discriminations, de quoi parle-t-on

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discriminations, de quoi parle-t-on
DISCRIMINATIONS, DE QUOI PARLE-T-ON ?
Faites le point de vos connaissances (réponses)
1. Les concours de la fonction publique française sont accessibles uniquement aux personnes
de nationalité française ou européenne.
oui, mais il s’agit d’une discrimination légale.
Une différence de traitement est faite en raison d’un critère de nationalité, ce critère faisant
partie de ceux listés dans la définition des discriminations. Cette situation est bien une situation
de discrimination. Néanmoins, c’est aussi la loi qui ferme ces concours aux étrangers. Il s’agit
donc d’une restriction « légale ». D’autres exemples existent de différence d’accès aux droits en
fonction de la nationalité : droit de vote, emplois réservés, droit pénal spécifique.
2. Un employeur annonce que « les Portugais sont plus entrepreneurs que les Maghrébins ».
non.
L’employeur ne fait qu’annoncer. Il n’y a pas d’acte mentionné. Il ne s’agit dont pas d’une
discrimination. L’employeur porte un jugement de valeur en caractérisant un ensemble humain
par des caractéristiques qui valent pour chaque individu relevant de cet ensemble, et identifie
une hiérarchie par rapport à un autre ensemble humain. Il s’agit donc d’un propos raciste
3. Une jeune fille n’est pas recrutée par une agence d’hôtesses d’accueil, car elle mesure
moins d’1,70 m.
oui
Des restrictions au principe de non-discrimination peuvent être apportées par l’employeur dès
lors que deux conditions cumulatives sont remplies : une restriction doit être d’une part justifiée
par la nature de la tâche à accomplir, et d’autre part proportionnée au but recherché. Dans le
cas cité, il y a un traitement inégal en raison de l’apparence physique et rien ne dit que la taille
demandée est justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché. Il s’agit donc
d’une discrimination.
4. Un employeur embauche un homme algérien plutôt qu’un tunisien parce que l’équipe dans
laquelle il sera amené à travailler est composée en grande majorité d’algériens.
oui.
Il y a un acte qui aboutit à écarter un tunisien du recrutement en raison de sa nationalité. Il
s’agit donc d’un cas de discrimination (la discrimination en raison de l’origine ne se fait pas
seulement au profit de français !). Par cet acte, l’employeur dit vouloir « prévenir un risque »,
celui d’avoir à gérer des situations de tensions entre tunisiens et algériens. Bien que ces
tensions puissent exister, son acte aboutit à ce que soit systématiquement attribué à un individu
les caractéristiques de ce qui est considéré comme un ensemble.
5. Un employeur embauche une jeune fille asiatique plutôt qu’une Française comme couturière
parce que les asiatiques sont plus minutieux.
oui
La jeune fille est embauchée plutôt qu’une autre en raison de son origine, elle-même associée
à une compétence. Il y a donc une discrimination envers la jeune fille française. L’acte
discriminatoire est expliqué par un jugement de valeur raciste différentialiste.
6. Un employeur fait remarquer tous les jours à une secrétaire administrative que ce n’est pas
parce qu’elle est maghrébine qu’elle doit se dispenser d’écrire le Français sans fautes
d’orthographe.
Réponse : On ne peut pas conclure avec ces seuls éléments.
Ce cas s’apparenterait à du harcèlement (éléments à étayer) qui peut avoir un caractère
discriminatoire (mais l’information disponible ne permet pas de faire une comparaison
aboutissant à la conclusion d’un traitement différencié par rapport à une autre personne d’une
autre nationalité).
7. Un jeune homme n’est pas recruté comme pilote car sa vue n’est pas assez bonne.
Réponse : Non
Ce refus d’embauche est lié à une qualité physique attendue justifiée par la nature de la tâche à
accomplir et proportionnée au but recherché. Il ne s’agit donc pas d’un cas de discrimination.
8. Un intermédiaire de l’emploi adresse une liste de 10 personnes à un employeur qui a déposé
une offre. Toutes ont les mêmes qualifications, mais certaines sont étrangères ou ont un nom
à consonance étrangère. Seules deux personnes sont reçues par l’employeur. Elles sont de
nationalité française et ont un nom à consonance française.
Réponse : Probablement, le juge se fera une opinion.
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L’Escale : www.lescale.asso.fr
Le Relais de Sénart : [email protected]
Dans ce cas, il s’agit bien de discrimination puisque toutes les personnes ont la même
qualification et que seules deux sont retenues. Il s’agit d’une opération de testing, qui fournit, en
cas de dépôt de plainte pour discrimination, des éléments de preuves, que l’employeur devra
expliciter, avant que le juge ne se fasse une opinion (aménagement de la charge de la preuve).
