Discour de M. Hans-Rudolf Schwarz, directeur de l`Etablissement

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Discour de M. Hans-Rudolf Schwarz, directeur de l`Etablissement
ETABLISSEMENTS DE
WITZWIL
Hans-Rudolf Schwarz, directeur
Conférence de presse du 6 août 2012
L'exécution des peines en milieu ouvert répond-elle aux défis actuels?
« L'exécution des peines en milieu ouvert se heurte à un problème de communication. »
L'introduction de nouvelles formes de sanction et le changement des besoins de la société
en matière de sécurité ont conduit à des révolutions dans l'exécution des peines et mesures.
Cependant, l'opinion publique perçoit encore le travail en milieu ouvert comme une
émanation des années 70 ou 80, qui ne correspondrait plus à notre temps.
La sécurité est aussi une question de confiance
Le fait que les citoyens et citoyennes sont d'avis que le niveau de sécurité intérieure a baissé
a un rapport avec la confiance placée dans les organes de sécurité de l'Etat. La confiance
naît là où les gens se connaissent, travaillent de manière professionnelle et communiquent
ouvertement. La conférence de presse d'aujourd'hui est le coup d'envoi d'une campagne de
deux semaines destinée à replacer dans son contexte l'exécution des peines en milieu
ouvert. L'idée est de servir cette institution, qu'elle soit acceptée et bénéficie de la confiance
des gens. Il est évident qu'une telle campagne n'est possible qu'en période calme, et non à
la suite d'un incident qui place le système d'exécution de peine sur la défensive.
L'exécution des peines évolue
Jusqu'à la fin du XIXe siècle, on ne connaissait que l'exécution des peines en milieu fermé. A
titre exceptionnel, le travail des détenus a été utilisé à l'extérieur des institutions carcérales,
par exemple pour des services de voirie (Schallenwerke). En Suisse, la naissance de
l'exécution en milieu ouvert remonte à 1891, ici à Witzwil. L'idée était de mieux mettre à profit
le travail des personnes détenues et de les rendre meilleurs. L'exécution des peines en
milieu ouvert figure ensuite dans le premier Code pénal suisse, de 1937, qui faisait une
distinction entre établissements pour délinquants primaires et établissements pour
délinquants récidivistes. Ce concept est donc le fruit d'une évolution de plus d'un siècle.
Mais est-il encore d'actualité? Ou a-t-il été dépassé par l'évolution politique et sociétale?
Mes observations s'étendent sur douze ans. Ce temps relativement court a été le théâtre de
grands changements dans l'exécution des peines. L'introduction de la peine pécuniaire, du
travail d'intérêt général, de la semi-détention ou des arrêts domiciliaires sous surveillance
électronique a fait perdre à l'exécution des peines en milieu ouvert un important « public
cible ». Ces détenus relativement faciles à traiter font aujourd'hui défaut, alors qu'elle
contribuait souvent au maintien de l'ordre et du calme dans l'établissement, exerçant une
influence positive sur les autres détenus. Un second groupe de détenus a également été
déplacé: les personnes détenues en milieu fermé, dont le risque de récidive est peu élevé,
mais pour lesquelles une récidive entraîne un grand dommage pour la société; aujourd'hui, la
libération de ces détenus se fait directement après l'exécution en milieu fermé, ou après un
séjour très court en milieu ouvert à des fins de réinsertion. Cette évolution montre que les
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personnes détenues aujourd'hui en milieu ouvert sont loin d'être toutes faciles, formées,
volontaires, saines et disposées à s'améliorer.
Le contrôle avant tout
Il faut préciser que seules sont admises à l'exécution des peines en milieu ouvert les
personnes qui ne présentent pas de grand risque d'évasion ni de récidive. Empêcher leur
fuite est incontestablement l'une des tâches de l'exécution en milieu ouvert. Mais il ne s'agit
pas là d'une mission aussi absolue que pour l'exécution en milieu fermé. Il s'agit plutôt de
rendre un évasion difficile et d'effectuer des contrôles de présence.
