Marchés publics et centres sociaux associatifs - Union Rhône
Transcription
Marchés publics et centres sociaux associatifs - Union Rhône
Marchés publics et centres sociaux associatifs « Les Centres sociaux et socio-culturels n'agissent pas seuls. Ils connaissent les autres acteurs associatifs, administratifs, politiques ou économiques de leur territoire de projet. Ils nouent avec eux les relations nécessaires aux actions à conduire. Ils formalisent, de préférence, ces relations dans des conventions de partenariat. Par contre, ils n'entendent pas être instrumentalisés ni devenir de simples prestataires de services ou réduire leur projet social à des délégations de service public. » Charte nationale de la FCSF, 2000 Cette réflexion porte sur les conséquences des procédures de marché public sur l'intervention sociale et éducative (centres de loisirs, action sociale individuelle et collective). Elle ne prétend pas pouvoir épuiser la problématique que pose la conception de marché dans l'ensemble du champ social et économique et sur la vie publique. Nous ne donnons des éléments de réponse qu'à la question suivante : « les marchés publics sont-ils une forme acceptable pour financer le projet associatif des centres sociaux ? » Elle pose la question de l'influence de l'outil technique (la subvention ou la commande publique) indépendamment des positionnements et des actions des acteurs individuels ce qui ne revient pas à nier l'existence de leurs marges de manœuvres et d'autonomie dans toutes les situations. Néanmoins, chaque outil a sa propre logique dont on ne s'en rend pas toujours compte sur le moment et qui façonnent les manières d'agir, qui répartissent le pouvoir d'une manière toujours différente. C'est à partir de ce prisme que nous raisonnons. D'autre part, l'étude de cette question a des conséquences sur d'autres questionnements. Nous ne les prolongerons pas même s'ils vaudraient la peine d'être détaillés par ailleurs : la place des habitants dans le pilotage des projets des centres sociaux municipaux ; le regroupement de plusieurs centres sociaux au sein d'une même association de gestion ; ... 1 SOMMAIRE 1. − Diagnostic sur la situation des centres sociaux face aux marchés publics en Rhône-Alpes 2. Analyse juridique Le régime de la subvention − Le régime de la commande publique − Conséquence des directives européennes sur le financement des associations − Contraintes juridiques concernant les centres sociaux 3. Analyse économique − − 4. Analyse politique Causes du développement des marchés publics Contradictions politiques avec le projet des centres sociaux 5. Analyse stratégique − − 6. Déclaration politique et recommandations Position politique du réseau fédéral et actions à engager en Rhône-Alpes Actions à engager au niveau national et européen 7. Ressources juridiques et politiques 2 Nous chercherons dans un premier temps à présenter la situation des centres sociaux en Rhône-Alpes puis tenter de comprendre les raisons de cette situation et ses conséquences avant de nous pencher sur les éléments de connaissance juridique et de principes politiques qui pourraient nous permettre de l'affronter. 1. Diagnostic sur la situation des centres sociaux en Rhône-Alpes Nous constatons une évolution des comportements de la part de collectivités locales de plus en plus nombreuses tentant de mener des procédures d'appels d'offre ou des délégations de service public (DSP) dans le champ d'intervention des centres sociaux. L'état des lieux des situations donne à peu près cette image concernant les centres sociaux − A Craponne (Rhône) ou à Aime (Savoie), le service juridique de la préfecture a incité la municipalité à passer le centre de loisirs en appel d'offres. Cette situation a entraîné la fin de la subvention de la municipalité pour le centre social de Craponne qui a déposé le bilan fin 2009. Ce choix a pu être évitée sur Aime (avec l'appui de la CAF et de la Fédération). − Un certain nombre de services et d'activités tendent à être gérées sous la forme de marchés publics dans ses diverses modalités. Nous les estimons en 2010 à 27 centres sociaux adhérents : 9 en Ardèche sur le Fonds Social Logement (sur une réponse commune centralisée par la Fédération) ; 6 ou 7 dans le Rhône sur des « lots » concernant l'accompagnement social individualisé au titre du RMI (Tassin la Demi-Lune ; Villeurbanne...) 4 dans la Loire sur des lots concernant l'accompagnement social individualisé au titre du RMI (Solaure, Montferré, Agasef et un quatrième) 1 en Isère (Beaurepaire sur la formation Bafa) 1 dans l'Ain sur la gestion du temps scolaire à midi 1 dans la Drôme sur la maison de l'enfance à St Paul Trois Chateaux − A ce jour, quatre centres sociaux sont du régime de la commande publique Valence et Thonon par Léo Lagrange en délégation de service public deux centres sociaux à Vienne par Alfa3A sous la forme d'un marché public (deux autres centres sociaux non adhérents sont gérés par Alfa3A dans l'Ain à travers des conventions avec les municipalités mais en conservant des associations locales) − De nombreux centres sociaux n'ont jamais été confronté à cette situation et ne se sont jamais interrogé (ce qui devrait être fait en amont car, alors, les délais sont souvent réduits). D'autres, plus rares, se sont posés la question et ont refusé : la Maison du Crêt du Roch (Loire) a décidé de ne pas répondre au marché ouvert par le Conseil Général sur l'ASI qui a arrêté sa convention. Cette situation concerne aussi d'autres associations porteurs de projets sociaux et éducatifs : de l'éducation à l'environnement aux maisons de retraite en passant par la prévention spécialisée, la petite enfance, l'action culturelle.... Cela « découpe » les projets associatifs par appartements ou bien les « vend » sur un marché de l'action sociale d'un bloc. 3 2. Analyse juridique L'analyse juridique se concentre sur ce que dit le droit, ses marges de manœuvre et ses restrictions. Le droit crée des catégories qu'il déclare légales ou non en fonction d'un certain nombre de conditions afin d'influer sur le comportement des personnes morales ou privées. Commençons par nous accorder sur les termes juridiques utilisés. Il existe deux grands régimes contractuels possibles : Le régime de la subvention n'est pas défini précisément par la loi. Elle est mentionnée sans définition dans l'article 6 de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations qui mentionne les possibles « subventions de l'État, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics ». Une instruction prise pour l'application du Code des marchés publics1 a détaillé : « Il y a subvention lorsqu'il s'agit pour une collectivité d'apporter un concours financier aux activités d'une association qui a bâti un projet spécifique. On ne se trouve pas alors dans le cadre d'une relation de marché public. En effet chaque fois qu'une collectivité décide de participer financièrement, dans une proportion qui peut fortement varier d'un cas à l'autre, à un projet élaboré par une association, et qui répond aux besoins de cette dernière, on se trouve alors dans le domaine de la subvention qui n'appelle pas de mise en concurrence préalable. Cela reste vrai même si le projet associatif se trouve être un projet d'intérêt général dans un domaine où l'administration pourrait aussi intervenir. De même, l'octroi d'une subvention peut s'accompagner d'un contrat afin que la personne publique convienne avec l'association des objectifs qui justifient une participation financière, prévoie des moyens de contrôle et des échéanciers de versement, sans pour autant donner au contrat passé à cet effet le caractère d'un marché public ou d'une délégation de service public. » Cette définition a été précisée récemment dans une circulaire : « La subvention caractérise la situation dans laquelle la collectivité apporte un concours financier à une action initiée et menée par une personne publique ou privée, poursuivant des objectifs propres auxquels l'administration, y trouvant intérêt, apporte soutien et aide. »2 Les subventions reposent sur l'existence d'une initiative autonome de la part des associations. Cette notion d'initiative n'est pas défini dans la loi mais la jurisprudence 3 l'a reconnue à travers un faisceau d'indices inscrits dans les circonstances de fait : − la préexistence de l'association et qui l'a créé ; l'indépendance des pouvoirs publics dans les fonctions exécutives... − l'existence formelle d'une demande de subvention ; la convention mentionne un soutien (plutôt qu'une phrase du type « la mairie décide »... L'intérêt de la collectivité se confond parfois avec l'intérêt général qui n'est pas défini juridiquement si ce n'est par le fait qu'il s'oppose à un intérêt particulier ou qu'il doit concerner la généralité des habitants. Cependant, cela s'oppose à d'autres conceptions de l'intérêt général : celle de la promotion des intérêts des citoyens les plus fragiles (enfants, handicapés...), celle de la recherche d'une plus grande égalité ou bien celle issue de la délibération des différentes parties prenantes... L'absence de définition juridique fragilise donc la subvention car les intérêts particuliers auxquels elle s'oppose sont souvent eux démontrés (droit de propriété par exemple). Les subventions sont discrétionnaires et aléatoires. Elles peuvent donc être arrêtées 1 Parue le 28 août 2001 au Journal Officiel. Cette instruction va dans le sens de la jurisprudence du Conseil d'Etat du 6 juillet 1990, Comité pour le développement industriel et agricole du Choletais, n°88224 2 Circulaire du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations. 