10 chambre – Instants d`audience

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10 chambre – Instants d`audience
10e chambre – Instants d’audience
Après « Faits Divers » en 1983 et «Délit flagrant», en 1994, le photographe et cinéaste
Raymond Depardon revient à l'univers judiciaire et explore la mécanique du procès. Mais,
loin des procès médiatisés des cours d'assises, le documentariste s'est rendu à la dixième
chambre correctionnelle de Paris, qui traite principalement des convocations pour délits
mineurs. De mai à juillet 2003, le cinéaste et son équipe ont obtenu une autorisation
exceptionnelle, qui leur a permis de filmer au plus près le travail des magistrats et les
réactions des inculpés de ces affaires mineures...
En 1994, « Délits Flagrants » montrait trois substituts du procureur face à des inculpés qui
risquaient gros.
À la 10e chambre du tribunal correctionnel de Paris, les cas sont a priori moins spectaculaires.
Plutôt des « petites affaires » - insulte à agents, conduite en état d'ivresse- menées tambour
battant. Durant trois mois, donc, Raymond Depardon a installé ses caméras et ses micros dans
une salle d'audience et a filmé tous les événements, tragiques ou cocasses. Guidé par sa seule
subjectivité, il n'a gardé, en définitive, que douze cas. Plus exactement quelques extraits
significatifs de ces douze audiences. D'où ce film étrange et passionnant, dans lequel il semble
moins porté à dénoncer les faiblesses de notre système judiciaire qu'à surprendre la panique qui
saisit n'importe quel innocent ou prétendu tel lorsqu'il doit, en quelques minutes, emporter
l'adhésion d'un juge, avec l'aide d'un avocat pas toujours inspiré (voire carrément insupportable).
On est alors en pleine pâte humaine, comme dans les romans de Simenon. Il y a la bourgeoise
qui a du mal à admettre qu’elle roulait vaguement ivre. L’homme qui, dans un état seconde,
bredouille des « Je m’excuse », des « Mes respects » pour se faire bien voir. Et le pire de tous,
sans doute, est ce petit macho qui a maltraité, durant des mois, sa copine et continue de la
menacer au téléphone, depuis leur rupture. Très vite, on ne voit que le visage de celle qui a porté
plainte, parce que la justice, elle y croit encore. Face à tous ces désastres, la justice s'en sort
comme elle peut. Plutôt pas mal, en fait. La juge applique la loi avec une efficacité souriante :
elle dialogue, en aide certains, en bouscule d'autres, consciente que chaque cas est un petit
drame qu'il lui faut régler au mieux. Tout se déroule dans le meilleur des mondes possibles, à
condition que chacun se plie au rôle que la société exige. Sinon gare... Soudain, on sent la juge
agacée par un prévenu, intimidé mais ferme, qui a décidé de se défendre lui-même, de prendre
des notes durant l'audience et de contester l'accusation point par point pour prouver que son
couteau n’était pas une arme. Il explique, discute, argumente et, brusquement, la juge explose :
« Vous n'allez tout de même pas m'apprendre le Code ? » lance-t-elle... En une fraction de
seconde, on mesure la frontière qui sépare l'autorité de l'autoritarisme. Le film poignant et drôle
fait alors froid dans le dos.
D’après Pierre Murat,
Télérama, 2011
RÉPONDEZ AUX QUESTIONS
1.
2.
3.
4.
5.
Quel est le titre du film de Raymond Depardon dont cet article fait la critique ?
Quel est le genre de ce film ?
Où ce film a-t-il été tourné ?
Que signifie l’expression « risquer gros » dans cet article ?
Le film montre une victime. D’après l’auteur de l’article, quel est son rapport à la
justice ?
VRAI OU FAUX ?
-
Les manquements à la loi présentés dans ce film sont de petits délits
En France, il est habituel que des caméras enregistrent les débats judiciaires
Parmi les histoires présentées dans le film, le délit qui a le plus indigné l’auteur de
l’article est la conduite en état d’ivresse
L’expression « Sinon gare… » communique un souhait
Le film montre que la fonction principale de la juge est de punir
Selon l’auteur de l’article, le film inspire des émotions contradictoires

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