A3DM magazine n°3 - L`information spécialisée de la Fabrication
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A3DM magazine n°3 - L`information spécialisée de la Fabrication
Fabrication additive / Impression 3D / Prototypage rapide / Développement produit A 3D M m a g a z ne INDUSTRIE L’usine du futur et l’Industrie 4.0 DROIT Réglementation de la fabrication additive PROJET R&D Les ondes térahertz ÉVÉNEMENT N°3 Mai-Juin 2016 Gratuit Assises européennes de la FA FABRICATION ADDITIVE DU DESIGN AU PRODUIT FINI www.a3dm-magazine.fr A 3D M m a g a z ne FABRICATION ADDITIVE / IMPRESSION 3D PROTOTYPAGE RAPIDE / DÉVELOPPEMENT PRODUIT Bring Your Design to Life avec On Demand Parts Édité par : G+G MEDIA GROUPE SAS SAS au capital de 14 000 € SIRET : 815 083 506 00015 10, rue de Penthièvre 75008 Paris Tél. : 01 60 11 57 46 Directeur de la publication – directeur de la publicité Guillaume Mouhat [email protected] Tél. : 01 60 11 57 46 Rédacteur en chef Gaëtan Lefèvre [email protected] Tél. : 06 67 09 01 76 Rédaction Philippe Bauer, Alain Bernard, Florian Berthelot, Gaëtan Lefèvre, Giorgio Magistrelli, Anne-Françoise Obaton Correctrice Astrid Rogge [email protected] Tél. : 09 51 45 14 80 Direction artistique Melissa Chalot [email protected] Tél. : 06 78 20 89 38 Fabrication Imprimerie ETC-INN 82, rue de Michel-Ange 75016 Paris Tél. : 01 47 43 76 76 Dépôt légal à parution Conception web 8D Concept - Gautier Mouhat Tél. : 06 60 56 57 88 Impression 3D [email protected] Crédits photo Couv. : Siemens - 5 : 3D System, F.Hrehorowski/Open Edge - 12-15 : Siemens 16 : Renishaw - 18 : Siemens - 19 : Makerbot - 21-22 : Siemens - 26 : Olaf Diegel - 27 : DR - 28 : Olaf Diegel - 30 : DR - 33 : Makerbot- 34 : DR - 36 : DR, Kildall 38 : F3DF - 39 : Granta Design - 40 : DR - 41 : F3DF - 44 : 3D Systems 45-46 : Stéphane Bruzaud/Université Bretagne-Sud - 48-50 : 3D Ceram Toute reproduction, même partielle, des articles et iconographies publiés dans A3DM Magazine sans l’accord écrit de la société éditrice est interdite, conformément à la loi du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique. Tous droits réservés France et étranger. La rédaction n’est pas responsable de la perte ou de la détérioration des textes ou des photographies non demandés qui nous sont adressés. Prototypage Rapide Outillage Rapide Demandez un devis gratuit! +33 (0)2 43 51 20 30 [email protected] ZA Les Petites Forges | 72 380 Joué l’Abbé Rejoignez la communauté magazine www.quickparts.com/eu www.a3dm-magazine.fr I N N OVAT I O N I N T E L L I G E N C E ® Conférence “concevoir pour la fabrication additive” Le 28 juin - Paris En présence de Philippe BAUER, responsable des opérations de convergence technologique chez Thales Air system et de Frédéric VIGNAT de l’INP Grenoble. Au programme de cette journée : des témoignages d’industriels, la découverte des dernières innovations et la possibilité de rencontrer et d’échanger avec des experts de la fabrication additive. Pour vous inscrire, rendez-vous sur www.altairatc.com ÉDITO La fabrication additive dans le monde de demain La fabrication additive continue d’animer l’actualité. Son développement se poursuit. Le rapport Wohlers 2016 montre une nouvelle forte croissance du secteur de la fabrication additive pour l’année 2015, atteignant 5,165 milliards de dollars. Le développement de nouvelles technologies comme les technologies de l’information et des communications (TIC), le projet d’Industrie 4.0 et les nouveaux « produits intelligents » comme « l’usine intelligente » (Smart Factory), ou l’usine du futur, l’impactent directement. Parallèlement, cette technologie fournit des procédés de fabrication flexibles et adaptatifs à cette nouvelle vision industrielle. Ce nouveau processus de fabrication est au cœur du monde d’aujourd’hui et de demain. A3DM Magazine a forcément voulu se pencher sur le sujet. Ces bouleversements technologiques modifient également les processus qui permettent de passer d’une idée à sa production. La fabrication additive pourrait transformer chacun d’entre nous en « petit producteur », pour reprendre les termes de Philippe Bauer dans le « Dossier ». Les passages du design au produit fini, du fichier à l’objet ont évolué. Nous pouvons maintenant récupérer les fichiers numériques d’un objet déjà créé sur Internet. Nous avons accès à des pièces brevetées, à des objets interdits ou à des œuvres protégées que nous pouvons concevoir par nos propres moyens. Cela pose la question de la réglementation : du droit de propriété intellectuelle, des brevets, de la standardisation et de la certification. L’ensemble du secteur doit se mettre autour de la table pour définir des règles claires à l’échelle internationale. La formation et la recherche sont toujours au centre des préoccupations et des sujets d’A3DM Magazine. C’est pourquoi nous ouvrons nos colonnes aux acteurs de ce secteur, que nous remercions généreusement pour leur participation. Par Gaëtan Lefèvre, rédacteur en chef. ©2016 Stratasys. Tous droits réservés. STRATASYS FAÇONNE LES IDÉES POUR EN FAIRE DES OPTIONS I M P R I M E Z A U - D E L À D U P O S S I B L E AV E C L’ I M P R E S S I O N 3 D D E S T R ATA S Y S . STRATASYS® INVENTE L’IMPRESSION 3D. UNE FOIS DE PLUS. Imaginez des prototypes tellement réalistes qu’ils transforment votre façon de créer. Avec des couleurs au rendu photo-réaliste, une vaste gamme de propriétés de matériaux et un flux de travail d’une efficacité redoutable, la nouvelle imprimante 3D J750™ de Stratasys représente un véritable bond en avant. Analysez les moindres détails des différentes options de conception avant de faire votre choix, tout en réduisant les délais et le coût de chaque pièce. Les promesses de l’impression 3D enfin respectées. Visitez Stratasys.com/J750. STRATASYS.COM/J750 SOCIÉTÉ DE SOLUTIONS D’IMPRESSION 3D AD_PJ_J750_Why Not_0316a.indd 2 4/6/2016 8:41:37 AM Droit 30 Réglementation de la fabrication additive et de l’impression 3D Trente ans après les premiers brevets en fabrication additive, où en est la réglementation de ce secteur ? Logiciel 08 Retrouvez les dernières news du secteur de la fabrication additive. Dossier 12 Fabrication additive – Du design au produit fini L’émergence de nouvelles technologies comme la fabrication additive permet à tous de devenir « de petits producteurs ». Quels sont les nouveaux processus pour passer de l’idée à la production ? Industrie 38 Fabrication additive – Du fichier à l’objet De nombreux logiciels de CAO permettent de transformer une idée en fichier numérique 3D. A3DM Magazine vous aide à faire un choix dans ce paysage. Rencontre 42 Formation – De nouveaux enjeux universitaires 18 L’usine du futur, l’Industrie 4.0 et la fabrication additive La fabrication additive est au cœur du développement de nouvelles technologies comme les technologies de l’information et des communications (TIC), l’Industrie 4.0 et « l’usine intelligente ». Les échos de l’AFPR 26 Les Assises européennes de la fabrication additive Retrouvez le programme et une présentation des Assises européennes de la fabrication additive organisées par l’AFPR et qui auront lieu les 21, 22 et 23 juin 2016. Benoît Eynard est enseignant-chercheur et directeur du groupement AIP-PRIMECA. Il enseigne des modules autour de l’usine du futur et est en contact direct avec les bouleversements entraînés par la fabrication additive. Stéphane Bruzaud est professeur des universités et responsable du diplôme « Impression 3D » à l’université Bretagne-Sud. Projet R&D 48 Les ondes térahertz, une alternative prometteuse aux méthodes classiques de CND Avec la fabrication additive, l’inspection des pièces ne peut plus se faire uniquement avec des méthodes de contrôle non destructif. Il faudra avoir recours à des méthodes dites volumiques. SOMMAIRE News NEWS RECHERCHES ET INNOVATIONS Créative Industry promeut l’excellence industrielle À Hanovre, en Allemagne, dans le cadre de la Foire internationale de l’industrie, Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique, a dévoilé la campagne « Créative Industry », une initiative visant à promouvoir le savoir-faire et l’ingéniosité industrielle de la France. Cette initiative s’insère dans la campagne « Créative France ». Airbus utilise la technologie Concept Laser Premium Aerotec lance sa production en série de pièces métalliques, pour Airbus, en utilisant des machines de Concept Laser. Pour réaliser ce projet, la filiale a construit un nouveau hall de production pour la fabrication additive de pièces en titane, à Varel, en Allemagne. La société a conclu un accord de coopération avec Concept Laser en tant que fournisseur pour la technologie de machines et d’installations. Cela a marqué le début de la production en série d’un coude à double paroi tuyau pour le système de l’avion de transport A400M. Dans le hall, deux machines Multilaser M2 et une machine XLine 1000R de Concept Laser produisent ces pièces 3D. Avec ses 263 milliards d’euros de richesses produites en 2015, 13,8 % du PIB (source du ministère de l’Économie), l’industrie est un des secteurs moteurs de l’économie française. Le gouvernement souhaite construire des pôles d’excellence capables de soutenir la concurrence internationale et entend démontrer sa compétitivité dans sept secteurs clés : l’efficacité énergétique, les nouveaux matériaux et composites, la digitalisation de la chaîne de valeur, la robotique, le monitoring et le contrôle, la réalité augmentée et enfin la fabrication additive. Lancement de la fusée Atlas V La fusée Atlas V d’United Launch Alliance (ULA) a été lancée, le 30 mars 2016, depuis la base de Cap Canaveral, en Floride, aux États-Unis. Le lanceur Atlas V contenait des pièces imprimées en 3D produites en série avec la technologie de Stratasys. Grâce à l’impression 3D, des composants métalliques ont été remplacés par des composants thermoplastiques légers. Ces pièces, qui comprenaient des supports, des buses et des panneaux de protection, ont été imprimées en matériau ULTEM™ 9085 avec une imprimante 3D Fortus 900mc Production. ULA a utilisé les services de Stratasys pour l’ingénierie, les outils de production et les pièces de production. Découvrez le lancement d’Atlas et des pièces imprimées en 3D sur la vidéo. 8 A3DM magazine n°3 NEWS Nouveaux logiciels de gestion de données pour l’industrie de l’automobile La société Granta Design collabore avec les membres de l’Automotive Material Intelligence Consortium (AutoMatIC) pour le développement de nouveaux outils pour la gestion des données de soudures et d’autres techniques d’assemblage. Généralement difficiles à gérer, ces informations sont complexes et multiples. Les ingénieurs pourront ainsi disposer de données sur un grand nombre de techniques d’assemblage et de matériaux cruciaux pour la simulation, la CAO et l’analyse de vieillissement. Rapport Wohlers 2016, une croissance soutenue de la fabrication additive La publication du rapport 2016 du cabinet de conseil indépendant Wohlers Associates montre une croissance du secteur de la fabrication additive, comprenant tous les produits et services dans le monde entier, de plus de 1 milliard de dollars, et cela pour la deuxième année consécutive. Celle-ci a augmenté de 25,9 % (TCAC : Taux de Croissance Annuel Composé) pour atteindre 5,165 milliards de dollars en 2015. Cette même année, 62 fabricants ont vendu des systèmes de fabrication additive de qualité industrielle d’une valeur supérieure à 5 000 dollars, contre 49 en 2014 et 31 en 2011. Ce rapport est construit sur des données recueillies auprès de 51 fabricants industriels, 98 fournisseurs de services, 15 producteurs de matériaux et de nombreux fabricants d’imprimantes de bureau 3D à faible coût. Il couvre les contributions de 80 experts dans 33 pays et se concentre sur la fabrication additive métallique et les imprimantes 3D de bureau. Redonner vie à une main Pour en savoir plus, découvrez l’article « Gestion de données “matériaux“ pour la fabrication additive ». Lunettes personnalisées Le monde de la lunetterie évolue et la personnalisation est aussi un souhait de ses clients. Le géant des lunettes Aoyama Optical France s’est tourné vers la fabrication additive et a signé un partenariat avec Materialise pour sa nouvelle collection WeDDD (qui se prononce « we 3D ») de lunettes grand public. Depuis la mi-septembre 2015, vingt-trois étudiants de l’ISEN (Institut Supérieur de l’Électronique et du Numérique) Lille en dernière année de cycle ingénieur en robotique ont travaillé sur un projet novateur, en collaboration avec l’entreprise DAGOMA (créateur d’imprimantes 3D). « Print’Hand » est un exosquelette pour membre supérieur à destination des personnes ayant perdu l’usage partiel ou total de leur main ou de leur avant-bras. Ce gant bionique sera disponible à faible coût et imprimable en partie en 3D (Open Source). Il redonnera ainsi une certaine motricité de la main et/ou du poignet aux personnes en situation de handicap suite à un AVC, un accident ou de l’arthrose. Encore quelques ajustements, et la version commercialisable verra le jour. Fabriquées en polyamide sur des systèmes de frittage laser, les montures sont légères, mais résistantes. Après la production, les montures passent par un travail de finition, qui leur applique un revêtement certifié pour un contact cutané. Les montures peuvent être teintes dans n’importe lequel des neuf coloris proposés par Aoyama ; 14 modèles représentent 85 combinaisons de coloris. A3DM magazine n°3 9 NEWS MACHINES ET MATÉRIAUX HyperWorks® 14.0, nouvelle technologie de simulation L’imprimante 3D J750 Stratasys a lancé son nouveau système appelé J750. Cette imprimante 3D représente une innovation clé dans sa stratégie de développement basée sur trois objectifs principaux : le prototypage, la production d’outillage et la fabrication de pièces finies. Roger A. Kelesoglu, directeur des ventes, a présenté les caractéristiques de cette machine : multimatériaux, multicouleurs, fabrication de prototypes correspondant aux produits réels, One-stop réalisme en 3D, polyvalence du système, temps de conception d’un produit réduit. Grâce à la suppression du processus de peinture et d’assemblage, le gain de temps permet de réduire significativement les délais de livraison. Cette machine propose également une gamme inégalée de 360 000 couleurs et de 6 matériaux pour réaliser des produits et des prototypes polyvalents et complexes. Retrouvez l’article complet sur le site d’A3DM Magazine. Nouveaux filaments Ira3D Ira3D réalise ses premiers pas dans le domaine médical, dans les principales applications, allant de la création de prothèses jusqu‘à la création de modèles en chirurgie et en passant par l‘industrie dentaire. Dans ce contexte, la société a présenté une nouvelle ligne de filaments. A3DM Magazine vous en présente quelques uns. L’IRABS Bismuto : filament métallique hybride avec une base en ABS. Il donne la possibilité de créer rapidement des pièces qui se rapprochent, par la densité, d‘un métal. GUMMIFY SKIN : filament de caoutchouc flexible à effet de peau. Il a été produit en collaboration avec des étudiants universitaires en médecine et en chirurgie. NYLON 680-680 NYLON FDA : matériau à base de nylon conçu pour le médical, le dentaire, la robotique et le domaine vétérinaire. Biopet GM0 : matériau de haute résistance appropriée pour les produits médicaux et de prototypage de soutien d’implants. Il est biocompatible avec MGo. 10 A3DM magazine n°3 Altair lance HyperWorks® 14.0 : de nouvelles technologies pour concevoir et optimiser des produits très performants, innovants et de masse réduite. Cette dernière version – la suite logicielle dédiée à la simulation à l’architecture ouverte – inclut de nouveaux logiciels, des nouvelles fonctionnalités avancées, des fonctions mises à jour et améliorées ainsi qu’un nouveau système de licences. Altair organise le 28 juin, à Paris, une conférence « Concevoir pour la fabrication additive ». Au cours de cette journée, vous découvrirez des témoignages d’industriels et les dernières innovations. Vous aurez également la possibilité d’échanger avec des experts de la fabrication additive. www.altairatc.com NEWS Technologie CLIP de Carbon3D chez Sculpteo Dans le cadre d’un partenariat exclusif, Sculpteo est la première société d’impression 3D en ligne à proposer la technologie CLIP mise au point par la firme Carbon3D. Nouveau système de frittage laser métal, EOS M 400 La société EOS a présenté au salon Industrie son système EOS M 400, destiné à la production de série de pièces métalliques. Avec un volume de fabrication de 400 x 400 x 400 mm, le système EOS M 400 permet la production de pièces de plus grandes tailles pour concrétiser de nouvelles applications dans la fabrication de série industrielle. Il est équipé d’un laser d’une puissance pouvant aller jusqu’à 1000 watts et d’un système de filtrage autonettoyant permettant des changements de filtres moins fréquents. De plus, EOS a amélioré les fonctions de contrôle et de reporting afin que les utilisateurs optimisent les contrôles « qualité » dans un environnement industriel. You design it, we make it Le procédé CLIP fonctionne avec un bain de résine liquide dans lequel est projetée une séquence continue d’images UV générées par un projecteur de lumière numérique, à travers une fenêtre transparente aux UV perméables à l’oxygène. La zone morte créée au-dessus de la fenêtre maintient une interface liquide. Au-dessus de la zone morte, la partie durcie est extraite du bain de résine. DOSSIER FABRICATION ADDITIVE DU DESIGN AU PRODUIT FINI Des mots très forts comme « rupture », « innovation disruptive » ou encore « révolution » sont associés à l’avènement de la fabrication additive. Cette technologie est également intégrée aux démarches de « l’industrie 4.0 » ou à l’usine du futur. Devant un tel déploiement de force, doit-on en déduire une remise en cause des processus qui nous permettent de passer de l’idée à la production ? Par Philippe Bauer, expert processus, outils et innovation en architecture mécanique chez Thales Air Systems. L ’émergence de nouvelles technologies permet à tous de devenir « de petits producteurs ». Tentons de revisiter les étapes de construction pour vérifier si l’adage « à partir de maintenant ce sera comme d’habitude ! » ne se vérifie pas une fois de plus. L’entreprise industrielle est souvent synonyme de complexité, de moyens matériels et humains lourds à mettre en œuvre. Le déploiement de la fabrication additive s’accompagne d’une envie d’abolir ces difficultés au profit d’un processus « libératoire ». Cette technologie change la vision de l’industrie en apportant des réponses moins quantitatives ou standard, mais plus nombreuses. Elle permet de mieux cibler les besoins, voire de les individualiser. Cette diversité nous amène plus que jamais à redoubler d’efforts pour générer des idées. 