuel Roblès et l’Oranie hispanique, Paris, L’Harmattan, 2012. FELLOUS, Colette, Meddeb, Abdelhawab et Wolinsky, Georges, Dégage ! Une révolution, Paris, Phébus, 2012. GRACIET, Catherine et Laurent, Eric : Le Roi prédateur, Le Seuil, 2012. JAMZALI, Wassila dir., Histoires minuscules des révolutions arabes. Ouvrage collectif. Montpellier, Chevrefeuille étoilé, 2012 KAOUAH, Abdelmadjid, Quand la nuit se brise, anthologie de poésie algérienne, Paris, Points, 2012. KHELOUZ, Nacer, Le Roman algérien des années 1920: Entre fiction et réalité politique, L’Harmattan, 2011. LAGARDE, Dominique, Algérie, la désillusion, Paris, Express Roularta Editions, 2011. Recueil des articles de l’hebdomadaire L’Express publiés depuis cinquante ans. LAROUI, Fouad, Le Drame linguistique marocain, Le Fennec, Casablanca, 2010. MOATI, Serge, Dernières nouvelles de Tunis. Paris, Michel Lafon, 2011. ALGERIE Hamid NACER KHODJA Université de Djelfa, Algérie [email protected] L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 POLITIQUE Sur le plan national, les réformes annoncées par le président Bouteflika en avril 2011 ont abouti à de nouvelles lois sur les partis politiques, l’information, les associations, lesquelles ont été accueillis avec circonspection par la presse et l’opposition politique mais saluées par des gouvernements occidentaux. L’événement le plus important est le renouvellement le 10 mai 2012 de la première chambre du parlement, l’Assemblée Nationale Populaire. Cette élection législative (scrutin proportionnel à un tour) s’est caractérisée par l’augmentation du nombre de députés qui passe de 389 à 462, et ce eu égard aux données du recensement de la population de 2008, et le retour du Front des Forces Socialistes (FFS) de Hocine Aït Ahmed qui revient dans l’arène électorale après 10 ans de boycottage. Les résultats ont assuré une large victoire du FLN et de son allié le RND, un revers des islamistes tandis que 145 femmes ont été élues. Les résultats donnés par le conseil constitutionnel, après les recours introduits par certains partis, sont les suivants : 1 2 3 4 Front de Libération Nationale (FLN): Rassemblement National Démocratique (RND): Alliance de l’Algérie Verte (AAV): Front des Forces Socialistes (FFS): 208 68 46 27 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 Parti des Travailleurs (PT): Indépendants: FNA: Addala: MPA: PFJ: PNSD: FC: AHD: ANR: FNJS: UFDS-ElIttihad: RA: RPR: MNE: FM: 24 18 9 7 1 1 4 3 3 3 3 3 2 2 2 2 Pour un nombre d’électeurs inscrits de 21.645.841, moins de dix millions de votants ont été recensés (43,14% de participation, et le nombre de bulletins nuls a été très élevé: 1.704.047). Au niveau international, le renversement du régime du colonel Kadhafi a conduit à une recrudescence d’armes illégales et d’actes terroristes au Sahel, ce qui a contraint les Etats riverains à coordonner leurs actions en organisant notamment plusieurs rencontres politiques de haut rang. Les rébellions de Touaregs du Nord Mali séparatistes contre le gouvernement central ont suscité une intervention diplomatique de l’Algérie - qui dispose de 1000 km de frontières avec ce pays - pour le respect des accords d’Alger du 4 juillet MAGHREB 243 DEUX DISPARITIONS DE LEADERS HISTORIQUES Ahmed Ben Bella Né le 25 décembre 1916 à Maghnia (Tlemcen), il meurt à Alger le 11 avril 2012. Homme politique et référence du nationalisme algérien, Ben Bella a participé dans le corps expéditionnaire français aux campagnes d’Italie, de France et d’Allemagne et fut décoré par le Général de Gaulle. Conseiller municipal de sa ville natale du PPA-MTLD de Messali Hadj de 1945 à 1949, il participe au casse de la poste 2006. Ces rébellions ont abouti le 22 mars 2012 à un coup d’Etat militaire au Mali, et, le 6 avril 2012, à l’indépendance du Nord de ce pays, l’Azawed, proclamé par le MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawed), proche des islamistes et de l’AQMI (Al Quaïda au Maghreb Islamique) qui a enlevé sept diplomates algériens du consulat de Gao. Le coup d’Etat comme la partition ont été rejetés en bloc par une grande partie de la communauté internationale. ECONOMIE ET SOCIETE Au 1er janvier 2012, l’Algérie compte 37,1 millions d’habitants, alors qu’elle a été de 36,3 millions en janvier 2011, avec un taux d’accroissement de 2,04 en 2011 (source Office Nationale des Statistiques). La hausse du SMIC est passée de 15.000 à 18.000 DA à compter du 1er janvier 2012, avec diverses revalorisations des pensions de retraites dont le montant ne saurait être inférieur à 15.000 DA. En avril 2011, il y a eu le premier recensement économique (hors agriculture) par l’ONS dont les premiers résultats publiés en février 2012 révèlent les données suivantes: le secteur tertiaire (commerces de gros et de détail, services, transport) représente 90% des activités et est aux mains de très petites entreprises familiales. Les 10% restants à l’industrie se caractérise par essentiellement des unités agroalimentaires, la fabrication des produits d’Oran en 1949. Arrêté, jugé et condamné à 7 ans de prison, il s’évade en 1952 pour se réfugier au Caire. Un des chefs historiques du FLN ayant déclenché la guerre d’Algérie le 1er novembre 1954, il est arrêté le 22 octobre 1956 (avec quatre de ses compagnons) par les autorités françaises qui ont détourné son avion. Prisonnier en France, il est libéré à l’indépendance de l’Algérie en 1962 et rentre à Alger où il est désigné président du conseil du nouvel Etat. En septembre 1963, après l’adoption de la première constitution du pays, il est élu président de la République. Le 19 septembre 1965, il est renversé par un coup d’Etat du colonel Houari Boumedienne, emprisonné jusqu’en juillet 1979 puis assigné à résidence jusqu’à octobre 1980. En 1981, il s’exile en Suisse où il fonde un parti d’opposition, le MDA (Mouvement pour la Démocratie en Algérie). A la faveur du multipartisme instauré en 1989, il revient à Alger le 27 septembre 1990. Il est progressivement réhabilité. Son décès a suscité une émotion mitigée, mais le chef d’Etat a eu droit à des funérailles nationales en présence du président Abdelaziz Bouteflika et des présidents et chefs de gouvernement du Maghreb (Maroc, Tunisie, République Sahraouie). Un deuil national de huit jours a été également décrété. métalliques et l’habillement. On remarque aussi très peu d’entreprises de BTP dans un pays en chantier. L’enquête de l’ONS a fait ressortir l’exécrabilité du climat des affaires en Algérie. La récurrente question liée au foncier et au crédit, les lenteurs administratives et la disponibilité d’une main-d’œuvre qualifiée ont été les principales préoccupations des opérateurs économiques. Quant au secteur de l’informel, en particulier l’agriculture, il représente 50 à 60% de l’économie. La récolte céréalière pour la campagne 20102011 a été de 42 millions de tonnes, soit une baisse par rapport à la précédente (45 millions). La facture alimentaire ne cesse d’augmenter. Cependant, le ministère de l’agriculture qui a donné ces chiffres a annoncé en janvier une croissance agricole 2011 en hausse de l’ordre de 10,6% (25,3 millions de tonnes), contre 8,5 en 2010. Mais la production locale couvre 70% des besoins. Par ailleurs, le taux d’inflation est passé à 4,5% en 2011 contre 3,9 % en 2010 (Office National des Statistiques) et le pouvoir d’achat connait une érosion accrue par la dévaluation (‘’dépréciation’’ selon la terminologie officielle) du dinar de l’ordre de 10% en 2012. Le taux de chômage est de 8,5% en 2011 selon l’organisation internationale du travail, soit le plus faible des pays du Maghreb. Mais le taux reste élevé pour les jeunes dont les différentes formules utilisées à leur égard restent L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 Abdelhamid Mehri Né le 3 avril 1926 à El Harrouch (Skikda), décède le 30 janvier 2012 à Alger. Il était une des figures marquantes du mouvement national, avec entre autres la fonction d’ancien ministre du GPRA (1959-1962), ministre de l’information et de la culture en Algérie indépendante (mars 1979-mars 1984), ambassadeur dans plusieurs pays dont en France entre 1984 et 1988, et figure politique d’envergure depuis octobre 1988 (SG du FLN entre 1988 et 1996), dans l’opposition depuis. 