La volatilité des prix des produits alimentaires
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La volatilité des prix des produits alimentaires
Recommandations de la CIDSE La volatilité des prix des produits alimentaires Conséquences et impacts sur le droit à l’alimentation } Tout le monde n’a pas les moyens de se payer de la nourriture plus chère lorsque les prix augmentent } La volatilité des prix des produits alimentaires affecte non seulement les consommateurs, mais également les producteurs } La constitution de stocks tampons et de stocks d’urgence à l’échelle locale, nationale et régionale est indispensable Dans ce document Introduction 4 Comment la volatilité des prix impacte la sécurité alimentaire des pays en développement? 5 - Pourquoi les petits paysans ne bénéicient-ils pas de la volatilité des prix? 6 - La production, un enjeu de taille 6 - Les agrocarburants 8 - La spéculation 8 - Les réserves et les stocks alimentaires 10 - Les politiques commerciales et agricoles 11 Conclusion Ce document présente le point de vue et les recommandations de la CIDSE sur les conséquences de la volatilité des prix des produits alimentaires et ses impacts sur le droit à l’alimentation. Il a été rédigé par Gisele Henriques (CIDSE), en collaboration avec Armin Paasch (Misereor) pour le chapitre relatif aux politiques commerciales et agricoles. Le groupe FAST de la CIDSE (Alimentation, agriculture et commerce durable) veille à ce que les politiques adoptées en matière d’agriculture et de développement rural permettent une réduction effective de la pauvreté et des inégalités et contribuent ainsi eficacement aux objectifs de sécurité alimentaire pour tous. Il est composé des organisations membres de la CIDSE suivantes : Broederlijk Delen, Center of Concern, Cordaid, CCFD-Terre Solidaire, Entraide et Fraternité, FEC, FOCSIV, Misereor et Trócaire. Contact : Gisele Henriques, [email protected], +32 (0) 2 233 37 54 Publié en octobre 2011 par la CIDSE, Rue Stévin 16, 1000, Bruxelles, Belgique Photo de couverture : Lorenzo Codacci Mise en page: fuel. - Bruxelles - www.fueldesign.be Ce document est disponible sur www.cidse.org/resources. 13 3 Résumé La «crise alimentaire» qui a récemment frappé la planète nous a cruellement rappelé combien notre système alimentaire est imparfait, et les envolées chroniques des prix des denrées alimentaires prouvent une nouvelle fois que la nourriture ne peut être considérée comme une marchandise quelconque. La faim et la malnutrition sont inacceptables. Pourtant, près d’un milliard d’être humains souffrent de la faim et 16 % de la population mondiale est encore gravement sous-alimentée alors que près d’un tiers des aliments produits dans le monde est gaspillé. Les lambées des prix qui ont marqué 2007 et 2008 ont révélé l’urgence d’une situation d’ores-et-déjà inadmissible. Le fait que 173 millions de personnes supplémentaires souffrent de la faim et que davantage encore soient sous-alimentées1 doit nous amener à repenser entièrement l’architecture du système alimentaire mondial. La volatilité des prix est un problème à multiples facettes, dont les causes, conjuguées entre elles, ont des conséquences désastreuses pour les populations les plus vulnérables. Si une hausse des prix peut théoriquement être positive pour les agriculteurs, la volatilité des prix s’avère extrêmement dangereuse, une chute des prix pouvant menacer les investissements des petits producteurs et de l’ensemble des opérateurs de la chaîne alimentaire. Les «fondamentaux du marché» sont souvent désignés comme la cause principale de la hausse des prix: la demande est considérée comme supérieure à l’offre, et donc entraîne une telle augmentation. Le changement climatique, l’appauvrissement des sols et des nappes aquifères ou encore la disparition de la biodiversité y contribuent également. La production alimentaire n’a jamais été aussi élevée qu’aujourd’hui et les marchés de matières premières s’avèrent de plus en plus attractifs pour les spéculateurs inanciers. L’insécurité alimentaire est avant tout le produit de politiques et de pratiques agricoles néfastes. Ce secteur multifonctionnel revêt une importance capitale, qui va au-delà de la sécurité alimentaire et englobe des considérations d’ordre social, écologique et économique. La nature complexe de la question appelle une réponse à la fois globale et cohérente. Les marchés à eux seuls ne sauraient garantir la sécurité alimentaire, c’est pourquoi les gouvernements se doivent de veiller à l’équilibre des différentes politiques, qu’elles concernent le développement économique, les échanges commerciaux ou encore la gestion des ressources naturelles. C’est à eux qu’il incombe de soutenir l’agriculture et de réguler les marchés, en déinissant des politiques en faveur du droit à l’alimentation (voir encadré page 4), en favorisant l’utilisation durable des ressources naturelles et en assurant un accès équitable aux plus pauvres. Dans cette optique, la CIDSE propose l’adoption des recommandations suivantes : } La régulation des marchés financiers comme instrument de modération de la volatilité des prix et de promotion de la transparence } L’institution d’un système de gouvernance alimentaire plus cohérent qui, placé sous l’égide du Comité de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies, soit en mesure de cibler les multiples causes structurelles du problème } La garantie de la cohérence des politiques alimentaires, agricoles et commerciales en faveur du droit à l’alimentation } L’investissement prioritaire pour l’agriculture familiale et les modèles de production agroécologiques } La consolidation des stocks d’urgence et de régulation, au niveau local, national et régional, en favorisant les approvisionnements locaux si possible } L’abolition des directives «agrocarburants» 4 La volatilité des prix des produits alimentaires - Conséquences et impacts sur le droit à l’alimentation Introduction La volatilité des prix sur les marchés alimentaires mondiaux vient exacerber une situation déjà critique, les oscillations excessives des prix ayant de fortes conséquences sur la sécurité alimentaire des plus pauvres. Parce qu’elle mine le