12 A3DM magazine n°3 DOSSIER Le marché est couvert La notion de localité est importante pour la fabrication additive. C’est son terrain ! Elle y promeut sa capacité à se rapprocher des clients et à localiser ses réponses en s’adaptant à la géographie du besoin. Ces marchés fourmillent et pourtant, ils sont délaissés par l’industrie dont l’inertie limite la mobilité créative et géographique. Les clients difficiles n’intéressent pas la grande industrie, la boîte aux lettres de l’ISS n’est pas envahie de publicités tous les matins. Rien n’a changé, mais tout à évolué. Pour s’installer au cœur de ce type de marché « local », il faut multiplier les business plans et les travailler soigneusement afin d’éviter de nombreux échecs. Pas de laisser-aller ! Proposer ou répondre à un marché impose d’être en empathie avec ce dernier et de ne pas céder aux fantasmes des modes et des pensées rapides ou illusoires. Je suis, donc je veux La fabrication additive promet beaucoup de choses à condition de savoir ce que l’on veut. Voilà le cœur du problème. Il n’existe pas de révolution dans la manière de préparer le terrain des idées. Laissez seuls dix ingénieurs en réunion « technique », ils confronteront avec acharnement leurs solutions et seront sans voix lorsque l’animateur leur demandera de rappeler, simplement, le sujet du besoin. Entre ceux qui ne croient que ce qu’ils voient et ceux qui ne veulent voir que ce en quoi ils croient, il faudra retrouver le chemin de la fertilité des idées. Nous ne sommes pas tous des génies ou des talents innés. La fabrication additive réinvente le besoin de prendre du recul, de sortir de nos spécialités pour retrouver l’inspiration. N’agissons pas trop vite ! Pensons, d’abord, un peu ! Sortons de nos trajectoires habituelles. Plus que jamais, les designers sont les alliés de nos ingénieurs. Ils les aident à déplacer les frontières des idées et des techniques. Se libérer des coûts, des délais et ouvrir, de nouveau, le champ des possibles est ardu pour un ingénieur. Pour réussir, il faut être plusieurs et accepter de prendre le temps d’une perte momentanée de contrôle. Rien ne change dans les processus de recherche d’idées, il faut les appliquer au bon moment et changer de posture. Même si elles sont coûteuses en termes de temps, elles apportent une maîtrise bénéfique. Trouver une bonne raison d’être L’optimisation topologique nécessite que les besoins fonctionnels soient exprimés sous les formes géométriques les plus élémentaires. Ainsi, un plan est défini par trois points et une normale. Une large face plate est une réponse surabondante. Trois plots de matière suffisent. Seule une analyse fonctionnelle exhaustive permet de répondre au cahier des charges des besoins géométriques. Les processus académiques de l’analyse fonctionnelle sont réglés, efficaces, enseignés et méritent d’être à nouveau utilisés à l’éclairage des nouvelles possibilités de la fabrication additive. Nous n’analysons pas la géométrie d’une pièce existante pour la transférer en fabrication additive, nous revisitons les solutions géométriques apportées aux fonctions. Et ces fonctions doivent se limiter à répondre aux besoins identifiés et justifiés. Rien n’a profondément changé. Il faut redéployer l’utilisation de l’analyse fonctionnelle pour parcourir à nouveau la trajectoire géodésique qui relie les solutions aux besoins. Se former aux règles Les mécaniciens n’ont pas l’habitude de gérer des évolutions rapides de leur métier. Comme présenté dans mon précédent article « Fabrication additive – Les nouveaux défis des concepteurs en mécanique » paru dans A3DM Magazine n°1 (que vous pouvez retrouver sur le site Internet www. a3dm-magazine.fr), concevoir pour la fabrication additive, c’est appliquer des règles : savoir ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Rien de bien nouveau, donc : à devoir gérer l’acquisition d’une nouvelle technique, il faut se former. Pour exister pleinement, la fabrication additive doit rester un mode d’élaboration parmi d’autres. L’hybridation peut être une des clés du succès. Il ne faut pas être dogmatique en prônant que la fabrication additive puisse remplacer les procédés de fabrication traditionnels. Les techniques de fabrication additive se complètent entre elles. Par exemple, les technologies sur lit de poudre et la technologie de projection laser peuvent s’associer avec bénéfice. Elles s’hybrident aussi avec les moyens traditionnels. Une pièce de tournage peut être complétée par des géométries obtenues en fabrication additive. Un tube extrudé peut être parachevé de formes externes ajoutées grâce au procédé de projection de poudre. Un assemblage majoritairement mécano-soudé peut incorporer des composants en provenance de la fabrication additive. N’oublions pas qu’une pièce métallique conçue en fabrication additive se comporte comme un banal brut de fonderie qui sera repris en usinage pour garantir certaines précisions nécessaires aux fonctionnalités. Elle sera donc comme à son habitude pourvue des surépaisseurs et des référentiels d’usinage nécessaires à sa reprise. A3DM magazine n°3 13 DOSSIER Pas de révolution donc ! Cette technologie est un procédé qui complète la panoplie des technologies actuelles et s’associe à ces dernières. L’atelier de fabrication du futur pourra aussi bien retirer de la matière qu’en ajouter. Des évolutions déjà en cours se stabilisent. Le modèle 3D existe depuis plusieurs décennies et finit par s’imposer comme source de données unique. La période transitoire qui associait la 2D à la 3D va se terminer pour les pièces fabriquées par fabrication additive et cela s’étendra aux autres modes de fabrication. « Dossier de définition » Il y a matière à La fabrication additive impose le modèle 3D comme référence de création de la géométrie. La conception et fabrication assistées par ordinateur (CFAO) nous avaient habitués à cela lorsqu’il s’agissait de programmer un parcours d’outils à partir d’un logiciel de fabrication assistée par ordinateur (FAO). La CFAO exploite les surfaces, parfois complexes, et génère les parcours d’outils en trois ou cinq axes. Le dossier de définition, pour sa part, indique ce qu’il faut faire et ce qui a été précédemment validé comme réalisable. Le dossier de fabrication indique comment faire pour respecter cette définition. Jean-Jacques Fouchet de la société Z3DLAB nous a expliqué, lors de sa présentation au congrès APS Meetings de février 2016, qu’« une pièce c’est une matière ». Un vrai changement ! La chaîne de transformation est impactée. Pourtant ce changement est frileux, car nous nous attachons encore trop à valider les matières traditionnelles pour un procédé de transformation nouveau. Si certaines s’en sortent correctement, d’autres résistent et déçoivent. Si nous revenons aux besoins, alors il faut créer et produire les matières adaptées. Les technologies et les sciences de la matière sont assez outillées et performantes pour avancer sur ce terrain. Il faudra du temps, mais probablement moins qu’avant. Bien sûr, ce travail n’est pas à la portée de tous : il mobilise l’industrie, naturellement. Le « dossier de définition » doit transmettre aux acteurs de la chaîne de valeurs des informations exploitables par chacun. Il est temps d’intégrer toutes ces données dans le seul modèle 3D. La technologie « 3D as master » élimine le plan 2D comme vecteur complémentaire d’informations. On peut enfin arrêter d’éparpiller les données entre plusieurs fichiers, l’un 3D et l’autre 2D. Le modèle 3D embarque des « vues » préparées par le concepteur. Ces vues cumulent des notes, des côtes, des tolérances géométriques, des indications de zones traitées, etc. L’utilisateur peut les visualiser sur des logiciels simples qui lui permettent d’imprimer sur du papier les vues qu’il souhaite, sous l’angle qu’il désire. Autant de vues qu’il juge nécessaire pour documenter le travail à faire. Il peut construire son dossier de fabrication en exploitant d’une façon simple et rapide les données de référence. Finition incontournable, main-d’œuvre nécessaire La pièce conçue par fabrication additive nécessite une finition, des nettoyages ou des préparations mécaniques et/ou chimiques comme des traitements thermiques pour atteindre les performances souhaitées. L’outillage technologique est classique et incontournable. La main-d’œuvre est encore nécessaire. Ces tâches nécessitent la mise en place de moyens respectant les normes environnementales et leur surveillance. Si certaines personnes pensaient alléger ces processus, c’est manqué. Ces sujets dérangent et montrent bien que cette technologie ne s’offre pas sans contraintes. Cette fois, l’évolution est discutable. Je ne résiste pas à me montrer diabolique et vous propose un cocktail « high tech » : prenez donc quelques vapeurs d’ABS sur la FDM multi-têtes et une cuillère à café de poudres nanométriques de Carbone Zircone Titanisé auprès de l’atomiseur. Plongez dix minutes sous les tirs des quatre lasers croisés d’une SLM boostée et finissez par une bonne douche de rayons X sous l’EBM « ultra power ». Avec tout ça, on devient très vite chef de projet chez Marvel Comics, Hulk ! Les géométries 3d imposent la métrologie, les scanners et les comparaisons par rapport aux données de référence. 14 A3DM magazine n°3 DOSSIER La fabrication additive impacte tous les flux : communication, qualité, management, production. Il existe peu d’espoirs que la fabrication additive perdure au sein d’ateliers ou de laboratoires d’alchimistes. L’industrie et ses clients se doivent de faire rentrer dans le rang ces technologies et d’imposer à nouveaux les règles qui vont nécessairement dimensionner les structures, bien audelà de la surface d’une chambre de geek dans la capitale. Halte ! Contrôle À nouvelles topologies de pièces, nouveaux besoins de contrôles ! Les géométries 3D imposent la métrologie 3D, les scanners laser et les comparaisons par rapport aux données de référence numériques. Plus de 100 paramètres pilotent la réussite d’une conception par fabrication additive. La transformation par microfusion laser des procédés sur lit de poudre (laser ou faisceau d’électron) créent la métallurgie de la pièce. La maîtrise des moyens de contrôles métallurgiques de la matière fusionnée est fondamentale. Les corps creux, pour leur part, sont rendus inaccessibles et justifient l’utilisation de moyens lourds tels que la tomographie pour les visionner et les contrôler sans les détruire. Nous parlons aussi de monitoring pour piloter le fonctionnement du procédé en continu. Nous installons également des éprouvettes à plusieurs endroits stratégiques de la pièce pour pratiquer un contrôle destructif sur des échantillons représentatifs. Il existe des similitudes avec la fonderie. Il est d’ailleurs intéressant de noter que cette technologie intervient de plus en plus pour remplacer les procédés de fonderie dont la complexité, bien que maîtrisée depuis longtemps, reste l’apanage de spécialistes au travers d’une supply chain qui se fragilise. Elle allège les besoins d’outillages, réduit le lead time, permet de diversifier et de s’adapter à des productions ponctuelles, mais ne diminue pas forcément l’expertise nécessaire à la maîtrise du procédé. Comme je le dis souvent à certains de mes fournisseurs : « on ne déclare pas disposer d’un savoir-faire, on le prouve ». Et la panoplie des moyens déployés en est la preuve. Chaîne de production, chaîne de compétences Si la structure de production ne dispose pas des moyens précités, la supply chain se doit de les intégrer. Rien n’est plus frustrant que de concevoir en cinq jours, fabriquer en deux, devoir attendre une semaine la réalisation d’un traitement thermique, quinze jours la disponibilité d’un usineur ainsi que quatre jours celle d’un tomographe. Ce phénomène n’est pas rare lorsque la fabrication additive n’est pas intégrée dans un contexte complet. Dans une telle configuration, la technologie participe assez peu à l’amélioration du lead time. Les plus belles réussites en fabrication additive nous proviennent d’industriels conventionnels qui l’ont adapté. Ceux qui savent déjà utiliser les outils de gestion de production et qui ont intégré les post-processus, bref les industriels. La fabrication additive sort du monde du prototypage et A3DM magazine n°3 15 DOSSIER doit se mettre au diapason de l’industrie, source de ses succès potentiels. Philippe Rivière, CEO de Prismadd Technology, écrit : « le passage du monde du prototypage au monde industriel permet d’accélérer la recherche de la performance et de l’efficience à chaque étape du processus. Ce changement demande un fort investissement de toute la supply chain pour la rendre robuste et industrielle afin de travailler sur les points critiques identifiés ». L’industrie s’accapare la fabrication additive, pas l’inverse. Un client, un fournisseur, un succès J’ai eu l’honneur de décerner le prix du jury du salon 3D Print Lyon 2015 à la société Prismadd pour la réalisation d’un projet avec Airbus. Celui-ci associait plusieurs technologies de fabrication additive, en polymères FDM (par dépôt de matière fondue – Fused Deposition Modeling) et métallique par SLM (fusion sélective par laser – Selective Laser Melting). Il utilisait également l’approche de conception par optimisation topologique. Ce qui couronnait cette action était la préservation d’un site industriel nouvellement dédié à ce projet, les emplois induits et le développement technologique de la région d’accueil. Une vraie réussite ! Ceci n’aurait pas été possible La fabrication additive réinvente le besoin de prendre du recul, de sortir de nos spécialités pour retrouver des inspirations. L’industrie s’accapare la fabrication additive, pas l’inverse. valorisent l’utilisation. Une ultime phrase de Philippe Rivière conclue ce sujet : « tous les flux sont impactés, communication, qualité, management, production. C’est une grande chance pour la génération actuelle que de vivre cette transformation ». Moi, petit producteur sans des liens forts tissés entre l’industriel, les fournisseurs qui innovent et prennent des risques ainsi que le donneur d’ordres qui est convaincu. Philippe Rivière a été très clair vis-à-vis de son investissement dans cette technologie : « cette aventure a une particularité puisque