La fabrication additive : préparez-vous à une révolution
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La fabrication additive : préparez-vous à une révolution
20 numéro du 25 mai 2013 LES AFFAIRES | WWW.LESAFFAIRES.COM en manchette La fabrication additive : préparez-vous à une révolution ! DOMINIQUE. FROMENT @TC.TC Quand il a sculpté son David au début du 16e siècle, Michel-Ange a pris un bloc de marbre et a enlevé le superflu au moyen de marteaux, de ciseaux... Cinq siècles plus tard, le secteur manufacturier fonctionne toujours selon le même principe : un bloc de matériau que l’on façonne pour obtenir une pièce. Mais préparez-vous, fabricants, car ça va changer ! Moteur de ce changement : l’impression 3D. Imaginez une imprimante de bureau qui applique une couche d’encre pour former des lettres ou des chiffres. Remplacez l’encre par du plastique en fusion ou du métal en poudre, superposez des couches de 5 à 13 millièmes de pouce (13 à 33 centièmes de millimètre) d’épaisseur, et vous obtiendrez un solide, en trois dimensions. C’est comme si vous empiliez en les collant des feuilles de papier rondes ; vous finiriez par obtenir un tronc d’arbre. C’est aussi simple que ça ! En fait, c’est un peu plus compliqué. La fabrication additive (par addition de couches) regroupe plus d’une trentaine de technologies différentes, comme les thermoplastiques, la fusion laser, les poudres métalliques et la polymérisation, explique François Guilbault, ingénieur, MBA et président de Solaxis, de Bromont, qui est en voie de devenir un spécialiste dans ce domaine. La fabrication additive ne relève pas de la science-fiction : 22 000 pièces de métal et de plastique produites ainsi volent déjà, affirme M. Guilbault. Dans les ailes des nouveaux Airbus A380 et Bœing 787, entre autres. À Sainte-Anne-de-Bellevue, dans l’ouest de l’île de Montréal, MDA travaille à un projet de pièces en titane pour ses satellites. « Il y a des pièces fabriquées selon des techniques additives dans nos prototypes de moteurs fonctionnels, et il y aura au moins une pièce de ce type dans les premiers moteurs du CSeries de Bombardier », a confié à Les Affaires Yves Rabellino, directeur principal, gestion stratégique des coûts, recherche & technologie et support aux opérations de Pratt & Whitney Canada. (Il n’a toutefois pas voulu dire laquelle.) Bientôt un campus spécialisé L’ingénieur Clément Fortin est pdg du Consortium de recherche et d’innovation en aérospatiale au Québec (CRIAQ). C’est sur lui que comptent Bombardier, Pratt & Whitney, Bell Helicopter, CAE, HérouxDevtek, Rolls-Royce et d’autres pour faire avancer le dossier de la fabrication additive. Ce consortium existe depuis 10 ans, mais en novembre, ses membres ont visionné une vidéo sur la fabrication additive qui a été le déclencheur. « Nous travaillons actuellement à mettre sur pied le Campus international de recherche et d’innovation en aérospatiale de Montréal (CIRIAM) dans ce but précis », précise M. Fortin. Au lieu que chaque établissement (Polytechnique, universités McGill et Laval) se procure ses propres imprimantes, le CIRIAM achètera plusieurs machines pour les mettre en commun. Les entreprises aérospatiales du CIRIAM obtiendront des licences exclusives gratuites pour le monde entier sur les découvertes qui y seront faites, alors que les universités garderont les droits pour les autres secteurs que l’aérospatiale. « Nous avons plusieurs fournisseurs qui possèdent déjà une imprimante 3D. Ce qui nous intéresse, ce n’est pas tant la machine que la façon optimale d’utiliser cette technologie », explique Mathieu Boisclair, chef de section, technologies stratégiques, aéronautique, chez Bombardier. Une chaîne d’approvisionnement locale Bombardier, Pratt et Bell veulent créer une chaîne d’approvisionnement locale de pièces fabriquées selon des procédés additifs. « Si vous voulez devenir un fournisseur de l’un de ces avionneurs, vous feriez bien de vous familiariser avec la fabrication additive », conseille M. Fortin. « Nous voulons collaborer avec des manufacturiers locaux pour leur faire part de nos besoins et pour apprendre d’eux aussi afin que chacun sache à quoi