Le château de Montal (Saint-Jean-Lespinasse)

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Le château de Montal (Saint-Jean-Lespinasse)
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Le château de Montal (Saint-Jean-Lespinasse)
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Installé sur un surplomb dominant la vallée de la Dordogne, le château a été
construit entre 1519 et 1534 par Jeanne de Balsac, dame de Montal. Jamais
achevé, ce chef-d'œuvre de la Renaissance se distingue par
l'exceptionnelle richesse de ses sculptures.
Logis, élévations sur cour.
Au début du 16e siècle, la seigneurie de Saint-Pierre, sur la paroisse de
Saint-Jean-Lespinasse, est acquise par les seigneurs de Balsac
d’Entraygues. Jeanne de Balsac, épouse du seigneur de La Roquebrou,
Amaury de Montal, y entreprend d’importants travaux à partir de 1519.
Au repaire médiéval, succède un château de plaisance, pourvu d’une
décoration sculptée exceptionnelle.
Les deuils successifs qui affectent Jeanne de Balsac, veuve depuis 1510,
mettent un terme à ses projets et, dès 1534, les travaux sont suspendus. Le
nouveau château, portant désormais le nom de la dame de Montal, ne sera
jamais terminé : deux ailes seulement sur les quatre prévues sont achevées.
Les deux fils de Jeanne et d’Amaury de Montal disparus avant leur mère,
morte en 1559, c’est le fils du cadet Dordet, Gilles, qui reçoit la charge de la
seigneurie. Celle-ci passe par héritage aux Pérusse d’Escars, puis à diverses
branches collatérales au cours des 17e et 18e siècles.
En 1771, la seigneurie est vendue au comte de Plas de Tanes.
Proposé comme bien national en 1793, le château, abandonné et en fort
mauvais état, ne trouve pas d’acquéreur. Il est restitué au comte à son retour
d’émigration.
Utilisé comme auberge, il est acheté par un banquier de Saint-Céré, puis par
un marchand de biens, Macaire du Verdier, en 1879.
Ce dernier accomplit en peu de temps une sinistre besogne. La frise
sculptée, les portes, lucarnes et cheminées sont démontées pierre à pierre et
expédiées à Paris. En deux ventes, une partie des lots trouve acquéreur et
le château, saisi par les créanciers, semble condamné.
L’un des éminents collectionneurs qui a déjà réuni plusieurs éléments de
sculptures, Maurice Fenaille, réussit enfin à acquérir le château en 1908.
Ses connaissances historiques, sa fortune et ses relations vont lui permettre
de mener, avec autant de rapidité que d’efficacité, une action de sauvegarde
magistrale. Ce qui ne peut être acquis auprès des acheteurs des ventes de
1881 et 1903 est copié par l’un des meilleurs artisans de l’époque, Matruchot,
travaillant pour Rodin.
En 1913, Maurice Fenaille fait don à l’Etat du château de Montal, restauré
et admirablement meublé, avec une réserve d’usufruit pour lui et ses enfants.
En savoir plus
A l'emplacement d'un édifice antérieur, …
Le château de Montal n’a pas été construit ex nihilo sur ordre de Jeanne de Balsac, mais a succédé à
un édifice antérieur dont un des vestiges les plus visibles est une fenêtre de la façade ouest, située
au rez-de-chaussée.
Cet élément peut être daté de la fin du 15e siècle.
Il appartiendrait donc au château de Saint-Pierre, attesté dans la seigneurie éponyme, propriété des
seigneurs de Miers jusque dans les années 1500.
… l'érection d'une demeure de plaisance
Le site sur lequel Jeanne de Balsac fit édifier un nouveau château à partir de 1519 était éloigné de
quelques centaines de mètres du bourg de Saint-Jean-Lespinasse, où se trouvait un autre château, dit
de Saint-Jean.
Cet isolement au milieu d’un vaste domaine rural faisait de cette demeure un espace privilégié, dont la
conception architecturale correspond à ce nouvel art de vivre que découvrait la noblesse française au
début du 16e siècle.
Même si les façades nord et ouest évoquent encore les châteaux forts, par la présence de trois tours
d’angles massives avec corbeaux sculptés, d’une échauguette desservant la tour d’escalier, de
quelques meurtrières et de douves, cette austérité ne met que mieux en valeur les logis ouvrant sur
la cour intérieure, orientés au sud-est et sud-ouest, face au massif des Césarines.