nous partons d’un nouveau processus et devons qualifier, identifier toutes les caractéristiques clés et démontrer leur répétabilité. Nous ne pouvons le faire qu’avec une grande transparence et une bonne relation avec le client ». La recette gagnante consiste bien à mettre en relation des professionnels. La confiance est seule garante de cette aventure qui consiste à emprunter de nouveaux chemins. Pour réussir, il faut réunir les hommes compétents ayant envie de parcourir un bout de chemin ensemble, chez le fournisseur et chez le client. La co-ingénierie est plus que jamais nécessaire. Toute production en fabrication additive doit faire l’objet d’un tour de table qui réunit les spécialistes et acteurs de la chaîne de création de valeur. Une technologie ne fait pas un succès ; chacun doit trouver les arguments qui en 16 A3DM magazine n°3 Nous sommes dans une évolution permanente. Seuls les passés et les expériences acquises sont capables de préparer notre avenir. Nous ne pouvons faire table rase de ce passé. Nous devons nous réunir et partager nos compétences. Chacun possède un morceau du puzzle. Nous devons conserver l’envie du risque sans en oublier la nécessaire maîtrise. L’industrie est, avant tout, une structure possédant des moyens et des individus formés et compétents. Leur aide, leurs conseils et l’honneur qu’ils ont à promouvoir leur travail est simplement incontournable pour construire l’avenir. La transition ou l’évolution ne se fera pas en un clic. Pour déployer la technologie, nous devons rencontrer les tourneurs, fraiseurs, soudeurs, fondeurs, chaudronniers, dessinateurs industriels, technologues, préparateurs de fabrication, acheteurs, lanceurs, scientifiques et leur raconter l’histoire de demain que vous imaginez et qu’ils vont vous aider à construire. Maintenant, ce sera comme d’habitude… mais en mieux. INDUSTRIE L’USINE DU FUTUR, L’INDUSTRIE 4.0 ET LA FABRICATION ADDITIVE Le développement de nouvelles technologies comme les technologies de l’information et des communications (TIC), le projet de l’Industrie 4.0 et d’« usine intelligente » (Smart Factory) impactent la fabrication additive. Parallèlement, cette technologie fournit des procédés de fabrication flexibles et adaptatifs à cette nouvelle vision industrielle. A3DM Magazine s’est mis en marche vers un monde moderne. Par Giorgio Magistrelli, expert en fabrication additive, gestionnaire d’entreprise et de projets. L ’industrie est un pilier fondamental de l’économie européenne. Le secteur manufacturier dans l’Union européenne (UE) représente 2 millions d’entreprises, 33 millions d’emplois et 60 % de la croissance de la productivité. L’Europe envisage d’augmenter la part du PIB du secteur manufacturier à 20 % en 2020. « L’agenda Europe 2020 » de la Commission européenne vise à devenir « une économie intelligente, durable et inclusive », tout en atteignant des niveaux élevés d’emploi, de productivité et de cohésion sociale. Le projet repose sur cinq objectifs ambitieux : l’emploi, l’innovation, l’éducation, l’inclusion sociale et le climat / énergie – à atteindre d’ici 2020. Il met en place sept « initiatives phares ». Parmi ces stratégies, le développement de l’innovation joue un rôle clé dans quatre politiques. 18 A3DM magazine n°3 INDUSTRIE • L’union de l’innovation pour améliorer les conditions-cadres et l’accès au financement pour la recherche afin de renforcer la chaîne d’innovation et de stimuler les niveaux d’investissement relatifs dans les 28 États membres. • Un agenda numérique pour l’Europe permettant d’accélérer le déploiement de l’Internet à haute vitesse et d’atteindre les avantages d’un marché unique numérique pour les individus et les entreprises. • Une Europe efficace dans l’utilisation des ressources pour aider à décupler la croissance économique par la décarbonisation de l’économie, l’utilisation accrue des sources d’énergies renouvelables, la modernisation du secteur des transports et la promotion de l’efficacité énergétique. • Une politique industrielle à l’ère de la mondialisation pour améliorer l’environnement des affaires, en particulier pour les petites et moyennes entreprises (PME), et pour soutenir le développement d’une base industrielle forte et durable, capable de soutenir la concurrence mondiale. Le programme-cadre « Horizon 2020 », avec son budget de 80 milliards d’euros pour la période 2014-2020, est l’un des outils de mise en œuvre de l’agenda Europe 2020. Le développement des TIC et la fabrication additive La dernière décennie du XXe siècle a représenté un tournant pour l’industrie manufacturière européenne, en particulier pour le développement des technologies de l’information et des communications (TIC). Leur impact sur la chaîne de valeur a embrassé une série de conséquences directes sur la façon dont les produits sont conçus, mis au point, fabriqués, contrôlés, distribués, et même réparés. Cependant, alors que certains secteurs de l’économie ont rapidement adopté des technologies et des procédés numériques, l’industrie européenne doit encore améliorer la pleine utilisation des possibilités informatiques pour devenir compétitives au niveau mondial. Les PME sont particulièrement en retard dans leur transformation numérique. Les études récentes estiment que la numérisation des produits et services augmentera de 110 milliards d’euros par an le chiffre d’affaires pour l’industrie, en Europe, au cours des cinq prochaines années. Dans ce but, de nombreux États membres de l’UE ont déjà lancé des stratégies visant à soutenir la numérisation de l’industrie. Cependant, une approche globale au niveau européen est nécessaire pour éviter la fragmentation des marchés et pour obtenir les avantages de l’évolution informatique. L’Industrie 4.0 met en évidence une production à forte personnalisation des produits et une interaction entre clients et producteurs. La fabrication additive est directement liée au développement des « usines intelligentes ». Dans le même temps, l’amélioration des infrastructures de TIC représente un soutien croissant et une opportunité pour le développement constant des technologies de fabrication additive. Le flux de processus de cette technologie provient des dessins numérisés en trois dimensions (3D) d’un produit par un logiciel de conception assistée par ordinateur (CAO), tout en exigeant une étape ultérieure à travers laquelle les processus additifs sont préparés en couches et communiqués au système. Les fichiers peuvent être transmis partout, mais ils exigent un réseau de TIC fiable, rapide et sécurisé pour permettre la fabrication d’un produit à proximité du client et de l’utilisateur final. Deux concepts sont à considérer lorsque nous évaluons le développement des TIC et son impact sur le présent et l’avenir de la fabrication : l’Industrie 4.0 et la définition de « Smart Factory » (« usine intelligente »). A3DM magazine n°3 19 INDUSTRIE Impacts de l’Industrie 4.0 La m des s ise e ytè n me ré int s d el li 4 e L’ac techn célér olo a gie tio se tical ver tion au uc od se pr s nt ge ux e a ielles âc t g r n en n po x 1 rie h ie én a c L’i n g ers l à trav aî dé ne ve lop de p é e vale ur Industrie 4.0 Nous avons déjà présenté en détail dans le premier numéro d’A3DM Magazine1 l’initiative allemande Industrie 4.02 qui considère que la fabrication industrielle, dans l’avenir, sera caractérisée par une forte personnalisation dans les grandes séries de production, par l’intégration étendue de clients et partenaires d’affaires et par une importance accrue du développement des « systèmes cyber-physiques ». Un impact direct de l’optimisation de la production et de la logistique ! La France, de son côté, a lancé le plan d’industrialisation française en 2013, The New Industrial France2, développé sous le nom de « l’industrie de l’avenir ». Celui-ci se concentre sur la modernisation de la production, des modèles d’affaires et des structures organisationnelles, comme le développement des technologies telles que la fabrication additive et l’Internet des objets (IdO)3. Selon une récente étude de la société de conseils Deloitte4, les impacts de l’Industrie 4.0 seront les suivants : • la mise en réseau vertical des systèmes de production « intelligents » tels que les usines « intelligentes », les produits « intelligents », les réseau « intelligents », des logistiques « intelligentes »... ; • l’intégration horizontale via une nouvelle génération de réseaux de partenaires commerciaux et de clients dans différents pays et sur divers continents ; • l’ingénierie développée à travers la chaîne de valeur et le cycle de vie du produit ; • l’accélération grâce aux technologies exponentielles permettant des applications étendues, des réductions de coûts et une augmentation de la puissance. 20 A3DM magazine n°3 h no o r i z u de ve o n t a l e ré l l e sea ux 3 2 n io a t ne r ég u L’i nt via tion éra gén De l’usine traditionnelle à l’« usine intelligente » Au sein de l’Industrie 4.0, le développement des TIC, depuis les années quatre-vingts et son évolution au cours des années quatre-vingt-dix, a conduit à une amélioration constante des systèmes d’exploitation. Des techniques de fabrication innovantes sont nées d’un niveau croissant d’automatisation, de l’adoption mondiale des concepts de Lean Manufacturing et Six Sigma ainsi que de l’intégration de systèmes informatiques d’entreprise comme ERP5 (Enterprise Resource Planning), MES6 (Manufacturing Execution Systems) ou PLM7 (Product Life Cycle Management). Aujourd’hui, l’attribut « intelligent » est partout, dans nos téléphones, nos maisons, les jeux de nos enfants, les réseaux des villes et, bien sûr, les usines. Mais qu’entend-on lorsque l’on parle d’« usine intelligente » ? Le terme est largement utilisé sans aucune définition uniforme, considérant que divers chercheurs et ingénieurs doivent inclure les nombreux visages d’une même médaille. Regardons d’abord les principaux impacts du développement des TIC sur la fabrication et les applications « intelligentes » de l’Internet à l’industrie. • La convergence complète des systèmes informatiques et des infrastructures d’automatisation des systèmes de production permet l’intégration de la fabrication verticale (d’un département « projet » à l’atelier ou d’un centre de contrôle à un système de fabrication, liés informatiquement) et horizontale (entre le siège et une usine de filiale, un centre de contrôle central et une machine dans une usine à l’autre bout du monde). Dans ce cas, nous devons parler de systèmes cyber-physiques INDUSTRIE (Cyber-Physical Systems – CPS) ayant les caractéristiques d’être « localement physiques, mais virtuels à l’échelle mondiale » – commandés centralement à travers un cyber-réseau virtuel et avec la capacité d’intervenir à distance. Les CPS reposent sur des technologies sans fil, le Cloud computing, le Big Data, la surveillance à distance et la cybersécurité. • La fabrication sur demande et la livraison à temps de produits en série et sur mesure nécessitent une gestion de la chaîne d’approvisionnement organisée et flexible. Les fabricants sont en lien avec les fournisseurs et les prestataires de services logistiques pour coordonner la livraison des matériaux, des produits intermédiaires et/ou des outils nécessaires. Cette combinaison permet de faibles coûts unitaires des processus de production de masse, plus de flexibilité, de personnalisation, permet et de répondre à une demande imprévisible. • La maintenance prédictive permet d’éviter ou de minimiser les coûts dus à des temps d’arrêt. À l’aide de capteurs à distance, les machines peuvent constamment vérifier leurs états et communiquer des problèmes éventuels au centre de contrôle. Elles peuvent dans le même temps planifier l’entretien régulier de la machine via MES ou ERP, et prévoir la livraison des pièces de rechange. Ces informations sur l’état de la machine et d’éventuels problèmes peuvent être directement transmises au fabricant (et également à l’utilisateur final) de la machine. • Des pièces et des machines « intelligentes ». La configuration des produits et les propriétés des matériaux peuvent être communiquées, sans fil, à la machine, qui pourra ensuite se calibrer automatiquement pour atteindre un traitement optimal. Cette machine aura la possibilité d’interagir avec d’autres machines pour les interroger sur les réglages appropriés. En cas de dysfonctionnement, cette machine pourrait également identifier une station de remplacement et communiquer les données connexes et la planification. Le client sera dans le même temps mis au courant du retard de livraison. • La fabrication avec optimisation d’énergie permet une allocation plus efficace des ressources et la planification de la fabrication. • L’allocation des capacités non engagées, dans le cas où des machines de production ne fonctionneraient pas à pleine capacité, peut être offerte à d’autres usines du groupe et/ou à d’autres entreprises, avec l’accomplissement de plusieurs ordres. • Une production flexible et versatile. Les TIC et les modules de production intelligents peuvent modifier une organisation, permettre l’expansion des installations de productions, des services, et l’intégration des étages de fabrication en les rendant plus efficaces, tout en communiquant par l’intermédiaire d’un réseau intégré. Ayant comme référence la littérature sur les usines intelligentes, nous avons tendance à favoriser cette définition complète : « La Smart Factory est une solution de fabrication qui fournit des procédés de production flexibles et adaptatifs qui permettront de résoudre les problèmes liés à une installation de production dans un monde de complexité croissante. Cette solution pourrait d’une part être liée à l’automatisation (définie comme une combinaison de logiciels, matérielle et/ou mécanique, qui devrait conduire à l’optimisation de la fabrication par une réduction de la main-d’œuvre redondante et du gaspillage des ressources inutiles), et d’autre part être vue dans une perspective de collaboration entre les différents partenaires industriels et non industriels, où les divers composants intelligents viennent former une organisation dynamique ». Les techniques de fabrication innovantes sont nées d’un niveau croissant d’automatisation. A3DM magazine n°3 21 INDUSTRIE Fabrication intelligente et fabrication additive La fabrication additive comprend diverses techniques de fabrication d’un objet en trois dimensions à partir d’un modèle 3D dans lesquelles des couches successives de matériau sont fixées sous le contrôle de l’ordinateur. Elle augmente la qualité du design et sa conformité, tout en améliorant le temps de mise sur le marché et en simplifiant la logistique entre les différentes phases de fabrication. Elle est directement liée au développement des usines « intelligentes », en particulier pour fournir la gestion de la chaîne d’approvisionnement, le développement de produits et de l’outillage. Si nous analysons les avantages spécifiques de cette technologie, nous découvrons que ceux-ci sont directement associés à l’intégration des composantes des TIC. • La complexité de fabrication est gratuite. En fabrication traditionnelle, plus la forme et la structure d’un objet sont compliquées, plus cet objet coûte à être produit. Avec la fabrication additive, la production d’un objet complexe coûte le même prix. De plus, les structures complexes pourraient être conçues en CAO et optimisées topologiquement sans la nécessité d’un accès direct à des machines-outils, réduisant ainsi la nécessité de composants multiples. • La variété est gratuite. Une seule machine peut créer de très nombreuses formes en même temps, à condition, évidemment, que les différents plans numériques et les matériaux de fabrication soient fournis. ou AMF, les ingénieurs peuvent créer un prototype avec une imprimante 3D. Dès que l’impression est terminée, les tests de propriétés sont réalisables. Terminés les longues semaines ou mois d’attente pour récupérer un prototype. • Des nuances infinies de matériaux. Les ingénieurs peuvent également concevoir des pièces avec des couleurs spécifiques et les imprimer grâce aux nombreux matériaux. Le Cloud et la fabrication additive Un autre point commun entre les entreprises de fabrication additive et les usines intelligentes est la nécessité d’utiliser le Cloud pour partager et développer des fichiers en CAO, pour fabriquer dans un lieu différent de celui de la conception et pour conserver leurs produits, évitant ainsi des coûts de stockage et des charges d’inventaire. Le « Cloud computing » (que l’on appelle aussi