pouvoir d’achat, la volatilité des prix réduit le bien-être général et la qualité de vie de la population qui devient alors plus vulnérable, favorisant alors l’instabilité politique. Le Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM) rapporte que l’augmentation des prix des denrées alimentaires constitue le problème le plus grave auquel il ait été confronté en 45 ans d’existence et qualiie le phénomène de véritable «tsunami silencieux» menaçant 100 millions de personnes supplémentaires de ne plus pouvoir manger à leur faim.2 D’après les estimations de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’explosion des prix observée en 2007 puis en 2008 a vu le nombre de personnes sousalimentées passer de 850 millions en 2007 à 1,23 milliard en 2009.3 Malgré la baisse enregistrée entre 2009 et 2010, les prix des denrées n’ont jamais retrouvé leur niveau d’avant 2007 et luctuent actuellement autour du double du prix moyen atteint entre 1990 et 2006. En fait, l’indice FAO des prix des produits alimentaires atteignait 234 points en juin 2011, soit 39% de plus qu’en juin 2010,4 conirmant ainsi que la crise alimentaire est loin d’être endiguée. La volatilité des prix, qui reste élevée, entraînera immanquablement de nouvelles luctuations et lambées des prix à court terme. Un rapport du Groupe d’experts de haut niveau, commandé par le Comité de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies (CSA), fait ressortir que, s’il est normal d’observer une certaine variabilité des prix, «celle qui a été enregistrée depuis 2007 est exceptionnelle».5 Son ampleur et l’étendue de son impact sont telles qu’elle est à l’origine d’une «situation sans précédent au cours des 20 dernières années». La «volatilité excessive des prix» est un processus dynamique résultant de nombreux facteurs interdépendants. Les fondamentaux du marché tels que l’accroissement de la demande, les répercussions des contraintes climatiques sur la production, la spéculation sur les marchés, les directives «agrocarburants» et les politiques commerciales et agricoles néolibérales igurent parmi les plus cités. Cette note vise à mettre en avant les différents facteurs contribuant à la volatilité des prix et à analyser son impact sur les populations les plus pauvres dans les pays en développement. Elle rappelle à quel point il est fondamental que les gouvernements fassent de cette question une priorité politique et présente dans ce sens un certain nombre de recommandations. Au delà de la justice sociale et de l’équité, la volatilité des prix des produits alimentaires constitue un réel enjeu de sécurité et de stabilité géopolitique. Qu’est-ce que le droit à l’alimentation? Le droit à l’alimentation est un droit de l’homme. C’est le droit inhérent à tous de vivre dans la dignité, à l’abri de la faim, de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition. Il n’est pas question de charité, mais de garantir à chacun le droit de pouvoir s’alimenter par ses propres moyens, dans la dignité. Le droit à l’alimentation est protégé par le droit international relatif aux droits de l’homme et par le droit humanitaire. Les obligations corrélatives des Etats en la matière sont également régies par le droit international. Le droit à l’alimentation est notamment reconnu dans la Déclaration universelle des droits de l’homme 6 et dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.7 De nombreuses constitutions nationales reconnaissent également le droit à l’alimentation. La reconnaissance de ce droit implique trois sortes d’obligations pour les Etats: le respecter, le protéger et l’exécuter. Ces obligations sont définies dans le Commentaire général 12 du Comité sur les DESC et ont été entérinées par les Etats en novembre 2004 lorsque le Conseil de la FAO a adopté les Directives volontaires sur le droit à l’alimentation.8 5 Comment la volatilité des prix impacte la sécurité alimentaire des pays en développement ? L’impact de la volatilité des prix sur les pays en développement dépend largement de la transmission des marchés internationaux aux marchés locaux. La hausse n’est pas uniforme et est survenue dans des délais différents selon les pays. Son impact dépend également des politiques mises en place, telles que les mécanismes de protection sociale, de salaire minimum, ou encore des subventions agricoles. ressortir qu’en cas de hausse des prix, les ménages les plus pauvres voient leurs conditions de vie se détériorer et ne sont plus à même de subvenir à leurs besoins nutritionnels, éducatifs ou de santé.11 Les populations les plus touchées par l’instabilité des cours sont celles qui connaissent déjà une situation précaire, c’est-à-dire qui sont sousalimentées et ne bénéicient d’aucune protection sociale. Il s’agit généralement de populations pauvres, de paysans dont les capacités de production et leur qualité de vie sont menacées par le climat d’incertitude, d’ouvriers (de zone rurale ou urbaine), de paysans sans terre ou encore, de producteurs de matières premières qui voient les termes de l’échange leur devenir défavorables sous l’effet de la hausse des prix. La consommation de produits alimentaires est déinie comme inélastique au prix – tout le monde doit manger. Pourtant, tout le monde n’a pas les moyens de se payer de la nourriture plus chère lorsque les prix augmentent. L’alimentation représente une part conséquente des budgets des ménages les plus pauvres; une hausse des prix a donc davantage de répercussions sur eux et contribue de fait à creuser les inégalités. Face à cette situation, les plus touchés se voient contraints de consommer des aliments de qualité inférieure et qui correspondent moins à leurs goûts, de manger moins et moins souvent ou encore, de suivre une alimentation moins équilibrée. Les femmes, qui sont plus directement confrontées à la faim infantile, sont les premiers témoins de ces conséquences sur les ménages. Devoir nourrir leur famille les amène à supporter une pression énorme, souvent au détriment de leur propre alimentation.12 Les pays en développement sont les plus durement touchés, dans la mesure où les dépenses alimentaires peuvent représenter jusqu’à 70% du budget des ménages, alors