L`entretien préalable au licenciement

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L`entretien préalable au licenciement
L’entretien préalable au licenciement
L’entretien préalable au licenciement est important. C’est la seule occasion, avant la notification
éventuelle du licenciement, qu’aura le salarié de connaître précisément les raisons pour lesquelles
son licenciement est envisagé. Au cours de cet entretien, le salarié pourra se faire assister et
bénéficier ainsi d’un témoin du déroulement de l’entretien. Ce dernier pourra ensuite rédiger une
attestation relatant l’entretien (les personnes présentes, les griefs exprimés, les réponses du salarié,
les questions posées par l’assistant lui-même, les réponses de la direction etc.).
Pour vous procurer un modèle d’attestation conforme aux dispositions du code de procédure civile
et du code de procédure pénale, cliquer ici
Tout licenciement, sauf en cas de licenciement collectif pour motif économique de 10 salariés et plus,
doit être précédé d’un entretien préalable. (Articles L 1232-2 et L 1233-11 du code du travail)
Le salarié n’est pas obligé de se rendre à l’entretien préalable. L’employeur ne peut se prévaloir du
fait que le salarié ne s’y soit pas rendu, formalité prévue dans son seul intérêt. Cass. soc. 28
novembre 2000 n° 98-41308 (P)
Cela étant dit, dans la mesure du possible, il est préférable que le salarié y aille et qu’il soit assisté.
1) La convocation à l’entretien préalable
a) La forme de la convocation
« La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre
décharge ». Article L 1232-2 alinéa 2 du code du travail
Le salarié qui n’accepte pas la remise en main propre contraint donc son employeur à le convoquer
par lettre recommandée.
Si seulement deux modes de convocation sont prévus par le code du travail, la jurisprudence a été
amenée à se prononcer sur d’autres modalités.
- La convocation par Chronopost : OUI
«L’envoi de cette convocation par le système de transport rapide de courrier dit “Chronopost”, qui
permet de justifier des dates d’expédition et de réception de la lettre, ne pouvait constituer une
irrégularité de la procédure de licenciement ». Cass. soc. 8 février 2011 n° 09-40027 (P)
- La convocation par huissier : OUI
« La remise par voie d’huissier de justice ne constituait pas une irrégularité de la procédure de
licenciement ». Cass. soc. 30 mars 2011 n° 09-71412 (P)
- La convocation par télécopie : NON
« L’envoi, de la lettre de convocation à l’entretien préalable par télécopie ne pouvait pallier
l’inobservation des prescriptions légales ». Cass. soc. 13 septembre 2006 n° 04-45698 (P)
b) Les mentions obligatoires
L’objet de l’entretien, la date et l’heure, le lieu ainsi que la possibilité de se faire assister sont les
mentions qui doivent toujours figurer dans la lettre de convocation à l’entretien préalable. A défaut
la procédure est irrégulière.
- L’objet de la convocation. (Articles L 1232-2 et R 1232-1 du code du travail)
Le salarié doit savoir s’il s’agit d’un entretien préalable au licenciement ou à une « simple » sanction
disciplinaire. En revanche, les motifs précis ne lui seront obligatoirement indiqués que lors de
l’entretien. Le salarié peut donc être amené à découvrir les raisons précises pour lesquelles son
licenciement est envisagé.
- La date et l’heure (Articles L 1232-2 et R 1232-1 du code du travail)
« L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la
lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation ».
Pour la Cour de cassation, cinq jours ouvrables doivent séparer la date de convocation de la date de
l’entretien préalable. Le jour de remise de la lettre ne compte pas dans le délai non plus que le
dimanche qui n’est pas un jour ouvrable. Cass. soc. 20 décembre 2006 n° 04-47853 (P)
Exemple :
Convoqué le mardi 17 juillet 2012, l’entretien préalable ne peut se dérouler avant le mardi 24 juillet
2012.
Le salarié peut-il être convoqué en dehors de son temps de travail habituel ?
Pour la Cour de cassation, la convocation du salarié à l’entretien préalable en dehors du temps de
travail ne constitue pas une irrégularité de procédure. Il peut seulement prétendre à la réparation du
préjudice subi. Cass. soc. 7 avril 2004 n° 02-40359 (PBRI)
Dans cette affaire, la demande d’indemnisation du salarié a été rejetée, la Cour ayant constaté que le
temps passé par le salarié à l’entretien avait été payé comme du temps de travail.
