dossier tourisme Aout 2014
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dossier tourisme Aout 2014
6 tourisme Comment la technologie modifie l’expérience touristique UN NOUVEAU MARCHÉ Le coût de l’investissement dans un site comme Zermatt.ch? Vaud:Guide, une application interactive innovante EDSI-Tech Sàrl, entreprise basée à l’EPFL et mandatée par l’Office du tourisme du Canton de Vaud, a récemment lancé l’application mobile Vaud:Guide. Intuitive et gratuite, cette dernière fournit aux visiteurs de la région des recommandations personnalisées de lieux ou d’activités à découvrir. Centrée autour d’une carte, l’application présente les principales attractions du territoire. Un visiteur amateur de culture se verra par exemple proposer des manifestations dans ce domaine. Ces mêmes suggestions permettent de faire remonter des informations du terrain pour aider les responsables d’un site ou d’une région à mieux appréhender les préférences de leurs visiteurs et à développer une offre touristique adéquate. Vaud:Guide est basé sur le système d’information et de statistiques touristiques MyCity, conçu par EDSI-Tech. Il intègre des algorithmes de machine learning et de data mining, développés notamment en collaboration avec le laboratoire M.E.D.I.A. de l’EPFL. Pour télécharger l’application Vaud:Guide pour iPhone et téléphones Android: appmobile.region-du-leman.ch/ - fotolia.com D’après le cabinet Oxford Economics, le secteur du voyage devrait enregistrer une croissance annuelle de 5,4% au cours des dix prochaines années, soit une progression supérieure à celle du PIB mondial. Voilà donc un marché qui se porte bien. En cause: la montée en puissance des pays émergents, la Chine en tête, mais aussi les technologies de la communication, qui ont favorisé la bonne santé et le dynamisme de nombreux acteurs de cette branche. Exemple: avec 56% des internautes achetant des produits et des services liés au voyage touristique, l’etourisme était au premier rang des achats en ligne en France en 2012. Au niveau européen, le voyage en ligne a connu une croissance à deux chiffres ces dernières années, même au plus fort de la crise. A l’échelle mondiale, la tendance est pratiquement la même. Les facilités de réservation sur internet constituent bien sûr l’essentiel des activités des etouristes. D’autant que les outils mobiles, comme les tablettes ou les smartphones, facilitent davantage les procédures. Le voyage virtuel précède plus que jamais le réel. Toutefois, les technologies de la communication sont également à l’origine d’autres bouleversements des habitudes. Statistiques personnalisées, conseils individualisés, réalité augmentée, échanges d’informations en direct… voilà autant de nouvelles possibilités de modifier l’expérience touristique. Il y a quelques semaines, Zermatt Tourisme se réjouissait ainsi d’une «technologie web révolutionnaire», qu’elle met désormais à la disposition des hôtes de la station. Un nouveau site, Zermatt.ch, propose des plans dynamiques, des géodonnées originales ou encore une indication des heures d’ouverture actualisée en temps réel. «Notre portail internet, qui affiche plus de dix mille illustrations du Mont Cervin et toutes les attractions proposées à Zer- matt, inspire les visiteurs qui le consultent. En outre, les nombreux pictogrammes intégrés dans les cartes interactives de notre destination guident intelligemment les curieux vers les endroits les plus pertinents par rapport à leurs besoins ou à leurs envies», expliquent en substance les responsables de cette offre numérique. Et de mentionner encore, dans leurs arguments destinés à convaincre, d’autres qualités de ce site aux 2,4 millions de connexions par an: plus de cent randonnées, ainsi que quelque deux cent cinquante animations, sont répertoriées, les heures d’ouverture et les numéros de téléphone s’affichent instantanément au cœur des illustrations géographiques, les images s’ajustent automatiquement au format d’un écran mobile ou fixe, quel qu’il soit, les recherches de chambres libres s’effectuent de manière intuitive, etc. Surtout, Zermatt.ch illustre l’importance prise par les services web complémentaires, dont les touristes sont aujourd’hui très demandeurs et qui les amènent à se rendre ou non dans un lieu de villégiature. «La qualité de l’accueil, la beauté réelle d’un paysage ou l’émotion intense ressentie lors d’une excursion conservent leur statut de critères primordiaux pour attirer toujours plus de personnes. Pourtant, l’accompagnement par une possibilité communicationnelle innovante de toutes les expériences touristiques, même – voire surtout – les plus impressionnantes ou marquantes, représente non plus une option, mais bel et bien une obligation pour les professionnels du secteur. Il ne s’agit plus de se poser la question de savoir si des investissements dans les technologies de la communication sont nécessaires, mais