3 Cela fut définit en jurisprudence par le Conseil d'État dans l'avis sur la cinémathèque française (18 mai 2004). L'arrêt Commune d'Aix en Provence (6 avril 2007) spécifie cette dimension d'initiative autonome et de reconnaissance de la dimension d'intérêt général de l'action engagée. « Lorsqu'une association exerce sous sa responsabilité, et sans qu'une collectivité publique en détermine le contenu, une activité dont elle a pris l'initiative, elle ne peut, en tout état de cause, être regardée comme bénéficiant de la part d'une personne publique de la dévolution d'une mission de service publique. » 4 sans justification à leur échéance. Le cas où une collectivité publique décide de recourir aux règles de la commande publique n'est pas en soi une cause d'irrégularité. Mais elle doit alors respecter les règles de transparence des procédures et d'égalité d'accès et de traitement des candidats au risque de tomber dans le délit de favoritisme. Dans le cas de la subvention, la somme d'argent n'a pas de contrepartie directe pour la personne publique. L'octroi d'une subvention doit s'accompagner d'un contrat au-delà de 23000€ afin que la personne publique convienne avec l'association des objectifs qui justifient une participation financière, prévoit des moyens de contrôle et des échéanciers de versement sans pour autant donner au contrat passé le caractère d'un marché public 4. Les conventions pluriannuelles d'objectifs (CPO)5 permettent un engagement sur les besoins mais n'engage pas le montant du budget accordé même s'il est spécifié. Dans la hiérarchie des normes, une « instruction » ou une « circulaire » n'a pas le même poids juridique qu'un ensemble de lois qui forment le « code des marchés publics ». On comprend alors pourquoi les services juridiques préfèrent adopter ce régime-là, mieux défini juridiquement. Les appels à projet thématiques n'ont pas de contours juridiques précis6. Ils laissent de la place aux initiatives tout en mettant en concurrence tacite les associations. Ils permettent ensuite à une collectivité d'apporter une contribution sous la forme d'une subvention. Les prestations de service consistent dans la prise en charge systématique dans la limite d'un plafond de services et de missions qui correspondent à des critères et font l'objet d'un agrément (prestation de service « animation globale » pour les centres sociaux) Le régime de la commande publique. La collectivité achète un service ou une prestation à un tiers. Elle a une contrepartie directe. Elle peut se prendre plusieurs formes : Les marchés publics sont « des contrats conclus à titre onéreux avec des personnes publiques ou privées par les personnes morales de droit public pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services » (art 1er du code des marchés publics ; complété par le décret n°2001-10 du 7 mars 2001). Ils sont passés dans le respect des procédures prévues par le code des marchés publics lorsque leur montant excède 90 000€ HT (obligation de publicité et de mise en concurrence). Il y a marché public lorsque l'administration exprime de son initiative un besoin qui lui est propre (et non un besoin défini par l'association) et qu'elle demande à un prestataire extérieur de lui fournir les biens ou prestations de nature à satisfaire ce besoin en contrepartie d'un prix. - Les marchés sans formalité préalable concernent des prestations de moins de 20 000€ où l'acheteur n'est pas soumis à une obligation de mise en concurrence (décret du 19 décembre 2008). Elle doit pour cela définir les prestations par référence à des normes et envoyer un avis d'attribution à l'Office des Publications des Communautés Européennes. - Les marchés à procédure adaptée sont librement fixés par la personne publique à condition de mettre en concurrence les candidats. A partir de 90.000€, la publicité préalable est obligatoire. Il peut être utilisé jusqu'à 206.000€ pour les collectivités locales et 130 000€ pour l'Etat. - Les marchés à procédure formalisées concernent les marchés de plus de 206.000€ et plus de 130.000€ avec appel d'offre et publicité préalable obligatoires. 4 Cette loi du 12 avril 2000 dont l'article 10 a imposé la rédaction de ces conventions mais a aussi réduit la distinction entre 5 6 subventions et marchés publics puisque la limite entre la définition d'objectifs et de moyens et la prescription d'activité peut être très ténue. Définies dans la circulaire du 16 janvier 2007 relative aux Conventions Pluriannuelle d'Objectifs Ils sont évoqués dans la circulaire du 18 janvier 2010 sans être encadré précisément par une réglementation. 5 La Délégation de Service Public est « un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. » (art 1411-1 CGCT) Cette délégation fait l'objet d'un appel d'offre s'appuyant sur un cahier des charges définissant les conditions de réalisation et financière du marché. Dans le cadre de la DSP, l'exploitation du service permet d'assurer tout ou partie de la rémunération (ex : la gestion de l'eau...) Elle peut prendre quatre formes : la concession, l'affermage, la gérance ou la régie intéressée. La délégation de service public a été mise en place par la loi du 29 janvier 1993 (dite loi Sapin) relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques. Dans la pratique, la différence entre un marché public et une délégation de service public est réalisée à partir du critère du risque d'exploitation : « est-ce que l'opérateur continue d'assumer un risque d'exploitation ? » Ce n'est pas un pourcentage mais le risque réel qui est pris en compte. Par exemple, dans le cas d'une cantine scolaire, s'il y a une subvention d'équilibre, il n'y a pas de risque d'exploitation, c'est donc un marché public. En principe, un usager paye un prix dans le cadre d'une DSP et le reste est compensé par le service public. Cela n'exclue pas les cofinancements. Dans le cadre d'un marché public, le cofinancement est perçu par la commune. Le critère essentiel de distinction entre le régime de la commande publique et le régime de la subvention repose sur l'initiative de la définition des besoins auquel doit répondre le contrat. Conséquences des directives européennes sur le financement des associations 7 Dans les années 1990, l'appareil juridique a fortement évolué dans le cadre de lois nationales adoptées suite à des affaires de détournement de fonds par l'entremise d'associations. Mais aujourd'hui, la principale source de transformation est due au cadre législatif européen qui constitue une norme de droit supérieure. L'Union Européenne s'est fondée historiquement autour de la libre circulation des biens et des services (qui constituent 70% du PIB européen). La Commission européenne a donc pour mandat de supprimer tout ce qui peut constituer un frein à la libre concurrence sur le « marché intérieur ». Elle se dote pour cela d'un arsenal juridique spécifique constitué de directives que les États membres doivent transposer dans leurs lois nationales. Nous présenterons deux de ces directives qui chamboulent les relations entre associations et pouvoirs publics. Pour autant, tout n'est pas considéré sous l'angle du marché. L'intérêt général existe et, contrairement au droit français, il est même défini : un service est d’intérêt général dès lors qu’il a −obligation de service public −soit la mise en œuvre des droits fondamentaux ; soit la couverture des risques sociaux (régimes de protection sociale