244 MAGHREB CULTURE Le nouveau billet de 2000 dinars algériens. L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 précaires, 10, 9%. Le nouveau billet de banque de 2000 dinars n’a pas réglé le problème du manque de liquidités dans les postes et banques dans un pays où tout se paye cash et où le paiement électronique vient d’être timidement introduit. Cependant, la position financière de l‘Algérie a été renforcée en 2011, avec l’accumulation de 182,22 milliards USD de réserves de change et la baisse de sa dette extérieure à 4,40 milliards USD (Source Banque d’Algérie). Dans un rapport du FMI de 2012, l’Algérie devient, après l’Arabie Saoudite, le second plus gros détenteur de réserves de change de la région MENA (Moyen Orient Afrique du Nord). Les estimations du FMI prévoient une évolution favorable des réserves de change du pays, en dépit des turbulences de la zone euro et de la baisse du cours des hydrocarbures dont on annonce régulièrement des découvertes y compris dans le nord du pays et les premières explorations du gaz de schiste, source d’énergie non conventionnelle. Au titre de l’exercice 2011, les chiffres du commerce extérieur se présentent comme suit: exportations 76,8 milliards de dollars, importations 20,2 milliards de dollars avec un accroissement des dépenses alimentaires, solde: 19,6 milliards de dollars (source Douanes Algériennes). Timimoun, capitale des déserts du monde (lcc Taguelmoust). D’autres faits sont à souligner: l’inauguration du métro d’Alger en novembre 2011, le deuxième en Afrique après celui du Caire; quant au phénomène des kidnappings, apparu en 2005, il s’est accentué. La célébration de la décennie des déserts et de la lutte contre la désertification 2010-2020 a été organisée à Timimoun (Algérie), choisie comme capitale des déserts du monde pour sa riche biodiversité. Il est à souligner que, d’une part, plusieurs régions de l’Est algérien sont menacées par la désertification, et, d’autre part, la moitié de l’Afrique est menacée; si le rythme de dégradation se poursuit, le continent risque de perdre les deux-tiers de ses terres arables à l’horizon 2025. L’année 2012 a été d’une extrême fécondité. ‘’Tlemcen, capitale de la culture islamique en 2011’’ a été clôturé en avril 2012. D’un montant de 125 milliards de dinars, le bilan présenté par le ministère de la culture est le suivant: 280 livres ont été édités, 32 documentaires produits, 12 colloques internationaux organisés et des dizaines de pièces théâtrales représentées. En dépit de la promulgation de la nouvelle loi sur l’information en janvier 2012, plutôt décriée par la presse écrite privée, le paysage audiovisuel algérien ne connaît pas encore de télévisions privées, malgré les chaînes ‘’offshore’’ émettant par satellites à partir de Londres ou des pays du Proche-Orient. L’Ambassadeur de France, accompagné du wali (préfet) d’El Tarf, a inauguré le 23 janvier 2012 une plaque commémorative placée à l’entrée de la maison natale de Camus à Dréan (ex-Mondovi). La célébration/commémoration de la fin de la guerre d’Algérie ou de l’Indépendance de ce Tlemcen, capitale de la culture islamique. pays a suscité de nombreuses manifestations et parutions d’ouvrages au niveau des deux pays. Citons particulièrement la commémoration du cinquantenaire de la mort de Frantz Fanon, Mouloud Feraoun et Jean Amrouche. Autre fait à retenir: le conseil national des Arts et des Lettres, une institution chargée notamment de la délivrance de la carte d’artiste, a été installé officiellement le 5 avril 2012 à Alger. En matière littéraire, la trilogie « Algérie » de Dib a été traduite en arabe (Alger, Sedia, 2011) après la Syrie et Le Liban, mais les dialogues sont en arabe dialectal. C’est là une originalité car c’est la première fois que les deux langues arabes, la scripturale et la vernaculaire, cohabitent en un heureux travail de (re)création. Sous le titre ‘’Le Contraire de l’amour’’, une trentaine de pages du ‘’Journal’’ de Mouloud Feraoun (qui a été réédité en août 2011 aux Editions du Seuil, dans la collection ‘’Points’’) a fait l’objet d’une adaptation théâtrale par Dominique Lurcel au Festival d’Avignon 2011. Ce monologue a été présenté avec succès à Alger le 26 octobre 2011 puis dans d’autres villes de France. Retenons aussi la mise en scène par Kherredine Lardjem des entretiens de Kateb publiés sous le titre ‘’Le poète comme un boxeur’’, au Centre MAGHREB ALGERIE GEOGRAPHIE Deuxième plus grand pays d’Afrique, occupé à près de 85 % par le désert (Sahara). Seulement 3 % des terres sont cultivées. Grandes ressources pétrolifères. HISTOIRE 1830 Prise d’Alger : début de la colonisation française. 1954-1962 Guerre franco-algérienne, qui prend fin avec les accords d’Evian (18 mars) et l’indépendance (1er juil.). 1963 Ahmed Ben Bella, président. 1965 Coup d’Etat de Houari Bou-médiène. 1979 Chadli Bendjedid lui succède. 1988-1991 Montée du FIS (Front islamique du salut), qui l’emporte aux municipales de 1990. Aux législatives de 1991, le FIS va vers la majorité absolue ; le processus électoral est interrompu. Début du terrorisme. 1992 Assassinat du président Boudiaf. 1995 Liamine Zéroual est élu président de la République. Les assassinats se succèdent malgré la répression. 1996 Référendum constitutionnel renforçant les pouvoirs du président. 1999 Démission du président Zéroual. Abdelaziz Bouteflika, lui succède, et obtient 98,5 % de « oui » au référendum sur la concorde civile. 2002 Agitations violentes en Kabylie. Elle a reçu deux prix pour son film ‘’Mollement, un samedi matin’’, lequel narre les tribulations d’une jeune femme aux prises avec un paumé et le fonctionnement de la société algérienne. Il a été diffusé le 24 janvier 2012 sur les chaînes de télé françaises France 3 et Arte. Un autre film documentaire de 30 mn sur Germaine Tillion a été réalisé et projeté à Alger (mai 2012) par Yacef Saadi, un des personnages historiques de ‘’La Bataille d’Alger’’. Quant au film ‘’Le Repenti’’, de Merzak Allouache, racontant le parcours d’un repenti bénéficiaire des lois de l’amnistie et de la concorde civile, il a reçu le prix «Label Europa Cinémas» décerné à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes (mai 2012). Enfin, il convient de retenir la disparition du journaliste francophone Abdou Benziane (19442011). Signant Abdou B, le défunt a été le fondateur de l’unique revue bilingue de cinéma et de télévision, Les Deux Ecrans (1978-1983) et directeur de la télévision algérienne (1990-1991 et 1993-1994) qu’il a rénovée. Il était une figure talentueuse de la vie culturelle algérienne. SPORT Durant la saison sportive 2011-2012, le sport algérien n’a cessé de reculer, sinon de s’enliser. Aux 10 èmes Jeux africains de Maputo (Mozambique) de septembre 2011, l’Algérie s’est classée à la cinquième place, devancée par l’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Egypte et la Tunisie. Elle n’a brillé qu’en boxe où elle a réussi une performance exceptionnelle de 7 médailles dont 3 en or, soit la meilleure équipe du tournoi. L’Algérie a terminé également à la cinquième place au classement général des 12èmes Jeux arabes de Doha (Qatar) avec un total de 88 médailles dont 16 en or, loin derrière l’Egypte, la Tunisie, le Maroc et le Qatar. Ce sont les plus mauvais résultats enregistrés lors participation précédentes à ces Jeux régionaux. Aux derniers championnats d’Afrique de judo organisés en mai 2012 à Agadir (Maroc), aucun résultat notable n’a été enregistré. Enfin, aux jeux olympiques de Londres 2012, seulement deux judokas ont été qualifiés pour y participer, de même que l’équipe nationale féminine de volley ball. Le marasme du sport algérien est encore aggravé par les marchandages de match et des arbitrages scandaleux qui ont généré des actes de violences et de vandalisme dans les stades, particulièrement après les rencontres de football. Ce dernier sport s’est vu aussi éclabousser par des révélations de pratique de dopage de certains joueurs internationaux de la décennie 1980 – âge d’or du football algérien - dont la progéniture souffre de déficiences physiques. Deux lueurs sont à souligner à ce sombre tableau: d’une part, du 12 au 14 mars 2012, retour d’une épreuve populaire avec l’organisation du tour cycliste de l’Algérie du nord, avec la participation