de connaître le niveau pertinent et la forme la plus adaptée de ces investissements», souligne Andreas Banholzer, directeur de l’Office du tourisme du canton de Vaud. photo pab_map Grégory Tesnier LES POSSIBILITÉS offertes par les technologies de la communication modifient l’expérience touristique des vacanciers. Quelque deux cent cinquante mille francs, services de facilité de réservations non inclus. Un marché florissant émerge dès lors pour proposer des solutions numériques originales aux acteurs du tourisme ou pour offrir des services en ligne complémentaires en s’adressant directement aux visiteurs d’une région ou d’un espace de loisirs. Des entreprises se spécialisent dans cette expertise. Elles portent des noms souvent abscons ou qui s’envisagent comme des invitations au voyage: My super souvenir, Sejourning, Simpki, Parisianist, Payintech, Captag, etc. Le point commun de ces entreprises, qui servent d’illustrations au propos, mais qui sont bien réelles? Elles font partie d’un incubateur de start-up très particulier: le Welcome City Lab, à Paris. Cette organisation, née en 2013 avec le slogan «Inventons le tourisme du futur», possède une triple vocation: repérer les futures pépites du tourisme international et soutenir leur croissance, créer un état d’esprit et une culture de l’innovation dans l’industrie touristique et, enfin, inciter les start-up à s’intéresser au secteur du tourisme. E-tourisme, visite argumentée, open data, big data, accueil et traduction, consommation collaborative, tourisme d’affaires, nouveaux loisirs, mobilité ou monétique, voilà autant de terrains de jeu pour les entrepreneurs invités à exercer leurs talents au sein de l’incubateur parisien. Laurent Queige, son directeur, qui connaît bien le canton de Vaud grâce à son experience professionnelle, explique encore: «Trente jeunes entreprises sont actives dans nos locaux. Nous les accompagnons dans leur croissance sur des durées variant de un à trois ans. A ma connaissance, nous sommes un incubateur unique au monde, puisque fonctionnant exclusivement en lien avec le milieu touristique. Lors de notre ouverture l’année dernière, nous avons reçu quelque cent septante dossiers de candidatures venues de toute l’Europe, dont certaines de Suisse». L’Ecole hôtelière de Lausanne possède aussi son propre incubateur d’entreprises consacré au secteur de l’accueil (www. ehl.edu/fre/Industrie/Incubateur-d-entreprises). Laurent Queige énumère les autres atouts de son institution: «Nous soutenons les gestionnaires de projets et nous les mettons en relation avec des personnesressources utiles. Nous leur offrons également la possibilité de suivre, à leur convenance, des conférences et des formations professionnelles en lien avec leurs compétences. Surtout, nous permettons une expérimentation de leurs produits ou de leurs services à grande échelle!». Un réseau de veille internationale spécialisée est à l’étude au Welcome City Lab pour 2015, tandis que des partenariats avec des villes étrangères,comme Mexico, Budapest ou Dakar sont d’ores et déjà engagés. Le concept de Welcome City Lab pourrait alors être testé dans d’autres lieux et dans d’autres contextes. «Nous sommes ouverts à différents types de collaboration et des discussions avec des entreprises ou des organismes helvétiques intéressés sont bien entendu aussi bienvenues.» DES ENTREPRISES SUISSES BIEN PLACÉES En Suisse,il existe en effet,outre l’Ecole hôtelière de Lausanne ou la Haute école de gestion et de tourisme du Valais, pour ne citer que ces deux institutions académiques, quelques lieux abritant des acteurs économiques désireux de percer dans le secteur touristique de manière innovante. L’EPFL fait partie de ces endroits. La société EDSI-Tech Sàrl, dirigée par Philippe Bonvin, en est directement issue, dans le cadre de la politique de transfert de technologies de l’institution. Fondée en 2005 et initialement consacrée à l’étude et au développement de solutions sur internet, cette entreprise a étendu ses activités aux applications mobiles. Et, Genève élue «Europe’s Leading City Break Destination 2014» Genève s’est vue décerner le trophée de Europe’s Leading City Break Destination 2014 lors de la cérémonie des World Travel Awards 2014 (WTA), qui s’est déroulée le 2 août dernier en Grèce. C’est la première fois qu’une destination suisse reçoit cette récompense, qui se veut l’équivalent des Oscars de l’industrie du tourisme. Le trophée a été remis à Athènes en présence de nombreux acteurs du secteur du tourisme (responsables de destinations, tours opérateurs, compagnies aériennes et chaînes hôtelières). Cette distinction est le résultat d’un vote en ligne auquel ont pris part des milliers de participants. Ce prix met en avant les prestations d’excellence touristique mesurées tout au long de l’année écoulée par les experts du secteur. Dans cette compétition, Genève faisait face