Commandement, autorité et pouvoir dans les organisations
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Commandement, autorité et pouvoir dans les organisations
Commandement, autorité et pouvoir dans les organisations 16 mars 2006 Eric GODELIER HSS2 L’expérience du pouvoir hiérarchique selon Robert Owen (1771-1858) Les premiers pas de directeur d’usine vers 20 ans : n « I looked grave, inspected everything very minutely… I was in with the first [workers] in the morning, and I looked up the premises at night. I continued this silent inspection and superintendence day by day for six weeks, saying merely yes or no to the questions… I did not give one direct order about anything. But at the end of that time I felt myself so much master of my position as to be ready to give directions in every department » Source : Robert Owen, The life of Robert Owen, London, 1967, réed., pp. 31-32 n Les Rapports hiérarchiques selon F.W. Taylor n «!The proper personal relations should always be maintained between the employers and the men; and even the prejudices of the workmen should be considered in dealing with them. The employer who goes through his work with kid gloves on, and is never known to dirty his hands or clothes, and who either talks to his men in a condescending or patronizing way, or else not at all, has no chance whatever of asertaining their real thoughts or fellings. n Above all it is desirable that men should be talked to on their own level by those who are over them. Each man should be encouraged to discuss any trouble which he may have, either in the works or outisde, with those over him. Men would far rather even be blamed by their bosses, especially if the «!tearing out!» has a touch of human nature and feeling in it, than to be passed day by day without a word, and with no more notice than if they were part of the machinery.!» Shop Management p. 148 INTRODUCTION GÉNÉRALE n Comment organiser la hiérarchie et le commandement, autrement dit le pouvoir ? INTRODUCTION GÉNÉRALE n Des enjeux importants : n n n Coordination et contrôle des parties de l’entreprise ou de ses membres Définition de règles pour l’obtention d’une action efficace Construction d’un climat et d’une culture de travail qui dépendent de l’équilibre entre : n n l’implication volontaire (individuelle et collective) et la contrainte ou la coercition. INTRODUCTION GÉNÉRALE I) Des pistes de définition des notions de pouvoir et d’autorité n II) L’organisation de la hiérarchie : relations individuelles et collectives n III) Hiérarchie et représentations sociales des rôles et des comportements n I) Des pistes de définition des notions de pouvoir et d’autorité n Qu’est ce qui définit un leader ? n n n n Deux auteurs de référence : n n n Ses qualités personnelles L’apprentissage d’un comportement Le contexte de l’action Max Weber (1864-1920) Chester Barnard (1886-1961) Pouvoir et autorité : la question des marges et de la stratégie d’acteur Max Weber : pourquoi les individus obéissent-ils aux ordres ? n n Parce qu’ils les croient légitimes (Économie et société, 1922) Distinction pouvoir/autorité : n n n Pouvoir : aptitude à forcer l’obéissance Autorité : aptitude à faire observer volontairement les ordres Comment les organisations légitiment l’autorité ? (typologie du pouvoir) Max Weber : Les 3 types de légitimité dans les organisations n n n Le leader charismatique : « reposant sur la soumission extraordinaire au caractère sacré, à la vertu héroïque ou à la valeur exemplaire d’une personne, ou encore [émanant] d’ordres révélés ou émis par celle-ci » Le leader traditionnel : « croyance quotidienne en la sainteté de traditions valables de tout temps et en la légitimité de ceux qui sont appelés à exercer l’autorité par ces moyens» La domination rationnelle-légale : « croyance en la légalité des règlements arrêtés et du droit de donner des directives qu’ont ceux qui sont appelés à exercer la domination par ces moyens » C. Barnard : La notion d’acceptation du pouvoir et de l’autorité (The functions of the Executive, 1938!) n n Président de la Bell Corp. qui devient ensuite un théoricien et un enseignant 3 apports : n n Une conception coopérative de l’organisation Le pouvoir, un phénomène de délégation « par le bas » : n n n Acceptation d’un ordre pour des raisons subjective (acceptation de la personne et de l’autorité de sa communication) ET objective (système organisationnel) => pouvoir est une relation pas un statut Organisations formelle et informelle Le dirigeant a une fonction morale, stratégique et politique d’organisation de la convergence Pouvoir et autorité : la question des marges et de la stratégie d’acteur (M. Crozier) n Des recherches sur la bureaucratie et ses pathologies/dysfonctionnements : les relations entre membres du personnel d’une agence du ministère des finances n n n Climat était très mauvais (grèves, rotation du personnel,forte activité syndicale) Pour la direction nationale : faiblesse des cadres moyens vis-à-vis des employés. M. Crozier : n n n n les règlements leur ôtaient tout pouvoir formel de fait le directeur de l’agence décide de tout, MAIS forte influence des cadres moyens par l’information Les règles enferment MAIS protègent tout le Monde Pouvoir et autorité : la question des marges et de la stratégie d’acteur (M. Crozier (1922- )) n Des recherches sur la bureaucratie et ses pathologies/dysfonctionnements : le fonctionnement d’une usine de la SEITA. n organisation très centralisée : n n n n n n Rôle déterminant des ouvriers d’entretien : n n n 1 directeur et un sous-directeur (sortis de l’X), des ingénieurs techniques, un corps administratif chargé des achats, des chefs d’ateliers, des ouvriers d’entretien très qualifié, et des ouvriers de production (essentiellement des femmes). Aucun pouvoir des contremaîtres tensions avec les ouvriers de production « subordonnés » par les « entretiens » Marges dues aux pannes, position de la DG et cercle vicieux II) L’organisation