il peut s’attendre de l’autre », ajoute Pierre Rioux, directeur, technologie et sciences du vol de Bell Helicopter Textron Canada. « De plus, faire fabriquer ici est plus rapide qu’en Chine et profite à notre économie, ajoute M. Boisclair. Si Bombardier peut livrer ses appareils plus rapidement, c’est un avantage concurrentiel. Et si on peut livrer les pièces de rechange plus rapidement, on améliorera notre service à la clientèle. » Et M. Fortin de préciser : « Ce n’est pas seulement l’industrie aéronautique qui pourra bénéficier de cette technologie, mais d’autres industries comme les transports terrestres, les véhicules et les équipements médicaux. » Dans un premier temps, le CIRIAM travaillera à dresser l’inventaire des ressources disponibles : laboratoires, équipements, expertises, etc. « Nous réaliserons aussi des études sur ce qui se fait ailleurs dans le domaine de la fabrication additive et nous étudierons les modèles existants pour trouver celui qui nous convient le mieux, précise M. Fortin. En somme, il s’agit d’aller chercher les connaissances qui nous manquent. » Cette première phase, d’une durée d’un an, sera lancée ces jours-ci avec la signature d’une entente entre les principaux partenaires. Clément Fortin se souvient de la première pièce de fabrication additive qu’il a vue lors d’une conférence à Detroit... en 1987. À l’époque, on appelait cette technologie Rapid Prototyping. PHOTO : GILLES DELISLE 1 De nombreuses économies Bonne nouvelle pour l’environnement : la fabrication additive s’inscrit parfaitement dans une démarche de développement durable. « On rejette jusqu’à 80 à 90 % de matériaux sur certaines pièces fabriquées de façon traditionnelle [moulage, injection, usinage, thermoformage, etc.], explique M. Rioux. Même si on recycle ces matériaux, il faut de l’énergie pour les produire. Alors qu’avec la fabrication additive, les rejets sont réduits au strict minimum. » La fabrication additive peut en outre permettre de réduire le poids des pièces et donc de l’appareil, sa consommation d’essence, ses émissions de GES, etc. « Avec la fabrication traditionnelle, on ne peut pas retirer de la pièce toute la matière inutile, parce que ce serait trop complexe, explique M. Rioux. La fabrication additive utilise des matériaux seulement là où il en faut et, de plus, on peut optimiser la géométrie de la pièce et faire en sorte de lui donner plus de résistance là où c’est requis. » Bell fabrique déjà selon des techniques additives de la tuyauterie en nylon pour la ventilation de la cabine de ses hélicoptères. « Question de se familiariser avec la technologie, on commence par les pièces non structurales », précise M. Rioux. Autre avantage : comme la fabrication additive ne nécessite pas de moule – qu’il faut parfois faire produire en Chine –, les délais de fabrication peuvent être beaucoup plus courts. « Obtenir certaines pièces peut nous prendre un an, alors qu’avec la fabrication t Les imprimantes 3D font beaucoup parler d’elles. Qui n’a pas entendu parler récemment de ce fusil en pièces détachées à imprimer à la maison, sur une machine qui coûte quelques centaines de dollars ? Mais derrière ce qui semble a priori un gadget se cache la prochaine révolution industrielle, la fabrication additive. D’ailleurs, au Québec, l’industrie aérospatiale – Bombardier, Pratt & Whitney et Bell Helicopter en tête – pousse fort pour provoquer les choses. Une véritable révolution numéro du 25 mai 2013 LES AFFAIRES | WWW.LESAFFAIRES.COM Dans sa livraison de mars 2013, la prestigieuse Harvard Business Review (HBR) titrait « L’impression 3D va changer le monde ». Rien de moins ! « Avec l’impression 3D, les facteurs qui ont fait de la Chine l’atelier du monde perdront de leur importance », écrit HBR, citant Richard A. D’Aveni, professeur à la Tuck School of Business, à Dartmouth, et auteur de Strategic Capitalism. 2 21 en manchette 3 4 1. Trois des quatre imprimantes de Solaxis, de Bromont. 2. Un conduit d’aération en cours de fabrication : la buse étend une nouvelle couche de plastique. 3. La pièce est terminée. 4. Un employé la sort de l’imprimante. 