qu’elles sont de l’ordre de 10 à 20% dans les pays riches.9 La situation affecte les décisions d’investissement à long terme et peut par conséquent alimenter le cercle vicieux de la pauvreté. Sans protection sociale adéquate, de plus en plus de gens s’enfoncent dans la pauvreté. Un rapport inter-agences mandaté par le G2010 fait 2.277 2.227 10 0 br eD éc em lle t Ju i br eem D éc -1 09 9 lle t Ju i br eem -0 08 8 -0 Ju i lle t D éc D éc em lle t br e- -0 07 7 06 1.935 1.893 1.637 1.520 1.442 Ju i D éc e 2.861 2.809 m br e- En milliers de Kwachas zambiens Coût du panier de consommation - Lusaka, Zambie Années Source: Jesuit Center for Theological Reflection: Etude sur le panier de consommation (*données ne tenant pas compte de l’inflation) 6 La volatilité des prix des produits alimentaires - Conséquences et impacts sur le droit à l’alimentation Pourquoi les petits paysans ne bénéficientils pas de la volatilité des prix ? D’un côté, les envolées des prix sont néfastes pour les consommateurs, et de l’autre, une chute subite des cours affecte également les producteurs. Les paysans les plus pauvres ne disposent généralement pas d’un capital-investissement sufisant pour faire face à de tels aléas, ce qui peut les amener à prendre des décisions d’investissement inadaptées et compromettre leur production sur le long terme. La hausse des prix des denrées agricoles ne s’est pas forcément traduite par une amélioration des revenus des paysans des pays en développement compte tenu de l’augmentation simultanée des prix du fuel domestique, du transport, des engrais, du kérosène et des intrants agricoles. Les intermédiaires répercutent également sur eux la hausse des coûts de transport. D’après une étude réalisée par Oxfam et IDS,13 la hausse des prix des intrants inciterait les paysans des pays en développement à produire moins de surplus. «Le coût élevé des intrants a sapé le pouvoir d’achat de la population. Les producteurs de denrées alimentaires n’ayant pas la marge de manœuvre sufisante pour se diversiier et se prémunir des risques tirent donc un proit très limité de la vente de leurs produits.» Il ressort également de ce rapport que les ménages redoutent de plus en plus le surendettement et que le stress qui en résulte, conjugué à un mécontentement croissant, est générateur de conlits dans les foyers. La production, un enjeu de taille Les Politiques d’ajustement structurel mises en œuvre depuis les années 1970 ont largement contribué au désinvestissement dans l’agriculture, erreur dont nous devons aujourd’hui assumer les conséquences. Au cours des dernières années, les dépenses publiques affectées à l’agriculture ont été réduites à 7% en moyenne dans les pays en développement, et à un niveau encore inférieur en Afrique.14 La part de l’aide publique au développement (APD) destinée à l’agriculture a quant à elle accusé un net recul, passant de 18% en 1979 à à peine plus de 3% ces dernières années.15 Par ailleurs, le taux de croissance de la production agricole mondiale par habitant atteint aujourd’hui son niveau le plus élevé depuis 50 ans (à savoir, 1,3% de la croissance annuelle).16 Ainsi, en dépit du déclin de l’investissement public et de l’aide des donateurs en faveur de l’agriculture, le secteur afiche des rendements en hausse. Si cela peut sembler paradoxal, il convient de souligner que les gains de productivité sont presque intégralement accaparés par des systèmes agroindustriels opérant sur les marchés mondiaux, qui dépendent d’intrants extérieurs, pratiquent la monoculture et afichent une empreinte carbone colossale. Ainsi, il n’est pas contradictoire de voir les indices de la faim exploser alors que la production globale augmente, dans le plus grand mépris des populations les plus touchées. Une hausse des rendements n’induit pas nécessairement la sécurité alimentaire, d’où l’importance de la distribution et de l’accès aux ressources. Le rapport du Groupe d’experts de haut niveau commandé par le Comité de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies (CSA) afirme qu’il «n’est pas nécessaire de dynamiser la croissance agricole [mais qu’il devient par contre urgent] d’orienter cette croissance vers une sécurité alimentaire à long terme».17 La «crise alimentaire», qui dépend aussi largement des conditions d’accès de la population aux denrées alimentaires, ne doit donc pas être uniquement évaluée à la lumière de considérations de production. Néanmoins, les impacts du changement climatique sont aujourd’hui manifestes et ils devraient avoir un impact catastrophique sur la production alimentaire. Dans ce contexte, les prix devraient maintenir leur tendance à la hausse. Tout comme la faim dans le monde. Améliorer la capacité de résilience des systèmes de production et réduire la vulnérabilité des pays en développement sur les marchés internationaux exige d’accroître les investissements en faveur des petits exploitants, qui sont les acteurs clés du développement agricole. Face au changement climatique, la consolidation des systèmes alimentaires locaux passe avant tout par des investissements agroécologiques, vecteurs de renforcement des capacités locales de production. Soutenus de la sorte, les marchés locaux de produits alimentaires se montreront moins sensibles aux luctuations des prix sur les marchés internationaux. 