en France le « nuage informatique ») fournit des services ou des applications informatiques en ligne, accessibles partout, à tout moment et de n’importe quel terminal (smartphone, ordinateur de bureau, ordinateur portable ou tablette). Le développement de la technologie du Cloud modifie les business models des entreprises de logiciels. Jusqu’à aujourd’hui, les logiciels étaient utilisés localement, en général sur un poste de travail et sur les serveurs à proximité. Le Cloud computing a créé un changement, le logiciel pouvant être chargé de n’importe où et utilisé d’encore plus loin. LIENS UTILES • L’assemblage n’est pas nécessaire. Alors que la fabrication traditionnelle nécessite une « chaîne de montage », la fabrication additive permet très souvent de supprimer cette étape d’assemblage. ICT Innovation in FoF PPP https://ec.europa.eu/digital-agenda/en/ about-112 • La réduction des délais de réalisation. Immédiatement après la finalisation du fichier en STL Factories of the Future http://ec.europa.eu/research/industrial_ technologies/factories-of-the-future_en.html EFFRA European Factories of the Future Research Association http://www.effra.eu/ EU Digital Agenda http://ec.europa.eu/digital-agenda 22 A3DM magazine n°3 INDUSTRIE LES AVANTAGES DE LA FABRICATION ADDITIVE LIÉS À LA SMART FACTORY • La convergence complète des systèmes informatiques et des infrastructures d’automatisation des moyens de production. • La fabrication sur demande et la livraison dans les temps de produits en série et sur mesure. • La maintenance prédictive. • Les pièces et les machines « intelligentes ». • La fabrication avec optimisation d’énergie. • L’allocation des capacités non-engagées. • La production flexible et versatile. Le développement des TIC Dans toute la chaîne de valeur de la fabrication additive, les TIC jouent un rôle crucial et trop peu souvent reconnu. Les fichiers CAO/STL/AMF et leurs transmissions du département de projet au centre de fabrication demandent un puissant système de TIC. Selon Digital Europe, « une condition essentielle pour une économie prospère est une infrastructure à large bande réactive ». La transformation numérique améliore l’intégration des services et des produits « intelligents ». Des industries clés comme l’ingénierie, l’automobile, la santé et les produits pharmaceutiques – grâce aussi à l’utilisation croissante des technologies et services de fabrication additive – sont de plus en plus touchées. La puissance majeure de l’Industrie 4.0 est basée sur la combinaison des technologies numériques avec d’autres technologies de pointe comme la fabrication additive, afin d’atteindre une efficacité maximale des ressources. Selon la récente présentation du Forum stratégique sur l’entrepreneuriat numérique, « la transformation numérique n’est pas une option – il est un must ». Plus précisément, le développement des infrastructures des TIC devrait se concentrer sur trois aspects : la vitesse, la qualité et la sécurité. pourcentage (2 %) des souscriptions dans l’UE avait le plus bas niveau de vitesse à large bande (entre 144 Kbps et 2 Mbps), excepté dans un petit nombre d’États membres comme l’Estonie et la Slovénie. La pénétration des abonnements à haut débit de plus de 30 Mbps à large bande rapide est en augmentation, passant de 2,5 % en 2012 à 6,3 % en 2014. Cependant, l’adoption du haut débit rapide reste faible (seulement 3 % des ménages dans l’UE). Les connexions rapides sont les plus largement utilisées en Belgique et aux Pays-Bas, ainsi qu’en Lettonie, en Suède et en Lituanie. D’autres États membres comme l’Italie, Chypre ou la Grèce n’ont pratiquement pas d’abonnements haut débit. En matière de qualité des services dans l’UE, la différence entre la vitesse à large bande annoncée et réelle reste la même. En octobre 2014, les consommateurs ont reçu 76 % de la vitesse annoncée. En matière de vitesse, le développement du haut débit a son importance pour une société. Il est reconnu et défini dans la stratégie « Europe 2020 ». Pour réaliser les avantages offerts par les TIC et la fabrication additive, et pour rivaliser avec succès dans l’économie mondiale, l’Europe a besoin d’accéder à un Internet ultrarapide, largement disponible et à un prix compétitif. Les pourcentages des abonnements de lignes fixes supérieures à 10 Mbps sont en augmentation. En janvier 2015, seul un très faible A3DM magazine n°3 23 INDUSTRIE Usine « intelligente » Technologie Big-Data Énergie Intégration de multiples composants et algorithmes pour atteindre des niveaux d’automatisation plus élevés. Traitement de volumes importants de données complexes et multiples pour des prises de décisions plus efficaces. Amélioration de la gestion des énergies de l’entreprise (humaines et matérielles) pour des gains de performances et de productivités. Enfin, un niveau élevé de sécurité des réseaux et de l’information à travers l’UE est essentiel pour assurer la confiance des consommateurs et soutenir l’économie en ligne. La cybersécurité signifie la résilience cybernétique en augmentant les capacités, la préparation, la coopération, l’échange d’informations et la sensibilisation dans le domaine de la sécurité des réseaux et de l’information, pour les secteurs publics et privés, ainsi qu’aux niveaux national et européen. Pour réduire la cybercriminalité, il est nécessaire de renforcer Objets connectés Acquisition de données de consommateurs et des processus de l’entreprise par une série de capteurs, matériels et objets en vue de perspectives d’applications sans précédent. l’expertise des personnes chargées d’enquêter, en adoptant une approche plus coordonnée entre les services répressifs dans l’UE et en renforçant la coopération avec d’autres acteurs. L’élaboration d’une politique de défense informatique de l’UE implique de favoriser les ressources industrielles et technologiques nécessaires pour bénéficier d’un marché numérique unique et de préconiser l’application du droit international existant dans le cyberespace. Notes 1 – Lire l’article « La Commission européenne – un soutien de poids » paru dans A3DM Magazine n° 1 en janvier 2016 ou sur le site Internet http://www.a3dm-magazine.fr/la-commission-europeenne-un-soutien-de-poids/. 2 - La première révolution industrielle était basée sur la mécanisation entraînée par la puissance de la vapeur. La seconde, menée par la puissance électrique, a conduit à la production de masse. Tandis que la troisième est basée sur l’automatisation de la production, activée par l’électronique et l’informatique. Enfin, la quatrième révolution industrielle (« Industrie 4.0 ») est entraînée par l’Internet, et plus précisément par cette combinaison spécifique des mondes virtuels et réels, aussi appelé « Internet des objets ». 3 - L’Internet des objets (IdO) vise à fusionner les mondes physiques et virtuels créant des « environnements intelligents » et permettant d’améliorer la vie des citoyens. Il représente la prochaine étape vers la numérisation de notre société et de l’économie dans laquelle les objets et les personnes seront reliés entre eux par le biais de réseaux de communication. L’IdO peut également offrir des avantages économiques pour l’Europe. Selon une récente étude de la Commission européenne, la valeur de marché de l’IdO dans l’UE devrait dépasser 1 billion d’euros en 2020. 4 - http://www2.deloitte.com/content/dam/Deloitte/ch/Documents/manufacturing/ch-en-manufacturing-industry-4-0-24102014.pdf 5 - Enterprise Resource Planning, http://www.gartner.com/it-glossary/enterprise-resource-planning-erp/ 6 - Manufacturing Execution Systems, http://www.businessdictionary.com/definition/manufacturing-execution-system-MES.html 7 - Product Life Cycle Management, http://www.productlifecycle-management.info/ 24 A3DM magazine n°3 Rapide. Fiable. Précis. Impression 3D par 3 technologies avancées : stéréolithographie, frittage sélectif par laser et frittage métal laser. Les technologies d’impression 3D produisent des prototypes de haute précision. Des petites pièces aux géométries complexes aux modèles plus grands, nous fabriquons de 1 à 50 unités sous 7 jours. IMPRESSION 3D | USINAGE CNC | MOULAGE PAR INJECTION Devis interactif en ligne | Analyse de faisabilité offerte Contactez-nous : protolabs.fr + 33 (0)4 27 50 29 47 [email protected] LES ÉCHOS DE L’AFPR ASSISES EUROPÉENNES DE LA FABRICATION ADDITIVE Les Assises européennes de la fabrication additive (AEFA), organisées par l’Association française du prototypage rapide et de la fabrication additive (AFPR), auront lieu du 21 au 23 juin 2016 à CentraleSupélec sur le site de Châtenay-Malabry. Par Alain Bernard, Professeur des Universités à l’École centrale de Nantes, vice-président de l’AFPR. L es 22e Assises européennes de la fabrication additive vont être l’occasion de faire le point sur certaines avancées récentes dans divers domaines. En effet, la fabrication additive est au cœur des processus technologiques et aujourd’hui, la vision systémique qu’il faut considérer prévaut : mise en œuvre des matériaux, mise en œuvre des machines avec une réelle productivité en maîtrisant la qualité, mise en place de processus technologiques complets, génération et maîtrise de l’information dans un référentiel global, mesure et contrôle au service des processus et des objets produits, sécurité et santé des opérateurs, et bien d’autres sujets. Pourquoi est-ce aussi important ? Rien de très original si l’on se réfère aux principes de création de valeur appliqués dans les chaînes de valeur. Nous sommes bien dans le cadre d’un processus qui va de l’idée au produit délivré conforme, en ajoutant des capacités à suivre le cycle de vie des objets fabriqués. Ce cycle de vie est de durée très variable en fonction des produits concernés. Certains produits ont des durées de présence sur le marché de l’ordre de quelques semaines et d’autres y restent plusieurs décennies. Cela pose donc le problème de maîtriser ce cycle de vie avec des orientations et des indicateurs de performance qui, eux non plus, ne sont pas très originaux – coût, qualité, délai – et cela tout au long de ce cycle de vie. Ainsi, il est capital de maîtriser la robustesse, tant numérique que technologique, des processus intégrant la fabrication additive mis en œuvre pour concevoir des pièces possédant des caractéristiques et 26 A3DM magazine n°3 des propriétés très diverses, des sous-ensembles fonctionnels, des outillages, et pour réparer ceux-ci. Le marché se développant à grande vitesse, il est important que chaque maillon des chaînes tant numériques que technologiques soit maîtrisé et exploité en utilisant le potentiel total que propose la fabrication additive, le tout dans des conditions de santé et de sécurité totalement maîtrisées : • liberté des formes ; • choix de matériaux très divers, aux caractéristiques variées et variables appliquées aux mêmes objets fabriqués et en fonction des conditions d’environnement ; • rationalisation et utilisation de la matière au regard des conditions d’utilisation des objets produits ; • intégration de fonctions ; • diminution de masse ; • ajustement des performances au juste nécessaire ; • raffinement des caractéristiques des objets produits par l’utilisation judicieuse de techniques de finition et de parachèvement. Tout ceci montre à quel point la fabrication additive vient compléter sans concurrencer totalement l’ensemble des savoirs traditionnels qui font la force et le potentiel de production. Aussi, il est important de définir et de spécifier de manière opérationnelle les compétences nouvelles dont les acteurs auront besoin afin de permettre un positionnement clair des compétences humaines dans l’ensemble du système productif. Tous ces sujets feront l’objet de présentations et d’échanges lors des prochaines Assises européennes de la fabrication additive. Nous espérons que cet événement donnera entière satisfaction aux participants et que des projets et dynamiques nouvelles verront le jour, comme cela a été le cas lors des éditions précédentes. LES ÉCHOS DE L’AFPR Le morphing évoque une transformation spatiale d’un objet par l’apport sépcifique d’énergie comme une création émergeant d’un métal liquide, tel le robot T-1000 de Terminator. Du 3D à la matière reprogrammable 4D CAO – Optimisation topologique – Simulation Le « morphing » ou matière programmable évoque une transformation spatiale d’un objet par l’apport spécifique d’énergie quelles que soient sa forme et sa nature, par exemple une machine capable d’imprimer en 3D des créations comme si elles émergeaient d’un métal liquide (comme le robot T-1000 de Terminator 2). À partir d’une forme donnée, facile à réaliser, on choisit un système matériau réactif / procédé pour qu’elle devienne par programmation et ciblage spatial d’un apport d’énergie une forme correspondant à une fonctionnalité spatiale et/ou temporelle. L’AFPR organise, en collaboration avec le centre R&D DINCCS de MICADO, une session dédiée à la conception et la simulation numérique pour la fabrication additive. La vision initiale de l’ingénieur (application du système KIS pour Keep It Simple) a été de faire « simple », avec les outils / matériaux à sa disposition. À partir de procédés encore « rustiques », il est capable de fabriquer des pièces en matière inerte, dans des domaines très variés. Le procédé utilisant de la lumière breveté en 1984 reposait sur la connaissance des coordonnées de l’objet à créer, mémorisées dans un ordinateur pilotant des miroirs galvanométriques, et l’ordonnancement du déplacement de la lumière pour transformer une résine en un solide par polymérisation d’une couche, « voxel » après « voxel ». L’ajout d’une deuxième couche, puis d’une troisième, etc., permet de créer ainsi la pièce comme le fait un maçon pour construire un mur. Cette base sert (encore) de concept fondateur aux technologies de fabrication additive. Mais elle est en train de se fissurer. Certains se préoccupent d’inventer des dispositifs qui peuvent changer le cours des choses sur des bases de robotique collective ou de fabrication additive 4D, de bio printing (créer du vivant 3D avec des aspects évidents en termes de réparation d’organes, voire de recherche de l’immortalité ou d’autres visions), etc. Comment, en France, trente-deux ans après le premier brevet qui a été abandonné, quelquesuns p,t-ils décidé de revenir un peu aux fondamentaux pour tenter de valider ou de rejeter quelques idées iconoclastes scientifiquement et pour rejouer autrement, en acceptant des impasses, une ancienne partition, mais avec de nouveaux concepts ? L’objet de l’exposé sera bien sûr de présenter les futures évolutions de la fabrication additive, de parler des technologies 4D qui sont encore à construire, dont certaines sont extraordinaires et porteuses de futur technologique, mais aussi de voir quelles sont les limites épistémologiques lourdes associées à ces nouveaux enjeux empreints de complexité (systèmes dynamiques non-linéaires) et fortement interdisciplinaires. De la même manière que les procédés de fabrication « classiques », la fabrication additive doit intégrer la chaîne numérique comme colonne vertébrale de son processus global. Il est en effet nécessaire de modéliser en 3D les produits à imprimer, d’anticiper les problèmes de fabrication, d’optimiser la matière utilisée, de simuler le procédé en lui-même. Outre les avantages connus d’une bonne gestion de la chaîne numérique, la fabrication additive, encore en phase de maturation d’un point de vue de l’industrialisation, donne l’opportunité de travailler sur les méthodologies numériques pour permettre une intégration intelligente sans être polluée par un historique trop pesant. Le procédé de fabrication additive remet en cause les modèles numériques utilisés pour les procédés de fabrication classiques (fonderie, forge, commande numérique). On peut ainsi légitimement se poser la question de la pérennité de l’approche constructive actuellement utilisée dans les outils de CAO dans le cadre de la fabrication additive. Les algorithmes d’optimisation de forme viennent sur ce sujet bousculer les lignes. Les formes modélisées, notamment organiques, deviennent ainsi grâce à la fabrication additive « fabricables », ce qui ouvre un nouvel espace de conception souvent difficile à intégrer dans les processus de conception actuels. Les travaux sur la mise en place de nouveaux modèles en CAO (déformations de formes globales, T-Splines) offrent des solutions de modélisation 3D dédiée à la fabrication additive. Ajoutons à toutes ces problématiques la nécessité de modéliser la connaissance