Les Etablissements de Witzwil disposent d'un concept de sécurité très élaboré, comprenant
notamment
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une évaluation standardisée des risques au moment de l'admission,
une répartition du travail en trois zones de sécurité différentes,
un comptage des détenus toutes les deux heures,
une procédure standard pour l'octroi de congés,
un échange interdisciplinaire quotidien,
un périmètre clairement identifiable avec des contrôles d'accès.
La place de l'exécution en milieu ouvert
On ne peut juger du rôle de l'exécution en milieu ouvert qu'en la comparant à l'exécution en
milieu fermé. En effet, les limites de la seconde (sécurité absolue et confinement) donnent
toutes ses chances à la première. La nécessité de placer une personne en milieu fermé
entraîne de sérieux inconvénients quant à la réinsertion sociale. Il est démontré qu'une telle
personne ne peut développer aussi bien qu'en milieu ouvert la responsabilité individuelle et
la compétence comportementale, qualités qui s'avéreront capitales dès les premiers instants
de leur libération.
Pour que l'exécution en milieu ouvert garde tous ses avantages, les Etablissements de
Witzwil placent l'accent sur
 le maintien de postes de travail de haute valeur dans 26 secteurs de spécialisation
(avec possibilité de conclure sa formation par un certificat),
 des situations de travail conforme à la réalité (objectifs de performance et de comportement en accord avec le niveau requis « à l'extérieur »),
 un plan d'exécution comportant des objectifs réalistes (en fonction des ressources
personnelles, du délit et de la durée de séjour),
 la construction d'un environnement hors de la criminalité pour la phase de libération,
 la mise en réseau avec les services de probation et d'autres institutions de suivi.
Une porte vers la liberté
Les deux campagnes prévues ont pour but d'attirer l'attention du public sur deux points: la
nécessité pour l'exécution des peines d'empêcher les effets néfastes de la détention (déresponsabilisation, perte de compétences, isolation sociale, etc.), et le potentiel considérable
que recèle l'exécution en milieu ouvert dans la perspective de la réinsertion sociale. Tel que
pratiquée à Witzwil, l'exécution en milieu ouvert n'existe pas seulement pour les détenus qui
remplissent déjà les conditions au départ, mais également pour ceux qui ont été placés
longtemps en milieu fermé. C'est là qu'intervient, d'entente avec les services de probation,
un travail important à faire au moment de la transition vers une vie libre. De récents
exemples ont montré que cette manière de faire contribue clairement à la sécurité publique:
des personnes placées aux Etablissements de Witzwil ont été réincarcérées en milieu fermé
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ou même rejugées. Par ailleurs, le taux d'occupation très élevé des établissements fermés
accroît l'attrait de l'exécution en milieu ouvert; il est tout à fait envisageable d'utiliser des
moyens techniques pour assurer la sécurité en rapport avec certains détenus (surveillance
électronique dans le périmètre de l'établissement, surveillance GPS pendant les congés).
Conclusion
L'exécution en milieu ouvert
 dispose d'un solide potentiel permettant d'éviter les effets néfastes de la privation de
liberté, d'améliorer les chances de réinsertion sociale et de préparer correctement la
libération,
 tient compte des points forts et faibles de chaque détenu et permet de réagir
rapidement aux changements qui interviennent chez la personne et dans sa situation,
 contribue de manière notable à réduire le risque de récidive en recourant au principe
de normalisation (place de travail, contrôles là où c'est nécessaire et où la sécurité le
requiert, maintien des relations, etc.), ce qui protège la population de la criminalité,
 ne peut pas supprimer complètement le risque de fuite, étant donné ses structures et
malgré ses installations techniques, et ne peut donc pas protéger la population de la
criminalité pendant l'intégralité de l'exécution de la peine.
L'exécution des peines en milieu ouvert est une tâche complexe et exigeante, avant
tout pour le personnel des établissements, et notamment du fait de la contradiction:
ouverture le jour, fermeture la nuit.