Droit fiscal : 1. Conditions d`exonération de TVA

Transcription

Droit fiscal : 1. Conditions d`exonération de TVA
N° 24 – Décembre 2014
Droit fiscal :
1.
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3.
4.
5.
6.
Conditions d’exonération de TVA des refacturations intra
groupe de contrat d’assurance
L’avantage tiré de la location meublée professionnelle
pouvant constituer un abus de droit
Prélèvement de 33,1/3 % sur les plus-values immobilières et
liberté de circulation des capitaux
Régime des impatriés et mobilité intragroupe
Régularisation des avoirs détenus à l’étranger : encadrement
des délais offerts au contribuable
Inconstitutionnalité de la contribution exceptionnelle sur les
hauts revenus aux revenus de capitaux mobiliers perçus en
2011
Droit des affaires :
1.
2.
3.
4.
De la distinction entre bail précaire et bail de courte durée
Distinction entre obligation et contribution aux dettes
Communauté de biens entre époux et qualité d’associé
Dédommagement d’une société mère lié au passif de sa filiale
Droit social :
1.
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5.
6.
Contestation de l’indemnité de rupture conventionnelle
Rupture conventionnelle : erreur sur le montant des
allocations chômage
Forfait annuel en jours
Expertise du CHSCT et ordre du jour
Licenciement disciplinaire : faits commis pendant l’essai
Licenciement fondé sur un abus de la liberté d’expression
Droit fiscal / N°24 – Décembre 2014
CONDITIONS D’EXONERATION DE TVA
DES REFACTURATIONS INTRA-GROUPE
DE CONTRAT D’ASSURANCE
Selon le tribunal administratif de Paris,
une société mère qui a souscrit un contrat
d’assurance groupe et refacture à ses
filiales le coût exact de leur quote-part de
prime d’assurance, ne réalise pas une
opération d’assurance exonérée de TVA,
à défaut d’apporter la preuve de
l’existence d’une relation juridique en ce
sens, entre la mère et ses filiales.
A tort, l’administration fiscale, a subordonné
l’application du régime d’exonération de
TVA aux opérations d’assurance en fonction
de la qualité d’assureur du prestataire, au
sens du code des assurances.
Selon le tribunal, dans le cadre d’une
refacturation intragroupe, ce régime
d’exonération peut s’appliquer à condition
que la société mère puisse prouver
l’existence
de
relations
juridiques
d’assurance avec ses filiales.
(TA Paris, 19 septembre 2014, n°1303822/1-2)
L’AVANTAGE
TIRE
DE
LOCATION
MEUBLEE PROFESSIONNELLE POUVANT
CONSTITUER UN ABUS DE DROIT
Le Comité de l’abus de droit fiscal a
considéré que le détournement du
régime favorable de la location meublée
professionnelle, constitue un abus de
droit.
En l’espèce, un couple a constitué une SARL
de famille ayant opté pour le régime fiscal
des sociétés de personnes, dans le but
d’acquérir un bien immobilier, financé par
emprunt bancaire au niveau de la SARL. Par
suite, un contrat de location meublée a été
établi entre la SARL et les époux, leur
permettant d’imputer sur leur revenu global,
sans aucune limitation, le déficit généré par
la déduction des charges liées à l’acquisition
du bien, du mobilier et des travaux. Le
Comité a considéré que cette situation
constituait un abus de droit, en raison,
notamment, de l’absence (i) de relations
économiques entre la SARL et des tiers ou
(ii) d’intention d’en établir.
(CADF n°7/2014, 16 octobre 2014, n°2014-32)
Notre prochaine lettre d’actualité sera
dédiée à l’exposé des dispositions de la
loi de finances rectificative pour 2014 et
de la loi de finances pour 2015.
PRELEVEMENT DE 33,1/3 % SUR LES
PLUS-VALUES IMMOBILIERES ET
LIBERTE DE CIRCULATION DES
CAPITAUX
Le Conseil d’Etat vient de confirmer
implicitement la non-conformité de ce
prélèvement au principe de liberté de
circulation des capitaux pour les associés
de sociétés civiles immobilières.