7 D’autre part, la gouvernance sur les investissements étrangers dans le secteur agricole doit être renforcée, ain d’assurer les intérêts des producteurs locaux, de protéger les ressources naturelles et de garantir le droit à l’alimentation, tout en soutenant des investissements durables.18 Au-delà de la question de la production, le déi consiste aussi à faciliter l’accès des producteurs les plus pauvres au marché. Il devient urgent de recentrer les marchés alimentaires au niveau local et de mettre in à la concentration des chaînes d’approvisionnement et de distribution des denrées. Une meilleure prise en compte des coûts réels de la production agricole doit être assurée pour permettre d’absorber les chocs extérieurs et garantir ainsi aux petits exploitants agricoles une juste rémunération de leur contribution économique et écologique. Dans la mesure où ils représentent d’importants fournisseurs de biens publics, il semble normal qu’ils soient reconnus et rétribués en tant que tels. Recommandations spécifiques: } Les donateurs, qui négligent le secteur agricole depuis plus de 30 ans, doivent impérativement réviser leurs politiques. Tout comme les gouvernements nationaux, ils doivent honorer leurs engagements et consacrer une plus grande part de leurs financements à l’agriculture (déclaration de Maputo et Initiative de L’Aquila pour la sécurité alimentaire). } Les systèmes de production agroécologiques tels que les promeut le rapport de l’EICSTAD (Évaluation Internationale des Connaissances, des Sciences et des Technologies Agricoles pour le Développement) devraient faire l’objet d’études plus poussées. } Les investissements effectués dans la recherche et le développement doivent intégrer les besoins et les contraintes des petits exploitants et respecter la pluralité des systèmes de connaissances, notamment ceux des femmes et des populations indigènes. La réforme du système du CGIAR19 doit impérativement être soutenue. } Un soutien doit être apporté à la mise en oeuvre des Directives volontaires de la FAO sur la gouvernance responsable des régimes fonciers des terres, pêches et forêts, qui encouragent et protègent la propriété foncière des petits exploitants et éleveurs. } Les gouvernements doivent s’atteler de toute urgence à la question du gaspillage dans le système alimentaire, notamment les pertes post-récoltes. 8 La volatilité des prix des produits alimentaires - Conséquences et impacts sur le droit à l’alimentation Les agrocarburants D’après l’étude du Groupe d’experts de haut niveau sur la volatilité des prix et la sécurité alimentaire mentionnée plus haut, «les politiques de soutien aux agrocarburants mises en place par les Etats-Unis et l’Union européenne ont provoqué un choc de demande largement identiié comme ayant été le catalyseur de la lambée des cours internationaux observée en 2007 et 2008.»20 L’industrie des agrocarburants engloutit aujourd’hui 40% de la production nord-américaine de maïs et deux tiers de la production européenne d’huile végétale. Elle a par ailleurs bénéicié, dans ces deux régions, de 8 milliards de dollars de subventions en 2009. Le boom des agrocarburants a eu un impact considérable sur l’évolution de la demande internationale de céréales et d’huile végétale. En outre, les terres dédiées à la production d’agrocarburants offrent un réel coût d’opportunité, bien souvent au détriment des cultures vivrières. Le plan d’action du G20 pour l’agriculture n’a malheureusement pas su intégrer le message des organisations internationales21 et continue de nier la gravité de la situation. Le Rapport inter-agences pour le G20 afirme que «les projections laissent penser que, dans les années à venir, la production d’agrocarburants exercera une pression croissante sur les prix. Aussi longtemps que les gouvernements imposeront leurs mandats, la production d’agrocarburants continuera d’exacerber l’inélasticité des prix à la demande, et donc la volatilité des prix des denrées agricoles».22 Les mesures à prendre sont claires: l’abolition immédiate des objectifs d’incorporation d’agrocarburants et la suppression des subventions et des barrières douanières en faveur de la production et du traitement des agrocarburants, conditions sine qua non pour subvenir aux besoins alimentaires futurs. Nombre d’institutions internationales ont déjà rallié ce point de vue et préconisent un ralentissement de la production d’agrocarburants en période de volatilité excessive des prix.23 A mesure que les cours du pétrole montent, la rentabilité des agrocarburants est inversement proportionnelle avec celle de la production agricole, du fait de la substituabilité des deux secteurs. La volatilité des prix du pétrole se répercute sur la volatilité des prix des denrées alimentaires par le biais des coûts de transport et du prix des engrais.24 D’après l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), le lien étroit entre le cours du pétrole et celui des produits alimentaires est un facteur prépondérant dans la volatilité des prix. Recommandations spécifiques: } Les objectifs d’incorporation d’agrocarburants doivent être abolis sans délai, tout comme les subventions soutenant leur production et leur fabrication. } Toute politique relative aux agrocarburants doit être fondée sur la capacité locale de production, et prendre en compte les impacts sur les systèmes locaux de production alimentaire et le changement d’affectation des sols. } L’accent doit être mis sur la recherche concernant l’efficacité énergétique; et des efforts doivent être faits pour réduire la consommation énergétique d’une manière générale. La spéculation La déréglementation inancière observée au cours des dix dernières années a, pour la première fois dans l’histoire, transformé les marchandises en actifs inanciers. Le capital spéculatif devient structurellement lié au le capital productif. Loin de renforcer le système alimentaire mondial, cette inanciarisation des marchés agricoles les affaiblit et contribue à l’instabilité et à la hausse des prix. La spéculation inancière sur les denrées agricoles est un facteur déterminant de la volatilité des prix. Sur les marchés à terme,25 les fonds spéculatifs se sont multipliés. Quand la crise inancière a commencé en 2007, les spéculateurs ont soudainement fui les actifs inanciers à risques et investi des sommes sans précédents sur les marchés de matières premières, créant ainsi une «bulle sur les cours mondiaux de denrées alimentaires».26 Une nouvelle catégorie de spéculateurs est apparue sur les marchés à terme 9 de matières premières, parmi lesquels igurent, entre autres, les fonds de spéculation privés et publics, les fonds de pension, les fonds souverains et les fonds de dotation universitaire. A eux tous, ces spéculateurs représentent en moyenne davantage de contrats à terme en circulation que n’importe quel autre participant.27 D’après Lehman Brothers Holdings Inc., la spéculation sur les fonds indiciels a augmenté de 1,9% entre 2003 et 2008,28 transformant le marché alimentaire en véritable casino virtuel. Les prix