comme la couverture santé, la retraite...) ; soit la satisfaction des besoins sociaux de base Une fois l'intérêt général reconnu, ce service peut être considéré : −Les Services Non-Économiques d'Intérêt Général (SNEIG) sont constitués par les fonctions régaliennes (défense, police, justice) ou par les régimes de protection sociale et d'éducation obligatoire. Ceux-ci sont principalement du ressort des États et non concernés par les directives de la Commission Européenne. − Les autres services sont considérés comme des Services d'Intérêt Économique Général (SIEG) reconnus dès le traité de Rome adopté en 19588. L'encadrement des 7 Nous avons tenté dans cette partie une simplification d'un droit européen et d'enjeux éminemment complexes. L'ensemble peut 8 être appréhendé plus précisément à travers les analyses, les positionnements et les propositions du Collectif SSIG www.ssigfr.org Article 90 « Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un 6 Services d'Intérêt Économique Général (SIEG) est assez strict. Il a été défini plus précisément dans un arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes dit Arrêt Altmark9. Les entreprises porteuses du SIEG doivent être distingués par les États membres au travers d'un « mandatement » (un des points de la directive Services). Ces services ne doivent pas être l'objet de « surcompensation » financière de la part des Etats (un des points du paquet Monti-Kroes). L'Union Européenne ne distingue pas au sein des SIEG les opérateurs à but lucratif (sociétés commerciales) et les opérateurs à but non lucratif (coopératives, mutuelles et associations) et les considère sous le même régime comme des opérateurs économiques 10. Parmi les SIEG, certains sont considérés comme des services sociaux d'intérêt général. Ce sont ceux où il y a « un fonctionnement fondé sur la solidarité, une absence d’équivalence entre prestations et cotisations, un caractère polyvalent et personnalisé, une absence de but lucratif, une participation de volontaires et de bénévoles, un ancrage marqué dans la tradition culturelle »11 Peuvent par exemple être inscrits dans ce champ les complémentaires santé. Être considéré comme SIEG a des avantages intrinsèques notamment celui de ne pas être soumis obligatoirement à un régime de mise en concurrence et celui de pouvoir faire l'objet d'apports financiers de l'État en compensation des missions de service public. Les services sociaux non obligatoires (centres sociaux, petite enfance, insertion, prise en compte du handicap, services à la personne, logement social...) sont tous considérés comme des formes de SIEG donc malgré tout situés dans le champ économique. Cela laisse ouverte la possibilité d'être situé dans un contexte marchand ou non marchand. La directive Services (applicable au 1er janvier 2010) Le principe de la directive vise à achever le marché intérieur européen en éliminant les « obstacles » à la circulation des services tout en conservant une haute qualité de services. Elle oblige donc les États à justifier toute restriction à la liberté d'établissement ou de prestation de services. Elle concerne ainsi des services aussi différents que les taxis ou les hôpitaux 12. Tout organisme qui veut être chargé d'une mission d'intérêt général doit être mandaté explicitement par la puissance publique (qui a le monopole de la définition de l'intérêt général) ou bien être réalisé par une association caritative13. Le mandatement, est défini par la commission comme monopole fiscal sont soumises aux règles du présent traité, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. ». Le protocole n°26 sur les services d'intérêt général du Traité de Lisbonne en vigueur au 1er décembre 2009 précise : « le rôle essentiel et le large pouvoir discrétionnaire des autorités nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser les services d'intérêt économique général d'une manière qui réponde autant que possible aux besoins des utilisateurs; (…) ;- un niveau élevé de qualité, de sécurité et quant au caractère abordable, l'égalité de traitement et la promotion de l'accès universel et des droits des utilisateurs. Les dispositions des traités ne portent en aucune manière atteinte à la compétence des États membres pour fournir, faire exécuter et organiser des services non économiques d'intérêt général. » 9 L'arrêt Altmark du 24 juillet 2003 énonce quatre critères pour qu'une offre de services puisse entrer dans le champ des SIEG (Services d'intérêt économique général) et obtenir des aides d'Etat. Il s'agit 1. le destinataire est expressément chargé d'obligations de services publics (caractère de nécessité du besoin et obligation de mandatement) 2/ les paramètres de calcul de la compensation ont été préalablement et objectivement définis 3/ Le destinataire ne bénéficie d'aucune surcompensation 4/ le destintaire de l'aide a été choisit à la suite d'une procédure de mise en concurrence ou selon le critère de « l'entreprise moyenne bien géré » 10 Repris en droit français dans la circulaire du 18 janvier 2010 qui déclare : « La réglementation dite des « aides d'État » s'applique à toute « entreprise » recevant un financement public dès lors qu'elles exercent une activité « économique » d'intérêt général, et ce quel que soit son statut juridique, pour la partie de son activité qui est « économique (…) Est qualifiée d'activité économique toute offre de biens et de services sur un marché. Seules échappent à cette qualification les activités liées à l'exercice des prérogatives de puissance publique ou certaines activités identifiées par la jurisprudence communautaire, comme les prestations d'enseignement public ou la gestion de régimes obligatoires d'assurance. (…) Dans la pratique la grande majorité des activités exercées par des associations peuvent être considérée comme des activités économiques ». 11 Faisceau d'indices déterminés par la Commission Européenne en 2006. 12 Le considérant n°10 exlut de façon expresse les services sociaux de son champ d'application : exclut « les critères d'accès de certains prestataires aux fonds publics, lesquels incluent en particulier les critères établissant les conditions dans lesquelles des prestataires sont habilités à recevoir un financement public, y compris les conditions contractuelles spécifiques, et en particulier les normes de qualité auxquelles est subordonnée la réception de fonds publics, par exemple les services sociaux » 13 Mais cette exception ne s'appliquera pas en France car le Gouvernement Français considère que c'est une exception faite 7 « l’acte officiel qui confie à l’organisme concerné la prestation d’un SIEG et indique la mission ainsi que l’étendue et les conditions générales du fonctionnement du service ». Ce mandatement s’accompagne de l’octroi de droits spécifiques ou exclusifs (exclusivité de prestation par exemple) et de compensations financières. Chaque État a des marges de manœuvre pour définir à qui il confie des mandatements. Mais il est contrôlé a minima par la Cour de Justice des Communautés Européennes qui va apprécier s'il n'y a pas d'erreur manifeste d'appréciation 14. Pour tout organisme qui n'a pas de mandatement explicite, c'est la règle de la concurrence propre à tous les services économiques qui s'applique. En France, comme dans d'autres pays, la notion n'existe pas dans notre code civil. L'État a donc envisagé plusieurs formes de mandatement : instructions ministérielles, lois et actes réglementaires, décisions des organes délibérants des collectivités territoriales.... Ainsi, la loi de 2002 sur les établissements médico-social est suffisamment précise pour être considérée comme un mandatement. Il en est de même pour le logement social, l'hébergement d'urgence, les établissements sociaux et médico-sociaux15, la protection judiciaire de la jeunesse, les organismes s'occupant de mesures d'accompagnement social personnalisé, les organismes d'accueil communautaires et d'activités solidaires (à l'image des communautés Emmaüs).... Mais le cadre réglementaire des établissements accueillant des enfants de moins de 6 ans ou des services à la personne devront au contraire appliquer la directive Services et être mis systématiquement en concurrence. A priori, selon des informations en provenance du ministère, les centres sociaux seront considérés comme des SIEG16 mais ce ne devrait pas être le cas des services de garde des enfants de moins de 6 ans. Cela pose problème car si un centre social (ou un hôpital ou tout autre organisme considéré comme un SIEG) est