Le taux proportionnel de l’impôt sur le
revenu
applicable
aux
plus-values
immobilières est fixé (i) à 19% lorsqu’elles
sont réalisées par des résidents fiscaux
français, d'un Etat membre de l’Union
Européenne (« UE ») ou de l'Espace
Economique Européen et, (ii) à 33,1/3%
pour celles réalisées par les résidents d’un
Etat tiers (CGI art. 244 bis A).
En début d’année, nous évoquions la
possibilité que le prélèvement de 33,1/3%
puisse être reconnu prochainement comme
contraire au principe de liberté de
circulation des capitaux prévu par l’article
64 du traité sur le fonctionnement de l’UE
(« TFUE ») (Lettre d’actualité de janvier
2014).
La question de la compatibilité de ce
prélèvement à ce principe a été portée
devant le Conseil d’Etat dans le cadre des
plus-values réalisées par des sociétés civiles
immobilières et imposables au niveau des
associés.
L’arrêt retient que l’application d'un taux
plus élevé aux plus-values correspondant à
des droits d'associés résidant dans des pays
tiers est en infraction avec le droit de l’UE.
Le Conseil d’Etat confirme une position
unanimement partagée par les juges du fond.
Il est ainsi possible de demander la
restitution d’impôts correspondant à la
différence de taux pour les résidents de pays
tiers.
(CE, 20 octobre 2014, n°367234)
REGIME DES IMPATRIES ET MOBILITE
INTRAGROUPE
L’article 86 du projet de loi pour la
croissance et l'activité, dit projet
«Macron» élargit le champ d’application
du régime fiscal des impatriés.
Le régime des impatriés visé à l’article 155B
du Code général des impôts prévoit, sous
certaines conditions, un régime favorable
d’imposition. Le bénéfice de ce régime serait
maintenu en cas de nouvelle prise de
fonctions, au cours de la mission, dans une
entreprise appartenant au même groupe.
Ainsi, le régime des impatriés ne serait plus
remis en cause en cas de mobilité
intragroupe.
(Article 86 du projet de loi pour la croissance et
l’activité)
REGULARISATION DES AVOIRS DETENUS
A L’ETRANGER : ENCADREMENT DES
DELAIS OFFERTS AU CONTRIBUABLE
Le 16 décembre 2014, l’Administration a
mis
en
ligne
une
circulaire
complémentaire encadrant les délais afin
que les contribuables puissent bénéficier
des conditions de régularisation offertes
par la circulaire Cazeneuve du 21 juin
2013.
Depuis le 10 décembre 2014, le délai pour
déposer l’ensemble des déclarations
rectificatives est fixé à six mois à compter de
la demande de mise en conformité. Ainsi,
pour les demandes déposées avant le 30 juin
2014, la date butoir est fixée au 31 mars
2015. Pour celles déposées entre le 1er juillet
2014 et le 9 décembre 2014, la date butoir
est fixée au 30 mai 2015.
Le dépôt de l’ensemble des déclarations
rectificatives hors délais prive le
contribuable du régime favorable prévu par
la circulaire Cazeneuve. Par ailleurs, en cas
de
demande
de
justificatifs
par
l’Administration, le contribuable devra
fournir les pièces dans un délai de soixante
jours. Enfin en cas de proposition de
transaction, le contribuable aura un délai de
trente jours pour formuler sa réponse.
(Circulaire du 10 décembre 2014 disponible sur le
site economie.gouv.fr)
INCONSTITUTIONALITE
DE
LA
CONTRIBUTION EXCEPTIONNELLE SUR
LES HAUTS REVENUS AUX REVENUS DE
CAPITAUX MOBILIERS PERÇUS EN 2011.
Le Conseil Constitutionnel censure la
rétroactivité
de
la
contribution
exceptionnelle sur les hauts revenus
(« CEHR ») appliquée aux revenus ayant
été soumis à un prélèvement forfaitaire
libératoire.