de la hiérarchie : relations individuelles et collectives n n Un rappel : Taylor vs Fayol Taylor : l’autorité dans la spécialité n n plusieurs supérieurs pour chaque subordonné selon le problème à traiter et autorité fonctionnelle Fayol : l’autorité hiérarchique n Chaque subordonné doit référer à un seul supérieur Hiérarchie et conception de l’homme au travail (McGregor, (1906-1964), 1960) n Théorie X ou négative de l’implication de l’homme ordinaire n n n Aversion pour le travail et va chercher à l’éviter Nécessité de la contrainte, du contrôle, de la direction et de la menace de sanctions Une « théorie » de l’homme n n n n préfère être dirigé, souhaite éviter les responsabilités, a peu d’ambition et recherche avant tout la sécurité. La médiocrité des masses, idée que personne ne veut afficher, est en fait partagée par de nombreux managers. Hiérarchie et conception de l’homme au travail (McGregor, 1960) n Théorie Y ou positive de l’implication : n n n n n n L’effort physique ou mental au travail est aussi naturel que le jeu ou le repos. L’homme ordinaire peut éprouver de la satisfaction dans le travail L’homme peut se diriger et se contrôler lui-même pour atteindre les objectifs dans lesquels il est impliqué Le contrôle externe et la menace de punition ne sont les seuls moyens pour obtenir un travail permettant d’atteindre les objectifs de l’organisation. L’implication dans les objectifs dépend des récompenses associées à leur obtention. La meilleur récompense pour obtenir la participation des employés, est la satisfaction de leurs besoins sociaux et égoïstes Hiérarchie et organisation de groupe (Mayo (1880-1949) et Leavitt) n Les expériences de l’usine d’Hawthorne (Western Electric fournisseur d’AT&T) n n La recherche d’un lien entre éclairage et productivité. Une explication de nature sociologique : n n n n Le rôle de l’attention de la hiérarchie La constitution de leader informel dans le groupe L’autorégulation du collectif The Human Problems of an Industrial Civilization (1933) Hiérarchie et organisation de groupe (Mayo et Leavitt (1922-)) n Pouvoirs des supérieurs et réseaux de communication (Leavitt) n n La recherche d’un lien entre formes de réseaux de communication, efficacité et moral des subordonnés. Réseaux « hiérarchisés » vs réseaux « démocratiques » Réseaux de communication et hiérarchie Roue Réseau complet Cercle Y Chaîne Communication et styles de direction (Likert) n Les 4 styles de leadership : n L’autoritaire exploiteur : n n n n Communications peu nombreuses et descendantes qui sont souvent déformées Utilisation de la crainte, des menaces et sanctions Fort éloignement psychologique des supérieurs et des subordonnés Organisation centralisée et décisions prises sans consultation des subordonnés. Communication et styles de direction (Likert) n Les 4 styles de leadership : n L’autoritaire paternaliste : n n n n Communications montantes peu nombreuses et filtrées par des subordonnés soumis qui donnent au supérieur ce qu’il souhaite entendre Utilisation des récompenses et des sanctions Quelques décisions peu importantes déléguées ; le travail d’équipe n’est pas possible pour les autres Existence d’une organisation informelle partiellement hostile à l’organisation officielle et à ses objectifs Communication et styles de direction (Likert) n Les 4 styles de leadership : n Le système consultatif : n n n n n Le manager cherche à impliquer ses subordonnés dans les décisions sans toutefois leur laisser une réelle influence Les Communications sont descendantes et ascendantes et plutôt fidèles Il y a des rapports latéraux de coopération Les employés sont relativement motivés Le travail en équipe est encouragé Communication et styles de direction (Likert) n Les 4 styles de leadership : n Le système participatif par groupe : n n n n Le manager mobilise régulièrement le groupe pour établir les objectifs (fixés de façon ambitieuse), prendre les décisions et régler les conflits Les Communications est réellement dans les deux sens La participation de chacun à plusieurs groupes donne sa cohésion à l’organisation Les contrôle sont largement délégués et menés de façon parfois plus rigoureuse aux niveaux inférieurs. III) Hiérarchie et représentations sociales des rôles et des comportements n L’organisation est un système social de rôles (Katz et kahn, 1966) : n n Poste, activités et rôles Interdépendance des rôles et conflits de rôles III) Hiérarchie et représentations sociales des rôles et des comportements n L’organisation est un système social de rôles (Katz et kahn, 1966) : n n Poste et activités Interdépendance des rôles et conflits de rôles III) Hiérarchie et représentations sociales des rôles et des comportements n L’interdépendance des comportements (K. Weick, 1969) n n L’organisation, une grammaire de règles et de convention Comportements anticipés et relations entre acteurs III) Hiérarchie et représentations sociales des rôles et des comportements n Hiérarchie et conflits : la conception coopérative de M. Parker Follett: n n n n Pour être l’efficacité de l’organisation suppose de rejeter l’idée d’un pouvoir dominant au profit du pouvoir commun. le pouvoir (inaléniable) ne peut se déléguer à la différence de l’autorité (aliénable). Les conflits sont normaux du fait même de l’exercice de la hiérarchie. 3 manières de dépasser les conflits : n n n la domination, le compromis l’intégration où les deux parties sont gagnantes (influence réciproque entre leader et subordonnés : abandon des ordres, émergence progressive d’une décision collective acceptée et mise en œuvre) CONCLUSION GÉNÉRALE n n n L’organisation de l’entreprise, symbolisée par l’organigramme, est un lieu de pouvoir, parfois formalisés parfois informels. Celui-ci conditionne la forme et la dynamique de l’action Il peut y avoir des convergences mais aussi des contradictions entre le pouvoir et l’autorité « Celui qui n’a pas appris à obéir ne peut pas être un bon dirigeant » Aristote, le Politique