porteur d'un service économique comme la restauration, la collectivité pourrait être obligé de mettre ce service en concurrence. En outre, le mandatement correspond à une obligation de prester un service public ce qui ne correspond pas à la notion d'initiative autonome dans laquelle nous nous inscrivons. Cette inversion est principalement du à un raisonnement qui considère les SIEG comme des exceptions à une règle générale de libre concurrence plutôt que comme un autre mode d'action publique qui a ses propres principes et modalités d'action. Le paquet Monti-Kroes (applicable depuis le 1er janvier 2006) Cet ensemble de directives (« paquet ») vient préciser et alléger l'amplitude d'application de l'arrêt Altmark de 2003. Il vise à réguler les aides d'État supérieures à 200 000€ sur 3 ans 17 qui pourraient fausser la concurrence. C'est au nom de ce paquet que les aides publiques à des entreprises en difficulté accordées par l'État français peuvent être invalidées par la Commission européenne. Elles peuvent être considérées comme une forme de protectionnisme qui vise à favoriser une entreprise nationale au détriment d'une entreprise étrangère (et du consommateur final). Une dérogation est définie pour les SIEG porteurs d'un mandatement de service public mais il interdit de « surcompenser » ces services d'intérêt général. Le principe est d'avoir une juste compensation (et non une subvention, le changement de terme est significatif !) du service d'intérêt général. Les aides ne doivent servir qu’à couvrir le coût du service public. C'est généralement une formule « charges - recettes + bénéfice raisonnable (±10%) ». La circulaire du 18 janvier 2010 a proposé une forme de calcul très compliquée et restrictive. Cette circulaire ne s'applique pas obligatoirement aux subventions accordées par les collectivités locales. uniquement pour l'Allemagne (ce qui n'est pas spécifié dans le texte). 14 Les opérateurs lucratifs sont ainsi implicitement incités à mener des recours pour contester les oligopoles d'intérêt général constitués dans certains secteurs : logement social, complémentaires santés... 15 La loi du 21 juillet 2009 « hôpital, patients, santé et territoires » redéfinit précisément le régime d'autorisation pour le rendre compatible avec la directive Services. 16 Il est possible que la prestation de service « animation globale » fasse office de mandatement ou bien alors les centres sociaux sont considérés comme « des organismes d'accueil communautaires et d'activités solidaires » 17 Ce seuil est apprécié par collectivité publique, toutes aides confondues, en intégrant les éventuelles facilités accordées à titre gratuit par les collectivités (mise à disposition de locaux, de personnel et de matériel) 8 Concernant les centres sociaux : « on peut juridiquement faire autrement ! » Concernant les centres sociaux et les activités contenus dans le cadre de leurs projets, le régime de la commande publique n'est pas une solution juridique obligatoire. C'est une possibilité dans certains cas. Elle résulte alors souvent d'un choix politique de mise en concurrence de la part de la collectivité locale. Concernant le projet « centre social » La collectivité locale n'a pas de compétence exclusive d'animation globale du territoire. Elle peut partager ou non ce souci avec d'autres institutions publiques (la CAF) ou privées (associatives). En réalisant une procédure de délégation de service public (art 144-1e du code CGCT), elle s'arroge une compétence dont elle n'est pas en droit le dépositaire exclusif. L'initiative permet (elle n'est jamais obligatoire par définition) un soutien effectif dans une visée d'intérêt général du projet porté par l'association centre social. L'aide apportée sous la forme d'une subvention est forfaitaire et fongible. Concernant des services portés par les centres sociaux Si l'association est à l'origine du service ou du projet du centre social, le procédure de la subvention doublée d'une convention de fonctionnement correspond à la modalité de soutien normale de la collectivité locale. C'est la notion « d'initiative » qui est au cœur de la distinction juridique. Il faut être particulièrement vigilant dans la rédaction de la convention à ce que les mots ne laissent pas induire le fait que certains services ou activités sont issus de la collectivités ou bien que celle-ci bénéficie de contreparties directes. La mention d'intérêt général doit être spécifiée. D'autre part, la présence d'indicateurs d'activités comprend un risque de requalification de l'activité sous la forme d'un marché public. Si c'est la collectivité locale qui est à l'origine du service porté par le centre social, le nouveau code des marchés publics mentionne les services dispensés de procédure de mise en concurrence obligatoire. On est dans le cas des marchés sans formalité préalable qui ne sont pas soumis à une procédure obligatoire de DSP ou d'appel d'offres. Ils sont spécifiés dans le décret n°2001-806 du 7 septembre 2001 : sont concernés notamment les services sociaux (dont les services d'accueil à la petite enfance, d'accueil, de réinsertion, d'aide à domicile en faveur des personnes âgées, handicapées ou en difficulté) et les services récréatifs, culturels et sportifs (dont les services de centres de vacances et de centres de loisirs sans hébergement, les séjours jeunes, les services d'animation culturelle et socioculturelle, les actions éducatives péri et post-scolaires) Par ailleurs, nous relevons que la distinction entre les régimes de la commande publique et de la subvention tend à s'effacer au regard des pratiques mais dans un sens unilatéral : celui d'une plus grande intervention de la puissance publique dans la définition des activités, de leurs finalités comme de leurs modalités d'exécution. On peut ainsi retrouver des conventions d'objectifs qui proportionnent le montant de la subvention à la réalisation d'objectifs quantifiés (ce qui peut entraîner une requalification en marché public). On se trouve souvent dans ce cas de figure avec les Contrats Enfance Jeunesse. Nous devons donc être vigilant dans ces cas là. Cependant, l'argumentation juridique ne suffit pas à l'analyse. Il faut la compléter par une analyse économique et politique avant de décider de notre stratégie. 9 3. Analyse économique L'analyse économique se concentre sur les conditions de la production, de la distribution et de la consommation des biens et des services. Dans cette partie, nous étudierons les effets du développement des marchés publics sur la viabilité économique des centres sociaux et sur les conditions d'emploi. On peut constater un certain nombre d'effets des marchés publics : − Dans un grand nombre de cas, le marché est créé par la solvabilisation institutionnelle de la demande et par la déréglementation ce qui accélère les processus de marchandisation. Cela permet alors au secteur lucratif de pénétrer des secteurs d'intérêt général afin d'y faire du profit (à redistribuer à ses actionnaires). On a ainsi pu voir une filiale de Vivendi répondre à l'appel d'offre concernant le centre social de Valence en 1998 ou bien la Sodexho sur celui de Thonon en 2000. − La qualité du service (relation professionnel-personne concernée) peut être équivalente dans un marché. Cependant, on constate que la définition d'indicateurs de résultats concentre l'attention des acteurs et détourne d'une visée plus générale, d'une évaluation permanente orienté vers les objectifs définis avec les habitants plutôt que ceux défini dans le cadre du marché public (le plus souvent réduit à la dimension de gestion financière 18). Cela peut créer alors des logiques de tri des publics (au détriment des publics qui sont les plus concernées par les inégalités) et une inattention au travail qualitatif fourni. Mais cette situation peut exister dans bien d'autres cas que dans celle d'un marché public. − Les formes de l'action sont souvent codifiées et uniformisées19. Par exemple, les modalités d'organisation des loisirs des enfants ne pourrait plus se faire sous la forme d'une animation de rue mais uniquement dans les formes définis par la puissance publique (le centre de loisirs sans hébergement). Les réponses au cahier des charges doivent pouvoir être comparables. Il doit donc être précis car sinon il pourrait être l'objet de recours. Cette précision empêche l'innovation. Pourtant, c'est là l'un des moteurs du développement économique d'une société 20 et du projet des centres sociaux agréé par les CAF. − Les conditions d'emplois et les compétences professionnelles sont souvent réduites afin d'être compétitif alors que le secteur associatif a tenté de progresser ces dernières années dans une réduction des temps partiel subi et une amélioration des rémunérations. Si le marché public permet de « sauver » un emploi à court terme, il le précarise ou amène à sa suppression à moyen terme. En effet, l'équilibre économique de l'activité devient déterminée par le résultat et non par le projet. Au centre social de Solaure, la salariée accompagnait une vingtaine de personnes mais le « lot » du marché était de 50 personnes mais il est rémunéré en fonction de l'accompagnement effectivement réalisé (et non pour une charge mensuelle). Au départ, il y avait moins de 5 personnes ce qui a déstabilisé la stabilité financière du poste. S'il y en a plus de 25, on se trouverait au contraire dans une situation de surcharge qui obligerait à embaucher des « intérimaires ». On voit le lien entre l'accroissement de la logique de marché et la précarisation des conditions d'emploi. 