de 118 coureurs de 15 nations; d’autre part, plusieurs Algériens ont été nommés aux commissions permanentes de la Fédération International de Football. } L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 Culturel Français d’Alger, devenu l’Institut français depuis le 1er janvier 2012. Signalons que l’Algérie a adhéré au réseau des instituts culturels des Etats membres de l’Union européenne, l’EUNIC (European Union National institut For culture). Des écrivains algériens continuent toujours d’être distingués: le romancier algérien Yasmina Khadra, dont l’adaptation du roman Ce que le jour doit à la nuit (Julliard, 2009) par Alexandre Arcady sera sur les écrans en septembre, a été récompensé par la fondation américaine Time For Peace qui lui a décerné le 26 janvier 2012 son prix littéraire lors d’une cérémonie au siège du Parlement européen à Bruxelles (Belgique). Le poète Amin Khan, pour le même recueil Arabian blues (SaintBrieuc, Editions MLD, janvier 2012) a obtenu en juin 2012 deux prix: le premier Prix Méditerranée de la Poésie Nikos Gatsos et le Prix François Coppée attribuée par l’Académie française. Dans le domaine cinématographique, l’année est entamée en janvier 2012 par la sortie réussie public et medias- du film documentaire ‘’El Gusto’’, de la réalisatrice Safinez Bousbia, 30 ans, racontant l’histoire des anciens élèves-musiciens juifs, chrétiens et musulmans de Cheikh El Anka, maitre du chaâbi, une musique populaire algérienne de la Casbah d’Alger. Le festival international du court métrage de Clermont-Ferrand, une référence en la matière, a couronné en février 2012 une jeune réalisatrice algérienne, Sofia Djama, 32 ans. 245 246 MAGHREB MAROC L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 Ahmed ISMAÏLI Professeur honoraire, université de Meknès [email protected] Un Premier ministre controversé Né en 1954 à Akkari, un quartier populaire de la capitale et dans une famille proche de l’Istiqlal, Benkirane s’inscrira à l’Ecole Normale Supérieure de Rabat après avoir suivi sans succès des études POLITIQUE d’ingénieur. Il devient professeur de physique et membre, dans les années 70, de la Chabiba IslaLa classe politique marocaine se mobilise à la veille des élections législatives anticipées en rai- miya (Jeunesse islamique), un mouvement passason de l’agitation qui secoue le pays suite au prin- blement rétrograde. Dix ans plus tard, il participe temps arabe. Ainsi, un front de refus regroupant à une manifestation contre la condamnation à le mouvement du 20 février, le Parti Socialiste mort de ses amis impliqués dans l’assassinat de Unifié (PSU), le Parti d’Avant-garde Démocra- l’ingénieur, journaliste, avocat et syndicaliste de tique et Socialiste (PADS), la Voix Démocratique gauche Omar Benjelloun, perpétré le 11 décembre (gauche radicale) Al Badil al hadari, Alternative 1975. En 1981, il fonde Al Jamaa al islamiya, qui Civilisationnelle (constituée d’islamistes et devient Réforme et renouveau, et rejoint Abdelkrim d’anciens gauchistes), et Justice et Bienfaisance El Khatib, autre figure de l’islamisme marocain. (islamistes plutôt antimonarchistes) décide, dès Viscéralement anticommuniste, il tente de parfin septembre 2011, de ne pas se rendre aux urnes. tir en Afghanistan pour participer aux côtés des Ces opposants estiment en effet que les membres moujahidin à la lutte contre les Soviétiques, alliés, de la commission chargée d’élaborer à l’époque, du régime marxiste instauré à Kaboul. A présent, il semble la nouvelle Constitution devraient être élus, au lieu d’être désignés oublier ce pays envahi notamment par le Palais qui garde pratiquepar les forces américaines. ment toutes ses prérogatives. En Au début des années 90, El Mosrevanche, une alliance entre huit tafa Ramid, l’un de ses lieutenants, actuellement ministre de la Justice partis (baptisée G8) sous la direction de M. Salaheddine Mezouar, et des libertés, établit une relaministre des Finances, se lance dans tion régulière avec Driss Basri, le la campagne le 5 octobre 2011 pour redoutable ministre de l’Intérieur maintenir le statu quo et barrer le de Hassan II. Chargé de rédiger un rapport sur la mouvance islamique, chemin aux islamistes du PJD (Justice et Développement). Il s’agit Ramid élabore un document assez d’un conglomérat d’éléments dispacritique vis-à-vis de Justice et Bienrates qui n’ont rien de commun au Abdelilah Benkirane, chef du faisance qui conteste la légitimité de niveau idéologique: conservateurs, trentième gouvernement maro- la monarchie marocaine. « progressistes » et islamistes qui cain depuis l’indépendance. En 1997, Basri reçoit El Khatib, avaient quitté le PJD. Benkirane, Saadeddine El Othmani Monarchiste et conservateur, lui aussi, tout (actuellement ministre des Affaires étrangères) et en se situant dans l’opposition depuis douze Lahcen Daoudi (l’actuel ministre de l’Enseigneans, ce même PJD parvient à réaliser un score ment supérieur, de la Recherche scientifique et historique le 25 novembre 2011, où le taux de de la Formation des cadres) et leur suggère de participation s’élève à 45 % des 13,5 millions présenter des candidats pour les élections légisd’électeurs. Il passe en effet de 47 à 107 sièges latives, dans quelques circonscriptions. Les amis sur 395 à la chambre des représentants. Il est de Benkirane obtiendront, malgré les restrictions suivi de l’Istiqlal (nationaliste, 60 sièges), imposées, quatorze sièges au Parlement. Abderle PAM (proche du Palais, 47 sièges), l’USFP rahmane Youssoufi, leader socialiste et chef du (socialiste, 39 sièges) et de divers partis de gouvernement d’alternance sous Hassan II, leur droite: Mouvement Populaire (32 sièges) et proposera un ministère. Cette offre sera dédaiUnion Constitutionnelle (23 sièges) gneusement rejetée. Conformément à la nouvelle Constitution, le roi Au lendemain des cinq attentats suicides du charge le secrétaire général du PJD, M. Abdelilah 16 mai 2003, perpétrés par une dizaine d’islaBenkirane, le 3 janvier 2012, de former le 30e gou- mistes radicaux, originaires d’un bidonville de vernement marocain depuis l’Indépendance. La Casablanca (41 morts et une centaine de blesnouvelle équipe compte une seule femme, Mme sés), certaines voix réclament l’interdiction du Bassima Hakkaoui, ministre de la Solidarité, de la PJD. Mais quelques années après la tempête, en 2007, Mohamed VI reçoit El Othmani. Famille et du Développement Social. Une véritable Les adversaires de Benkirane le trouvent popurégression dans la mesure où le gouvernement précédent comprenait sept dames. liste, démagogue, réactionnaire, opportuniste, MAGHREB MAROC GEOGRAPHIE Pays au relief diversifié (montagnes, riches plaines, désert) ; double ouverture maritime : Méditerranée et Atlantique. Agriculture, tourisme, mines (3e pays producteur de phosphate). HISTOIRE VIIIe-XVe s. Conquête par les Arabes qui imposent l’islam aux Berbères. Les dynasties arabes et berbères se succèdent. 1830-1912 Pénétration européenne. 1912 Protectorat français. Le maréchal Lyautey, résident général (1912-1925). 1956 (3 mars) Indépendance. Le sultan Mohammed V devient roi. 1962 Couronnement du roi Hassan II, chef d’Etat et commandeur des croyants. 1979 Occupation par le Maroc de l’ensemble de l’ancien Sahara espagnol, contestée par le Front Polisario qui a l’appui de l’Algérie. 1992 (sept.) Révision de la Constitution. 1993 Elections législatives. 1996 Révision constitutionnelle visant au bicaméralisme, voté en 1998. 1999 (23 juil.) Mort d’Hassan II. Son fils Mohammed VI lui succède. 2000 Entrée en vigueur de l’Accord d’Association avec l’UE. 2002 (sept.) Elections législatives. Driss Jettou, nouveau premier ministre. 