des différents procédés pour permettre une intégration cohérente dans la chaîne numérique. L’objectif de la session est d’échanger sur tous ces sujets au travers d’interventions d’experts renommés qui viennent exposer l’état de leur recherche ou encore montrer des cas concrets. Texte de Nicolas Gardan Texte de Jean-Claude André A3DM magazine n°3 27 LES ÉCHOS DE L’AFPR Qualité, hygiène, sécurité et environnement Heavy Metal, une nouvelle génération de guitares imprimées en 3D La guitare Heavy Metal, imprimée en 3D en aluminium, a été conçue pour explorer les possibilités infinies de la fabrication additive métallique et pour mieux comprendre toutes les subtilités de cette technique : de la conception à l’impression réelle de la guitare, au traitement final du produit pour transformer l’objet métallique imprimé par une machine en un chef-d’œuvre. La conception de cette guitare est délibérément complexe pour pouvoir vraiment pousser les limites de la fabrication additive en métal. La guitare, conçue par Olaf Diegel, devait pour ce projet être suffisamment complexe pour être géométriquement impossible à fabriquer en utilisant des méthodes classiques. Elle devait également symboliser une réflexion sur la beauté intrinsèque du matériel utilisé. La conception a commencé avec un design inspiré d’une Fender Telecaster, probablement le design le plus iconique dans l’histoire de la guitare. Le côté extérieur de la guitare Heavy Metal est en style marchepied diamant et le corps est bâti en fils barbelés entrecroisés (avec les pointes barbelées gardées à l’écart du joueur). Ces deux détails de conception rappellent la dureté du métal. Pour adoucir cette dureté et apporter de la poésie, des roses ont été ajoutées à l’intérieur de la guitare. Le corps entier a été imprimé par Xilloc, en Hollande, en une seule pièce en aluminium AlSi10Mg, avec une imprimante additive métallique EOS M 400. Le post-traitement du corps métallique imprimé en 3D a été réalisé par Olaf Diegel pour créer un mode d’apprentissage pour l’enlèvement de matériau de support en aluminium, et pour créer le post-traitement nécessaire pour obtenir une guitare en aluminium avec une finition acceptable. Ce projet était surtout un exercice pour mieux comprendre les possibilités de la conception pour la fabrication additive à partir de métal. Un grand merci à l’équipe de Xilloc pour l’excellent travail qu’ils ont réalisé dans l’impression du corps de la guitare ! Texte de Olaf Diegel 28 A3DM magazine n°3 Ces dernières années, nous vous avions aborder les qualifications médicales puis aéronautiques basées principalement sur l’analyse de risque. Lors de récents symposiums, c’est suite à la dure réalité des choses que sont réapparues les problématiques relatives à la sécurité des personnels en considérant qu’il faut anticiper – pour éviter ce que tout le monde redoute – « le principe de précaution ». Ces quatre lettres, QHSE, sont un mode de fonctionnement généralisé dans nos entreprises et je vous propose que nous en partagions les bonnes pratiques tant pour les hommes, les produits que les moyens de production. Texte de Philippe Vannerot Santé Une session consacrée aux applications médicales de l’impression 3D – « Avancées de la fabrication additive dans le domaine de la santé » – aura lieu aux Assises européennes de la fabrication additive. Le médical représente déjà le quart des applications de l’impression 3D. La session médicale des Assises européennes de la fabrication additive, qui aura lieu le 23 juin à l’école CentraleSupélec à ChâtenayMalabry, reflète la diversité des applications actuelles et à venir dans le domaine de la médecine. Qu’il s’agisse de prothèses destinées à réparer des tissus lésés ou à améliorer des fonctions déficientes, de modèles anatomiques réalistes ou d’outils pour guider les interventions, l’impression 3D répond à la demande d’une chirurgie plus précise et personnalisée. Cela se fait naturellement de pair avec l’évolution des procédés d’impression 3D de plus en plus aboutis et utilisant des matériaux « métal », « polymère », « céramique », voire des cellules avec la bio-impression, qui répondent au cahier des charges biologique. Les différents intervenants de cette cession, venus de différents pays d’Europe, présenteront les dernières évolutions dans ce domaine en pleine expansion. Texte de Didier Nimal Les solutions 3DEXPERIENCE de Dassault Systèmes pour la fabrication additive Lors de cette session, des solutions actuelles (utilisées en production) et à venir (des solutions plus intégrées) de Dassault Systèmes pour la fabrication additive et l’optimisation de topologie seront présentées. Ces technologies sont souvent associées bien qu’elles ne le soient pas à priori : la fabrication additive permettant plus simplement (à coût acceptable) de fabriquer les géométries (très organiques) proposées par l’optimisation de topologie. Au-delà d’une conception mécanique qui change profondément, en embarquant intimement la simulation pour proposer les meilleures solutions fonctionnelles , il ne faut surtout pas oublier les contraintes liées aux processus de fabrication additive. Ceux-ci sont très différents. Il faut tenir compte du matériau utilisé mais aussi de la trajectoire du laser ou de la buse. La simulation apporte un plus non négligeable pour valider virtuellement la matière, la pièce et le processus de fabrication afin de maximiser le taux de réussite de la production… réelle. 22E ASSISES EUROPÉENNES DE LA FABRICATION ADDITIVE (AEFA) Philippe RIVIERE 10h05 - 10h30 Processus de qualification de pièce série pour le marché aéronautique (Titre à confirmer) Mazyar YOSOFI, Olivier KERBRAT, Pascal MOGNOL 11h - 11h25 Programme prévisionnel Mardi 21 juin Denis RODITI Ouverture 9h - 9h15 9h30 - 12h30 9h30 - 10h15 Introduction générale 11h50 - 12h15 Alain BERNARD, vice-Président AFPR, Conférence Chairman Keynotes 14h - 17h30 Du 3D à la matière reprogrammable 4D Philippe VANNEROT Design for AM: The key to the adoption of additive manufacturing Standardization : A growing standardization work at International level : 16 ISO/ASTM working groups, 7 of which were created in 2016 European support to Additive Manufacturing projects (titre en attente de confirmation) 12h40 - 13h 14h45 - 15h10 15h10 - 15h35 15h35 - 16h 16h30 - 16h55 16h55 - 17h20 Nicolas GARDAN (Chairman) Le projet OptiFabAdd : point sur les premiers résultats et perspectives Grégoire ALLAIRE, Ch. DAPOGNY, A. FAURE, F. JOUVE and G. MICHAILIDIS On the mathematical modelling of some manufacturing constraints in topology optimization of structures 8h55 - 9h15 Eujin PEI (Keynote) 4D Printing – a New Horizon for Design Futures Investigating the effects of multiple powder re-use cycles in AM David JOUGUET, Lucas DEMBINSKI, Charles BERNAGE DINAMIS (titre à confirmer) Design for Additive Manufacturability by Multistation : Conception, Simulation and control Richard GAIGNON 16h30 - 16h55 Opticeram : l’innovation en ingénierie 3D de produits céramique, solutions et applications Session « Applications » 17h35 - 19h15 Benoit VERQUIN (Chairman) détail en cours de finalisation Christian LAVIGNE (Keynote) 19h15 - 19h45 Improving the workflow from design to production of topological optimized parts by using additive manufacturing Avancées des Arts Numériques et Fabrication Additive (titre à confirmer) 19h45 - 20h15 Remise des Trophées de l’AFPR 2016 Diego CANALES, Jose Vicente AGUADO, Francisco CHINESTA Model Reduction for Fast Simulation of Manufacturing Processes Involving Trajectories Place de l’optimisation topologique dans un processus de conception pour la fabrication additive Étude et réalisation d’une pince de robot de forge en fabrication additive Jeudi 23 juin 8h30 - 13h30 Session « Qualité, sécurité, environnement, économie » Philippe VANNEROT (Chairman) 8h30 - 9h15 Grégory NOHLENS Virginie ORSILA 11h-11h25 11h25 - 11h50 Maria AVEREYANOVA 12h15 - 12h40 Recherche de méthodes de routine pour caractériser les pièces personnalisées réalisées en masse par fabrication additive Implants et prothèses 9h40 - 10h05 11h50 - 12h15 Analyse comparative de la défectologie de pièces fabriquées additivement par le procédé SLM selon 3 stratégies de lasage Paulo BARTOLO (Keynote) 9h15 - 9h40 Qualité, Hygiène, Sécurité, Environnement pour la fabrication additive (titre à confirmer) La sécurité au travail : quelles mesures prendre Session « Avancées de la fabrication additive dans le domaine de la santé » Didier NIMAL (Chairman) 10h05 - 10h30 Floriane ZONGO, Anne-Françoise OBATON, Eric BAUSTERT 9h40 - 10h05 Eujin PEI (Chairman) Simon VERMEIR Gaëtan PECHET, Guillaume RUCKERT, François CORTIAL, Matthieu PERRIN 9h15 - 9h40 Session « Solutions industrielles » Arthur MEUNIER, Lucas REYES, Edouard LECONTE 16h05 - 16h30 Ontologie et outil d’aide à la décision en Fabrication Additive Philipe VANNEROT (Keynote) 8h30 - 8h55 15h40 - 16h05 Alexandre SCHNEIDER Mercredi 22 juin 8h30 - 12h15 Synthèse et Conclusion – Proposition de la création de clubs utilisateurs par technologies et fournisseurs – Une demande d’origine aéronautique (GIFAS) accessible à tous les domaines Lucy GAINGER 15h15 - 15h40 Procedural microstructures with controlled elasticity Didier LINXE 17h45 - 18h10 14h30 - 15h15 Sylvain LEFEBVRE Franck POURROY 17h20 - 17h45 14h30 - 16h30 Session « CAO – Optimisation topologique – Simulation » Nicolas GARDAN (Keynote) 14h - 14h45 Étude de la micro coupe du Ti-6Al-4V élaboré par procédé SLM De la Fabrication Additive à la Métallurgie des poudres : une solution novatrice pleine de perspectives German ESTEBAN-MUNIZ (en attente de confirmation) 11h45 - 12h30 Gaël LE COZ, Marie FISCHER, Romain PIQUARD, Alain D’ACUNTO, Pascal LAHEURTE, Daniel DUDZINSKI Akram AL HUSSEIN 12h15 - 12h40 Catherine LUBINEAU 11h - 11h45 L’impression 3D, comment atteindre les cadences industrielles ? Jean-Claude ANDRÉ Olaf DIEGEL 10h15 - 11h 11h25 - 11h50 Georges TAILLANDIER, Président AFPR Bernard YANNOU, Directeur LGI, CentraleSupélec 9h15 - 9h30 Inventaire et modélisation des flux d’énergie et de matière d’un procédé de fabrication additive Didier NIMAL Epithèses – Orthèses Bertrand BUSSON Thierry OQUIDAM Modèles - Guides Dr ENOULT et/ou Dr BACHELET Dr Jean-Christophe BERNHARD Bio-impression 12h40 - 13h05 Dr DALLY 13h05 - 13h30 Pr. Dominique FRANCO 14h30 - 15h30 15h30 - 17h Session « Impression 3D pour tous » Contenu en cours de finalisation Session « Éducation / formation » Benoit EYNARD (Chairman) Contenu en cours de finalisation A3DM magazine n°3 29 DROIT REGLEMENTATION DE LA FABRICATION ADDITIVE ET DE L’IMPRESSION 3D Droit de propriété intellectuelle, brevets, standardisation et certification, les questions portant sur la réglementation de la fabrication additive ne sont pas closes. Des règles claires à l’échelle internationale sont nécessaires pour le développement de cette technologie. A3DM Magazine s’est interrogé sur la réglementation de la fabrication additive, trente ans après les premiers brevets. Par Giorgio Magistrelli, expert en fabrication additive, gestionnaire d’entreprise et de projets. L orsque la fabrication additive était encore appelée « prototypage rapide », les développements technologiques ont été la source d’une importante littérature. Les projets d’innovation et les résultats des recherches ainsi que les analyses industrielles ont fourni du contenu et des évaluations quotidiennes, dans le monde entier, stimulant le « hype cycle of 3D printing ». Un tel battage médiatique a souvent donné l’illusion que l’impression 3D était une technologie plug-and-play qui pourrait permettre de tout fabriquer, partout et à un coût moindre. Cependant, la fabrication additive – bien que présentant de nombreux avantages – n’a pas encore levé toutes les barrières. Ses principaux avantages 30 A3DM magazine n°3 sont la personnalisation de masse, la réduction de production de déchets, des coûts de transport plus faibles, l’amélioration de l’innovation et de la créativité, la fabrication sur demande, la livraison « juste à temps », mais aussi la possibilité de remplacer les pièces de rechange de manière efficace et pratique. Des inconvénients peuvent être indiqués dans la rare applicabilité à la production de masse en raison du coût plus élevé et d’une vitesse de production plus faible par rapport à la fabrication traditionnelle, la nécessité d’un traitement de surface, un accès encore difficile aux applications de la technologie, le manque de ressources humaines qualifiées, des matériaux limités (en comparaison à la fabrication traditionnelle) aux coûts élevés. Cette littérature technique, cependant, n’a pas été suivie par celles portant sur les questions réglementaires qui pourraient être rencontrées par les applications liées à la fabrication additive. DROIT Hype cycle pour l’impression 3D Source : Gartner (Juillet 2015) Espérance Impression 3D dans la chaîne d’approvisionnement Impression 3D pour les dispositifs médicaux Impression 3D industrielle Impression 3D dans les opérations de fabrication Impression 3D par les particuliers Bio-impression pour la recherche en science de la vie Vente d’objets 3D en magasin Impression 3D pour le prototypage Impression 3D en classe Impression 3D de prothèses de hanche et de genou Impression 3D pour le pétrole et le gaz Système de bio-impression pour la transplantation d’organes Scanners 3D Impression 3D d’appareils auditifs Logiciel de création d’impression 3D Impression 3D macro Service d’impression 3D bureaux Protection de la propriété intellectuelle (impression 3D) Impression 3D d’entreprise Impression 3D d’appareils dentaires Impression 3D de biens de consommation Innovation Pic d’attente Creux de désillusion Espoir de l’illumination Niveau de productivité Niveau sera atteint en : moins de 2 ans de 2 à 5 ans de 5 à 10 ans plus de 10 ans obsolète avant d’atteindre le niveau Nécessités légales et réglementaires pour la fabrication additive Pour développer la fabrication additive sur la durée et permettre une application étendue à de nouveaux secteurs, des règles claires sont nécessaires. Par exemple, il n’existe pas d’indications précises sur les licences et les droits de propriété intellectuelle liés aux produits, mais aussi concernant la responsabilité pour les produits imprimés. Qui est responsable en cas de défaillance ou de problème ? Le titulaire ? Le concepteur ? Les fabricants du système ? L’utilisateur final de ce système ? Les fournisseurs de matériaux ? Ou les distributeurs du produit final ? D’autres questions cruciales portent sur la normalisation et la certification. De nombreux acteurs sont constamment impliqués dans l’amélioration de l’environnement réglementaire et ce domaine avance pas à pas. Propriété intellectuelle et fabrication additive La propriété intellectuelle joue un rôle majeur dans le développement économique et des systèmes de productions modernes. Les droits de propriété intellectuelle (DPI) sont l’une des questions les plus controversées dans la discussion sur la fabrication additive. Tandis que la communauté des utilisateurs d’imprimantes 3D considère les DPI comme une série de règlements qui protège les intérêts des grandes entreprises, ces dernières voient, parfois, la fabrication additive et l’impression 3D comme un outil potentiel pour le piratage des designs et des produits. La propriété intellectuelle est un pilier important pour le développement de l’innovation industrielle. Il devient crucial de trouver un juste équilibre entre la protection des idées fondées sur les droits exclusifs et le droit d’utiliser librement et de commercialiser. Un système de DPI efficace est donc essentiel pour la poursuite du développement de la recherche et de la coopération à l’innovation. Et, dans ce domaine, l’Europe est à la traîne. Actuellement, les pays de l’UE possèdent peu de brevets liés à la fabrication additive. Les États-Unis mènent la course avec 946 brevets contre 146 pour l’Allemagne, premier pays européen et à la cinquième place mondiale derrière, respectivement, le Japon, la Chine et la Corée du Sud. Concernant les sociétés, derrière l’américaine 3D Systems et Stratasys (Israël), la première entreprise européenne est Materialise – basée en Belgique – avec 22 brevets. Les principaux acteurs, possesseurs de brevets, proviennent du secteur industriel. Selon le rapport Wohlers de 2014, en 2013, les trois quarts des brevets délivrés provenaient de sociétés, 10 % des universités, 10 % des acteurs individuels, et 6% des laboratoires à but non lucratif. A3DM magazine n°3 31 DROIT Le système européen actuel des