18 Les critères d'attribution du marché public des centres sociaux de Vienne sont les suivants : « Offre économiquement la plus avantageuse appréciée en fonction des critères énoncés ci-dessous avec leur pondération : - la valeur technique jugée sur un mémoire technique : le budget annuel détaillé par structure (30%) ; la méthode d'organisation par structure détaillant dont l'organisation de la masse salariale (10%), la capacité à intégrer l'équipement dans les politiques publiques locales, régionales et nationales (10%), l'organisation des activités (5%) ; les propositions de nouvelles actions (15%) - le prix des prestations (30 %) qui sera analysé selon la formule suivante : C x [ 1 - [(Po – pmini)/Pmini]] avec C pourcentage affecté au critère prix ; Po étant le prix de l'offre analysée ; Pmini étant le prix de l'offre la plus basse ou le prix de l'estimation de l'administration ou du maître d'oeuvre si cette estimation est inférieure au montant de l'offre la plus basse. » http://www.klekoon.com/boamp/boamp-appels-offres-gestion-centres-sociaux-municipaux-vienne-1212653.htm 19 On trouve ainsi sur Internet des modèles de gestion de cahier des charges pour la gestion par affermage de centres sociaux. En vente pour 120€ sur www.modeles-experts.com 20 Contrairement à d'autres théories économiques défendues comme celle défendue par Joseph Schumpeter qui place l'innovation au cœur du développement du système économique, Théorie de l'évolution économique, 1913 10 − Si les marchés publics peuvent être mis en place pour « casser » des monopoles de fait, ils contribuent à en créer d'autres indirectement. En effet, la capacité de petites structures à répondre à des marchés publics de grande taille étant restreinte, celles-ci sont amenées à disparaître et à laisser la place à des monopoles associatifs ou lucratifs qui sont seuls en capacité d'avoir l'infrastructure (de production) permettant de répondre à des « lots » importants sur des territoires très étendus. − Les marchés publics sont souvent économiquement inefficace à moyen terme. La masse de ressource est réduite au monétaire. Elle s'en trouve diminuée (le bénévolat n'est plus d'aucune utilité donc tend à se réduire). En outre, l'évaluation des modalités de l'action doit coller avec les temps institutionnels de renouvellement des marchés plutôt qu'avec les évolutions de l'action elle-même. − La commande publique va remettre en cause le régime fiscal des associations à terme. Celui-ci est fondé sur les « 4P » : le produit fondé sur le projet, le public socialement digne, le prix inférieur au marché, l'absence de publicité. Dans un marché, tout change : le produit est prédéfini ; le public c'est la commune (l'usager l'est indirectement) ; le prix est défini par la commune ; la publicité devient obligatoire. On aurait plus alors d'arguments juridiques pour être exonéré d'impôts21. L'analyse économique ne suffit pas à valider le refus des appels d'offres. Car elle se limite à une dimension gestionnaire en effaçant les objectifs du projet (le fait de ne pas seulement délivrer un service mais de le faire dans une visée plus large avec des motivations éthiques et politiques) et ses conditions (la capacité de dialogue démocratique entre habitants et élus sur ce qui constitue l'intérêt général pour un territoire donné). C'est en cela que l'analyse politique est indispensable. 4. Analyse politique L'analyse politique se concentre sur l'organisation et l'exercice du pouvoir par les différents acteurs d'une société donnée. Elle permet d'étudier la manière de décider ce qui constitue le bien commun. Causes du développement des marchés publics « pourquoi un élu politique déclenche-t-il un appel d'offres ? » La première raison c'est l'émergence de besoins propres qui ne sont pas de l'initiative des associations et qui ne peuvent se traduire autrement que par des commandes publiques. La seconde raison identifiée est l'alerte déclenchée par des services juridiques qui cherchent à « sécuriser les relations de financement entre collectivités et prestataires » à partir d'une grille de lecture dominante (celle des marchés publics) et par des arguments d'autorité (« on ne peut pas faire autrement »). Les risques de condamnation au pénal déclenchent une peur de se tromper. Il existe un code des marchés publics et pas de code du partenariat. Donc on évoque la possibilité de contestation. Or, aujourd'hui, les contestations se font quasiment toujours sur des marchés publics (par des concurrents non sélectionnés) et non sur les subventions. La troisième raison identifiée est la volonté de certaines collectivités locales de pouvoir s'approprier et afficher la propriété de certaines actions (pouvoir communiquer sur un projet qui 21 Cet argumentaire concernant la fiscalité a été développé par Brigitte Clavanier, avocate à JurisAssociations, lors d'une conférence organisée par l'Union régionale le 27 novembre 2009 à la CAF de Lyon. Cette inquiétude peut être confirmé par le positionnement de certains députés comme cette question écrite au Gouvernement posée le 24 février 2004 par Francis Falala : « M. Francis Falala appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire sur les pratiques de certaines associations, MJC, centres sociaux ou autres comités d'entreprises dispensant des activités dans des secteurs concurrentiels et à des prix identiques à ceux du secteur commercial. En effet, il semble que, du fait de leurs statuts, ces structures échappent de facto à l'assujettissement à la TVA dans ce domaine. Aussi, il souhaite être renseigné sur le caractère légal ou non de ces usages ainsi que sur les recours éventuels dont disposent les acteurs privés, afin de les empêcher ou de les restreindre. » 11 est le sien). Cela permet également de pouvoir communiquer sur les projets comme étant ceux de la puissance publique. Cette question de la visibilité de l'action publique de soutien à des associations mériterait d'être creusée. La quatrième raison est la préoccupation de gestionnaire de certaines collectivités qui peuvent ainsi mieux contenir les évolutions budgétaires dans leurs relations contractuelles. Les marchés publics se font avec une somme donnée qui ne pourrait être rediscutée et serait garante d'une bonne gestion. La concurrence est alors considérée dans sa valeur performative : « que le meilleur gagne ! ». Cela permet de réguler l'augmentation des besoins, la multiplication des initiatives associatives et la limitation des ressources avec un minimum de conflits. La cinquième raison va être de pouvoir contester le pouvoir d'associations autonomes sur leurs territoires. Ces associations sont alors considérées comme des monopoles, fonctionnant avec des « rentes de situations ». Les marchés publics sont alors un moyen de définir unilatéralement un cahier des charges et de choisir l'autres prestataires au détriment de certaines associations entendues comme des contre-pouvoir. Motivations et vision du monde des acteurs prônant les marchés publics On pourrait également élargir le champ de la réflexion et prendre en compte des représentations qui induisent les procédures de marchés publics : 1. La croyance que la concurrence est seule garante de l'efficacité, de la lutte contre les monopoles et la procédure la plus économe. Cette pensée utilitariste est dominante notamment dans l'élaboration des directives cadres de l'Union Européenne qui vise à établir une « concurrence libre et parfaite » dans tous les domaines de la vie socioéconomique. C'est également la jurisprudence de la Cour de Justice de la Communauté Européenne qui assimile les associations à des opérateurs économiques soumis aux règles de la concurrence – ceci sous l'influence forte, permanente et systématique du patronat néolibéral22. Cette tendance européenne est relayée par des acteurs publics nationaux qui vont parfois plus loin que ces règles européennes 23. On voit ainsi une extension de la sphère marchande où les associations n'ont été que des intermédiaires (sphère familiale → bénévolat → salariat associatif → salariat lucratif). Aujourd'hui, on leur demande soit de se transformer pour être dans le marché, soit de se retirer... 