2003 (mai) Une loi anti-terroriste est votée. certaine, notamment auprès des classes défavorisées. Mais il a dilapidé ce capital de sympathie à force d’opportunisme, de compromissions et de corruption. Le déclin du parti est sans doute lié aussi à la répression policière et à l’effondrement du Bloc socialiste. Contrairement à l’USFP, l’Istiqlal et les dirigeants du PPS (communistes) consentent à se rallier au PJD, en dépit de l’indignation de l’aile gauche de ce parti allergique aux islamistes. Ainsi, ne parvenant pas à adopter une position commune au sujet de la participation au gouvernement Benkirane, la Koutla (Bloc National composé de l’Istiqlal, de l’USFP et du PPS) éclate. On assiste également à la désintégration du G8 qui subit un échec cuisant aux élections législatives. Quant au mouvement du 20 février, il continue à manifester sporadiquement nonobstant le retrait de Justice et Bienfaisance qui constituait le plus gros de ses troupes, et en dépit des agressions perpétrées par des bandes de jeunes se disant monarchistes. Persuadés que la liberté d’expression est menacée, les intellectuels et les artistes expriment leur inquiétude, d’autant plus que des publications étrangères ont été censurées (L’Express, El Païs, Le Nouvel Observateur) sous prétexte qu’elles « portaient atteinte aux valeurs sacrées » du pays. Pour les syndicalistes, même le droit de grève est remis en cause par le nouveau gouvernement. Mais avant même la mise en place de la nouvelle équipe, le roi procède à la nomination de nouveaux ambassadeurs et s’entoure de nombreux conseillers, dont Fouad Ali El-Himma, ami d’enfance du monarque, régulièrement décrié par le mouvement du 20 février. Il fait appel aussi à d’anciens ministres tels que Taïeb Fassi-Fihri (Affaires étrangères) et Yassir Zenagui (Tourisme). Selon certains observateurs, le vrai pouvoir continuera à être exercé par le Palais. Campagne anti-corruption Le gouvernement Benkirane fait de la lutte contre la corruption et l’économie de rente l’une de ses priorités. Dans cette perspective, il publie la liste des détenteurs de licences de transport: des sportifs, des artistes, d’anciens combattants, mais aussi des individus impliqués dans l’enlèvement et le meurtre du militant de gauche, Mehdi ben Barka. On presse le même gouvernement de divulguer également les noms de ceux qui raclent les carrières de sable et le fond de la mer avec leurs chalutiers. En attendant, le nouveau ministre de l’Enseignement supérieur étale au grand les irrégularités et scandales qui ont entaché le mandat de son prédécesseur Ahmed Akhchchine, ancien gauchiste devenu ultérieurement haut responsable du PAM (Authenticité et Modernité). De même, la Cour des Comptes diffuse un rapport accablant sur certains hauts responsables politiques et administratifs. Coupable de détournement de fonds et de dilapidation des deniers publics, l’ancien ministre socialiste Khalid Alioua sera jeté en prison au même titre que Abdelhamid Benalou, ex-PDG de L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 provocateur, bavard et impulsif. Il demeure, cependant, assez habile, souvent prêt à reculer pour mieux sauter. Il a le sens de la communication et insiste inlassablement sur sa volonté de gagner la confiance du monarque, même si celui-ci aurait, selon les révélations de wikiLeaks, mis en garde les Américains contre tous les islamistes. Il convient de rappeler ici que, de son côté, le premier ministre sortant, Abbas El Fassi (Istiqlal), répétait invariablement que son programme était celui du roi. Ajoutons que pendant l’élaboration de la nouvelle Constitution, Benkirane s’opposait farouchement au principe de liberté de conscience. Il mettait l’action sur la question de l’identité nationale. Les socialistes refusent de participer au gouvernement Benkirane. Driss Lachgar, l’un des ténors de l’USFP se plaît désormais à comparer l’arrivée au pouvoir des islamistes, dans divers pays de la région, à la faveur du printemps arabe, à celle des fascistes en Europe entre les deux Guerres. Difficile, cependant, de prendre M. Lachgar au sérieux: il s’était hâté d’accepter le portefeuille de ministre des Relations avec le Parlement le 4 janvier 2010 après avoir reproché longtemps à ses amis socialistes d’adhérer à un exécutif résolument conservateur. Il convient de rappeler ici que jusqu’aux années 90, l’USFP, appelé autrefois l’UNFP, bénéficiait d’une popularité 247 248 MAGHREB L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 l’Office National des Aéroports, et Tawfik Ibrahimi, ex-PDG de la société de navigation Comanav, responsables, eux aussi, de manœuvres douteuses. Il s’agit également de mener une guerre sans merci contre les caisses noires. Ainsi, l’ex-ministre de l’Economie et des Finances et ennemi juré du PJD, Salaheddine Mezouar, est montré du doigt. En plus de son salaire, il se faisait octroyer une prime mensuelle de 88000 dirhams par le trésorier général du Maroc, qui percevait, à son tour, une prime complémentaire de 32000 dirhams par mois, puisés dans un mystérieux « fonds particuliers ». Controverse sur les chaînes de tv En avril 2012, Mustapha El Khalfi, ex-directeur du journal Attajdid (Renouveau) et actuel ministre de la Communication expose publiquement les nouveaux cahiers des charges des deux chaînes publiques marocaines, instruments de propagande saturés de publicité. Les adversaires de ce projet n’en retiendront que la volonté d’accorder plus de place à la religion et à l’arabe classique. Or, M. El Khalfi a au moins le mérite de lancer le débat sur deux institutions souffrant de maux multiples: opacité, gaspillage et programmes d’un niveau plutôt affligeant. Les attaques contre M. El Khalfi fusent de partout. A commencer par certains membres du gouvernement de coalition où des ministres, tels que Nabil Benabdallah (PPS), reprochent à leur confrère de n’avoir consulté personne avant de présenter son projet. L’Istiqlal et le Mouvement Populaire manifestent eux aussi leur mécontentement. Les critiques émanent également de certains responsables de la seconde chaîne comme l’inamovible PDG du pôle audiovisuel (Faiçal Laraïchi), la directrice de l’information (Samira Sitaïl), et un troisième directeur qui sort curieusement de l’ombre (Salim Cheikh). Ils insistent sur la tolérance et la diversité culturelle du Maroc. Des fonctionnaires qui refusent de se soumettre aux instructions de leur ministre de tutelle. Du jamais vu. Larbi Messari, ancien ministre de la Communication qui a échoué lui aussi lamentablement à réformer les deux chaînes, parle d’un puissant lobby, hostile à tout changement. Il rappelle que ce même lobby, qui se pique d’ouverture et de tolérance, a poussé, il y a quelques années, une foule fanatisée à organiser une manifestation d’une rare violence contre le défunt Journal hebdomadaire, une publication francophone et progressiste, accusée d’avoir reproduit une caricature du Prophète. Soufflant le chaud et le froid, Benkirane prononce un discours devant les sympathisants de son parti pour dénoncer avec véhémence l’entourage du roi. Oubliant son hostilité au mouvement du 20 février, il affirme que le « printemps arabe » ne s’est pas encore achevé, et que les monarques s’entourent souvent d’éléments dangereux qui leur portent préjudice et les abandonnent précipitamment, en cas de péril. Il sera convoqué au Palais et finira par minimiser l’affaire des cahiers des charges. Première défaite du nouveau gouvernement. Quelques jours plus tard, M. Ahmed Ghazali, qui n’a pas prévu la tempête, sera démis de ses fonctions de président de la HACA (Haute Autorité de la communication audiovisuelle). Le roi le remplacera par Mme Amina Lamrini et M. Jamal Eddine Naji, deux anciens gauchistes. Toujours le contentieux avec l’Algérie Par ailleurs, les socialistes reprochent à Benkirane son incapacité de tirer le meilleur profit de la nouvelle Constitution. Ainsi, contrairement à l’esprit de la loi fondamentale, il laisse le Palais se tailler la part du lion au niveau de la nomination des hauts fonctionnaires. En effet, ce dernier désigne les directeurs de dix-sept institutions vitales comme l’OCP (Office Chérifien des Phosphates), la RAM (Royal Air Maroc), l’ONCF (Office National des Chemins de Fer)... Sur le plan diplomatique, le nouveau gouvernement s’efforce d’améliorer les rapports du royaume avec ses voisins. Ainsi, dès le début de février 2012, le Maroc reçoit le président tunisien, M. Moncef Marzouki, dans l’espoir de réchauffer les relations entre Rabat et Alger, rouvrir les frontières et ressusciter l’UMA (Union du Maghreb Arabe), cadavre inerte depuis 1994. Dans cette perspective, El Othmani, ministre des Affaires étrangères, se rend en Algérie d’abord en janvier, puis en avril 2012 à l’occasion des obsèques d’Ahmed ben Bella. Il est accompagné de Benkirane, El Fassi-Fihri et Aït