DPI peut être amélioré, en particulier sur les coûts des brevets. En Europe, ces derniers sont toujours plus élevés que dans le reste du monde, représentant un lourd fardeau financier pour les start-up et les petites entreprises. De plus, leurs temps d’approbation par l’Office européen des brevets (OEB) sont également plus longs que ceux requis par l’Office des brevets du Japon (JPO) ou l’Office des brevets des États-Unis (USPTO). L’activation des droits de propriété intellectuelle inutilisés est un autre défi majeur. Les ventes aux enchères des DPI et la création de fonds de brevets (tels que ceux de la Deutsche Bank et Credit Suisse) qui achètent la propriété intellectuelle des universités et des entreprises représentent un La propriété développement intéressant. intellectuelle joue Certaines grandes entreprises ont également commencé à se un rôle majeur dans concentrer sur l’activation des le développement DPI inutilisés, comme Microéconomique. soft, qui a créé des entreprises de DPI avec des start-up, et la néerlandaise TNO, qui a ouvert son portefeuille DPI aux start-up et aux PME. Un autre développement digne d’être mentionné est l’émergence de collaborations précompétitives à grande échelle dans laquelle les modèles des DPI prédéfinis sont utilisés pour protéger la propriété intellectuelle des technologies. Dans notre analyse, en prenant en considération que tous les opérateurs doivent tenir compte du droit en raison des caractéristiques transfrontalières de la fabrication additive, nous nous sommes principalement concentrés sur les droits d’auteur, les marques et les brevets. Le droit d’auteur Le concept de droit d’auteur s’applique à une création intellectuelle enregistrée et qui existe comme une œuvre littéraire, artistique ou musicale, ou comme un film, des enregistrements sonores ou des arrangements typographiques. Il donne des droits spécifiques à l’auteur, interdit les actions non autorisées et permet au propriétaire d’initier une action judiciaire contre les cas de contrefaçon ou de plagiat. Le droit d’auteur est – en général, avec quelques exceptions spécifiques – un droit protégé automatiquement et à l’international. Dans le cas de l’impression 3D et de la fabrication additive, le point critique se situe sur la base de données de fichiers numériques CAO pouvant être partagés via Internet, dans des circonstances semblables à celles que les films et les producteurs ont 32 A3DM magazine n°3 connues. Une caractéristique clé du droit d’auteur est qu’il est difficile, voire impossible que deux personnes ou entités produisent une même création intellectuelle en même temps. Marques Une marque peut être un nom, un mot, un slogan, une conception, un symbole ou un autre dispositif unique qui identifient un produit ou une organisation. Elle est enregistrée au niveau national ou international auprès d’un organisme gouvernemental désigné. L’enregistrement peut prendre entre six et dix-huit mois et la protège, généralement dans le pays où elle est déposée. Cependant, au sein de l’Union européenne, il existe maintenant une marque communautaire (Community Trade Mark – CTM) qui apporte une protection dans tous les pays de l’UE. En outre, le système de Madrid offre une facilité à présenter des demandes de marques de commerce dans de nombreux pays en même temps. Les marques déposées peuvent être identifiées par l’abréviation « TM » ou le symbole « ® ». Il est, évidemment, illégal d’utiliser ces symboles ou de déclarer avoir reçu l’approbation lorsque la procédure d’enregistrement est en cours et qu’elle n’est pas encore finalisée. Aux États-Unis, il existe une différenciation entre les marques utilisées pour des produits et celles utilisées pour des services, avec une classification appelée « services de marques », bien que ceux-ci reçoivent la même protection juridique. Les lois de protection des marques punissent généralement les impressions 3D à des fins commerciales, mais permettent aux particuliers un usage privé des produits ou des fichiers de CAO. Une perspective différente pourrait être représentée par des plateformes de partage, même si dans ce cas aussi la discrimination des fins commerciales devrait être appliquée. DROIT Brevets DPI : la voie à suivre Les brevets sont appliqués aux procédés industriels et aux inventions pour les protéger, durant une période de temps limitée, contre la mise en œuvre non autorisée de l’invention. Cette dernière est définie, par un produit ou un processus, comme une solution à un problème technique spécifique. Les brevets sont des concessions accordées par les gouvernements nationaux qui donnent aux propriétaires un droit exclusif d’utilisation de vente ou de fabrication. Comme les marques, ils sont enregistrés au niveau national ou international auprès d’un organisme nommé par le gouvernement. Les brevets prennent généralement deux à trois ans pour être accordés. Certaines interventions politiques et législatives, en soutien aux start-up et aux petites entreprises, pourraient réduire les coûts de la protection de la propriété intellectuelle (comme la réduction des frais d’entrée) et les délais de délivrance de brevets. Parallèlement, de nouvelles réglementations devraient saisir le secteur de la fabrication additive dans sa capacité à distribuer les données techniques et les fichiers (CAO). Cependant, aussi longtemps que les DPI liés à la fabrication additive ne seront pas entièrement définis, ce (nouveau) potentiel ne pourra pas être utilisé. Le cadre législatif et réglementaire doit être réexaminé avec une attention particulière pour les nouvelles technologies et l’innovation. Le développement des technologies de l’information et de la communication (TIC) met en péril la protection des brevets. Les infractions indirectes et par des tiers pourraient devenir de plus en plus fréquentes. Dans cet article, nous évitons intentionnellement d’évaluer les possibilités liées à l’expiration de brevets de fabrication additive, qui feront l’objet d’une analyse future. Droits de conception Les droits de conception peuvent être considérés à la fois comme des droits d’auteur et de conception. Ils peuvent être enregistrés d’une manière similaire aux brevets, mais ils sont assez difficiles à protéger, surtout en Europe. A3DM magazine n°3 33 DROIT Standardisation et certification Selon une récente étude du Centre commun de recherche (CCR, Joint Research Centre), « les standards sont très importants car ils fournissent des exigences, des spécifications, des lignes directrices ou des caractéristiques qui peuvent être utilisées pour veiller à ce que les matériaux, les produits, les processus et les services soient adaptés à leur usage. Ils contribuent à éliminer les obstacles techniques, conduisent à de nouveaux marchés et profitent à la croissance économique. Ils facilitent également le transfert de technologie et contribuent à assurer la sécurité des produits, affectant ainsi la vie quotidienne des citoyens ». En général, les objectifs de la standardisation sont de promouvoir la qualité des produits, des procédés et des services pour l’amélioration de la qualité de vie, la sécurité, la santé et la protection de l’environnement, ainsi que pour une meilleure utilisation des matériaux, de l’énergie et des ressources humaines dans la production. La standardisation permet une communication claire et sans ambiguïté entre tous les partis intéressés. Elle est inscrite dans des documents juridiques afin de promouvoir le commerce international par l’élimination des barrières créées par les différences nationales. L’utilisation des technologies de fabrication additive à des fins industrielles devrait donc se concentrer sur l’application cohérente et la répétabilité, pour garantir un développement généralisé. Tous les éléments de la chaîne de valeur (en tant que matériaux, équipements et procédés) doivent être qualifiés et certifiés à plusieurs reprises pour obtenir la fabrication de pièces de haute qualité. Le manque de standardisation des matériaux, des procédés et des produits rend difficile la fabrication de ces pièces. L’élaboration de standards pour la qualification et la certification est compliquée en raison des nombreux matériaux, machines et 34 A3DM magazine n°3 procédés. Un déploiement accru de ces technologies nécessitera l’élaboration de normes pour faciliter la certification de tous les matériaux, machines, procédés et produits. La normalisation Les principaux organismes de normalisation, actifs dans le monde de la fabrication additive, et leurs comités techniques (TC) sont l’ASTM (American Society of the International Association for Testing and Materials – F42), l’Organisation internationale de normalisation (ISO – TC 261) et le Comité européen de normalisation (CEN rapproché avec le CENELEC – TC 438). Parallèlement, de nombreux organismes nationaux (ONN) couvrent le secteur de la fabrication additive, comme l’Association française de normalisation (AFNOR) en France avec le comité UNM 920, le VDI en Allemagne avec le comité GPL sur la production et la logistique, l’AENOR en Espagne avec le comité AEN/CTN 116, le SIS en Suède avec le comité SIS/TK 563 ou le BSI au Royaume-Uni avec le comité AMT/8. Dans la fabrication additive, à la différence d’autres secteurs où la concurrence est plus marquée, ces principaux organismes de normalisation travaillent en coordination pour atteindre l’objectif commun d’adopter un ensemble de normes pouvant être utilisées à l’échelle mondiale. Actuellement, l’ASTM F42 a conclu un accord de coopération avec l’ISO TC 261 sur l’adoption de normes communes. Le CEN TC 438 évalue les normes existantes au niveau d’ISO TC 261 qui pourraient être adoptées en Europe. Une structure commune définit plusieurs niveaux de normes : les normes générales (concepts généraux spécifiques et exigences communes), la catégorie des normes (exigences spécifiques à traiter ou catégories de matériaux) et les normes spécialisées (exigences spécifiques à un matériau, processus ou application spécifique). DROIT Le Comité européen (CE) a financé le projet de l’UE pour l’« Action de soutien de la standardisation dans la fabrication additive » (SASAM). Une feuille de route pour les activités de standardisation coordonne un groupe de plus de 122 intervenants de l’industrie du secteur, dont une majorité d’Européens. Ces intervenants ont indiqué la nécessité et le type de normes à élaborer en fonction des catégories comme la conception, les besoins industriels, la qualité des pièces fabriquées, la sécurité (règlements) et l’éducation. Standardisation : la voie à suivre En finançant le projet SASAM, l’Europe, à travers le CEN/TC 438 et sa coopération avec l’ISO TC 261 et l’ASTM F42, a montré son soutien au développement de normes dans le secteur de la fabrication additive. L’accord de Vienne entre l’ISO et le CEN permet également l’approbation de normes européennes et internationales, sur la base d’une seule version préliminaire. Les technologies de fabrication additive sont interdisciplinaires. Certains matériaux, méthodes d’essai et propriétés définis, ainsi que certaines étapes du processus et de préparation des données sont similaires à d’autres procédés industriels. Par conséquent, il est nécessaire d’évaluer comment connecter les activités de standardisation en fabrication additive avec d’autres ISO/TC et CEN/ TC. L’industrie, les organismes de normalisation et les parties prenantes se concentrent sur l’objectif de parvenir à un développement de normes communes dans le secteur en : • renforçant la coordination entre les comités techniques (TC) des organismes de standardisation spécialisés dans la fabrication additive : ASTM F42, ISO TC 261 et CEN CENELEC TC 438 ; • évitant les activités parallèles et donc le risque de perdre des experts ; • menant des actions de sensibilisation auprès des entreprises de machines-outils, des associations nationales et des parties prenantes ; • soutenant davantage l’engagement de l’industrie dans l’ISO/TC261, le CEN CENELEC et l’ASTM pour recueillir les contributions des parties prenantes en termes d’exigences de standardisation et de certifications ; • élaborant des processus visant à accroître la certification des pièces produites par fabrication additive ; • élaborant des techniques avancées d’inspection et contrôle de la qualité ; • élaborant des méthodes pour prévenir ou corriger les défauts du produit. • développant des systèmes de qualité couvrant l’ensemble de la chaîne de fabrication ; • évaluant les standards déjà approuvés et existants dans différents secteurs et qui pourraient être étendus à la fabrication additive. Règlements médicaux Les questions de réglementation sont une préoccupation majeure de tous les secteurs d’application, et particulièrement pour le secteur médical. Nous présenterons la situation particulière de ce secteur dans le prochain numéro d’A3DM Magazine, tout en analysant l’impact de la fabrication additive sur le développement de l’industrie médicale. LIENS UTILES Institut national de la propriété industrielle (INPI) http://www.inpi.fr Bureau de la propriété intellectuelle (BDPI) http://www.droitsdauteur.culture.gouv.fr/index-pla.htm Organisation mondiale de la propriété intellectuelle http://www.wipo.int/portal/index.html.en US Patent Office www.uspto.gov Office de la propriété intellectuelle (UK) www.ipo.gov.uk Office européen des brevets www.european-patent-office.org Irish Patent Office www.patentsoffice.ie American Society of the International Association for Testing and Materials http://www.astm.org/COMMITTEE/F42.htm Organisme international de normalisation http://www.iso.org/iso/fr/standards_development/technical_committees/other_bodies/iso_technical_committee. htm?commid=629086 Comité européen de normalisation https://standards.cen.eu/dyn/www/f?p=204:7:0::::FSP_ ORG_ID:1961493&cs=1725A335494BA95FA4CC9FE85A6F 6B4B1 A3DM magazine n°3 35 DROIT LA MOUSTACHE, UN CAS DE PROPRIÉTÉ Chess with Mustaches est une œuvre originale inspirée des travaux de Marcel Duchamp. Peu de monde, en particulier en France, ignore qui est Marcel Duchamp et son œuvre la « Joconde avec moustaches » (L.H.O.O.Q). L’artiste a également créé un jeu d’échecs, œuvre moins connue. En 2014, aux États-Unis, des artistes de fabrication 3D, Scott Kildall et Bryan Cera, ont produit des pièces d’échecs imprimées en 3D et représentant les sculptures de Marcel Duchamp. Les modèles numériques ont été téléchargés, gratuitement, sur le site de partage de fichiers Thingiverse sous le titre Readymake. Rapidement, les artistes ont reçu une lettre d’avertissement de la Fondation Duchamp citant une violation du droit d’auteur. La fondation se fondant sur le droit français existant depuis 1923 (Droit d’auteur de la France), a obligé les artistes à supprimer leurs fichiers. Scott Kildall et Bryan Cera ont été contraints de retirer leur travail du Web. En 2015, ils ont imprimé en 3D un nouveau projet intitulé Chess with Mustaches, répondant ainsi à la succession Duchamp. Cette œuvre est une réplique du jeu de Marcel Duchamp, mais avec de petites moustaches ajoutées à chaque pièce. Les artistes « ont l’espoir que ce projet amène les personnes à parler des connexions entre la propriété intellectuelle, les œuvres d’art, l’impression 3D et l’Internet ». http://kildall.com/project/chess-with-mustaches/ 36 A3DM magazine n°3 45 OC TOBRE 2016 LY O N - E U R E X P O Ce document est édité par FRANCE L E S E U L S A LO N B TO B E N F R A N C E EXCLUSIVEMENT DÉDIÉ À LA FABRICATION ADDITIVE 3dprint-exhibition.com LOGICIEL FABRICATION ADDITIVE DU FICHIER À L’OBJET Lors du processus de conception d’un produit, avant même l’étape de fabrication, il faut transformer son idée en fichier numérique 3D. La question du choix logiciel se pose et chacun, fort de son expérience, vous recommandera une solution plutôt qu’une autre. A3DM Magazine vous propose les clés pour vous aider à faire un choix dans le paysage des logiciels de CAO. Par Florian Berthelot, responsable CAO/3D chez F3DF, Formation 3D France. L a fabrication additive part de l’utilisation d’un fichier en trois dimensions (3D). Avant le stade de fabrication par processus additif de couches successives de matériau, la possession d’un fichier numérique 3D est essentielle. Pour obtenir ce fichier, plusieurs possibilités s’offrent à vous : 38 A3DM magazine n°3 LOGICIEL • l’acquisition d’un fichier par numérisation 3D ou scan 3D : cette opération consiste à passer de l’objet à un fichier 3D à l’aide d’un scanner (quelle que soit la technologie du scanner : photogrammètrie, lumière