2. La croyance dans la définition unilatérale de l'intérêt général24. L'intérêt général est pris en charge par les politiques élus démocratiquement. Les associations devraient donc se concentrer sur ceux qui en ont le plus besoin, sur les laissés pour compte ce qui revient à entériner la fracture sociale. Les associations ne peuvent plus contribuer à la définition de l'intérêt général de manière autonome et à un projet de solidarité pour tous. Elles doivent accompagner les évolutions de l'économie moderne (sous-entendu marchande). Il n'y a plus de société civile autonome (mais subordonnée dans l'exécution). Ce qui est difficilement compatible avec l'animation de groupes d'habitants qui définissent leur propre intérêts, leurs diagnostics et leurs modalités d'exécution. 22 Cf : « Concurrence : marché unique, acteurs pluriels. Pour de nouvelles règles du jeu », Medef, mai 2002 et notamment le chapitre sur « l'économie dite sociale. Un secteur en pleine évolution arc-bouté sur ses privilèges » qui dénonce tout à la fois les subventions importantes, la fiscalité privilégiée, la législation sociale dérogatoire, la captation des valeurs... Il propose « d'intégrer le secteur social dans le marché concurrentiel » ou bien de « solvabiliser la demande en matière d'action sociale, plutôt que de subventionner l'offre » www.medef.fr/staging/site/php?pag_id=302 23 Rapport « Pour un partenariat renouvelé entre l'État et les associations » remis en 2008 à Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, de la Jeunesse et des Sports qui recommande le passage « d'une culture de la subvention à celle de la commande publique ». Même si d'autres rapports (mission d'information de l'Assemblée Nationale) propose la généralisation des contrats d'objectifs pluriannuels. 24 En terme philosophique, cela revient à la théorie néolibérale des contrats où l'utilité publique est définie par le seul commanditaire et présumée traduite en objectifs de service en amont (hors du déroulement effectif de l'action elle-même). Elle permet en aval, le contrôle du commanditaire avec des « indicateurs » à la clé. 12 3. La croyance que seul l'économie marchande est productrice de richesses. Les solidarités naturelles, les formes auto-organisées et non monétaires de réponses aux besoins sociaux n'ont aucune valeur. La modernité tend à séparer les faits et les valeurs, l'utilité du service et ses modalités. Cette distinction ne permet plus de juger une action à sa manière d'être exécutée mais au fait qu'elle le soit. Ce n'est plus la manière de travailler à la lutte contre la pauvreté, à l'éducation des enfants... (celle-ci est prédéfinie dans le cahier des charges) mais ses résultats effectifs. Les effets indirects et à moyen terme ne sont plus estimées comme importants dans le cours de l'action. Ainsi, dans un groupe de femmes qui apprennent le français, ce qui comptera ce n'est pas le fait qu'elles aient pu accéder pour certaines d'entre elles au Conseil d'Administration, que le groupe ait fonctionné de manière démocratique, qu'elles aient acquises une manière d'apprendre sur elles... mais qu'elles parlent ou non le français. Pourtant, ce n'est pas là leur seule motivation pour participer à l'action collective. Le service et l'utilité annoncée est une réduction de l'action engagée, des apprentissages réalisées et du pouvoir développé. En bref, l'utilité sociale ne se réduit pas l'utilité économique mais également elle n'est pas porteuse en elle-même d'une perspective de cohésion et de justice sociale, d'un respect de la dignité de toutes les personnes et d'un fonctionnement démocratique. Le droit et l'évolution des formes de financement des politiques publiques vient valider cet état de fait qui est avant tout caractérisé par le fait que les politiques publiques se donnent comme principal objectif la croissance du Produit Intérieur Brut 25. 4. La croyance que l'homme se définit principalement par ses besoins. En effet, toute la politique publique nationale et européenne se structure progressivement autour de la notion de service avec d'un côté une offre et de l'autre une demande. Ce service vise à combler des besoins des êtres humains. Si cela correspond à une réalité, cela réduit également considérablement. En effet, les êtres humains ne se réduisent pas à des demandeurs de services. Ils ont également des sentiments, des ressources, des convictions, des projets, des savoirs, du pouvoir d'agir qui rendent la vie sociale plus riche et diverse que la vie économique marchande. Toute l'activité humaine peut être regardée avec les lunettes des « services » mais c'est considérablement réducteur et appauvrissant au regard d'une certaine idée de la civilisation. L'économie subordonne le « social » et le « politique ». Ces objets (au sens de l'article 1 des statuts des associations) n'ont pas leurs règles propres mais sont subordonnés aux règles économiques du marché libre et non faussé. Contradictions politiques avec le projet des centres sociaux Nous détaillons ici les contradictions politiques avec notre projet : Les habitants sont mis à la porte de la définition des problèmes qui les concernent26 − La procédure de délégation de services publics prévoit un cahier des charges public sans la consultation des associations et des personnes concernées. Ce cahier des charges définis précisément la mise en œuvre du projet. Or, pour nous, le projet social doit être élaboré par l'équipe du centre social avec les habitants et ne peut donc se présumer au départ. Ce sont les « habitants associés appuyés par des professionnels » qui ont l'initiative du projet et du service aux habitants. Cela contrevient donc à nos à nos manières de faire (inscrites dans notre Charte) et avec la procédure d'agrément des CAF. − Les missions du centre social doivent être définies sur l'initiative des « habitants associés » dans un dialogue avec les partenaires du centre social (dont la CAF et la collectivité locale). Dans le cas d'un marché public, le cahier des charges est défini unilatéralement par la collectivité locale ce qui va à l'encontre d'un projet d'émancipation 25 Cf rapport de Patrick Viveret (Reconsidérer la richesse) qui propose de créer de nouveaux indicateurs de richesse 26 Cet argument interroge le fait que nous puissions reconnaître comme adhérents des centres sociaux municipaux sans comités d'usager exerçant un pouvoir effectif sur le projet social et ses modalités. 13 porté par des habitants. La place des habitants s'en trouve réduite au mieux aux conditions de mise en œuvre d'un projet défini unilatéralement. Certains tenants des marchés publics prétendent que la constitution de « comité d'usagers » permettrait de répondre à cette préoccupation de participation des habitants. Ils confondent en cela l'exercice de la fonction d'animation et le pouvoir de définir de manière autonome ses buts et modalités d'exécution. La liberté de codéfinir le cahier des charges ne peut être inscrit dans le cahier des charges d'un marché public qui vise l'exécution d'un service précis selon des modalités précises. C'est notre conception de la démocratie qui est en jeu ! − Cette évolution concerne l'ensemble des associations de l'éducation à l'environnement au travail social en passant par le travail d'accompagnement social et juridique en centre de rétention, la prévention spécialisée, le temps périscolaire... Elle traduit une évolution du rapport de force et une volonté renouvelée de transformer le secteur associatif en prestataire plutôt qu'en partenaire de la puissance publique. Cette situation fait fi d'une conception de la démocratie où une pluralité d'acteurs contribuent à la définition de l'intérêt général par la délibération démocratique27. Elle s'appuie sur une conception de la souveraineté incarnée exclusivement par l'État et des collectivités