Idder, militant de gauche et grande figure du nationalisme marocain. A leur retour, un communiqué officiel apprend aux Marocains que cette délégation a quitté précipitamment Alger pour protester contre la présence de certains membres du Polisario à la cérémonie. Les Algériens rétorquent qu’au cours des funérailles de Hassan II à Rabat, en juillet 1999, le président Bouteflika s’est retrouvé en face du premier ministre israélien. Il a été obligé de lui serrer la main. Mais la délégation algérienne n’a pas claqué la porte, même si Alger n’entretenait pas de relations diplomatiques avec Tel-Aviv. De nouveau, le ton monte entre les deux pays du Maghreb. On peut se demander dans ces conditions si la réconciliation est toujours à l’ordre du jour. Cependant, vers la fin de février 2012, trois membres du Polisario intègrent le Conseil National du PAM, le parti le plus proche du Palais. La même formation politique élit comme secrétaire général M. Mustapha Bakkoury, technocrate, financier notoire et ancien PDG de la Caisse de Gestion et de Dépôt (CGD) chargée de conserver et de gérer d’énormes ressources d’épargne. Au début du mois de mars 2012, M. El Othmani part à la tête d’une délégation aux Etats-Unis pour reprendre les habituelles et stériles négociations avec le Front Polisario. Le Maroc se sent d’ailleurs obligé de se procurer de nouvelles armes. Dans ce domaine, il est classé second en Afrique, juste après l’Algérie. En avril, un malentendu surgit entre le royaume et l’ONU au sujet du rôle de la MINURSO (Mission des Nations Unies pour l’Organisation d’un MAGHREB la politique à court terme du gouvernement. Il met en évidence le déficit budgétaire, le déséquilibre chronique de la balance commerciale (qui atteint 112 milliards en août 2011), désapprouve l’augmentation des salaires et les recrutements immodérés dans la fonction publique. Il attire l’attention également sur la hausse des importations (+20,7%) concernant notamment les denrées alimentaires, les produits manufacturés et les hydrocarbures (+26%). Afin de remédier à cette situation, le nouveau gouvernement s’attaque, en premier lieu, au problème de la Caisse de Compensation, véritable gouffre qui absorbe 52 milliards de dirhams en 2011 (3,4 milliards consacrés à la farine et au blé tendre, 5 milliards au sucre et 43 milliards aux hydrocarbures), et qui profite essentiellement aux plus riches. Il décide d’augmenter le prix de l’essence, du gasoil et du fuel industriel. Il envisage également de fournir, d’une manière directe, des allocations aux couches les plus démunies de la population, bien que cette option semble, à première vue, difficile à mettre en œuvre. Par certains côtés, la politique économique du royaume peut paraître volontariste. Ainsi, dès 2007, Référendum au Sahara Occidental) qui entend contacter librement les Sahraouis et leurs associations. Rabat dénonce aussi l’attitude de l’envoyé personnel du secrétaire général des NationsUnis pour le Sahara, l’Américain Christopher Ross, suspect de déborder le cadre de sa mission. Toutefois, Mme Hillary Clinton effectue, en février 2012, une visite officielle au Maroc où elle s’entretient avec le conseiller du roi, El FassiFihri, avant El Othmani, et pose la première pierre du nouveau bâtiment de l’ambassade des Etats-Unis, un projet estimé à un milliard de dirhams. De son côté, arrivé au Maroc au début de mars 2012, Alain Juppé, ministre français des Affaires étrangères, approuve clairement le projet d’autonomie du Sahara proposé par Rabat. La socialiste Martine Aubry lui emboîtera le pas et discutera avec le roi et le premier ministre de la situation politique et économique du royaume. Après sa défaite aux élections prési- Le projet de TGV marocain ne rallie pas tous les suffrages. dentielles françaises, Nicolas Sarkozy atterrit avec sa compagne à Marrakech. Ulcérés Renault-Nissan a signé des accords avec l’Etat mapar ses positions de plus en plus similaires à rocain en vue d’édifier une usine de production celles du Front National, beaucoup de Marocains automobile dans la région de Tanger. En vertu de se réjouissent de sa débâcle. Reste à savoir quelle ces accords, le pays devait exporter 400 000 voiposition adoptera M. Hollande vis-à-vis de la ques- tures par an. De même, la première ligne de TGV au tion épineuse du Sahara. Signalons à ce propos que Maroc est inaugurée le 29 septembre 2011, en présence de Mohamed VI et de Nicolas Sarkozy. Mais Mohamed VI est le premier chef d’Etat à être reçu par le nouveau président français. de nombreux militants de la société civile s’élèvent contre ce programme considéré comme excessivement onéreux pour un pays où le taux de chômage ECONOMIE D’une manière inattendue, Abbas el Fassi, le pre- et d’analphabétisme reste particulièrement élevé, mier ministre sortant, retire à la dernière minute, et où des secteurs de la plus grande importance, le projet de loi de finances censé être débattu au comme la santé et l’enseignement public, manquent Parlement, et ce, afin de permettre à Salaheddine cruellement de moyens. Par ailleurs, lors d’une visite officielle à Rabat Mezouar, à la fois ministre de l’Economie et chef du Rassemblement National des Indépendants, de le 24 novembre 2011, l’émir du Qatar laisse ense consacrer à la campagne électorale. La même tendre que son pays projette d’investir plusieurs loi de finances sera adoptée sans modification milliards dans le tourisme au Maroc, un secteur notable en mars 2012. qui commence à souffrir énormément de la crise Mais déjà en septembre 2011, Abdelatif Jaouhari, économique mondiale. gouverneur de la Banque Centrale, présente son D’autres secteurs sont, au contraire, en plein rapport pour l’année 2011 où il évoque la situa- essor. Ainsi, les bénéfices de Maroc Télécom, qui tion critique de l’économie marocaine et réprouve se développe aussi bien dans le royaume que L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 Renault s’est implanté à Tanger. 249 L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 250 MAGHREB d’autres pays africains (Mauritanie, Mali, Gabon, mouvement du 20 février, comparaît, en présence Burkina Faso), atteignent 8 milliards de dirhams. de plusieurs sympathisants, devant un tribunal de Le nombre des abonnés au téléphone portable Casablanca. Dans ses clips, ce militant de vingtaugmente considérablement (29 millions en 2012, quatre ans se permet de critiquer ouvertement le soit une progression de 12% par rapport à 2011). pouvoir. Libéré après avoir purgé une peine de Dans le domaine des phosphates également, les quatre mois de détention, il sera remis en prison. résultats obtenus sont particulièrement satisfaiCependant, la société civile se montre souvent sants (16,3 milliards de dirhams correspondant vigilante. En effet, des associations féministes se à un production totale de 28 millions de tonnes). mobilisent suite au suicide d’Amina Filali, mariée En revanche, l’accord de pêche entre le royaume de force, conformément à une loi contestée, à son et l’Union Européenne n’est pas renouvelé. Les violeur. Beaucoup de militants estiment que ce bateaux de pêche européens sont alors priés de dernier devrait être plutôt poursuivi en justice. quitter les eaux territoriales marocaines. Néan- De son côté, le collectif « Démocratie et modernité » moins, l’UE offre au Maroc en avril 2012 la somme relance le débat sur la laïcité et la liberté de culte. de 80 millions d’euros destinés à l’accompagnement socioéconomique du pays. CULTURE Signalons également la tenue du Salon Interna- L’invité d’honneur du Salon International de l’Edition tional de l’Agriculture à Meknès en avril 2012, dont et du Livre, qui ouvre ses portes le 10 février 2012, l’invité d’honneur est le Canada. Mais la campagne est l’Arabie Saoudite. D’autre part, l’arrivée au pouagricole s’annonce assez médiocre en raison du voir des islamistes, qui parlent de « culture propre », déficit pluviométrique, même si des précipitations suscite beaucoup d’inquiétude chez les intellectuels tardives semblent bénéfiques pour les arbres frui- et les artistes. M. Boulif, l’un des ministres proches de Benkirane a bien donné le ton tiers. M. Aziz Akhnouch, ministre en déclarant à la presse qu’il ne de l’Agriculture annonce en avril voulait pas être obligé de se voiler qu’il prévoit au niveau des récoltes céréalières 48 millions de quintaux. la face en regardant, en famille, un Mais beaucoup de prévisions sont film marocain. revues à la baisse. Pendant la camCependant, les festivals se pagne électorale, le PJD promettait multiplient, alors que de plus en plus de salles obscures ferment un taux de croissance de 7%. Selon les dernières estimations, il serait leurs portes, faute de clients. Au de l’ordre de 2%. lieu d’aller au cinéma, beaucoup Notons enfin que Mme Meriem de Marocains préfèrent, en effet, Bensalah, directrice des eaux suivre les émissions des chaînes minérales d’Oulmès, est élue satellitaires ou regarder des le 16 mai 2012, présidente de films DVD chez eux. la Confédération Générale des Le Festival International du Entreprises du Maroc (CGEM). Film de Marrakech a eu lieu en Ainsi, les patrons sont apparem- Mort à vendre, primé à Berlin. décembre 2011, celui du court ment favorables à la parité genre métrage à Tanger en janvier au sein de leur confédération. 