5. Gabriel Allard et François Guilbault, les fondateurs de Solaxis. « Il y aura au moins une pièce fabriquée selon la technique en additive dans les premiers moteurs du CSeries de Bombardier. » – Yves Rabellino, de Pratt & Whitney Canada additive, un mois suffit, soutient M. Rabellino. Ces délais réduits nous permettent en plus d’expérimenter plusieurs configurations pour trouver celle qui est optimale. » De son côté, Mathieu Boisclair estime que la fabrication additive permet un meilleur contrôle de la qualité. « Tout est contrôlé numériquement, il y a donc moins d’intervention humaine. Et comme la machine crée le matériau en même temps que la pièce, la marge d’erreur est réduite. » La fabrication additive permettra-t-elle aussi aux entreprises de réduire leurs frais de transport ? M. Fortin se permet de rêver : « Une fois que vous avez le modèle 3D dans votre ordinateur, vous avez seulement à l’acheminer par Internet vers l’imprimante 3D située le plus près de votre client. » « Ça pourrait en effet devenir très économique d’avoir de petites usines équipées de quelques imprimantes dans plusieurs pays, croit aussi Jocelyn Leclerc, associé chez KPMG Canada. Ainsi, les économies d’échelle deviendraient moins critiques pour les PME. » Des pièces pour le cockpit du CSeries François Guilbault et son associé Gabriel Allard ne doutent pas du potentiel de la fabrication additive. En 2010, ils ont créé Solaxis avec l’objectif de devenir des spécialistes. Ils possèdent quatre imprimantes 3D de modèle Fortus, valant de 375 000 à 500 000 $ chacune ; elles ont été achetées au fabricant Stratasys, du Minnesota. Solaxis utilise la technologie du fil de plastique (thermoplastique), qui est relié à une buse qui se déplace comme une tête d’imprimante en fonction de la forme de la pièce. La buse chauffe le fil pour le liquéfier et étend juste où il faut une mince couche de plastique qui se fusionne à la précédente. Lors de notre passage à l’usine, un conduit d’aération en polycarbonate de 18 centimètres pour l’industrie aéronautique a été produit en 56 minutes. Solaxis vient d’agrandir son usine. « Nous ne sommes pas encore dans la technologie des poudres métalliques, parce qu’elle n’est pas encore au point. Mais comme vous voyez, il y a de la place pour de l’expansion », lance fièrement M. Guilbault. « La technologie des poudres métalliques est plus avancée que ne le croient les dirigeants de Solaxis », estime toutefois Clément Fortin, du CRIAQ. PHOTOS : GILLES DELISLE Solaxis, qui emploie 10 personnes dont 4 ingénieurs, produit des prototypes fonctionnels pour le cockpit du CSeries de Bombardier. Solaxis est également le fournisseur de pièces de fabrication additive d’IBM, de Pratt & Whitney, de Prévost Car, d’Alstom, de la STM, d’Hydro-Québec, de BRP (pour son prototype canadien de rover lunaire et martien) et... du Cirque du Soleil, pour lequel elle produit les boîtiers à l’épreuve du feu qui contiennent des batteries que les artistes portent sur eux en spectacle pour illuminer leurs costumes. Une application toute simple mais qui, avec les techniques additives, a l’avantage de ne pas nécessiter de moule. n La suite de notre manchette sur la fabrication additive à la page 23 t t 5 numéro du 25 mai 2013 LES AFFAIRES | WWW.LESAFFAIRES.COM 23 t en manchette Suite de la page 21 Entretien avec Terry Wohlers, l’expert mondial cours des 10 prochaines années. Wohlers Associates estime que, d’ici 2015, la vente des produits et des services de fabrication additive atteindra 3,7 milliards de dollars américains à l’échelle mondiale, et que, d’ici 2019, elle dépassera 6,5 G$ US. La fabrication additive touchera d’abord surtout les industries aérospatiale, médicale et dentaire. Pour l’aérospatiale, les avantages sont la réduction du poids et la consolidation de nombreuses pièces élémentaires et opérations d’assemblage en un seul élément complexe. Les fabricants de moteurs d’aéronefs prévoient aussi utiliser des composants métalliques de fabrication addi- Dans l’industrie, ceux qui s’intéressent à la fabrication additive vous diront tous que le consultant Terry Wohlers, de Wohlers Associates au Colorado, est le numéro un mondial dans ce domaine. Le volumineux