Suite à une Question Prioritaire de
Constitutionnalité « QPC » portant sur la
rétroactivité de la CEHR (lettre d’actualité
d’octobre 2014) aux revenus perçus en 2011,
le Conseil Constitutionnel a considéré que la
rétroactivité de cet impôt remettait en cause
le caractère libératoire du prélèvement dont
les revenus de capitaux mobiliers pouvaient
bénéficier conformément à la législation
alors en vigueur. Cette décision serait
applicable à l’ensemble des revenus ayant
fait l’objet d’un prélèvement forfaitaire
libératoire
ainsi
qu’aux
plus-values
immobilières réalisées en 2011. Les
contribuables se trouvant dans cette
situation ont jusqu’au 31 décembre 2014
pour envoyer leur réclamation.
(QPC 5 décembre 2014 n° 2014-435)
Droit des affaires / N°24 – Décembre 2014
DE LA DISTINCTION ENTRE BAIL
PRECAIRE ET BAIL DE COURTE DUREE
Faute de précarité, un bail de deux ans est
un bail de courte durée dérogatoire au
statut des baux commerciaux qui se
transforme en bail commercial soumis au
statut des baux commerciaux en cas de
poursuite au-delà des deux ans
En application de l’article L.145-5, al.1 du
Code de commerce, les parties peuvent
déroger au statut des baux commerciaux à la
condition que la durée totale du bail ne soit
pas supérieure à deux ans (trois ans depuis
la loi Pinel).
Au cas d’espèce, les parties avaient conclu un
bail de deux ans, conventionnellement exclu
du champ d’application des baux
commerciaux, qui s’était prolongé d’une
année pour permettre au preneur de réaliser
des travaux de dépollution. Peu après le
terme de ces trois ans, le preneur avait
résilié le bail selon les formes convenues
contractuellement, résiliation contestée par
le bailleur, qui réclamait en conséquence les
loyers dus au titre de la seconde période
triennale.
La Cour de Cassation a donné raison au
bailleur en rappelant la distinction qu’il
convient d’opérer entre une convention
d’occupation précaire, qui n’est pas limitée
dans le temps et peut se prolonger tant
qu’existe le motif de précarité qui a justifié sa
conclusion et un bail dérogatoire pour
lequel il suffit de constater le maintien dans
les lieux du preneur au-delà de cette durée
maximum de deux ans (trois depuis la loi
Pinel comme précisé ci-dessus) pour
emporter automatiquement l’application du
statut des baux commerciaux et par voie de
conséquence le respect du formalisme
inhérent à ce type de bail en vue d’y mettre fin.
Dès lors la prorogation de la convention
d’occupation précaire ne provoque pas
l’application
du
statut
des
baux
commerciaux, pour autant que le motif de
précarité existe toujours, ce qui n’était pas le
cas en l’espèce.
La Cour de Cassation a considéré qu’au cas
présent il s’agissait d’un bail dérogatoire, et
qu’il était donc devenu commercial par
l’effet du maintien dans les lieux du locataire
au-delà de la période maximum autorisée de
deux années. Le preneur devait donc bien
s’acquitter des loyers échus après cette date.
(Cass. 3ème Civ., 15 octobre 2014, n°13-20.085)
DINSTINCTION ENTRE OBLIGATION ET
CONTRIBUTION AUX DETTES
L’obligation aux dettes des associés de
société civile ne profite qu’aux tiers et ne
concerne pas les rapports entre associés
Un associé créancier au titre de son compte
courant ne peut pas réclamer le paiement de
sa créance à ses coassociés sur le fondement
de l’obligation aux dettes sociales visée à
l’article 1857 du Code civil. Rappelant la
distinction entre l’obligation et la
contribution aux dettes, la Cour d’appel de
Paris a considéré que « l’obligation
subsidiaire, indéfinie et conjointe au paiement
des dettes sociales » qui pèse sur les associés
de société à risque illimité est une garantie
qui ne profite qu’aux tiers. La Cour ajoute
que l’associé créancier n’est pas pour autant
privé de tout recours contre ses coassociés,
lesquels sont tenus de contribuer aux pertes
au terme de la vie sociale. Autrement dit, si
les tiers peuvent, après mise en demeure
infructueuse de la société, demander aux
associés le paiement des dettes de la société
à la date d’exigibilité ou au jour de la
cessation des paiements, l’associé créancier
est privé de cette voie de recours réservée
aux tiers. Il pourra toutefois exercer un
ultime recours en paiement sur la base de
l’obligation de contribution aux pertes qui
existe en fin de société, c’est-à-dire à la
clôture de la liquidation.