à de prestigieuses et sérieuses concurrentes également nominées: Paris, Londres, Madrid, Rome ou encore Dublin. très récemment, elle a mis au point une solution pratique à destination des professionnels du tourisme et des touristes eux-mêmes: MyCity. Cette technologie novatrice aide à collecter, sur le terrain et en temps réel, des statistiques sur les visiteurs d’une région. Ces derniers bénéficient en retour d’une aide et de recommandations personnalisées grâce à l’analyse poussée de leur comportement. L’Office du tourisme du canton de Vaud a choisi de faire confiance à EDSI-Tech en lui confiant la mise au point de Vaud:Guide (lire encadré en page 6), une application interactive directement issue du savoir-faire de la société. Selon Philippe Bonvin, MyCity va bientôt devenir une entreprise à part entière et se détacher d’EDSI-Tech. «Notre spécialité d’origine consiste d’abord et avant tout à concevoir des algorithmes de recommandations efficaces. Leur application au monde touristique, à partir de la technologie MyCity, apparaît comme très porteuse et nous allons la développer de façon autonome.» Dans le détail, MyCity se présente comme un guide touristique intelligent, adapté aux moyens de communication actuels, et capable d’être intégré à un appareil mobile, à des kiosques dans des points d’information ou encore dans le module d’un site internet. «Les organismes qui mettent à la disposition de leurs visiteurs la technologie MyCity, comme l’Office du tourisme du canton de Vaud, mais aussi le Parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut ou la station des Diablerets, bénéficient de statistiques précises et accèdent à une meilleure connaissance de leurs hôtes», souligne Philippe Bonvin. 7 «Les petites structures ont du mal à suivre l’évolution» Internet a d’abord et avant tout facilité les réservations en ligne. Le secteur touristique s’en est trouvé bouleversé; tous les professionnels ont dû s’adapter. Les technologies de la communication modifient également, depuis plus de quinze ans et de multiples autres façons, les habitudes des vacanciers et les offres proposées par les responsables d’excursions, de musées ou de l’hôtellerie. Tour d’horizon de quelques changements observés. un dossier réalisé par ENTREPRISE ROMANDE 29 août 2014 SAVOIR INVESTIR JUDICIEUSEMENT Du côté de l’Office du tourisme du canton de Vaud, Andreas Banholzer se déclare satisfait de sa collaboration avec EDSITech. Il poursuit sa réflexion: «Certes, une expérience touristique peut toujours s’effectuer en se passant de tout apport technologique. Sa qualité ne va pas changer. Cette valeur intrinsèque reste le facteur de popularité le plus important. Toutefois, la plus-value apportée par une application innovante ou par des services en ligne efficaces correspond désormais aux attentes des visiteurs». Quelles sont ces attentes? Il y a d’abord le désir de partage. «On aime dire ce que l’on a aimé ou non grâce aux réseaux sociaux ou par d’autres moyens technologiques. L’expérience touristique se vit désormais avant, pendant et après le voyage», analyse Vincent Dubi, directeur marketing de Genève Tourisme. Il indique en outre que les touristes apprécient également de pouvoir être séduits par un site internet, par des photos ou par des vidéos. «Etre visible sur la toile de manière efficace demeure essentiel», confirme Andreas Banholzer. La difficulté pour les professionnels du tourisme réside donc dans le fait de savoir bien investir dans les technologies de la communication. «Beaucoup de responsables de sites touristiques se trompent en dépensant des sommes folles par simple mimétisme, alors qu’il leur faudrait dépenser en lien direct avec leurs activités. Tout ne convient pas à tout le monde», affirme Vincent Dubi. «Dans les technologies de la communication, le «toujours mieux» est généralement l’ennemi du bien. Le secret de la réussite? Avoir la bonne idée au bon moment», conclut Laurent Queige. n Jean-Claude Morand est l’auteur, notamment, de Tourisme 2.0, un ouvrage consacré aux bouleversements économiques intervenus dans le secteur touristique à la suite de la montée en puissance d’internet, des réseaux sociaux et du web 2.0. Il est professeur invité à l’Ecole hôtelière de Lausanne et offre des conseils en e-Business et e-Tourisme. Les touristes ont-ils l’occasion, grâce aux technologies de la communication, de vivre des émotions plus fortes lors de leurs voyages, de leurs balades ou de leurs séjours culturels? Oui, les touristes vivent une expérience touristique plus forte, car plus longue dans le temps. Ils ont une meilleure connaissance préalable des lieux visités et deviennent des experts de leurs destinations grâce aux wikis, aux sites internet, aux blogs, à la réalité augmentée, à des plans de villes interactifs ou à la géolocalisation. De plus, il y a une extension de la durée de l’expérience touristique au niveau