locales. Elle passe sous silence la contribution de l'action collective de citoyens associés à la définition bien commun. Et réduit la part d'autonomie de la vie associative. Dans la Charte nationale des centres sociaux, il est d'ailleurs affirmé que les centres sociaux visent « un projet d'intérêt général pour l'ensemble de la population d'un territoire » mais également plus loin que « Les centres sociaux n'agissent pas seuls. Ils connaissent les autres acteurs associatifs, administratifs, politiques ou économiques de leur territoire de projet. Ils nouent avec eux les relations nécessaires aux actions à conduire. Ils formalisent de préférence ces relations dans des conventions de partenariat. Par contre, ils n'entendent pas être instrumentalisés ni devenir de simples prestataires de services ou réduire leur projet social à des délégations de service public. » − Dans cette situation, la fonction d'interpellation de l'État et des pouvoirs publics ne peut plus s'exercer puisque l'association est tributaire de la prestation de service. Cette fonction, indissociable de notre conception de l'association, peut également ne pas être exercée alors que l'association est financée par des subventions mais elle n'est pas exerçable dans le cas d'un marché public ce qui comporte une différence importante. Dans un cas, on n'utilise pas une liberté que l'on a. Dans l'autre, on n'a pas cette liberté. Les marchés publics ne sont pas garants de l'efficacité des interventions sociales et éducatives − La procédure de marché public ne prend pas en compte l'existence d'un projet global territorialisé. Elle distingue des services et les segmente en « lots » selon une définition administrative du territoire. Elle contrevient ainsi à un projet social intégré. Le territoire du marché ne correspond pas forcément au territoire de vie sociale et il devient alors impossible d'organiser des passerelles pour la personne accompagnée entre son entrée dans le centre social et d'autres activités. Les intervenants sont alors de moins en moins à l'écoute de leurs territoires d'intervention puisqu'ils ne considèrent plus que les conditions du marché et non le contexte d'intervention. La solidarité de proximité n'est plus une condition indispensable de l'action. Enfin, sans territoire d'intervention fixe, les structures deviennent concurrentes comme c'est arrivé sur une commune de la Loire entre centres sociaux fédérés pour l'accompagnement social individualisé. − D'autre part, il y a également une rupture dans le temps puisque les marchés publics sont renouvelables régulièrement. Si nous ne sommes pas contre ce renouvellement en théorie (renouvellement périodique du projet), nous tenons à ce qu'ils puissent s'envisager avec des acteurs associatifs pérennes. Car c'est avec les personnes concernées que l'on doit définir le projet éducatif pour leurs enfants, le projet de développement avec les adultes. C'est dans cette considération politique pour la communauté locale que l'on envisage notre 27 Cette conception de la démocratie a plus de deux siècles et fut pour la première fois évoquée par Alexis de Tocqueville dans « De la démocratie en Amérique » 14 intervention plutôt que sur le marché du social. La durée est une composante élémentaire de la relation de confiance nouée avec les habitants. − La définition de toute activité sous la forme de « services » met à distance la demande des personnes (à partir de leurs besoins et de leurs problèmes) afin de constituer une offre. Le problème n'est pas coconstruit. L'institution n'a pas sa part dans la responsabilité du problème qui appartient aux personnes. Les personnes ne sont pas des marchandises que l'on peut découper en « lots », « places », « marché » et où les réponses d'intervention peuvent être mises en concurrence. Elles ont une dimension personnelle et politique imbriquées et inséparables. Le passage au marché public éloigne le commanditaire des préoccupations que vivent les publics visés. Cette mise à distance symbolique et technique fait supporter à « l’opérateur » la charge des situations et des réalités complexes des publics concernés. Le programme institutionnel du commanditaire ne participe plus à une production de sens partagé avec les personnes concernées. − Le centre social n'est plus ouvert à tous. En effet, le marché public cible ses publics, les évalue et les contrôle (afin de pouvoir mettre en concurrence et évaluer ses prestataires). Ainsi, le centre social de Solaure n'accompagne au titre de l'Accompagnement Social Individualisé que les publics relevant de la seule décision du Conseil Général. − Les structures qui répondent aux DSP sont de grandes associations spécialisées dans la gestion des équipements de proximité. Le projet social ne repose plus sur une association située sur un territoire à partir de ses habitants mais sur une organisation de service fondée d'abord sur une professionnalité. L'opérateur professionnel doit avoir des savoir-faire et des techniques pour agir sur un secteur balisé, circonscrit à des catégories de publics. Le professionnel se trouve souvent dans une forme individuelle d'intervention. L'autonomisation et la sectorisation de l'intervention peuvent rapidement s'exonérer d'une référence au projet associatif et au projet social de la structure pour se cantonner aux seuls attendus indiqués par le marché public. 15 5. Analyse stratégique : répondre ou ne pas répondre ? Si politiquement, on peut regretter que les procédures de marché public se développent dans le financement de l'intervention sociale et éducative, il y a des divergences sur la position à adopter face à ce développement. Il existe deux grandes postures stratégiques qui ont leurs nuances : Les marchés publics existent. Il faut y répondre en essayant d'influer sur les critères des cahiers des charges pour faire reconnaître la spécificité des associations (dont les centres sociaux). Il ne faut pas laisser le terrain aux entreprises privées lucratives. Les marchés publics existent mais ne sont pas une fatalité. On peut influer sur la commande publique afin qu'elle reconnaissent et adopte le plus possible des formes de contractualisation qui se situent dans le régime de la subvention. Ces postures ne sont pas entièrement contradictoires. Mais face à un marché public donné, on ne peut pas à la fois le contester et y répondre (donc reconnaître sa légitimité). De plus, dans une vision stratégique (à moyen et long terme), elles ont des conséquences très différentes. C'est pourquoi il est préférable de les prioriser. 1. Définir un choix stratégique Nous proposons donc « a priori » de refuser la forme des marchés publics comme mode de financement pour les centres sociaux. Cette position transformatrice nécessite de réaffirmer des convictions et un projet associatif solide. Elle permet de conserver une position de partenaire, d'égal à égal avec les pouvoirs publics mais nécessite de faire des gains rapides sur certaines situations pour ne pas se retrouver dépassé par un développement rapide des marchés publics dans notre secteur. 2. En tirer les conséquences Cela a notamment comme conséquence de se réinterroger sur le financement pérenne du cœur de métier (l'animation globale) et sur les exceptions possibles à cette position (répondre à certains marchés publics dont l'intérêt et les conditions sont maîtrisées et limitées) cela afin de pouvoir prendre en compte la question de l'emploi qui est souvent posé comme l'un des vecteurs du choix. D'autre part, cela nous oblige à revoir un certain nombre de conséquences : − Comment associons nous effectivement les habitants à la définition des problèmes et des solutions qui les concernent (du diagnostic participatif lors de l'élaboration du projet social à sa stratégie de mise en œuvre) ? - et pas seulement à l'exécution d'actions − comment pouvons-nous et souhaitons nous évaluer notre projet d'animation globale ? À partir de quels procédures et indicateurs ? − Comment continuons nous d'exercer effectivement notre fonction d'interpellation des pouvoirs publics ? − Comment valorisons nous les ressources non monétaires de notre projet ? − Comment nous associons nous pour répondre ensemble aux défis qui dépassent les territoires locaux d'intervention (en conservant l'initiative) ? − Comment sommes-nous vigilants lors de la contractualisation sous la forme de subvention à rester dans l'esprit de la loi et à conserver de l'autonomie ? 