(CA Paris, 11 septembre 2014, n° 12/13017)
COMMUNAUTE DE BIENS ENTRE EPOUX
ET QUALITE D’ASSOCIE
L’associé a seul qualité pour percevoir les
dividendes
Les parts sociales acquises avec des deniers
communs sont des biens mixtes dont le titre,
à savoir la propriété des parts et la qualité
d’associé, reste attaché à l’acquéreur et la
finance, à savoir les dividendes et la valeur
des parts, entre en communauté. L’associé est
néanmoins le seul à avoir qualité pour
percevoir les dividendes. Ce principe vient
tout juste d’être rappelé par la Cour de
cassation. En l’espèce, une société, dans
laquelle deux époux étaient associés, versait
depuis quatre ans les dividendes dus à
l’épouse entre les mains de son mari. Celle-ci
a assigné la société et son époux en paiement.
La Cour d’appel de Paris l’a déboutée de sa
demande, considérant que l’époux pouvait
valablement recevoir ces dividendes, chacun
des époux ayant le pouvoir d’administrer seul
les biens communs (art. 1421 du Code civil).
La Haute juridiction considère au contraire
que le versement effectué entre les mains de
l’époux n’a pas libéré la société, seul l’associé
ayant qualité pour percevoir les dividendes.
(Cass. 1ère Civ., 5 novembre 2014, n° 13-25.820)
DEDOMMAGEMENT
D’UNE
SOCIETE
MERE LIE AU PASSIF DE SA FILIALE
Condamnation d’un investisseur à des
dommages-intérêts suite à la résolution
judiciaire d’une cession de contrôle
La responsabilité d’une société mère en cas
de défaillance de sa filiale est parfois
recherchée dans le cadre des relations de
groupe. Dans un arrêt récent, la Cour de
cassation a au contraire rendu une décision
favorable à une société mère.
Après avoir supporté d’importantes dettes
de sa filiale suite à l’avortement d’un projet
de cession, une société mère s’est vue
attribuer un montant significatif de
dommages-intérêts en indemnisation de son
préjudice. Dans cette espèce, un vaste projet
immobilier, qui comprenait la cession d’une
filiale, devait être réalisé. Un acte de cession
portant sur 70% des actions de cette
dernière était intervenu et des promesses
croisées de vente et d’achat avaient été
échangées sur les 30% des titres restant.
L’investisseur ayant manqué à ses
obligations contractuelles, la Cour d’appel de
Paris avait prononcé la résolution judiciaire
de la cession aux torts de ce dernier. Cette
résolution avait généré un passif
considérable en raison des dépenses
engagées pour la réalisation du projet et des
condamnations
financières
auxquelles
s’était exposée la filiale du fait de l’abandon
de celui-ci. La société mère avait ainsi
supporté une partie importante des dettes
de sa filiale afin de ne pas la laisser en état de
cessation des paiements. En conséquence, la
Cour d’appel de Paris avait condamné
l’investisseur défaillant à verser des
dommages-intérêts en réparation du
préjudice subi. L’investisseur contestait
cette décision en soutenant que la société
mère n’était pas légalement tenue des dettes
de sa filiale, et qu’elle ne pouvait en
conséquence se prévaloir d’un préjudice
personnel.
La Cour de cassation, approuvant les juges
du fond, a au contraire considéré que les
manquements du cessionnaire, à l’origine
d’un passif dont la société mère « a dû
assumer la charge afin de ne pas laisser sa
filiale
en
état
de
cessation
des
paiements », avaient
directement
et
personnellement causé à la société un
préjudice en relation avec la résolution de la
cession.