des marchandises à terme constituent un point de référence pour les prix des marchandises physiques, c’est pourquoi toute hausse induite par les fonds de spéculation est immédiatement ressentie dans l’économie réelle, augmentant les prix pour les consommateurs. La spéculation indicielle croît en fait à mesure que les prix augmentent, du fait de l’attraction qu’exercent les prix élevés sur les spéculateurs – une motivation pour le proit totalement étrangère au comportement rationnel des consommateurs. D’après Olivier de Schutter, Rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation, «une grande partie des pics de prix observés en 2007 – 2008 sont dus à l’apparition d’une bulle spéculative. Une réforme générale du secteur inancier doit être entreprise de toute urgence pour éviter d’autres crises des prix alimentaires.» Cette question igure cette année parmi les priorités du G20 et la Commission européenne a également déclaré que «des mesures doivent être prises pour améliorer la transparence sur les marchés à terme et réglementer plus strictement la spéculation». A ce jour, les démarches concrètes entreprises dans ce sens restent toutefois extrêmement timides et évasives. Il est urgent d’instaurer des réglementations appropriées capables de prévenir les risques systémiques et les pratiques manipulatrices, en imposant par exemple des marges aux opérateurs et des limites de position. Il est également indispensable de limiter, voire d’interdire, la spéculation excessive de certains opérateurs, en réintroduisant des règles distinguant les opérateurs du marché des spéculateurs. Enin, les activités d’institutions assurées par l’Etat sur les marchés dérivés de matières premières devraient être restreintes, voir même complètement interdites, via l’instauration de l’obligation de marges et marges de réserves de capitaux. Les échanges de produits dérivés de gré à gré, auparavant non réglementés, devraient être effectués sur les marchés publics. De même, il conviendrait d’imposer des limites globales de position spéculative (nombre et valeur totale des contrats pour une marchandise donnée) et des marges plus élevées à tous les investisseurs. Les opérations qui, du fait d’une standardisation insufisante, ne font pas l’objet d’échanges et de compensations devraient être assujetties à des procédures de rapport en temps réel et conditionnées à des marges plus élevées. Certains marchés nécessitent par ailleurs la mise en place de limites de prix ou «disjoncteurs». Enin, instituer une obligation de rapport public en amont et en aval des échanges sur les marchés de marchandises physiques faciliterait le contrôle de l’arbitrage entre ces marchés et ceux des produits inanciers. Recommandations spécifiques: } Les marchés financiers devraient faire l’objet d’une régulation plus stricte en matière de spéculation et de transparence des échanges. } Les autorités de surveillance doivent être renforcées. } Les marchés physiques et à terme doivent faire l’objet d’une plus grande transparence, en particulier lors des opérations de gré à gré, qui devraient être conditionnées à une obligation de rapport en amont et en aval des échanges de marchandises physiques. } Des limites de position et de spéculation doivent être imposées aux opérateurs douteux. 10 La volatilité des prix des produits alimentaires - Conséquences et impacts sur le droit à l’alimentation Les réserves et les stocks alimentaires La récente crise alimentaire a rappelé l’urgence de consolider les stocks alimentaires locaux, nationaux et régionaux. C’est une mesure déterminante pour limiter la volatilité des prix et la spéculation mais également pour instaurer un environnement favorable pour les producteurs locaux, et plus particulièrement pour les petits exploitants agricoles. Au cours des 10 dernières années, les stocks mondiaux se sont progressivement vidés et ont atteint leur niveau le plus bas en 2011. La relation entre le niveau des stocks et l’instabilité des prix est bien établie : de faibles stocks induisent une lambée des cours et une grande volatilité des prix. Les stocks jouent un double rôle pour les distributions alimentaires humanitaires (appelés stocks d’urgence) et pour stabiliser les marchés (stocks tampons, de régulation). Les premiers sont indispensables dans les situations d’urgence qui, sous l’effet du changement climatique, tendent malheureusement à se multiplier, comme en témoigne la situation dans la Corne de l’Afrique. Les seconds offrent une certaine protection pour les consommateurs les plus pauvres contre les variations de prix, sécurité fondamentale dans les pays très dépendants des importations de denrées alimentaires. Ces réserves, gérées de manière transparente, contribuent ainsi à lisser les prix entre les périodes de bonnes et de mauvaises récoltes. Les réserves alimentaires devraient être constituées et gérées par les petits agriculteurs et les communautés au niveau local; elles devraient également faire l’objet de régulations nationales et être soustraites aux intérêts du secteur privé ; elles devraient être constituées par le biais de procédures d’achats publics si possible et inclure des produits agricoles en plus des trois principales céréales (riz, blé et maïs) ; elles doivent être gérées de manière participative et impliquer les petits exploitants et les consommateurs les plus pauvres. Les stocks d’urgence et l’aide alimentaire devraient soutenir les systèmes alimentaires locaux et non répondre aux intérêts des pays donateurs. Le projet de création du Système d’information sur les marchés agricoles (SIMA) proposé par le G20 représente un pas dans cette voie. Mais les pays développés ne doivent pas constituer trop de stocks car, inalement mis sur les marchés internationaux, les produits pénètrent les pays en développement et viennent directement concurrencer la production locale. Les petits exploitants de ces pays, incapables de s’aligner sur les prix trop faibles des produits subventionnés arrivant du Nord, se retrouvent évincés de leurs propres marchés. La production agricole locale en pâtit et la subsistance de la population est compromise. Enin, la FAO souligne que 30% des récoltes – et