de sa restitution, avec un partage en ligne de son vécu, de ses sentiments et de ses impressions. L’émotion ressentie lors d’un voyage ou d’une visite est-elle pour autant plus intense qu’auparavant? Cela peut être le cas, mais pas forcément. La technologie est aussi susceptible de constituer un obstacle délétère entre la beauté d’une œuvre ou d’un territoire et celui ou celle qui admire cette beauté. L’écran mobile devient par exemple parfois un «mur» entre le touriste et l’objet à contempler ou un frein à la rencontre avec les gens. Les technologies de la communication sont-elles à envisager comme un simple gadget ou comme une nécessité pour les professionnels du tourisme? Il faut distinguer deux groupes de professionnels: les gérants de petites structures et les dirigeants de très grosses entreprises, comme les grandes chaînes hôtelières, par exemple. Pour les petites structures, les coûts des investissements nécessaires deviennent hors de portée de leur budget – le groupe Hilton investit ainsi cette année cinq cents millions de dollars dans la technologie mobile! – et elles ne possèdent pas non plus les connaissances requises pour présenter sur Les tarifs des voyages d’affaires en hausse L'industrie mondiale du voyage d'affaires doit s'attendre à une hausse des prix pour 2015. En Suisse, les prix des vols vont augmenter de 0,4% et les prix des hôtels de 2%. Les tarifs des voitures de location seront probablement en hausse de 0,1%. Voilà les résultats d’une nouvelle étude, Global Travel Price Outlook, publiée par Carlson Wagonlit Travel (CWT), en collaboration avec la Fondation GBTA, la branche formation et recherche de la Global Business Travel Association. Le rapport souligne que la demande croissante des pays émergents comme la Chine, l’Inde et le Brésil, ainsi que la reprise de la croissance économique dans les économies avancées, associées au développement limité de l’offre de transport, mèneront à une augmentation des tarifs, notamment sur les marchés à forte demande. A titre d’exemple, pour les tarifs aériens, la plus grande hausse tarifaire est attendue en Amérique latine avec 3,5%, tandis que les augmentations en Europe devraient être beaucoup plus modestes. photo bordeaux tourisme & congrès tourisme ENTREPRISE ROMANDE 29 août 2014 LA VILLE DE BORDEAUX propose aux touristes Imayana, un outil de réalité augmentée pour plonger dans le XVIIIe siècle. Un spectacle mobile permettant de superposer en temps réel un bâtiment disparu au décor actuel. Le parcours pédestre proposé par Imayana se déploie sur environ un kilomètre. Machine en main, le visiteur vit un spectacle scénarisé, au cours duquel il va animer des statues, rencontrer des personnages, activer des portes temporelles… le marché des innovations capables de les différencier. Il leur reste donc à utiliser des applications existantes et proposées par de grands acteurs du web (logiciels de cartographie, générateurs d’itinéraires, agendas interactifs, etc.). Pour les grandes entreprises actives dans le tourisme, les budgets explosent, mais les investissements demeurent prometteurs, notamment avec l’exploitation à venir du plein potentiel commercial des objets connectés, des terminaux mobiles ou des réseaux sociaux. Notons que toutes les formes de tourisme subissent des bouleversements, même le tourisme d’affaires. Ainsi, grâce à des produits originaux, comme par exemple Téléprésence, de CISCO – qui permet une nouvelle forme de vidéoconférence plus efficace –, les centres de réunions et de congrès sont peut-être amenés à devenir de plus en plus virtuels. Il est donc hors de question pour un professionnel du tourisme, quelle que soit sa situation, d’ignorer les progrès en lien avec les technologies de la communication? Oui, mais les petites structures ont du mal à suivre l’évolution. Et, malheureusement, le fractionnement des organisations touristiques institutionnelles ne permet pas de concevoir des supports réellement efficaces pour elles. Elles doivent se concentrer sur leurs atouts historiques: l’accueil, l’authenticité, la qualité des prestations. Les offices du tourisme, pour les aider, devraient envisager des regroupements ou, au minimum, une mise en commun de leurs ressources, pour être en mesure de développer des applications technologiques à forte valeur ajoutée. S’il est nécessaire, l’investissement dans les technologies de la communication est-il pour autant toujours rentable? Je suis de plus en plus dubitatif en observant les montants investis par certaines organisations. Les calculs de retour sur investissement sont souvent absents lors des prises de décisions. A leur décharge, il faut reconnaître qu’il est difficile de prévoir l’impact d’une nouvelle application technologique. Ainsi, un musée qui développerait un outil de réalité augmentée pourrait voir sa fréquentation dopée grâce à l’effet d’annonce. Mais rien n’est sûr. n