Une société mère peut donc prendre en
charge le passif de sa filiale alors même
qu’elle n’en a pas l’obligation légale et, le cas
échéant, obtenir son dédommagement si la
responsabilité d’un tiers est établie.
(Cass. Com., 23 sept. 2014, n° 13-15.495)
Droit social / N°24 – Décembre 2014
CONTESTATION DE L’INDEMNITE DE
RUPTURE CONVENTIONNELLE
Un salarié peut contester le montant de
l’indemnité versée dans le cadre d’une
rupture conventionnelle sans solliciter la
nullité de cette dernière
Une salariée revendiquait auprès du Conseil
de
Prud’hommes
un
complément
d’indemnité de rupture conventionnelle en
arguant du fait que son ancienneté n’avait
pas été intégralement prise en compte. En
effet, l’employeur aurait dû tenir compte des
15 ans d’ancienneté de la salariée depuis
1995, et pas uniquement de l’ancienneté
acquise à compter du transfert de son
contrat de travail en 2009. Dans un premier
temps, la demande de la salariée a été rejetée
par les juges d’appel, ces derniers estimant
que la salariée ne démontrait pas l’existence
d’un vice de son consentement. Finalement,
la Haute Cour a fait droit à la demande de la
salariée. Dès lors que l’indemnité de rupture
est inférieure à l’indemnité légale de
licenciement et bien que la salariée ait signé
la convention de rupture, cela ne vaut pas
renonciation au bénéfice du plancher légal.
La salariée pouvait donc revendiquer le
complément d’indemnité sans pour autant
solliciter la nullité de la rupture intervenue
entre les parties.
(Cass. Soc. 10 décembre 2014, n°13-22.134)
RUPTURE CONVENTIONNELLE : ERREUR
SUR LE MONTANT DES ALLOCATIONS
CHOMAGE
L’erreur de l’employeur sur le montant
attendu
des
allocations
chômage
entraîne la nullité de la convention de
rupture
Un salarié a conclu une rupture
conventionnelle de son contrat de travail.
L’employeur a informé le salarié à cette
occasion sur le calcul de ses droits à chômage.
Le montant annoncé n’ayant pas été perçu, le
salarié a sollicité la nullité de la rupture
conventionnelle en raison de l’erreur
commise. La Cour a fait droit à la demande
du salarié lequel a obtenu des dommages et
intérêts pour licenciement sans cause réelle
et sérieuse. Malgré l’absence d’obligation
d’information de l’employeur sur le montant
des allocations chômage susceptibles d’être
perçues, lorsque ce dernier décide d’en
informer le salarié, l’erreur dans le montant
attendu entraîne la nullité de la rupture
conventionnelle.
(Cass. Soc. 5 novembre 2014, n°13-16.372)
FORFAIT ANNUEL EN JOURS
Dès lors que l’accord collectif applicable
impose à l’employeur de veiller à la
surcharge de travail du salarié, la
convention de forfait annuel en jours
signée entre les parties est valable
Un salarié en forfait jours réclame un rappel
d’heures supplémentaires au motif que la
convention de forfait jours prévue par son
contrat, en application de l’accord de
branche signé au sein du secteur des
Banques, n’assure pas la protection de sa
santé. Cet accord prévoit que le décompte
des jours travaillés se fait sur la base d'un
système auto-déclaratif, que la hiérarchie
doit veiller aux éventuelles surcharges de
travail en prenant le cas échéant les
dispositions adaptées et que la charge de
travail doit permettre au salarié de prendre
son repos quotidien de 11 heures. La cour
d’appel juge la convention de forfait illicite
en considérant que le système autodéclaratif qu’elle met en place fait peser sur
le salarié la garantie de son droit à la santé.
La Cour de cassation censure ce
raisonnement. Elle valide l’accord signé au
sein de la branche des Banques qui répond
aux exigences relatives au droit à la santé et
au repos en ce qu’il impose à l’employeur de
veiller à la surcharge de travail et d’y
remédier. Dans la mesure où cette
responsabilité pèse sur l’employeur et non
sur le salarié, le contrôle de la durée
maximale raisonnable de travail est assuré.