jusqu’à 40% en Afrique – sont gaspillées en raison de l’absence ou de l’inadéquation des structures de stockage.29 Nombre de pays consacrent une part croissante de leur budget aux importations de produits alimentaires alors qu’ils gaspillent dans le même temps une partie de leur propre production. Les méthodes de traitement et de gestion des denrées alimentaires post-récolte devraient avoir été repensées depuis longtemps. Recommandations spécifiques: } Les donateurs et les institutions internationales doivent favoriser le renforcement des capacités techniques et financières des pays en développement pour la constitution de réserves, ainsi que le soutien pour la collecte, la gestion et la diffusion des informations sur les stocks. } La constitution de stocks d’urgence et de régulation au niveau local, national et régional est indispensable. } Dans la mesure du possible, les stocks devraient être constitués par le biais de procédures d’achats publiques. } Les informations sur les niveaux des stocks doivent être plus transparentes; les gouvernements et les institutions internationales doivent mieux collaborer sur la question. 11 Les politiques commerciales et agricoles Les politiques agricoles et commerciales des grands blocs commerciaux que sont par exemple les Etats-Unis et l’Union européenne igurent parmi les principales causes structurelles de la crise alimentaire actuelle. Pendant des décennies, les exportations de produits agricoles, directement ou indirectement subventionnés, ont empêché les paysans des pays en développement d’accéder aux marchés et ont exercé une pression constante sur les cours des marchés internationaux. Le dumping de produits européens tels que le blé, la viande, le lait en poudre et, plus récemment, la purée de tomate, le porc et les morceaux de poulets, a eu un impact direct sur le droit à l’alimentation des communautés et des petits producteurs des pays en développement et plus particulièrement d’Afrique. En effet, les produits européens subventionnés mis sur le marché sont vendus à des prix artiiciellement bas, avec lesquels les producteurs locaux ne peuvent pas rivaliser. Ces méthodes ont des répercussions négatives à long terme sur les choix d’investissement et sur la productivité agricole dans les pays en développement. Si des pays africains sont aujourd’hui importateurs nets de denrées alimentaires, c’est en partie lié à la Politique agricole commune (PAC).30 La chute des prix la plus spectaculaire sur les marchés agricoles internationaux a été observée du milieu des années 1970 au milieu des années 1980, lorsque l’Union européenne a réduit ses importations alimentaires pour devenir l’un des principaux exportateurs d’aliments de base. La comparaison des balances commerciales de l’UE et de l’Afrique montre clairement que cette dernière est passée du statut d’exportateur net à celui d’importateur net, notamment de céréales et de produits laitiers, au cours de cette même période. De nombreux pays sont ainsi devenus complètement dépendants des importations pour assurer un approvisionnement sufisant en nourriture à leur population. Constatant la chute des cours internationaux des denrées alimentaires, les gouvernements ont déduit que l’importation de denrées alimentaires leur coûterait moins cher que le soutien à la production alimentaire nationale. Simultanément, le Fonds monétaire international (FMI) a instauré les Programmes d’ajustements structurels (PAS), entraînant l’ouverture des marchés aux importations et la réduction des dépenses publiques dans le secteur agricole. D’après la FAO, ces stratégies ne sont pas étrangères à la crise alimentaire de 2007-2008. «La disponibilité de denrées alimentaires moins chères sur les marchés internationaux est l’un des facteurs qui a contribué au recul des investissements et la baisse du soutien des pays en développement (et de leurs partenaires) à leur secteur agricole est généralement admise comme l’une des causes de la dernière crise.» 31 Le manque de clairvoyance des politiques commerciales a également contribué au problème. Depuis 1995, la déréglementation des importations induite par les PAS a été renforcée par l’Accord sur l’agriculture (AoA) de l’OMC. Des Accords de libre-échange bilatéraux (ALE) actuellement négociés, pourraient forcer les pays en développement à abolir intégralement les barrières tarifaires aux importations pour 80 à 90% des produits, à s’ouvrir aux Investissements directs étrangers (IDE) et à renforcer les Droits de propriété intellectuelle (DPI) des sociétés agroalimentaires sur les semences. Dans son étude sur la volatilité des prix, le Comité de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies avertit du fait que la libéralisation des marchés a accéléré la transmission de la volatilité internationale des prix vers les marchés nationaux. «Pour certains pays en développement, la libéralisation s’est traduite par une hausse conséquente du niveau des importations; l’instabilité internationale des prix des denrées alimentaires est par conséquent plus problématique pour eux qu’elle ne l’aurait été dans les années 1970.»32 La libéralisation des marchés exacerbe l’équation car les prix dans les différents pays sont aujourd’hui plus que jamais connectés entre eux. Pour les pays en développement, la libéralisation signiie une dépendance accrue visà-vis des importations de produits alimentaires, redoutant ainsi particulièrement les hausses des prix. Alors que la FAO et le CSA prônent une refonte de la réglementation commerciale actuelle et souhaitent «mieux prendre en compte les questions de politique publique relatives à la sécurité alimentaire», le G20 revendique quant à lui une plus grande libéralisation des échanges.33 Dans un système de libre échange, les pays les plus pauvres absorbent une plus grande part de l’ajustement quantitatif nécessaire à l’équilibre de l’offre et de la demande. La réduction nécessaire de la demande pour une offre donnée n’est pas distribuée de manière égale. De plus, nombre de pays souhaitent interdire les restrictions aux exportations dans le cadre de l’OMC, de manière à s’assurer une offre illimitée sur les marchés internationaux. C’est