Le plan adopté ici est simple : les deux corps de logis placés en équerre sont desservis par un
escalier monumental placé dans un pavillon rectangulaire dominant les bâtiments.
Deux galeries à portiques devaient initialement fermer la cour intérieure, à l’est et au sud-est, comme
l’attestent la présence d’une porte sculptée au premier étage de l’aile nord-est et des pierres d’angle en
saillie à l’extrémité gauche de la façade sud-est.
La distribution des pièces, identiques sur les trois niveaux, répond à un souci de confort et d’intimité
nouveau, tout en privilégiant la fonction de prestige et d’apparat grâce à l’escalier somptueusement
décoré et largement éclairé.
Au rez-de-chaussée et au premier étage, chacun des trois appartements est organisé autour d’une
grande chambre avec garde-robe et cabinet de retrait placés dans la tour.
Deux vastes salles occupent une partie de l’aile nord-ouest.
Celle du premier étage était selon toute vraisemblance la pièce de réception. Elle comporte une
cheminée à la française dont la hotte est ornée de motifs héraldiques et d’une majestueuse statue de
cerf, sujet assez répandu au 16e siècle dans le décor intérieur.
La grande salle du rez-de-chaussée dispose également d’une cheminée magnifiquement sculptée, où
abondent les initiales de Jeanne de Balsac et de son fils aîné Robert, les meubles héraldiques et les
blasons familiaux, dans une profusion de rinceaux et d’animaux.
L'escalier et ses décors
L’escalier, à la fois par sa conception et son décor, est le point fort de cette architecture résidentielle.
Intégré dans une tour quadrangulaire, il rappelle par sa verticalité marquée l’importance du donjon
médiéval, tout en apportant une solution novatrice aux problèmes de circulation.
Le modèle traditionnel de l’escalier en vis hors œuvre, tel qu’on peut le voir encore dans l’aile François
1er à Blois, élevée à partir de 1515, a été rejeté au profit d’un escalier inspiré par les réalisations des
architectes italiens.
Cet escalier droit, rampe sur rampe, dont le mur d’échiffre est largement ajouré par des arcs en
anses de panier, est célèbre pour son décor sculpté au revers des marches.
L’ornementation suit la progression du visiteur vers l’étage noble : aux motifs géométriques et
héraldiques, succède un répertoire décoratif "à l’antique", avec putti, candélabres, oiseaux affrontés,
dauphins, médaillons avec profils d’empereurs et scènes de la vie d’Hercule.
Jeanne de Balsac, par la présence de son portrait sculpté, des armoiries familiales, de ses initiales, s’y
affirme comme l’unique dame et maîtresse des lieux.
Exemple unique en son genre, l’escalier droit de Montal rappelle cependant des modèles prestigieux
comme l’escalier d’honneur d’Azay-le-Rideau, daté de 1518.
On trouve au château de Cieurac (Lot), construit vers 1515, un escalier en vis dont les contremarches sont sculptées. Ce travail n’a cependant rien de comparable à la qualité d’exécution et à la
richesse iconographique observées à Montal.
Des bustes sculptés en l'honneur des défunts
L’ordonnancement des façades ouvrant sur la cour intérieure est bien dans le goût de la première
Renaissance française, avec un quadrillage en damier.
Moulures et frises horizontales séparent les niveaux, rythmés par des pilastres sculptés dont la
verticalité est accentuées par les hautes lucarnes ouvragées.
C’est toutefois le programme ornemental sculpté sur ces façades qui fait de Montal un château
véritablement exceptionnel.
Le répertoire décoratif de la première frise, formant un large bandeau sculpté en léger relief, mêle
figures mythologiques (Hercule et Antée, Mars) ou symboliques (Victoire, Renommée, Force),
angelots, personnages et animaux fabuleux (sirènes, licorne, centaure) aux initiales de Jeanne et de
ses deux fils accompagnées de blasons et de devises en français ou en latin.
La frise située sous la toiture montre, en alternance avec le I de Jeanne, une suite de coquilles, motif
répétitif très fréquent dans le décor des châteaux de la première moitié du 16e siècle.
Au niveau de l’étage noble, le décor prend une toute autre importance, avec la série de bustes en
haut-relief, placés en médaillons encadrés de pilastres sculptés, dans les panneaux aveugles entre
les fenêtres.