rapport annuel qu’il produit est une véritable bible de la fabrication additive. Nous lui avons posé quelques questions. LES AFFAIRES – Que prévoyez-vous concernant la fabrication additive sur un horizon de 10 ou 20 ans ? TERRY WOHLERS – Le secteur de la fabrication additive devrait maintenir une solide croissance à deux chiffres au Terry Wohlers tive dans la prochaine génération de moteurs à réaction. Les industries médicale et dentaire ont adapté la fabrication additive en raison de sa capacité de produire des pièces uniques pour un patient, sans avoir recours à quelque moule, matrice PRIX RELÈVE D’EXCELLENCE 2013 ou outil que ce soit. À titre d’exemple, mentionnons les appareils auditifs qui épousent la forme de l’oreille, les aligneurs orthodontiques invisibles et les chapes métalliques des couronnes et des ponts dentaires. Dans 20 ans, de nombreux produits de consommation seront fabriqués selon des procédés additifs, y compris des chaussures, des vêtements, des produits alimentaires et même des os et des tissus mous à partir de cellules vivantes. Des scientifiques de l’Université d’Oxford, en Angleterre, ont créé, avec une imprimante 3D, des matériaux ressemblant à des tissus vivants qui pourraient avoir des applications PRÉSENTÉ PAR médicales. Pour les clients, commander des produits personnalisés de tous genres sur le Web sera courant, et la livraison se fera souvent le jour même ou le lendemain. L.A. – Quels sont les pays et les entreprises chefs de file de la fabrication additive actuellement ? T.W. – Je dirais Stratasys (Israël et États-Unis), EOS (Allemagne), Arcam (Suède) et Materialise (Belgique). On trouve une liste plus complète de fabricants de systèmes et autres produits à wohlers associates.com/manufacturers-and-developers. html. D. FROMENT POUR EN SAVOIR PLUS Rapid Manufacturing : An Industrial Revolution for the Digital Age, de Neil Hopkinson, Richard Hague, Philip Dickens (Wyley) La bible de la fabrication additive : wohlersassociates.com/2012report.htm (495 $) Une vidéo sur la fabrication additive : youtube.com/watch?v=M_qSnjKN7f8 Client : HEC Montré Andrée-Ann 514 340-70 PROGRAMME D’ASSURANCES HABITATION ET AUTO prixreleve.ca denise.cadie 514 340-566 CATÉGORIE SERVICES DE CONSULTATION (1er, 2e et 3e prix du jury) ÉDITION 2013 Le Réseau HEC Montréal est fier de vous présenter les lauréats qui ont été honorés le 17 mai dernier lors d'un Gala à l'hôtel Fairmont Le Reine Elizabeth. Depuis 28 ans, ce concours souligne le succès professionnel de diplômés HEC Montréal de 35 ans et moins. Étienne Boucher HEC 04 Conseiller principal Normandin Beaudry Rafal Kuczynski Gildas Poissonnier Journal Le Parution : le HEC 02 Associé et co-fondateur Lacharité McComber Kuczynski HEC 07 Directeur Développement durable Deloitte Format : 1/2 10 x 6,15 po Noir et blan Nom du do Laureat Prix CATÉGORIE GRANDE ENTREPRISE (1er, 2e et 3e prix du jury) Darcy Ferron Isabelle Rioux Michel Bérubé HEC 11 Vice-président, Financement du commerce international BMO Marchés des capitaux HEC 06 Directrice Solutions de contenu TELUS HEC 04 Directeur, Produits et services internationaux Desjardins PRÉSIDENT D’HONNEUR Pierre J. Blouin, HEC 82 Chef de la direction, MTS Allstream Holding Inc. et Manitoba Telecom Services Inc. COUP DE CŒUR DU JURY JEUNE PHILANTHROPE Émilie Poirier HEC 10 Responsable de produit TC Media LES PARRAINS D’HONNEUR Jean-François Cloutier HEC 08 Directeur des ventes, Industrielle Alliance, Assurance et services fnanciers inc. CATÉGORIE ENTREPRENEUR (1er, 2e et 3e prix du jury) Marie-Pierre Dufort Jean-Daniel Nieminen Louis-Philippe Maurice HEC 02 Vice-présidente conseil et ressources humaines Synetik HEC 05 Vice-président et Directeur général Équipements KN HEC 03 Président et co-fondateur Busbud Inc. CATÉGORIE PME (1er, 2e et 3e prix du jury) Catherine Gauthier Maxime Deraspe Claire Yu HEC 08 Directrice des ressources humaines, Symbiose Centre Contact Client PROGRAMME D’ASSURANCES HABITATION ET AUTO HEC 07 Vice-président, Ventes et marketing Adco Groupe HEC 08 Project Director Montréal International PARTENAIRE MÉDIA PARTENAIRE FINANCIER ENVOI : PDF fait à partir CS4 - Police