structurée, laser...) ; • le téléchargement d’un fichier : de nombreuses plateformes de téléchargement sur Internet permettent de se procurer des fichiers 3D. Vous trouverez des plateformes généralistes comme Grabcad, Traceparts, ou dédiées à l’impression 3D comme Thingiverse, Cults, myminifactory ; • la modélisation ou conception assistée par ordinateur (CAO) : elle comprend l’ensemble des logiciels utilisés pour concevoir des produits simples mais aussi des assemblages complexes. Aujourd’hui, il existe de nombreuses solutions logicielles. Et il n’est pas toujours facile de s’y retrouver, dans ce panorama. Sur quels critères choisir votre logiciel CAO ? A3DM Magazine vous propose plusieurs éléments de réponse. Les deux grandes approches de la modélisation Les logiciels de CAO permettent la conception de pièces, d’assemblages et de mises en plan. Ils intègrent aujourd’hui des fonctions annexes comme : la simulation, la génération de programme d’usinage, le rendu, etc. On y retrouve deux approches. La modélisation 3D paramétrique est aussi nommée modélisation à base de fonctions ou features based modeling, en anglais. Il s’agit d’une approche de conception technique et fonctionnelle. Les logiciels de CAO paramétrique se distinguent par la présence d’un historique de conception reprenant l’ensemble des opérations de l’utilisateur appelées fonctions : extrusion, révolution, chanfrein, lissage, etc. La simplicité des modifications et les répercutions sur l’ensemble des modèles, des plus simples au plus complexes, sont des avantages incontestables. La modélisation 3D directe ou direct modeling, en anglais, est une approche plus créative offrant d’avantage de liberté dans la conception. On se détache de l’historique de modélisation paramétrique pour se concentrer sur la création. La vision du projet De nombreux logiciels de CAO vous permettront de réaliser des projets de qualité. Votre choix portera sur différents critères de sélection. Quelques questions sont à se poser avant de choisir ce logiciel. Le budget que vous engagerez dans l’achat de votre logiciel vous aidera à définir ce dernier. Plusieurs critères jouent sur leur prix : l’achat de licence, la maintenance et la formation. Lors de l’achat d’un logiciel, vous devez tenir compte du type de licence qui vous est proposé. Il existe trois catégories de licences : • les achats de licences initiales : on parle également de licences « perpétuelles ». Les acheteurs font l’acquisition d’un logiciel pour une durée indéterminée. L’achat représente un coût fixe, mais il faut anticiper un budget supplémentaire pour les mises à jour à venir ; La modélisation est une étape indispensable, souvent négligée au profit des machines et matériaux. A3DM magazine n°3 39 LOGICIEL • les licences mensualisées ou annualisées : les éditeurs proposent d’accéder au logiciel ou à la suite de logiciels pendant la durée de l’abonnement. Vous bénéficiez automatiquement des mises à jour. Ce principe se généralise. Il devient le business model des éditeurs ; • les licences gratuites : il s’agit la plupart du temps de logiciels propriétaires mis à disposition gratuitement par des éditeurs. Dans certains cas, il peut s’agir d’une limite dans le temps ou dans les fonctions. Les logiciels de CAO sont, comme la fabrication additive, des technologies pointues. Ils sont régulièrement réactualisés et nécessitent d’être associés à du matériel performant. Ainsi, lors de l’achat de votre logiciel, vous devrez prendre en compte les performances de votre ordinateur et anticiper les possibles changements de version des logiciels ainsi que la maintenance que nécessite votre station de travail. Enfin, il n’est pas forcément facile de concevoir un objet, même assisté par ordinateur. Selon le procédé de fabrication additive utilisé, certaines règles sont à respecter. Par exemple, la notion de supports doit être maîtrisée dès la conception. Le designer doit traquer les plafonds horizontaux, les arêtes ou sommets qui naissent dans le vide, les marges dont l’angle d’inclinaison est inférieur à un certain degré (voir l’article « Fabrication additive – les nouveaux défis des concepteurs en mécanique », dans A3DM Magazine n°1 ou sur le site Internet : www.a3dm-magazine.fr). Ainsi, en fonction de vos connaissances et de votre expérience, une formation peut être nécessaire pour une utilisation optimale des logiciels et pour ne pas avoir de mauvaises surprises lors de l’étape de fabrication. Enfin, d’autres critères sont à prendre en compte lors votre achat. Voici une liste non exhaustive d’exemples qui peuvent influencer vos choix : • la taille de la structure ; • le nombre de personnes affiliées au projet ; • votre mobilité ; • le type de fichiers exigé par le client ; • l’interopérabilité. La modélisation est une étape indispensable. Elle est souvent négligée au profit des machines, matériaux et autres opportunités du marché de l’impression 3D. Le choix d’un logiciel est un équilibre entre les exigences du projet, les ressources matérielles et fincancières et les compétences et profils des acteurs du projet. La formaion de concepteurs et de modélisateurs compétents est un des défis des centres de formation. Vos besoins sont aussi essentiels dans le choix de votre logiciel. Le niveau de complexité des conceptions que vous souhaitez créer et vos critères de production doivent être, de préférence, bien ciblés en amont pour vous orienter au mieux lors de la sélection de votre logiciel. Pour la fabrication additive, la notion de supports doit être maîtrisée dès la conception. 40 A3DM magazine n°3 LOGICIEL Logiciels de CAO Parmi le vaste choix de logiciels de CAO qui vous seront proposés, A3DM Magazine vous propose une première sélection. SolidWorks de la société Dassault Systèmes Racheté en 1997 par Dassault Systèmes, ce logiciel est l’un des plus vendus, en France, mais touche aussi un public dans le monde avec plus de 469 000 licences. SolidWorks est un logiciel très utilisé dans la formation initiale. Il s’est, entre autres, implanté dans le secteur de l’enseignement. Principales utilisations : mécanique industrielle. Prix : à partir de 6 500 €. Inventor d’Autodesk Le logiciel phare de CAO, édité par Autodesk, est le grand frère d’AutoCad. Il permet de réaliser des conceptions 3D. Principales utilisations : mécanique industrielle. Prix : à partir de 5 550 €. CATIA de Dassault Systèmes Développé par Dassault Systèmes pour ses propres besoins, le logiciel CATIA est extrêmement puissant. Il est particulièrement adapté pour des conceptions et assemblages complexes. Principales utilisations : aéronautique, automobile, défense. Prix : prendre contact avec un commercial de la société. PTC Creo Le logiciel de CAO PTC Creo, anciennement nommé Pro/Engineer, peut être complété par de nombreux modules « métiers spécifiques ». SpaceClaim Le logiciel de CAO SpaceClaim est édité par la société SpaceClaim. Prix : à partir de 3 000 $ (environ 2 600 €). Fusion 360 Le logiciel Fusion 360 intègre des designs et ingénieries dans une solution Cloud. Disponible sur toutes les plateformes : ordinateurs et tablettes. Prix : gratuit pour les start-up et en abonnement à 282 € / an. HyperWorks 14.0 Le logiciel de CAO HyperWorks est édité par la société Altair. Prix : prendre contact avec un commercial de la société. FreeCad FreeCad est un ogiciel de CAO open source et multiplateforme, orienté en génie mécanique et design de produit. Prix : gratuit. Openscad OpenSCAD est un logiciel de CAO open source, qui à la particularité de fonctionner par la rédaction de script de modélisation. Prix : gratuit. Prix : à partir de 5 000 € Solid Edge Le logiciel de modélisation paramétrique Solid Edge est édité par Siemens PLM. Prix : entre 130 € et 530 € / mois / poste. NX NX est un logiciel de conception assistée par ordinateur (CAO) développé par Siemens PLM Software (anciennement Unigraphics Solutions). Prix : prendre contact avec un commercial de la société. TopSolid TopSolid est un logiciel de CAO français édité par la société Missler Software. Prix : à partir de 7 300 €. A3DM magazine n°3 41 RENCONTRE Formation De nouveaux enjeux universitaires La formation est devenue un enjeu essentiel pour le développement de la fabrication additive. Aujourd’hui, les formations proposées sont principalement intra- ou interprofessionnelles. Elles concernent un public de professionnels plutôt que des étudiants scientifiques ou techniques. Elles ne durent, généralement, que quelques jours, ce qui ne permet pas forcément de traiter toute la chaîne de production. A3DM Magazine est parti à la rencontre d’acteurs souhaitant faire bouger les frontières dans ce domaine. Benoît Eynard est enseignant-chercheur et directeur général du groupement AIP-PRIMECA. Il enseigne des modules autour de l’usine du futur et est directement en contact avec les bouleversements provoqués par la fabrication additive. Stéphane Bruzaud est professeur des universités. Il est également responsable du diplôme « Impression 3D » à l’Université Bretagne-Sud. Propos recueillis par Gaëtan Lefèvre, rédacteur en chef. 42 A3DM magazine n°3 RENCONTRE Benoît Eynard Groupement d’intérêt scientifique AIP-PRIMECA Les recherches du groupement d’intérêt scientifique (GIS) AIPPRIMECA portent sur l’usine du futur et les secteurs mécanique et productique. Ces travaux concernent toute la chaîne de production, du prototypage à la réalisation de pièces finies : la conception, la fabrication intégrée, la fabrication additive, mais aussi l’automatisation, la robotisation des chaînes de production, la maintenance et l’organisation industrielle, les chaînes numériques de conception et fabrication assistées par ordinateur (CFAO) et tous les systèmes d’informations d’entreprises au sens large. Ce groupement universitaire regroupe des acteurs de l’enseignement supérieur, des universités, des écoles d’ingénieurs et des diplômes universitaires de technologie (D.U.T.), de bac + 2 au doctorat. Les transformations issues du développement de la fabrication additive sont au cœur de l’enseignement. Rencontre avec Benoît Eynard, le directeur général. Benoît Eynard est également enseignant-chercheur à l’université de technologie de Compiègne au sein de laquelle il a occupé différentes fonctions : directeur du département génie mécanique et génie industriel mais aussi directeur des relations industrielles. Actuellement, il conduit des sujets autour de l’industrie du futur. Quels sont les enjeux de la formation pour la fabrication additive ? L’un des principaux enjeux est l’introduction de ces nouveaux procédés de fabrication dans les cursus de nos étudiants. Nous allons devoir faire évoluer l’offre, à la fois sur les fondamentaux théoriques : connaître les matériaux, les procédés de fabrication, mais aussi sur la mise en pratique. Comment allons-nous concevoir des pièces produites avec ces technologies ? Quelle gestion des modèles 3D allons-nous mettre en place ? Comment passerons-nous du modèle 3D numérique au modèle 3D physique ? Etc. Pour répondre à ces questions, il faudra revoir nos cursus de formation pour élargir les champs d’application. La fabrication additive amène de nouvelles possibilités. Il faut donc compléter notre offre de formation. Il est important de créer des liens entre le monde de la formation et le monde de l’entreprise. Mon expérience dans une université de technologie me montre qu’il s’agit d’une des clés de la réussite de ces formations universitaires, en France. Cependant, même à notre échelon, nous remarquons une insuffisance de dialogues entre ces deux univers. Nous devrons être capables de développer, plus encore, ce lien, que ce soit à des niveaux pré-bac ou post-bac. Nous travaillons donc sur ce dialogue. Par exemple, avec la Fédération de la plasturgie et des matériaux composites, nous poussons au développement et à la construction de référentiels. Ces sujets sont développés avec des personnes de l’éducation nationale mais aussi de l’enseignement supérieur et de la recherche. A3DM magazine n°3 43 RENCONTRE On entend justement parler d’un institut national pour fédérer les professionnels et l’enseignement scolaire… La création d’un institut national serait un point de référence sur le sujet. Il faciliterait certainement la dynamique. Mais cet institut trouverait-il sa place dans un paysage où de nombreux acteurs sont déjà installés ? Comment fonctionneraient ensemble toutes ces entités ? Si un institut de ce type voyait le jour, nous devrions imaginer et construire un nouveau fonctionnement. Aujourd’hui, nous observons principalement des formations intra- ou interprofessionnelles dans les secteurs liés à la fabrication additive. Mais où en sommes-nous concernant la formation continue scolaire ou universitaire ? Les offres de formation continue commencent à émerger, que ce soit dans les lycées, dans l’enseignement technologique et professionnel, mais aussi dans les écoles d’ingénieurs. Par exemple, l’ENSAM (Écoles Nationale Supérieure d’Arts et Métiers) ou les écoles des Mines ont développé leurs offres. Cependant, nous sommes à l’émergence de ces formations. Structurer le paysage va prendre du temps. Et il faudra s’assurer d’une base d’enseignement et de formation proposée solide et concrète. 44 A3DM magazine n°3 La chaîne de production de valeur est vaste et complexe. Les étapes principales sont la conception de modèles numériques, la préparation de la fabrication, la mise en œuvre de la machine avec une connaissance dans les matériaux et les procédés, les traitements qui vont permettre les finitions, auxquelles on pourrait ajouter le contrôle des pièces. Une filière peut-elle répondre à tout cela ? Les parcours ingénieurs seront, plutôt, spécialisés, par exemple en bureaux d’études, en numérisation 3D dédiée à la fabrication additive, etc. Ce seront des évolutions des cursus existants qui devront être complétés par des modules dédiés à la fabrication additive, que ce soit sur les matériaux ou sur les procédés de fabrication. Aux niveaux bac + 2, bac + 3, les entreprises peuvent avoir des besoins plus spécifiques, comme des étudiants suivant un cursus de génie des matériaux pour leur apporter l’expertise qui leur fait défaut. Les formations devront répondre aux besoins, notamment en sortie des lycées ou section de BTS. RENCONTRE STEPHANE BRUZAUD Université Bretagne-sud L’université Bretagne-Sud, accompagnée de ses partenaires – l’Institut de Recherche Dupuy de Lôme (IRDL), anciennement, le Laboratoire d’Ingénierie des Matériaux de Bretagne (LIMATB), celui des Sciences et Techniques de l’Information, de la Communication et de la Connaissance (Lab-STICC), le CREAFAB de Lorient ainsi que le plateau technique ComposiTIC – a ouvert la première formation continue universitaire dédiée à l’impression 3D. Rencontre avec Stéphane Bruzaud, responsable de ce diplôme d’université. Stéphane Bruzaud est professeur à l’université Bretagne-Sud. Directeur scientifique et responsable des recherches, il travaille notamment sur l’élaboration de matériaux nanocomposites, sur la durabilité de matériaux plastiques et sur les matériaux d’origine renouvelable. Comment est né le diplôme « Impression 3D » à l’Université Bretagne-Sud ? Ce diplôme est issu d’un partenariat avec un Fablab de Lorient. Le responsable de ce dernier est intervenu dans une formation initiale portant, essentiellement, sur l’impression 3D. Les étudiants se sont montrés très réceptifs à cette technologie. Du coup, il m’est venu l’idée d’une formation spécifique à l’impression 3D abordant tous les champs de compétences nécessaires pour l’utiliser, de la partie « logiciels » jusqu’à la partie « finition », en passant par le fonctionnement de la machine et des matériaux. Mon idée était de concevoir une formation transversale pour laquelle le format du D.U. (diplôme universitaire) se prêtait bien. L’université a décidé de se lancer dans ce projet sous une formation continue. L’ensemble de la chaîne de production pour la fabrication additive est très complexe. Comment arrivez-vous à intégrer tous les niveaux : la conception de modèles numériques, la fabrication, la connaissance des matériaux, le traitement final ? Nous avons, à Lorient, un écosystème très favorable : • avec des enseignants-chercheurs du l’Institut de Recherche Dupuy de Lôme (IRDL) pour ce qui est de la connaissance des matériaux ; • notre laboratoire des Sciences et Techniques de l’Information, de la Communication et de la Connaissance (Lab-STICC) pour l’aspect numérique, informatique et mécatronique ; • ainsi que le laboratoire technique