Chaque buste est surmonté d’une architecture avec fronton triangulaire accosté de personnages
composites ou de volutes, d’animaux fantastiques. Une inscription gravée autour de chaque buste
permettait à l’origine une identification rapide, mais certaines sont aujourd’hui peu lisibles.
Les sept portraits sont ceux de Jeanne et de ses proches, tous disparus à l’époque de l’exécution des
bustes, hormis son second fils Dordet, son cousin Dordet de Béduer et bien entendu Jeanne ellemême. Amaury de Montal, son mari, son père Robert de Balsac, sa mère Antoinette de Castelnau, son
fils aîné Robert de Montal, sont donc honorés ici avec les vivants prenant déjà leur place dans ce qui
est bien une sorte de monument funéraire.
Ce procédé ne peut être isolé de l’ensemble de la conception décorative, où le culte de la mort et du
souvenir est porté à un haut niveau littéraire et humaniste.
La qualité de la sculpture, inégale sur les façades appartenant chacune à une campagne de
construction différente, est très homogène dans cet ensemble de portraits.
On peut y voir le travail d’un atelier actif dans le sud-ouest de la France dans le premier tiers du
16e siècle, sous l’autorité du "maître de Biron".
Pascale Thibault, MONUM, 2004.
Données issues de l'inventaire
Datation : 15e siècle ; 1ère moitié 16e siècle
Style artistique : Renaissance
Protection juridique : classé au titre immeuble
Propriétaire : propriété de l'Etat
Classification patrimoniale : Architecture des châteaux et sites fortifiés
Mots clés : château ; sculpture
Album d'images
Le château et la chapelle
vus depuis le sud-ouest,
vers 1900.
Elévations sur la cour, vers
1900.
Décor du grand escalier,
vers 1900.
Grand escalier, vers 1900.
Vue aérienne depuis le sudest.
Décor du grand escalier,
vers 1900.
Le château de Montal
Grand escalier, vers
1900.
Le jardin vu depuis le
château.
Chevet de la chapelle vu
depuis l'est.
Logis, aile ouest,
élévation ouest.
Grand escalier.
Logis, aile nord,
élévation sur cour,
détail : fenêtre du
rez-de-chaussée.
Logis, aile ouest,
élévation sur cour,
détail.
Logis, élévations
sur cour et tour
d'escalier à l'angle
nord(ouest.
Palier au sommet du grand
escalier.
Grand escalier, détail.
Vitrail en remploi.
Cheminée du premier étage.
Grand escalier.
Accès au site
Comment s'y rendre ? :
Depuis Saint-Céré, prendre la D673 en direction de Gramat et continuer sur la gauche vers Saint-Jean-Lespinasse. Bifurquer
de suite à gauche sur le chemin communal indiquant le château de Montal.
Cartographie
Zone : Lambert 2 étendu
X : 562979
Y : 1984521
Adresse administrative
Commune : Saint-Jean-Lespinasse
Canton : Saint-Céré
Pays : Pays de la Vallée de la Dordogne Lotoise
Lieu-dit : Rèvery (près de)
Entité géographique : Vallée de la Bave
Visites
Le château de Montal est ouvert à la visite des Rameaux à Toussaint (voir conditions ci-dessous).
Bibliographie (ouvrages généraux et publications spécialisées)
Tollon Bruno, "Le château de Montal", in Lot, Guide Gallimard, collection "Les encyclopédies du voyage", Paris, 2003, page
156.
Chantraine Colette, Jardin du Ségala. Saint-Céré - Bretenoux, Martel, Editions du Laquet, Collection "Guides Tourisme et
Patrimoine", 1994, 100 pages :
notice sur la commune de Saint-Jean-Lespinasse, pages 82 à 84.
Benejeam-Lère Mireille, Sire Marie-Anne,le château de Montal, Toulouse, ADDOC, 1992.
Juillet Jacques, Seigneurs et dames de Montal en Quercy, Turenne-Limoges, 1988.
Paul Roudié, "Le maître de Biron et les bustes de Montal", in Bulletin Monumental, tome 139, 1981, pages 233 à 238.
Sources et documents d'archives
Cueille Sophie, Le château de Montal, mémoire de maîtrise, Université de Paris IV-Sorbonne, 1986.
© MONUM, Centre des Monuments Nationaux, 2004 / Inventaire Général, 2006 / Conseil Général du Lot, 2006 21/02/2008
une réalisation www.geosignal.fr