compréhensible, 12 La volatilité des prix des produits alimentaires - Conséquences et impacts sur le droit à l’alimentation étant donné que, comme l’a montré l’exemple du riz en 2007, les restrictions aux exportations sont vectrices de hausse des prix, et qu’elles ont généralement eu un impact négatif sur les autres pays importateurs de produits alimentaires. D’un autre côté, les restrictions aux exportations peuvent s’avérer nécessaires pour éviter que les aliments de base ne soient entièrement absorbés par les marchés internationaux et que les prix ne subissent une inlation abusive à l’échelle nationale. Si des exportations excessives menacent de limiter l’accès des consommateurs les plus pauvres à l’alimentation sur le territoire national, les Etats ont alors l’obligation, au nom du droit à l’alimentation, de prendre des mesures concrètes pour les restreindre. Les politiques commerciales, qui ont été négociées en pleine période de surproduction, doivent aujourd’hui être révisées. Une des grandes leçons à retenir de la crise est que les marchés internationaux ne sont aujourd’hui plus une source sûre de produits alimentaires à des prix stables et accessibles. En période de hausse des prix et d’instabilité élevée, les importations ne sauraient être la pierre angulaire d’une stratégie durable de sécurité alimentaire. Pour cette raison, la CIDSE demande que les accords d’échanges multilatéraux et bilatéraux laissent aux pays en situation d’insécurité alimentaire la marge de manœuvre nécessaire pour réagir face aux mouvements des prix internationaux. La réglementation doit notamment autoriser l’instauration de quotas d’importation et de barrières douanières chaque fois que cela est nécessaire pour protéger l’accès aux marchés, le revenu et le droit à l’alimentation des communautés agricoles contre les importations moins chères. Elle doit par ailleurs autoriser les mesures commerciales telles que les restrictions aux exportations et prévoir des mécanismes de sauvegarde spéciaux si des exportations excessives viennent à menacer la disponibilité des produits alimentaires et entravent l’accès des consommateurs locaux à l’alimentation. La communauté internationale doit également progresser dans la coordination de telles mesures. Il conviendrait notamment qu’elle étudie les différentes options de régulation des restrictions aux exportations dans un contexte humanitaire. Recommandations spécifiques: } La réglementation des échanges doit être révisée de manière à refléter les principes du droit à l’alimentation plutôt que les préoccupations d’accès aux marchés des exportateurs. } Les négociations commerciales devraient laisser aux pays en situation d’insécurité alimentaire la marge de manœuvre nécessaire pour réagir face aux fluctuations des prix internationaux et leur permettre par exemple de mettre en place des mesures de stabilisation des prix, des quotas d’importation et des barrières douanières, voire des restrictions aux exportations le cas échéant. Les pays à faible revenu en situation de déficit alimentaire devraient bénéficier d’un traitement de faveur lors des négociations d’accords commerciaux. } Les impacts des politiques agricoles européennes et nord-américaines sur les marchés des pays en développement doivent être pris en compte. Les subventions directes ou indirectes entraînant une distorsion des coûts de production devraient être supprimées et la réalisation d’études d’impact permettrait de veiller à ce que les échanges commerciaux n’évincent pas les producteurs locaux au profit des importations ou ne soient pas contraires aux droits de l’homme. 13 Conclusion Comme nous venons de le démontrer, la volatilité des prix a des effets négatifs sur le droit à l’alimentation des consommateurs aussi bien que sur celui des producteurs. La quête effrénée du proit qui caractérise les marchés alimentaires mondiaux ne proite qu’à une minorité et doit donc être bridée. Nous vivons une époque de marchés déréglementés, de libéralisation des échanges, de surproduction et de gaspillage. Les considérations économiques priment sur les questions d’ordre humanitaire. La crise alimentaire constitue donc une occasion unique de réorienter nos politiques alimentaires et nos systèmes de production et de réaliser enin le droit à l’alimentation pour tous. Comme l’a déclaré le Pape Benoît XVI dans Caritas in Veritate, «la faim ne dépend pas tant d’une carence de ressources matérielles, que d’une carence de ressources sociales, la plus importante d’entre elles étant de nature institutionnelle».34 La nature complexe des causes de la faim entraîne des divisions d’opinions sur les solutions à apporter au problème. Parvenir à un consensus sur les politiques touchant à la sécurité alimentaire est pourtant indispensable. Le Comité de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies, la plus haute instance de gouvernance en matière de sécurité alimentaire, doit être reconnu comme espace de dialogue et de coordination des initiatives. Il doit veiller à contenir la lambée des prix, gérer les informations, faciliter l’apprentissage et coordonner les mesures politiques et les engagements des donateurs. Le Comité est l’organe le mieux placé pour négocier des solutions avec les gouvernements et ixer les priorités politiques d’un plan global d’action qui permettra enin d’éradiquer les causes structurelles de l’insécurité alimentaire. Nous exhortons les dirigeants à prévenir les problèmes plutôt que de se contenter de les résoudre. Ils devront pour cela démêler les causes originelles de la faim et privilégier des solutions qui soient favorables au droit à l’alimentation plutôt qu’au droit au proit. 14 La volatilité des prix des produits alimentaires - Conséquences et impacts sur le droit à l’alimentation Références 1 FAO, La Situation Mondiale de l’Alimentation et de l’Agriculture, juin 2011, http://www.fao. org/docrep/meeting/022/mb328f.pdf. 2 UN World Food Programme, News, 22 avril 2008, http://www.wfp.org/node/195. 3 FAO, La Situation Mondiale de l’Alimentation et de l’Agriculture, juin 2011, http://www.fao. org/docrep/meeting/022/mb328f.pdf. 4 Indice FAO des prix des produits alimentaires, juillet 2011. 