2012. Parmi les récents longs métrages dont on a beaucoup parlé cette année, on peut citer Omar m’a tuer de Roschdy Zem (l’histoire du jardinier SOCIETE A l’instar d’autres pays arabes, le Maroc connaît marocain accusé d’avoir assassiné sa patronne une certaine agitation. Ainsi, des affrontements française), Les Hommes libres d’Ismael Ferroukhi (des Musulmans ont protégé des Juifs en France, se produisent entre les forces de l’ordre et des diplômés chômeurs le 4 janvier 2012 à Taza, à l’Est pendant l’Occupation), La Source des femmes de du royaume. Plusieurs blessés et de nombreuses Radu Mihaileanu (la condition féminine et la résisvoitures brûlées. Ne parvenant pas à être recrutés tance du second sexe à la tyrannie masculine). Les metteurs en scène marocains ont réalisé de dans la fonction publique, des diplômés chômeurs s’immolent, dans différentes régions du pays, par nombreuses œuvres au cours des deux dernières années. Quelques exemples: Un Film de Mohamed le feu. D’autres incidents éclatent en février 2012 dans d’autres villes comme Tanger, Agadir et Achouar (la difficulté de trouver un sujet pour une Marrakech et Meknès, souvent après la démolition œuvre cinématographique), The End de Hicham Lasd’habitations illégales. Des émeutes ont lieu à ri (les mésaventures surréalistes d’un marginal proBouayyach, au Nord du Maroc. Les manifestants tégé par un commissaire tortionnaire et sordide), seront sérieusement condamnés. Les Mains rudes de Mohamed Asli (le petit peuple Le gouvernement décide par ailleurs de sévir recourt à des combines pour s’en sortir), Le Retour contre certaines formes de contestation. Ainsi, du fils d’Ahmed Boulane (les obstacles rencontrés incarcéré depuis le 9 septembre 2011 après avoir par un enfant de couple mixte), Andalousie, mon été accusé de coups et de blessures par un membre amour de Mohamed Nadif (une bande de filous roule de la jeunesse royale, Mourad Boulghouat, surnom- des candidats à l’immigration clandestine), Road to mé El Haqed (Le Rancunier), ouvrier et chanteur du Kaboul de Brahim Chakiri (les épreuves burlesques MAGHREB de jeunes rêvant de s’enrichir en partant illégalement à l’étranger), Agadir Bombay de Myriam Bakir (le problème de la prostitution traité sous forme de comédie), Un Marocain à Paris de Saïd Naciri (impécunieux, un jeune maghrébin se rend en France où il s’égare au milieu des trafiquants de drogue). D’autre part, Les Etoiles de Sidi Moumen, roman de Mahi Binebine portant sur les attentats terroristes de Casablanca, a été adapté à l’écran par Nabil Ayouch sous le titre Les Chevaux de Dieu. Mais le film qui semble obtenir le plus de succès est Mort à vendre de Faouzi Bensaïd (trois personnages face à la cruauté de la vie). Primé au Festival International du Film de Berlin et au Festival National du Film de Tanger, il a est projeté au cours de la séance de clôture du Festival International du Film de Marrakech. Dans le domaine de la musique également, de nombreux festivals ont été organisés: Gnaoua à Essaouira, au sud du Maroc, Jazz à Tanger (septembre 2011), musiques sacrées à Fès. Mais celui de Mawazine Rythmes du Monde est fort contesté, fondamentalement par le mouvement du 20 février qui le trouve ruineux (60 millions de dirhams, d’après le quotidien Akhbar al yawm), et propose d’organiser plutôt des séances de lecture dans des lieux publics. A Rabat, la police dispersera, à coups de matraque, les trouble-fête en leur intimant l’ordre d’aller lire chez eux. SPORT Le 13 novembre 2011, deux équipes nationales sont déclarées gagnantes de la Coupe du Trône: le CODM de Meknès et le MAS de Fès. Le même jour, l’Espérance de Tunis reçoit le Widad de Casablanca et marque un but à zéro. A l’issue du match, 251 les forces de l’ordre tunisiennes rouent de coups les supporters marocains. Vers le 20 février 2012, les Lions de l’Atlas affrontent le onze tunisien à Libreville dans le cadre de la CAN (Coupe d’Afrique des Nations). La rencontre se solde par la défaite des Marocains (2 à 0) qui seront battus également par le Gabon (3 à 2), et éliminés par la suite de la CAN. Ces déroutes successives poussent le public à se poser des questions sur le rôle d’Eric Gerets, l’entraîneur belge de la sélection nationale. La polémique enfle notamment au sujet de son salaire faramineux (2.767.617 dh par mois). On lui reproche même de ne pas payer d’impôts. Par ailleurs, certaines compétitions sont suivies de scènes de défoulement et de violence. Ainsi, à la fin du mois de septembre 2011, après un duel entre la Jeunesse de Mohammedia, venue du nord du Maroc, et la Mouloudiya de Dakhla, des centaines de Sahraouis demandent bruyamment aux autorités de déplacer les habitants du quartier Al Wakali, originaires du nord. La manifestation tourne à l’émeute. Bilan, sept morts. En février 2012, des mineurs commettent des actes de vandalisme après un match entre les FAR (Forces Armées Royales) et le Raja, puissante équipe casablancaise. Ils agressent des passants et saccagent des établissements de commerce. Le 1er avril 2012, la confrontation entre une équipe de Kénitra et le Widad de Casablanca s’achève sur une bagarre où un jeune trouve la mort. La victoire des Lions de l’Atlas sur la Libye à Jeddah, en Arabie Saoudite (3 buts à 1), réconforte, cependant, les Marocains. Elle permet à la sélection nationale de remporter la Coupe Arabe des Nations 2012. } Rédaction Année Francophone Internationale [email protected] POLITIQUE Dès le début de l'année 2011, la contestation sociale et politique d'une ampleur sans précédent depuis l'indépendance, dans le contexte des printemps arabes, a gagné de nombreuses villes du pays, avec des défilés, sit-in, grèves et occupation d'espaces publics. Mais cette contestation restée très éparse, même si elle a généré des répressions locales avec trois morts recensés, une immolation par le feu, ne s'est pas transformée en révolte généralisée comme en Tunisie ou en Syrie. C'est qu'elle visait des objectifs bien précis: baisse des prix, amélioration de la justice, annulation de marchés publics frauduleux, rétablissement de l'eau potable, salaire minimum à 73.000 ouguiyas (205€), etc. Et peinait à générer des relais politiques contre un président certes issu d'un coup d'Etat mais correctement légitimé par les urnes en 2009, et soutenu depuis sans beaucoup de failles par tous ceux qui voient en lui un rempart contre l'AQMI et une garantie contre un effondrement national de type malien. C'est aussi que le gouvernement a su gérer les contre-feux: déblocage de 9 milliards d'ouguiyas pour faire baisser de 30 % le prix des denrées de première nécessité dans un réseau de boutiques spécialisées, concessions "libérales" envers la presse (dépénalisation des délits de presse en juin, autorisation des médias privés en septembre, application de l'augmentation des salaires de 10 à 50% obtenue en 2008...) et les jeunes diplômés: distributions de terres à cultiver, etc. Et puis les négociations avec l'opposition, à l'automne, aboutissent à des résultats tangibles: reconnaissance des minorités mais aussi de l'interdiction L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 MAURITANIE 252 MAGHREB de l'esclavage dans la constitution (voir encadré), criminalisation des coups d'Etat, exclusion des militaires de la politique, féminisation du Parlement, augmentation des chaînes de télévision de 2 à 7, des stations de radio de 2 à 7 également. Enfin, le pouvoir a marqué du sceau de la réconciliation nationale l'arrivée de la dernière vague de rapatriés mauritaniens du Sénégal, le 25 mars à Rosso, ville frontalière. Le chef de l'Etat Birame Ould Dah, militant inlassable de sa cause. MAURITANIE GEOGRAPHIE Territoire en grande partie désertique (90 %). Ressources minières (fer), agriculture et pêche. Quatre ethnies : AraboBerbères, Peuls, Wolofs, Soninkés. HISTOIRE 1902 Xavier Coppolani conquiert L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 l’intérieur du pays qu’il nomme Mauritanie. 