La symbolique de l`érotisme dans les chansons

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La symbolique de l`érotisme dans les chansons
La symbolique de l’érotisme dans les chansons
Les films de Bollywood comportent très souvent des histoires d’amour mélodramatiques d’une extrême pudeur. Vous ne verrez
jamais de baiser (même pas un smack) et encore moins de scène de sexe. Mais il ne faut jamais dire jamais, car certains films
récents osent cette entorse à la règle, mais quand on connaît, ça fait bizarre… On s’habitue vite à ce romantisme poussé à
l’extrême, où un simple frôlement de main est la plus érotique des expressions amoureuses.
On dit que les chansons dans les films Indiens, remplaçent les baisers, pendant longtemps interdits dans les films, ou les
scènes d’amour, qui elles sont toujours bannies dans les films Indiens. En effet, l’Inde actuelle – le même pays, où étonnamment, a été rédigé le Kamasutra – reste toujours sous l’influence de la moralité victorienne; ce qui se manifeste par les
codes de censure de 1919, dont plusieurs étaient en vigueur jusqu’à très récemment, notamment l’interdiction du baiser sur
les lèvres à l’écran.
Cette rigidité concernant le comportement sexuel à l’écran, selon plusieurs historiens du cinéma indien, a mené à l’exploitation des séquences de chanson et de danses comme substituts de l’acte sexuel, leur conférant ainsi une fonction «orgasmique». Nous nous apercevons bien que des séquences qui aboutiraient inévitablement à un baiser, ou à l’accouplement, dans
un cinéma moins réglementé par une censure antédiluvienne, atteignent leur point culminant par une chanson, qui fournit
une sorte d’«éjaculation musicale». Mais tout cela n’est qu’une question d’interprétation…
Si, jadis, on représentait aussi l’acte sexuel en faisant disparaître le couple derrière des arbres ou des buissons et fixant
la caméra sur des fleurs, des oiseaux ou des abeilles (des symboles d’une transparence manifeste), actuellement il ne reste
pas de traces d’une telle pudeur: les gestes, les mimiques et les symboles visuels expriment presque explicitement le coït.
La collaboration quasi-obligatoire des chorégraphes qui décident non seulement les mouvements des danseurs mais aussi les
angles de prises de vue qui peuvent accentuer l’érotisme. Avec des codes de censure beaucoup moins pesants aujourd’hui
cela devient un vrai choix artistique et non pas une exigence juridique ou régie par la société. Devdas, Veer Zaara, proposent
de bons exemples de cette tendance.
Pour ce type de scène, les metteurs font souvent référence à la mythologie hindoue, en s’inspirant ainsi très souvent du
céléèbre couple Radha et Krishna, métaphore éternelle de la passion. Les séquences de chanson et de danse qui font allusion
à ce couple divin sont innombrables dans le cinéma hindi depuis le début: il s’agit soit d’un recours à une scène de rêve où
les personnages principaux font semblant d’être les amants mythiques, soit d’une scène de fête communale qui récrée l’ambiance festive associée avec le couple mythique (ce qui se fait couramment dans presque chaque quartier lors des festivals
comme Holi), soit de références au couple divin toujours. Le duo y prend souvent l’allure d’un duel car l’histoire d’amour de
Radha et Krishna comporte des épisodes explosifs! Le film Lagaan comporte une telle séquence de fête où les personnages
principaux, jouant les rôles du couple légendaire, se lancent dans une série de répliques: la chanson et sa mise en image
sont à la fois badines et sensuelles. L’héroïne se plaint, en fait, du caractère inconstant de son amant qui charme toutes les
gopis (prétendante). La chanson entière prend la forme, en fait, d’une petite querelle entre amoureux.
La notion de «faire la cour» ou «d’amour courtois» n’existe pas car le mariage est estimé être un devoir social et familial,
une des étapes essentielles dans la vie: l’amour et la compatibilité y sont secondaires. Ainsi, on est censé non pas épouser
une personne mais de s’allier à une famille entière, et par conséquent, les enjeux de l’alliance sont bien différents: on a beau
s’entendre parfaitement avec son époux ou son épouse, si l’on n’arrive pas à se faire accepter par sa famille, le reste de sa
vie pourrait facilement se passer avec de grandes difficultés.
Dans cette optique sociétale, et surtout compte tenu de sa pratique de ne jamais mettre en cause le statu quo sociétal, la
tendance du cinéma hindi à vouer obéissance à l’amour comme à l’état idéal qu’il faut atteindre ne pourrait-elle pas se voir
comme une déviance flagrante, en fait la seule qu’il se permette? La toute puissance de l’amour entre homme et femme est
évoquée dans presque toutes les chansons, sa primauté dans la vie de l’individu y est aussi révendiquée sans cesse.
Si l’on tentait de compiler un recueil des chansons d’amour du cinéma hindi, on y trouverait sans doute des descriptions
soigneusement esquissées, des invocations sublimes de toutes les nuances de ce rasa; des preuves incontestables de l’obsession nationale, avec la liberté (car il s’agit bien d’une forme de liberté) qui lui est socialement et moralement interdite:
celle de la passion.
90% des séquences chantées font allusion à l’amour sentimental. A la différence de la société occidentale, l’Inde n’a
aucun mode d’expression socialement visible de l’amour entre un homme et une femme. Les films ont surmonté cette limite
sévère en ayant recours au fantasme à travers des séquences de chansons et de danses. D’ailleurs, en raison des restrictions
écrasantes de la société et des religions en Inde, l’amour entre l’homme et la femme dépend fortement du fantasme ou de la
rêverie. Le cinéma imite tout simplement la vie.
textes © mulotine production
Bollywood pour les nuls

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