5 Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA), Volatilité des prix et sécurité alimentaire, rapport du Groupe d’Experts de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et la Nutrition, juillet 2011, http://www.fao.org/ileadmin/user_upload/hlpe/hlpe_documents/HLPE-Rapport-1Volatilite-des-prix-et-securite-alimentaire-Juillet-2011.pdf. 6 http://www.un.org/fr/documents/udhr/. 7 http://www2.ohchr.org/french/law/cescr.htm. 8 http://www.fao.org/docrep/meeting/009/y9825f/y9825f00.htm. 9 Cohen, Marc J. et Garrett, James L., Human Settlements Working Paper Series: The Food Price Crisis and Urban Food (In)security, UNFPA et IIED, août 2009, http://pubs.iied.org/ pdfs/10574IIED.pdf (en anglais). 10 FAO, FIDA, FMI, OCDE, CNUCED, PAM, Banque mondiale, OMC, IFPRI, Groupe d’experts de haut niveau des Nations unies, ‘Price volatility in food and agricultural markets: Policy responses’, rapport inter-agences du G20 sur la volatilité des prix des denrées alimentaires, juin 2011, http://www.ifad.org/operations/food/documents/g20.pdf (en anglais). 11 Tout indique (Anriquez et al, 2010) que les hausses des prix des denrées alimentaires observées en 2008 ont non seulement entraîné une diminution de la ration alimentaire moyenne, mais ont également bouleversé la distribution des calories consommées, aggravant de fait la situation nutritionnelle de la population. 12 Ibidem. 13 Hossain, Naomi et Green, Duncan, Living on a Spike: How is the 2011 food price crisis affecting poor people? Oxfam et Institute of Development Studies, juin 2011, http://www. oxfam.org/sites/www.oxfam.org/iles/rr-living-on-a-spike-food-210611-en.pdf (en anglais). 14 Centre d’investissement de la FAO: http://www.fao.org/investment/whyinvestinagricultureandru/fr/. 15 Synthèse de la CNUCED nº18, décembre 2010, http://www.unctad.org/fr/docs/ presspb20108_fr.pdf. 16 Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA), Volatilité des prix et sécurité alimentaire, rapport du Groupe d’Experts de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et la Nutrition, juillet 2011, p.47. 17 Ibidem. 18 Comme indiqué dans les conclusions de l’Evaluation internationale des connaissances, des sciences et des technologies agricoles pour le développement (EICSTAD), http:// www.agassessment.org/reports/IAASTD/EN/Agriculture%20at%20a%20Crossroads_ Synthesis%20Report%20%28English%29.pdf (en anglais). 15 19 Le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR) est un partenariat stratégique international rassemblant des organisations engagées dans la recherche sur le développement durable. 20 Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA), Volatilité des prix et sécurité alimentaire, rapport du Groupe d’Experts de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et la Nutrition, juillet 2011, p.10. 21 Consulter le rapport du Groupe d’experts de haut niveau (CSA) sur la Volatilité des prix des produits alimentaires (2011) et le Rapport inter-agences du G20 (juin 2011). 22 FAO, FIDA, FMI, OCDE, CNUCED, PAM, Banque mondiale, OMC, IFPRI, Groupe d’experts de haut niveau des Nations unies, ‘Price volatility in food and agricultural markets: Policy responses’, rapport inter-agences du G20 sur la volatilité des prix des denrées alimentaires, juin 2011 (en anglais). 23 Réunions de printemps de la Banque mondiale et du FMI et Rapport inter-agences du G20 (http://www.ifad.org/operations/food/documents/g20.pdf, en anglais) . 24 La production d’une calorie alimentaire par le système agroalimentaire nord-américain nécessite plus de 7 calories d’énergie (Heinberg et Bomford, 2009), essentiellement fournies par des combustibles fossiles, 20% dans des exploitations agricoles et le reste au cours d’autres étapes telles que le transport et la transformation. 25 Un contrat à terme est un échange dans lequel les participants achètent et vendent des biens devant être livrés à une date ixée à l’avance. La plupart du temps, ces contrats ne donnent pas réellement lieu à la livraison des biens achetés. 26 CIDSE, Global Food Responsibility, mai 2009, http://www.cidse.org/uploadedFiles/Publications/ Publication_repository/CIDSE%20IATP%20Global%20Food%20Responsibility%20paper. pdf (en anglais). 27 D’après des données de la US Commodities Futures Trading Commission. 28 http://www2.weed-online.org/uploads/weed_food_speculation.pdf, p.11. 29 Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Global Food Losses and Food Waste, mai 2011, http://www.fao.org/ileadmin/user_upload/ags/publications/ GFL_web.pdf (en anglais). 30 Reichert, Tobias. Who feeds the World? The impacts of European agriculture policy on hunger in developing countries, MISEREOR, janvier 2011, http://www.misereor.de/ileadmin/ redaktion/MISEREOR_Who%20feeds%20the%20world.pdf (en anglais). 31 Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Country Responses to the Food Security Crisis: Nature and Preliminary Implications of Policies Pursued, 2009, p. 24, http://www.fao.org/ileadmin/user_upload/ISFP/pdf_for_site_Country_Response_to_ the_Food_Security.pdf (en anglais). 32 Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA), Volatilité des prix et sécurité alimentaire, rapport du Groupe d’Experts de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et la Nutrition, juillet 2011, p.9. 33 Ibidem, p. 13. 34 Pape Benoît XVI, Caritas in veritate, Encyclique, 29 juin 2009, Chapitre II, parag.27, http://www. vatican.va/holy_father/benedict_xvi/encyclicals/documents/hf_ben-xvi_enc_20090629_ caritas-in-veritate_fr.html. Membres de la CIDSE } Autriche Belgique Belgique Canada Angleterre et Pays de Galles France Allemagne Irlande Italie Luxembourg Pays-Bas Portugal Ecosse Espagne Suisse Etats-Unis La CIDSE est une alliance internationale d’organisations de développement catholiques. Ses membres s’efforcent d’éradiquer la pauvreté et d’instaurer la justice dans le monde selon une stratégie qui leur est commune. Les actions de plaidoyer de la CIDSE couvrent les domaines suivants: la gouvernance mondiale; les ressources allouées au développement; la justice climatique; l’alimentation, l’agriculture et le commerce durable ainsi que les entreprises et les droits humains. www.cidse.org