1903 Protectorat français, transformée en colonie (1920), puis en TOM (1946). 1956 Autonomie interne. 1960 Indépendance. Moktar Ould Daddah dirige le pays (jusqu’en 1978). 1984 Coup d’Etat. Ould Taya devient président. 1991 Nouvelle Constitution (multipartisme), suivie de l’instauration d’un régime démocratique ; réélections de Ould Taya (1992, 1997 et 2003). 2005 (août) Coup d’Etat militaire renversant Ould Taya. 2006 Référendum constitutionnel, élections législatives et municipales. s'était déplacé avec le haut-commissaire des Nations-Unies aux réfugiés, et a salué une journée historique «destinée à fermer des plaies ouvertes par les douloureux événements de 1989» (affrontements communautaires violents qui avaient vu fuir des dizaines de milliers de Mauritaniens d'origine négro-africaine). Une commission interministérielle devrait être chargée de réinsérer dans la vie publique les anciens fonctionnaires et faire bénéficier ceux qui ont atteint l'âge de la retraite d'une pension. ECONOMIE L'économie mauritanienne connaît une croissance significative, pour l'essentiel tirée par le secteur minier (fer et or), un peu par le secteur pétrolier en progression, et a engagé un assainissement progressif des finances publiques, mais l'envolée des prix alimentaires génère des difficultés sociales pour lesquelles le gouvernement doit dégager des moyens importants de lutte contre la pauvreté, en subventionnant les produits de première nécessité. La dette a été allégée par une annulation en provenance du Koweït, et les créanciers arabes se montrent patients. En avril 2012, le gouvernement a signé avec la SIDSP, filiale de la Banque islamique de développement, une convention lui permettant d'émettre ses premiers bons du trésor islamiques, et de mobiliser l'épargne non usuraire, dont elle attend près de 300 millions de dollars en un an. Mais la préoccupation majeure reste la lutte contre le terrorisme des extrémistes du Maghreb islamique. La Mauritanie doit accueillir des dizaines de milliers de réfugiés du nord du Mali, et les conséquences du déficit pluviométrique de 2011 sur les cultures ou la mort des bovins ne TOUJOURS LE DENI DE L’ESCLAVAGE Réalité toujours persistante et toujours niée avec persistance par les autorités politiques du pays, l’esclavage -dont la Mauritanie n’a hélas pas le monopole- a enrichi l’argumentaire anti-islamiste qui n’en avait pas besoin. Car c’est au nom du «viol des valeurs islamiques du peuple mauritanien» que les autorités ont arrêté un militant mauritanien «historique» de la lutte anti-esclavagiste, et dix de ses compagnons de lutte. «Violer les valeurs islamiques», c’était en l’occurrence pour Birame Ould Dah Ould Abeid, président de l’IRA (Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste) organiser une manifestation contre l’esclavage. Mais il est vrai que Birame, lui-même musulman, n’est pas né où il fallait, et n’a pas la bonne couleur de peau. Négro-mauritanien descendant d’esclaves, il a organisé une prière collective du vendredi hors des mosquées où la question esclavagiste est tabou. Dans l’élan, il commet l’erreur de brûler en symbole des livres de droit du rite musulman malikite, qui justifient l’exploitation esclavagiste et déclinent droits et devoirs du serviteur et du maître. (On se demande au passage pourquoi de tels livres existeraient s’il n’y avait pas d’esclavage...). Il a pris la précaution de sauver toutes les pages où l’on représentait le Coran, mais cela ne l’exonère pas de la présomption de blasphème. L’arrestation a donc été immédiate et des manifestations «spontanées» ont aussitôt surgi. La TV publique passe en boucle les condamnations de ces actes. Le président luimême invoque la charia. Mais la justice mauritanienne, enfin saisie, annule le procès pour vice de forme, puisque les accusés risquant la peine de mort pour apostasie, ils ne peuvent comparaître en flagrant délit. Début septembre, Birame et ses co-détenus ont été remis en liberté sous caution. MAGHREB facilitent pas les choses. Le Mali compte beaucoup sur l'aide mauritanienne (2.400 kms de frontière commune) pour stabiliser la situation dans son pays. Pour attaquer et chasser des villes de Tombouctou, Gao et Kidal, les combattants d'AQMI, l'appui mauritanien est précieux, et le président Abdel Aziz ne fait pas mystère de sa volonté d'en découdre, afin d'éviter « un nouvel Afghanistan ». « Si la communauté internationale, le Mali, les pays voisins décidaient de combattre, la Mauritanie ferait partie de ce groupe », a déclaré, le 14 avril, le président Abdel Aziz, dans un entretien radiodiffusé en Europe, tout en ajoutant: « Ces Etats auront pratiquement devant eux une armée et même un Etat. Avant, ils n'étaient pas très nombreux, maintenant ils ont conquis pratiquement 253 65 % du territoire malien et ils sont très équipés; avant, ils se ravitaillaient par petites quantités de carburant, maintenant, c'est par citernes.» Les armées malienne et mauritanienne travaillent déjà ensemble, mais un grave incident est venu perturber cette entente début septembre 2012, lorsqu'à Diabali, au nord de Ségou, un groupe de seize personnes a été tué par l'armée malienne, alors qu'il s'agissait de prédicateurs de la confrérie religieuse de la Dawa, pour beaucoup mauritaniens. Un communiqué très officiel des autorités mauritaniennes a dénoncé «la cruauté de cet assassinat collectif injustifiable de prêcheurs innocents désarmés, par des hommes en armes, revêtus de l'uniforme de l'armée régulière». } TUNISIE Après la révolte des rues survenue durant l’hiver 2010-2011, qui conduisit à la fuite de la famille Ben Ali et à la chute du régime que le Président déchu avait très progressivement mis en place, c’est vers la Tunisie que tous les regards se tournaient en cette année 2012 qui devait voir la mise en place, à la suite des élections du 23 octobre 2011, démocratiquement organisées mais qui ne virent pas les Tunisiens se précipiter vers les urnes, d’un gouvernement de coalition et d’une Assemblée Nationale Constituante (ANC) de 217 membres, chargée de rédiger une nouvelle Constitution dans des délais raisonnables. POLITIQUE Difficilement organisées en octobre 2011 (plus de 1.500 listes en présence, ce qui suffit à expliquer la désaffection des citoyens), neuf mois après la chute du régime, ces élections donnèrent au parti islamiste Ennadha une majorité relative de 138 sièges, insuffisante pour diriger seul le pays mais suffisante pour empoisonner durant toute l’année la vie politique, sociale et culturelle. Au plan politique, afin que l’Assemblée Nationale Constituante puisse se mettre au travail dans des conditions acceptables, ce parti aux valeurs religieuses marquées dut s’allier à deux formations de centre gauche, aux valeurs nettement plus laïques, le Congrès pour la République (CPR, 29 sièges), formation du Président de la République Moncef Marzouki, élu le 11 décembre 2011 au sein des députés de la nouvelle Assemblée Nationale, et le Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL, 20 sièges), plus connu sous le nom de Ettakatol, formation du Président de l’Assemblée nationale, Mustapha Ben Jaafar. Etat de fait qui conduit depuis un an à une fragile et délicate gouvernance à trois têtes, dominée par Ennadha qui détient les postes-clés de l’Exécutif: Premier Ministère avec Hamadi Jebali, et divers portefeuilles majeurs dont celui des Affaires étrangères avec Rafik Abdesallem, gendre de Rached Ghannouchi, le charismatique leader d’Ennadha qui, en coulisse tire bien des ficelles. Si