9. La part des femmes recrutées dans un secteur professionnel sur une période de 3 ans est de
20 %, alors que la part des femmes dans les écoles et centres de formation du secteur est de
45 %.
Réponse : Ces statistiques peuvent laisser supposer qu’il y a des processus de discrimination indirecte à
l’oeuvre.
Rien ne dit que des personnes prennent délibérément en considération le sexe des individus dans ce secteur pour leur
refuser l’accès à l’embauche. Néanmoins, il existe une grande différence entre la proportion de diplômées femmes et
celle de femmes embauchées dans le secteur. Ces statistiques peuvent laisser supposer qu’il y a des processus de
discrimination indirecte à l’oeuvre, ceci restant à étayer en écartant d’autres variables d’explication (taux de chômage
des diplômés du secteur notamment).
10. Un intermédiaire de l’emploi décide de ne pas mettre en relation un employeur ayant
déposé une offre de carreleur et étant réputé pour ses propos racistes et un jeune Maghrébin
qui a une qualification de carreleur, pour éviter à celui-ci le « casse pipe ». Il propose
néanmoins l’offre à plusieurs jeunes français d’origine.
Réponse : oui
L’intermédiaire de l’emploi fait une différence de traitement entre le jeune d’origine maghrébine et les autres jeunes
d’origine française. Il fait donc une discrimination.
Une action de l’intermédiaire de l’emploi auprès de l’entreprise pour lui rappeler la loi et faire changer ses
représentations (embauche uniquement fondée sur les compétences) aurait dû être prévue.
11. Un demandeur d’emploi refuse de se rendre à un entretien car « de toute façon, ils ne
prennent pas d’arabes ».
Réponse : non
Dans cette situation, le traitement différencié en raison du motif discriminatoire est réalisé par la
personne elle-même. Il ne s’agit pas de discrimination au sens de la loi, mais on peut parler
d ’» auto-discrimination » : la personne se prive de l’accès à certaines ressources (l’entretien)
en raison de son origine. Elle s ’» auto-discrimine » parce qu’elle anticipe la réaction négative
de l’employeur, et d’un cas (qu’elle a pu connaître ou pas), elle fait une généralité qui l’empêche
d’avancer dans sa recherche d’emploi. Elle entre dans un processus de « victimisation ».
12. Un restaurateur qui dépose une offre à l’ANPE demande une personne « qui présente bien,
vous voyez ce que je veux dire… »
Réponse : non
Lors d’un dépôt d’offre à l’ANPE par téléphone, un restaurateur demande une personne « qui
présente bien, vous voyez ce que je veux dire… ». Il n’y a une demande par téléphone avec
des insinuations qui peuvent laisser penser que le restaurateur ne souhaite pas recruter de
personne d’origine étrangère (ou plus largement de personnes de forte corpulence,
d’homosexuel…). Néanmoins, aucun motif discriminatoire n’est mentionné, et qui plus est, il ne
s’agit que d’une demande. Rien ne permet donc d’affirmer qu’il y a (ou qu’il va y avoir)
discrimination. C’est néanmoins le rôle professionnel de l’agent ANPE de faire dire, faire
préciser ce qui est entendu par « vous voyez ce que je veux dire », afin de lever les non dits, de
ne pas laisser passer des propos ambigus ou insidieux, de refuser la connivence. Le rôle de
l’agent est aussi permettre des re-formulations qui confortent ou invalident le diagnostic premier
selon lequel il y aurait une intention de discriminer.
13. Un magasin de vêtements pour jeunes filles embauche une jeune femme sans qualification
plutôt qu’une femme de cinquante ans ayant une expérience de 20 ans dans la vente de
vêtements alors que les deux acceptaient les mêmes conditions de travail.
Réponse : oui
L’employeur peut faire un choix sur des critères discriminants (qualification notamment) mais
pas sur des critères discriminatoires (âge). Il ne semble pas que l’âge, qui est le critère qui a
différencié les deux candidatures, soit dans ce cas un critère proportionné au but recherché et
justifié par la tâche à accomplir. Il s’agit donc d’un cas de discrimination1.
Source :
Agir contre les discriminations dans les zones urbaines sensibles. L’apport des plans territoriaux de prévention et
de lutte contre les discriminations sur le marché du travail (2001-2006)
Délégation Interministérielle à la Ville – FASILD. Paris, juillet 2006
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L’Escale : www.lescale.asso.fr
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