16 6. Déclaration de principe et recommandations Le développement des marchés publics dans le secteur de l'intervention sociale et éducative remet en cause les fondements de notre projet associatif. C'est pourquoi nous interpellons l'ensemble des acteurs publics et associatifs sur le fait que le projet associatif doit rester l'élément central de la relation aux pouvoirs publics. 1. Nous demandons donc aux collectivités locales de financer les centres sociaux et l'ensemble de leurs activités à travers des conventions claires et précises à travers un régime de subvention. Cette demande est politiquement et juridiquement recevable. Le positionnement politique de la CNAF indique sa préférence pour ce mode de conventionnement concernant les centres sociaux. 2. Pour répondre aux contraintes internes des pouvoirs publics, nous nous engageons à progresser dans la manière d'évaluer (au sens de délibérer collectivement sur la valeur) nos projets. Cela afin de vérifier l'hypothèse que la coopération « vaut » la concurrence dans son efficacité à moyen terme. Position politique du réseau fédéral Rhône-Alpes Refuser toute adhésion-reconnaissance pour des centres sociaux en gestion DSP (choix réalisé par les conseils d'administration des fédérations départementales sauf 38) Donner des clés d'analyses à tous les centres sociaux pour comprendre ce qui est en jeu dans une la décision de répondre ou pas aux marchés publics. Susciter le débat à la fois dans les fédérations et les centres sociaux. (réalisé par les conseils d'administration des fédérations départementales sauf 38 et des comités de directeurs de centres sociaux) 1. Pour prendre conscience que les choix individuels ont des conséquences collectives sur l'élargissement de la logique de marché dans l'intervention sociale 2. Pour distinguer leur cœur de métier autour de l'animation globale (action sociale et éducative collective comprenant les activités socioculturelles, les centres de loisirs, l'accompagnement de projet et le soutien à la vie associative) et les autres actions et services (accompagnement individuel, services à la personne de proximité, insertion, services de garde de la petite enfance...) aux périphéries du projet social. Conseiller aux centres sociaux le refus de répondre à ces appels d'offres quand ils concernent le cœur de projet des centres sociaux (réalisé par les fédérations départementales sauf 38) Envisager une position spécifique concernant les services de garde de la petite enfance dont l'environnement concurrentiel se développe fortement : soit ne pas répondre ; soit externaliser la réponse à travers une association ad-hoc ; soit … ??! (non réalisé) Conseiller aux centres sociaux de ne répondre aux appels d'offres sur des activités annexes au cœur de projet que sous certaines conditions (réalisé auprès de certains centres sociaux : Beaurepaire, Bron, centres sociaux ardéchois...) 1. Comparer le cahier des charges avec le projet du centre social et son diagnostic. 2. Vérifier que c'est bien la collectivité locale qui est à l'origine du service (et pas une autre association du territoire qui est démantelée) 3. Envisager les conséquences du portage de cette activité sur le cœur du projet social. 4. Envisager la conformité du territoire du marché public avec celui du centre 17 social. 5. Envisager l'absence de concurrence avec d'autres centres sociaux ou associations d'habitants. 6. Envisager la capacité à influer le cahier des charges afin d'intégrer les intérêts et le diagnostic des habitants. Notamment en refusant la clause du moins-disant pour celle du « mieux-disant » 7. Organiser un débat en Conseil d'administration car c'est toujours un choix politique de répondre à un marché public. 8. En tout état de cause, viser moins de 5% du budget du centre social soit concerné par des appels d'offre à l'horizon 2020 Sensibiliser les CAF de la région Rhône-Alpes afin qu'elles adoptent une position claire en direction des collectivités locales finançant des centres sociaux (organisation d'une demi-journée de débat le 27 novembre 2009 à Lyon). Réaliser avec les CAF un travail de promotion de conventions qui sécurisent les subventions dans une visée d'intérêt général et dans le cadre de la démarche impulsée par la FCSF sur les pactes de coopération (réalisé en novembre 2010 à Lyon) Créer un collectif associatif régional (FJT, MJC, GRAINE, URIOPSS, CCO...) contre la multiplication des marchés publics dans les secteurs de l'éducation et de l'intervention sociale. Avec ce collectif, lancer une campagne d'information conjointe en direction des élus politiques et des services juridiques des collectivités locales et des préfectures au printemps 2010 (non réalisé) Investir les instances représentatives des associations (CRAJEP, CPCA) afin de promouvoir cette position. (réalisé au sein du CRAJEP en 2009, animation d'une réflexion en AG, portage lors des élections régionales, faible au sein de la CPCA) Être présent dans les formations du CNFPT sur ces questions de relations entre collectivités locales et associations afin de mieux présenter les subventions (non réalisé ; intervention d'un directeur de centre social dans des formations privées pour les fonctionnaires territoriaux) Action à engager à un niveau national et européen Faire pression sur les pouvoirs publics nationaux pour que l'Etat français refuse le développement de la logique de marchés dans l'intervention sociale et éducative (amorcé lors d'une audition par une commission du Sénat sur l'impact des directives européennes sur les associations en mai 2010) Être présent dans les formations de l'école Nationale de la Sécurité Sociale pour présenter les enjeux autour de cette question alors qu'aucune formation n'existe pour présenter les subventions et les centres sociaux à ce jour. Se mobiliser au sein du collectif SSIG pour faire adopter une directive cadre sur les « services sociaux d'intérêt général » afin de sécuriser leur constitution hors d'une logique de marché et de ne pas laisser de place à une interprétation jurisprudentiel de la Cour de Justice des Communautés Européennes. 18 7. Ressources juridiques et politiques Ressources juridiques « La subvention publique, le marché public et la délégation de service public. Mode d'emploi. », Ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, 2007. http://www.associations.gouv.fr/IMG/pdf/Mode_d_emploi.vf01.05.2007.pdf Les textes de lois et les décrets sont disponibles sur www.legifrance.gouv.fr − Articles 144-1 et suivant du code générale des collectivités territoriales portant sur « la délégation de services publics ». − article 30 du code des marchés public relatif aux « marchés public de service » − Décret n°2001-806 du 7 septembre 2001 fixant la liste des services relevant des catégories mentionnées par l'article 30 du code des marchés publics − La circulaire du 18 janvier 2010 relative aux relations entre pouvoirs publics et associations Ressources politiques − Charte de la FCSF, adoptée le 18 juin 2000 à Angers − « Les centres sociaux et la délégation de service public », Lettre Circulaire LC 264-97, 9 octobre 1997, CNAF − Annexe à la lettre fédérale n°86 de la FCSF portant sur les marchés publics − Guide SSIG, Une Europe protectrice des services sociaux, réalisé par le Collectif SSIG, www.ssig-fr.org − Danièle Demoustier, Réponses au Medef, 2002, www.rhone-alpes.centressociaux.org/spip.php?article41 − Patrick Viveret, Reconsidérer la richesse, 2002, Rapport au secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. Rédaction : Manu Bodinier Version 1.1 8 avril 2009 Version 1.2 Suite à un comité des délégués et un Conseil d'administration : 19 mai 2009 Version 1.3 Avec l'intégration des remarques de Pierre Cristin et Paul Maguin (situation dans les centres sociaux de la Loire), de Jérôme Bar, de Benoit Vandoolaeghe : 27 juillet 2009 Version 1.4 Avec quelques modifications et la citation de la Charte nationale de la FCSF (indiquée par Loic Murgue) ; les références Internet ; la journée du 27 novembre 2009 avec les CAF de la région Rhône-Alpes et l'intervention de l'avocate spécialisée Brigitte Clavagnier ; la note réalisée par Christiane Zimmer et César Ghaouti concernant la transposition de la directive Services : 9 décembre 2009 Version 1.5 Avec l'apport de la circulaire du 18 janvier 2010 Version 1.7 Novembre 2010 après l'intervention d'Yves Delaire, avocat, lors d'une journée régionale. Pour citer cet article : BODINIER Manu, Marchés publics et centres sociaux associatifs, Document de travail de l'union régionale des centres sociaux Rhône-Alpes, novembre 2010, 20p. 19