de la faculté des sciences en relation avec le CREAFAB de Lorient pour la pratique. Nous arrivons ainsi à construire toute une chaîne de compétences permettant de répondre à toutes ces questions. Tout cela se trouve dans un environnement géographique de un à deux kilomètres. Cet écosystème permet d’apporter toutes les compétences nécessaires. Vous pouvez retrouver sur le site de l’université Bretagne-Sud la plaquette de présentation du diplôme « Impression 3D ». Vous verrez que nous avons plusieurs modules : avec une partie « logiciel », une autre « mécatronique », une partie plus expérimentale sur les matériaux, une sur la conception, le prototypage et la simulation du comportement mécanique et enfin un cinquième portant sur l’écosystème (voir encadré page 45). Ces cours magistraux et pratiques sont dispensés par un personnel qualifié puisque la plupart des enseignants-chercheurs travaillent à la pointe de ce qui peut se faire dans ce secteur. A3DM magazine n°3 45 RENCONTRE Concernant les matériaux et les procédés enseignés, certains sont-ils privilégiés ? Notre travail est plus orienté sur la partie « plastique », comme le procédé FDM (Fused Deposition Modeling, dépôt de matière fondue) par exemple. Le plastique fait partie de nos compétences de base. Nous traitons un panorama de tous les matériaux plastiques qui sont imprimables mais, surtout, nous réalisons un focus de trois heures sur les bioplastiques. Quels sont les bioplastiques aujourd’hui disponibles sur le marché de l’impression 3D ? Quels sont ceux en voie de développement ? Etc. Le bioplastique est au cœur de l’activité du laboratoire. Nous développons beaucoup de recherches autour des bioplastiques. Nous souhaitons concevoir des nouveaux matériaux imprimables et renouvelables afin de limiter l’utilisation de matériaux plastiques pétrochimiques tels que l’ABS, proposer des matériaux de substitution plus vertueux sur le plan environnemental. L’impression 3D est une technologie qui risque de générer une consommation de matières importante, pour laquelle nous allons devoir nous poser la question de la fin de vie et de leur utilisation après. L’impression de matériaux biodégradables ou recyclables peut être une réponse à ces problématiques. Aujourd’hui, la plupart des formations sont interou intraprofessionnelles… À ma connaissance, nous sommes la première formation universitaire autour de l’impression 3D. Il existe des formations privées, des formations professionnelles, mais nous sommes le seul diplôme universitaire « Impression 3D ». La fabrication additive est une discipline qui n’est pas forcément facile à aborder sur un plan pédagogique. À l’université, nous développons des formations plus initiales, plus verticales comme les logiciels ou les matériaux, mais il est difficile de coupler le tout : logiciel, mécatronique, matériaux. Pourtant, le format du D.U. s’y prête particulièrement bien. Il permet d’avoir une approche plus transversale, très pluridisciplinaire. Nous apportons les bases nécessaires aux étudiants pour appréhender l’impression 3D. Ensuite, chaque étudiant peut choisir tel ou tel axe selon ses problématiques, son projet ou ses compétences. Le diplôme universitaire que nous avons mis en place, je l’imaginais dans cet esprit : former des personnes polyvalentes dans l’impression 3D, qui soient capables d’aborder des problématiques sur la partie « logiciel », sur la partie « mécatronique », sur les matériaux ou sur une partie expérimentale et ensuite, au sein des entreprises, développer une compétence spécifique. La spécialisation nécessite, néanmoins, d’avoir des compétences assez complètes sur l’ensemble de la chaîne. 46 A3DM magazine n°3 RENCONTRE Un des problèmes aujourd’hui, autour de la formation à l’impression 3D, est que nous formons soit des informaticiens, soit des mécaniciens, soit des polyméristes, mais personne qui n’ait réellement la vision d’ensemble que nécessite cette technologie. Le format du D.U. permet justement de répondre à cette problématique. Pouvez-vous nous présenter le format du diplôme « Impression 3D » ? Il s’agit d’un format de 120 heures comprenant cinq sessions de trois jours chacune, de décembre à avril. Ce format nous a paru logique pour solliciter un public large sur un plan géographique. Il permet aux candidats de se déplacer à Lorient uniquement trois jours par mois, du lundi au mercredi. Par conséquent, un public venant de toute la France s’est inscrit. Nous avons également eu un candidat belge qui venait de Bruxelles. Pensez-vous, que dans quelques années, nos collèges seront équipés d’imprimantes 3D et que les élèves seront formés à la conception de modèles numériques ? Il existe actuellement des collèges équipés d’imprimantes 3D. Certaines machines ont des coûts relativement bas, par rapport à il y a quelques années. Aujourd’hui, des établissements scolaires peuvent donc s’équiper d’imprimantes 3D. Je le vois aussi à travers les étudiants de première S ou de terminale qui ont des TPE (travaux personnels encadrés) à réaliser et me sollicitent pour répondre à des questions ou pour imprimer deux ou trois objets à l’université. On sent bien que cette génération est déjà fortement imprégnée par cette technologie. Elle est friande d’informatique et de technologie. La région de Lorient semble être un pôle qui bouge dans ce domaine. Effectivement ! L’équipe et les laboratoires cherchent à se positionner comme un pôle fort de l’impression 3D, aussi bien sur la partie R&D que sur la partie pédagogique. La création de ce diplôme universitaire en est une illustration. Nous souhaiterions être reconnu scomme un pôle de compétences de recherche et de transfert autour de l’impression 3D. DIPLÔME D’UNIVERSITÉ « IMPRESSION 3D » Programme de la formation La formation de ce diplôme universitaire est organisée autour de cinq modules : Module « Logiciels pour fabrication numérique » • Conception de pièces • Paramétrage de la machine Module « Mécatronique de la machine imprimante 3D » • Micrologiciels • Electronique de commande • Motorisation • Éléments fonctionnels Module « Matériaux pour impression et technologies d’impression » • Panorama sur les matériaux • Physico-chimie des matériaux • Rhéologie • Fabrication d’un consommable Module « Pièces 3D : conception, prototypage et simulation du comportement mécanique » • Utilisation et maintenance de la machine • Caractérisation mécanique et structurale des pièces • Échanges thermiques dans les procédés • Penser et concevoir en impression 3D Module « Écosystème de l’impression 3D » • Place de l’impression 3D dans le paysage scientifique et industriel Public visé • Toute personne du milieu industriel : chef de projet, cadre dirigeant, responsable de production, responsable d’atelier, responsable de bureau, technicien… • Toute personne amenée à concevoir, modifier, éditer des objets à produire en plus ou moins grande quantité ou à produire des prototypes industriels. • Admission : toute personne titulaire d’un Bac + 2 dans le domaine scientifique ou sur dossier. Contact Tél. : 02 97 87 11 39 Mail : [email protected] Partenaires A3DM magazine n°3 47 PROJET R&D LES ONDES TÉRAHERTZ, UNE ALTERNATIVE PROMETTEUSE AUX MÉTHODES CLASSIQUES DE CND L’un des principaux intérêts de la fabrication additive (FA) relève de la possibilité de réaliser, d’un seul bloc, des pièces de géométrie très complexe, irréalisables sans assemblage ni soudure par des techniques traditionnelles. En conséquence, l’inspection de ces pièces ne peut plus se faire uniquement avec des méthodes de contrôle non destructif (CND) dites surfaciques. Il faudra avoir recours à des méthodes dites volumiques. Par Anne-Françoise Obaton du Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE) P armi les méthodes volumiques utilisées classiquement et permettant de détecter, localiser et caractériser des défauts, figurent les contrôles suivants. • Les courants de Foucault : la pièce sous test est excitée avec un flux magnétique variable. Un détecteur permet d’observer les éventuelles perturbations du flux causées par un défaut ou un changement de milieu. • Les ultrasons (US) : la pièce sous test est excitée par des ondes ultrasonores. Un traducteur ou une matrice de traducteurs (US multi éléments) mesure la réflexion ou la diffraction (TOFD : Time of flight diffraction) à l’interface avec un défaut ou un changement de milieu. • La thermographie : la pièce sous test est excitée avec un flux thermique. Un imageur ou une caméra thermique permet d’observer les éventuelles perturbations causées par un défaut ou une différence de milieu dans la propagation de la chaleur. 48 A3DM magazine n°3 • L’émission acoustique : la pièce sous test est sollicitée naturellement en fonctionnement par des contraintes mécaniques, thermiques ou chimiques. Cela engendre la propagation d’ondes acoustiques. La perturbation de ces ondes causée par la présence d’un défaut ou d’une différence de milieu sera mesurée avec un maillage de capteurs piézo électriques. • La radiographie : la pièce est excitée avec des rayons X ou g. La présence d’un défaut ou une différence de milieu atténue l’intensité des rayons. Un détecteur (X) ou un film photographique (g) permet de visualiser cette atténuation en nuances de gris. • La tomographie à rayons X : il s’agit de radiographies prises autour de la pièce sous différents angles de vue, suivies d’une phase purement mathématique qui consiste à reconstruire numériquement la pièce dans un volume 3D. Tomographie et ondes électromagnétiques En fabrication additive et particulièrement pour certains procédés, vérifier la qualité d’une pièce ne consiste pas uniquement à détecter, localiser et caractériser des défauts éventuels. Il faut également contrôler que la géométrie et les cotes de la pièce sont conformes au cahier des charges. Pour ce faire, il faut comparer le dessin numérique initial de l’objet avec la pièce finale. À partir de mesures réalisées avec un scanner 3D ou une machine à mesurer tridimensionnelle (MMT), nous pouvons comparer l’enveloppe externe de l’objet au dessin numérique. Cependant, en toute rigueur, il faut examiner l’ensemble de la pièce, les structures internes et externes. Les seules méthodes qui permettent cette double inspection externe et interne sont les méthodes d’imagerie 3D telle que la tomographie X. PROJET R&D Toutefois, dans le spectre fréquentiel, d’autres ondes électromagnétiques sont présentes comme les ondes térahertz (figure 1). Ces ondes ont longtemps été délaissées faute de solutions simples pour les générer et les détecter. Aujourd’hui, grâce au progrès de la micro électronique, les scientifiques sont capables de les produire et de les détecter aisément. 1 Spectre des ondes électromagnétiques Les ondes térahertz peuvent détecter, localiser et caractériser des défauts par spectroscopie résolue en temps. Mais elles peuvent également faire de l’imagerie 3D par temps de vol ou par tomographie. Depuis une dizaine d’années, bon nombre de chercheurs du monde entier travaillent sur les ondes térahertz. Ces ondes possèdent des propriétés exceptionnelles, sans danger pour la santé et avec un fort pouvoir pénétrant. Ces ondes mi-radio, mi-lumière, devraient bouleverser de nombreux secteurs d’activité : la médecine, le traitement de l’information, la chimie, l’astronomie, la sécurité et le contrôle non destructif. L’équipe de Patrick Mounaix, du Laboratoire de l’Intégration du Matériau au Système (IMS), de l’université de Bordeaux, a développé des moyens de mesure et d’analyse dans ce domaine. Des contrôles pour polymère et céramique Compte tenu de la bande fréquentielle des ondes térahertz par rapport aux rayons X, il est utopique d’obtenir des images d’égale résolution spatiale (les longueurs d’ondes varient entre 75 µm et 3 mm). Par ailleurs, les ondes térahertz ne sont pas appropriées pour sonder le métal et les matériaux fortement conducteurs car elles sont écrantées. Cependant, elles sont prometteuses pour les matériaux polymères et la céramique, qui comptent parmi les matériaux les plus utilisés en fabrication additive. Les industriels qui ont adopté cette technologie sont en quête de méthodes moins onéreuses que la tomographie X pour qualifier leurs pièces (détection de défauts, déformations, dimensionnement de géométrie complexes). En conséquence, en collaboration avec l’équipe La- ser et terahertz Test Team de l’IMS, nous avons entrepris d’explorer les possibilités de ces ondes térahertz pour le contrôle en fabrication additive. Notre investigation s’est tout d’abord portée sur les polymères. Les résultats obtenus en tomographie sur des pièces en PEEK, PEKK et polyamide 12 ont été particulièrement concluants1. À l’heure actuelle, nous nous intéressons à la céramique en collaboration avec Richard Gaignon et Benjamin Pradeau de la société limougeaude 3D Ceram. Cette société conçoit depuis 2010 et commercialise depuis 2014 des machines de la catégorie « photopolymérisation en cuve » (figure 2). Machine Ceramaker de 3D Ceram 2 A3DM magazine n°3 49 PROJET R&D Leur technologie utilise le procédé FCP (Fast Ceramic Production) développé par le laboratoire du CNRS Science des Procédés Céramiques et de Traitements de Surface (SPCTS) de Limoges. Ces machines sont dédiées à la céramique : alumine, zircone, hydroxyapatite, ATZ (Alumina Toughened Zirconia). 3D Ceram fabrique également des pièces et développe les formulations de pâtes céramiques composées de résine photosensible et de céramique utilisées dans leur machine. Le principe de la fabrication consiste à construire la pièce, couche après couche, par photopolymérisation de la résine avec un laser UV (355 nm). En sortie machine, la pièce, dite verte (composée de résine photosensible et de céramique), subit un traitement thermique afin de la délianter et de la fritter. Cette étape permet d’éliminer la résine et de densifier la céramique à 100 %. Elle induit un rétrécissement géométrique de la pièce de 17 à 20 % suivant le matériau, d’où la nécessité de contrôler que les spécifications géométriques initiales de la pièce sont bien conservées. Cette technologie intéresse particulièrement le luxe pour la qualité de la texture des pièces « sortie machine », mais également le secteur médical pour les propriétés d’ostéo-intégration de la céramique, et naturellement d’autres secteurs industriels comme celui de la microfluidique. Spectrométrie térahertz de pièces en zircone Nous avons procédé à des mesures par spectrométrie térahertz d’une de leurs pièces en zircone destinée à des applications en microfluidique (figure 4A) en collaboration avec Patrick Mounaix, Jean-Baptiste Perraud et Hugo Balacey de l’IMS. Les mesures ont été réalisées en transmission avec le spectromètre térahertz TPS 3000 de TeraView (figure 3). Les résultats permettent de visualiser clairement les canaux à l’intérieur de la pièce, de les inspecter et de les mesurer (figure 4C). On observe la surpolymérisation en extrémité des canaux dans les zones coudées. Cette interprétation est confortée par la comparaison avec l’image optique de la pièce coupée en deux (figure 4B). A 4 c b a) Ppièce en céramique de 3D Ceram. b) Image optique de la pièce coupée en deux. c) Image obtenue par spectro imagerie térahertz à l’IMS. En conclusion, ces résultats mettent en exergue les perspectives de contrôles que peuvent apporter les ondes térahertz pour les matériaux céramiques. Bien sûr, de nombreux efforts sont à réaliser pour passer de la phase de laboratoire à la phase de transfert, mais l’imagerie térahertz devrait se développer au cours de la prochaine décennie. Les ondes térahertz sont bel et bien perçues comme une source d’imagerie et d’analyse sans contact, porteuses d’applications en contrôles surfacique et volumique. Patrick Mounaix Directeur de Recherches / Senior Researcher Laboratoire IMS - UMR 5218 CNRS - Groupe Nano - Équipe Laser Université Bordeaux, Bat A31 351, Cours de la Libération - 33405 Talence Cedex - FRANCE [email protected] Richard Gaignon Président / CEO de 3D Ceram Tel : 05 55 04 10 90 [email protected] A Note b 3 a) Spectromètre térahertz TPS 3000 de TeraView. b) Montage expérimental du TPS 3000 pour les mesures en transmission. 50 A3DM magazine n°3 1 - J.-B. Perraud, A.-F. Obaton, J. Bou-Sleiman, B. Recur, H. Balacey, F. Darrack, J.-P. Guillet and P. Mounaix, “THz imaging and tomography as efficient instruments for testing polymer additive manufacturing objects”, Applied Optics, Vol. 55, Issue 13, pp. 3462-3467 (2016). DOI: 10.1364/AO.55.003462. 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