C’est la deuxième fois que la Cour de
cassation valide un accord relatif au forfait
jours (cf Accord de la Métallurgie, cass soc,
29 juin 2011, n°09-71.107).
(Cass. Soc.17 décembre 2014, n°13-22.890)
EXPERTISE DU CHSCT ET ORDRE DU JOUR
Une délibération relative à une expertise
du CHSCT peut être votée sans être
inscrite à l’ordre du jour
Une salariée en arrêt de travail ayant
dénoncé des faits de harcèlement moral, les
membres du CHSCT ont été convoqués à une
réunion extraordinaire avec pour ordre du
jour la mise en place d’une commission
d’enquête à ce sujet. Au terme de cette
réunion, ils ont en outre décidé de recourir à
une expertise sur les risques psychosociaux,
sans que cela ne figure à l’ordre du jour.
L’employeur a contesté cette délibération en
arguant du fait que la question ne figurait
pas à l’ordre du jour et n’avait aucun lien
avec celui-ci. Les juges ont estimé au
contraire que le recours à un expert du
CHSCT était en lien avec le harcèlement
moral invoqué par la salariée de telle sorte
que l’expertise n’avait pas à être inscrite à
l’ordre du jour.
(Cass. Soc. 19 novembre 2014, n°13-21.523)
LICENCIEMENT DISCIPLINAIRE : FAITS
COMMIS PENDANT L’ESSAI
Des faits commis pendant une période
d’essai peuvent justifier un licenciement
ultérieur pour faute
Un Directeur des ventes a été licencié pour
faute grave plus de deux mois après
l’expiration de sa période d’essai sur le
fondement
de
griefs
intervenus
principalement au cours de cette période.
L’employeur n’ayant pas mis fin au contrat
pendant
la
période
d’essai
jugée
satisfaisante, la Cour d’appel a considéré que
le licenciement pour faute était injustifié,
l’employeur ne pouvant en effet revenir sur
son appréciation en invoquant des faits
commis au cours de l’essai. Revenant sur sa
jurisprudence antérieure, la Cour de
cassation censure cette position en retenant
que l’employeur pouvait invoquer des faits
commis pendant la période d’essai pour
justifier un licenciement disciplinaire
ultérieur. La seule limite reste cependant
celle du respect du délai de prescription de
deux mois courant à compter de la
connaissance des faits par l’employeur,
question qui n’était pas soulevée en l’espèce.
(Cass. Soc. 3 décembre 2014, n°13-19.815)
LICENCIEMENT FONDÉ SUR UN ABUS DE
LA LIBERTE D’EXPRESSION
Des propos virulents et excessifs visant
l’employeur et diffusés à des tiers
justifient un licenciement pour cause
réelle et sérieuse
Un avocat salarié visé par différents griefs
dans un courrier mettant en cause la qualité
de son travail, a répondu à son employeur de
façon virulente en dénonçant des faits de
harcèlement moral dans un courrier
transmis au Bâtonnier ainsi qu’à l’Inspection
et la Médecine du travail. Sur la base de ce
courrier et de sa transmission à des tiers, le
salarié est licencié pour faute grave. Saisi par
le salarié de la contestation de cette mesure,
le bâtonnier, appuyé par la Cour d’appel, a
considéré que, si le licenciement pour faute
grave ne pouvait être retenu, la virulence des
propos tenus par le salarié à l’égard de son
employeur justifiait son licenciement pour
cause réelle et sérieuse. Confirmant cette
position, la Haute Cour a estimé que le
licenciement ne reposait pas sur la
dénonciation d’un prétendu harcèlement
moral mais que les propos virulents et
excessifs du salarié, transmis à des tiers
étaient disproportionnés et caractérisaient
un abus de sa liberté d’expression justifiant
le licenciement pour cause réelle et sérieuse.
(Cass. Soc.3 décembre 2014, n°13-20.501)