- Le lieu de l’entretien (Article R 1232-1 du code du travail)
Le lieu de l'entretien préalable est en principe celui où s'exécute le travail ou celui du siège social de
l'entreprise. Cass. soc. 9 mai 2000 n° 97-45294 (P)
Lorsque, pour des raisons légitimes, le lieu de l'entretien préalable n'est pas celui où s'exécute le
travail, ou celui du siège social de l'entreprise, le salarié a droit au remboursement de ses frais de
déplacement. Cass. soc. 28 janvier 2005 n° 02-45971 (P)
- La possibilité se faire assister
Dans les entreprises dotées d’institutions représentatives du personnel, le salarié peut se faire
assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise. Pour la Cour de
cassation, l’entreprise est également l’unité économique et sociale (UES) composée de plusieurs
sociétés. L’employeur doit mentionner la possibilité de se faire assister par une personne
appartenant à l’UES dans la lettre de convocation à l’entretien préalable. Cass. soc. 8 juin 2011 n° 1014650 (P)
Dans les entreprises dépourvues d’institutions représentatives du personnel, la lettre de
convocation doit indiquer la possibilité de se faire assister d’un conseiller extérieur et préciser
l’adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition. (Article L
1232-4 du code du travail)
Cette liste est tenue à disposition du salarié dans chaque section d’inspection du travail et dans
chaque mairie. (Article D 1232-5 du code du travail)
Le salarié qui souhaite se faire assister, lors de l'entretien préalable à son licenciement, par un
conseiller du salarié communique à celui-ci la date, l'heure et le lieu de l'entretien.
Le salarié informe l'employeur de sa démarche. (Article R 1232-2 du code du travail)
2) Le déroulement de l’entretien préalable
Aux termes de l’article L 1232-3 du code du travail, « l'employeur indique les motifs de la décision
envisagée et recueille les explications du salarié ».
Si le code du travail parle d’employeur, la jurisprudence admet assez largement la possibilité de
mandater et d’être représenté par une personne faisant partie de l’entreprise. Bien que non prévue
par le code, l’employeur peut également se faire assister.
a) L’employeur
En fait d’employeur, la Cour de cassation laisse une grande latitude à ce dernier de se faire
représenter.
Dans une affaire où l’entretien et la notification du licenciement avaient été réalisés par le directeur
financier de l’entreprise, la Cour de cassation se contente de relever qu’il avait agi au nom de
l'entreprise et qu’une délégation de pouvoir écrite n’était pas exigée. Cass. soc. 18 novembre 2003 n°
01-43608 (PB)
Si la finalité même de l'entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement
interdisent à l'employeur de donner mandat à une personne étrangère à l'entreprise pour procéder à
cet entretien et notifier le licenciement, Cass. soc. 26 mars 2002 n° 99-43155 (PBRI)
Mais ne sont pas considérées comme des personnes extérieures à l’entreprise le DRH de la société
mère (Cass. soc. 15 décembre 2011 n° 10-21926), le directeur du personnel d’une société mère (Cass.
soc. 19 janvier 2005 n° 02-45675 PB) ou encore le président du groupe auquel appartient
l’employeur (Cass. soc. 6 mars 2007 n° 05-41378)
b) L’assistance de l’employeur
L'employeur ne peut se faire assister que par une personne appartenant au personnel de
l'entreprise. Cass. soc. 20 juin 1990 n° 87-41118 (P) ; Cass. soc. 30 mars 2011 n° 09-71412 (PB)
L’employeur ne peut donc se faire assister d’un huissier (Cass. soc. 30 mars 2011 n° 09-71412 PB), ni
du fils du dirigeant salarié d’une autre société du groupe (Cass. soc. 28 octobre 2009 n° 08-44241 PB)
Le choix de la personne appartenant au personnel de l’entreprise supporte toutefois certaines
limites. La présence de certaines personnes auprès de l’employeur peut dénaturer l’objet de
l’entretien.
Ainsi, la participation d'un délégué du personnel aux côtés de l'employeur durant l'entretien
préalable au licenciement alors qu'il existait un différend important entre cette personne et le salarié
avait empêché ce dernier de s'exprimer librement ; qu'elle a ainsi caractérisé un détournement par
l'employeur de l'objet de cet entretien. Cass. soc. 21 juin 2011 n° 10-11690
En revanche, la Cour de cassation a admis la présence d’une infirmière de l'établissement assistant la
directrice, intervenue en une seule occasion pour confirmer des propos reprochés au salarié. Cass.
soc. 5 mai 2010 n° 09-40737 (PB)
3) La sanction des irrégularités concernant l’entretien
Plusieurs distinctions doivent être opérées, selon l’ancienneté du salarié et le fait qu’il travaille dans
une entreprise employant habituellement moins de onze salariés. Des règles particulières
s’appliquent lorsque l’irrégularité de procédure concerne la faculté pour le salarié dont l’entreprise
est dénuée de représentants du personnel de se faire assister d’un conseiller extérieur. (Articles L
1235-2 et L 1235-5 du code du travail)
Salarié ayant au moins deux ans d’ancienneté et travaillant dans une entreprise est habituellement
de onze salariés et plus : indemnité ne pouvant être supérieure à un mois de salaire.
Salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté : indemnité laissée à la libre appréciation du juge.
Salarié travaillant dans une entreprise de moins de onze salariés : indemnité laissée à la libre
appréciation du juge.
Salarié appartenant à une entreprise dépourvue de représentants du personnel et irrégularité
relative à la possibilité de se faire assister d’un conseiller extérieur : indemnité ne pouvant être
supérieure à un mois de salaire.