bien que de nombreux observateurs n’hésitent pas à poser la question: qui dirige aujourd’hui la jeune Tunisie née de la révolution de jasmin ? Depuis un an, pas une semaine en effet sans lutte d’influence entre les trois grands partis, sans conflit politique, au sein d’un gouvernement dont les Ministres ne cessent de valser, comme à l’extérieur où les syndicats «historiques» comme l’UGTT tentent de se faire entendre; sans grève de fonctionnaires en conflit ouvert avec leur hiérarchie; sans troubles à l’ordre public dans les rues, les écoles ou Hamadi Jebali, premier ministre tunisien. Rached Ghannouchi, leader d’Ennnadha et gouvernant de l’ombre. les universités... En somme, la Tunisie jugulée de Ben Ali n’a pas encore laissé place à une Tunisie libérée, seulement et pour le moment à une Tunisie empêtrée. Ce contexte permettra-t-il de déboucher, après l’élaboration sans cesse reportée d’une nouvelle Constitution et les nouvelles élections législatives prévues au printemps 2013, sur un régime étatique serein et juste, répondant aux aspirations du peuple tunisien ? L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 Guy DUGAS Université Montpellier 3, directeur de l’IRIEC [email protected] 254 MAGHREB ECONOMIE Il est bien évident que c’est l’ensemble de la vie économique et culturelle qui se ressent de telles incertitudes. A commencer par l’activité touristique, première source de revenus et d’emplois de la République tunisienne depuis l’Indépendance: après une baisse catastrophique de plus de 40% des entrées en 2011, ce qui a généré une augmentation de plus de 10% du chômage dans le secteur de l’hôtellerie et de l’accueil, les résultats semblent un peu meilleurs un an plus tard, les Tour opérateurs européens ayant consenti des tarifs sans précédents sur les séjours dans le pays. Mais il ne faut pas oublier que le premier client touristique en apport de devises était ces dernières années le voisin libyen - dont le L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 TUNISIE GEOGRAPHIE Pays essentiellement plat, montagnes au N.-O. ; mines (phosphates), tourisme, textile. Activités économiques concentrées dans le nord et les zones côtières. HISTOIRE VIIe-XVIe s. Conquête arabomusulmane, dynasties orientales puis berbères. XVIe s. Domination ottomane. 1881-1956 Protectorat français. 1956 (20 mars) Indépendance. 1956-1987 Habib Bourguiba, président? ; modernisation du pays. 1970 Adhésion à L’Organisation internationale de la Francophonie 1987 Le premier ministre Ben Ali destitue Bourguiba et prend la tête du pays. 1995 (17 juillet) Accord de partenariat entre la Tunisie et l’Union européenne. 1999 Le président Ben Ali est réélu avec plus de 99 % des suffrages. 2002 Réforme constitutionnelle acceptée à plus de 99 %. 2004 La Tunisie remporte la Coupe d’Afrique des nations. 2004 Réélection du président Ben Ali (94,49 % des voix). Le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) remporte 80 % des sièges de la Chambre des députés. Fin juillet à Carthage, le président Marzouki reçoit le secrétaire à la défense US Léon Panetta (lcc Erin A. Kirk-Cuomo). peuple se ressent de sa propre révolution, qui a suivi de quelques semaines à peine celle de Tunisie. Il semble évident que les conventions de libre-échange existant depuis une dizaine d’années entre les deux pays doivent à présent être révisées, dans un contexte de grande confusion à Tripoli, d’où proviennent quantité de réfugiés et d’armes transitant en direction des pays du Sahel. Satisfait par l’amélioration ressentie au premier semestre de cette année, le Ministre du Tourisme augure d’un retour à des résultats équivalents à ceux de 2010 dès l’année prochaine, en promettant une restructuration du secteur touristique permettant plus de régularité dans les flux et une plus grande diversification des destinations - le tourisme tunisien étant jusqu’alors un tourisme estival et de plages. Mais rien n’est moins certains, car, comme le montre a contrario la belle santé du tourisme et de l’immobilier au Maroc, ce secteur reste toutefois très dépendant de la confiance placée par les opinions publiques occidentales dans la vitalité et la stabilité du pays-hôte. Par bonheur, les autres secteurs de l’économie nationale se portent relativement bien, notamment l’agriculture qui bénéficie actuellement, comme dans les pays voisins, de bonnes conditions climatiques. Ceci conduit le FMI, qui envisageait pour le pays un taux de croissance légèrement supérieur à 2%, à revoir à la hausse ses prévisions en annonçant qu’un taux de 2,7% lui paraissait envisageable dès 2012. SOCIETE Cette conjoncture économique encourageante n’empêche toutefois pas le citoyen tunisien de demeurer très frileux en matière d’acquisition de biens propres, lui qui s’était ces dernières décennie lancé avec délice dans l’achat de biens de consommation: une récente enquête a montré que les consommateurs tunisiens se montrent réticents, à près de 90% en moyenne, à tout nouvel achat mobilier ou immobilier. Pour justifier cette frilosité, ils évoquent à près de 59% des problèmes de financement et pour 21% l’incertitude quand à l’évolution de la conjoncture. Le reste des répondants, soit près de 20%, prétendent ne pas ressentir actuellement de besoin d’achat. Il faut dire, en guise d’explication possible, que les plus graves incertitudes demeurent au plan social: des grèves sectorielles, des manifestations parfois sanglantes ou violemment réprimées (un jeune, atteint par une balle, est encore décédé à Sousse au mois de juin 2012) ne cessent d’éclater ici ou là, conduisant à la restauration du couvre feu dans certaines régions. Le chômage reste extrêmement important, en particulier chez les jeunes, en dépit d’une politique très volontariste du Gouvernement promettant la création de plus de 100 000 postes en 2012. Et plus que tout, la confiance tarde à venir du fait des tergiversations du monde politique et de la multiplication des affaires: contrôle des blogs et de la presse, montée de la xénophobie, procès incompréhensibles faits à certains fonctionnaires ou serviteurs de l’Etat, limogeage du directeur de la Banque Centrale de Tunisie, un homme pourtant reconnu pour son intégrité et ses compétences... MAGHREB SPORT Tout comme les deux pays voisins, la Tunisie peine à montrer ses possibilités lors des Jeux Olympiques: seuls à ce jour le nageur Oussama Mellouli, médaille de bronze dans le 1.500m nage libre, et l’équipe nationale de hand-ball, qualifiée pour les quarts de finale ont permis de voir flotter sur Londres le drapeau national. Il est vrai qu’au Maghreb comme ailleurs, c’est vers le football, sport populaire entre tous, que convergent tous les regards et toutes les attentions. En 2010-2011, et pour la troisième saison consécutive, c’est l’Espérance Sportive de Tunis qui l’a emporté en championnat. Forte de sa participation satisfaisante à la dernière Coupe d’Afrique des Nations (CAN) où elle n’a été éliminée qu’en quart de finale et après prolongations par le Ghana, l’équipe nationale désormais dirigée par Sami Trabelsi, ancien capitaine de la sélection lors de la Coupe du monde 1998 tente actuellement de se qualifier pour la CAN 2013 en Afrique du Sud. } L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 2 -2 0 1 3 Coupables de graves dégradations de biens et même d’atteintes aux personnes, les fauteurs de troubles salafistes donnent le sentiment de bénéficier d’une quasi impunité et de sérieux appuis dans les milieux politiques et judiciaires. Les dysfonctionnements dont ils se sont rendus coupables, l’année universitaire durant, au sein de l’université de la Manouba, où ils ont séquestré le personnel administratif, perturbé les cours et les examens ne se retournent-il pas contre les autorités universitaires elles-mêmes ? En dépit des dénégations répétés d’Ennadha, il n’en faut pas davantage pour alimenter toutes les spéculations quant au contenu de la prochaine Constitution, au statut de la Tunisienne, au port de voile et autres aménagements de la sharia - dont il paraît néanmoins acquis qu’elle ne figurera pas dans la prochaine Constitution. Il n’empêche: au sein de la société civile, jeune et dans son ensemble fidèle aux acquis bourguibiens, le débat reste vif, parfois même explosif. 255