30 aubais - J`aime les Musées et les Vieilles Pierres

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30 aubais - J`aime les Musées et les Vieilles Pierres
AUBAIS (Gard) : château
classement au titre des Monuments Historiques le 08/03/2010
classement du pavillon central abritant l'escalier monumental du château inscrit le 18/05/ 1998
Le château d'Aubais peut être tenu pour le chef-d’œuvre de l'architecture classique méridionale.
C'est en effet une œuvre majeure par le caractère spectaculaire des thèmes traités, le gigantisme
des proportions et, enfin, l'éminente personnalité des constructeurs.
Le château médiéval des Baschy se situait sur la bordure ouest de l'escarpement dont le village
d'Aubais occupe le plateau culminant ; cette demeure fit l'objet d'une première rénovation vers la
fin du 16e siècle et au début du 17e avec une tour ronde, toujours en place, à l’ouest.
L'extension du baron Louis Baschy, entre 1680 et 1685, consista à développer le château vers le
sud, avec une façade regardant la campagne et une tournée vers le village, avec une grande cour
d'honneur. Son parti fut de substituer au vieux château irrégulier et hétérogène, une demeure à la
moderne rigoureusement symétrique. Elle forme un long bloc centré sur le pavillon monumental
d'un grand escalier. Le pavillon central est un espace stupéfiant à la fois par l'ampleur de son
échelle et par la virtuosité stéréotomique de l'escalier qu'il contient. Cet espace est couvert en
coupole en pendentifs de Valence, avec grand oculus zénithal de 6 mètres de diamètre. Un
lanternon couvrait primitivement l'oculus.
L'escalier qui se déploie dans cette cage rachète le dénivelé d'un étage entre le côté cour et le
côté campagne. L'escalier distribue ensuite l'étage noble de la demeure. Avec ses volées
alternativement convergentes et divergentes, il crée une impression d'euphorie et de vertige. La
recherche du spectaculaire va même ici jusqu'à l'absurde : deux volées de l'escalier construites
pour parfaire l'effet de symétrie, ne mènent nulle part !
Les volées sont portées sur voûtes en demi-berceau avec trompes coniques, dans les retours. Le
palier, repose sur une voûte plate de 11 mètres sur 6, véritable record pour un tel ouvrage à cette
époque. Des clefs pendantes - structurellement inutiles - exacerbent l`effet de folle audace de cet
ouvrage. Cet esprit gothique d'arrière-saison est encore accentué, à Aubais, par la présence de
nervures garnissant les berceaux rampants de l'escalier et de la coupole. Ces nervures sont
strictement décoratives et n'ont, elles non plus, aucun rôle structurel. D'où le caractère
déconcertant de ce grand escalier qui veut évoquer les créations parisiennes d'avant-garde, et tout
à la fois se pare d'enjolivures décoratives d'un temps révolu.
Apres l'incendie d’avril 1792 et le morcellement du 19e., le grand escalier a perdu ses gardecorps, ses limons, les bustes qui devaient garnir les niches de la cage etc. L'architecte de cet
étonnant morceau est un ingénieur du roi, Ponce Alexis de la Feuille, contrôleur des travaux du
canal des Deux-Mers, qui a réalisé de nombreux édifices dans la région.
Le maçon était un nîmois. Gabriel Dardailhon est un praticien remarquable mais sa culture n'a
rien d'académique : les gothicismes de l'escalier sont probablement son fait.
Ce château marque un moment, encore non-normatif et original, avant l'assimilation complète
aux standards de l'art central. Et, il se trouve que l'échelle exceptionnelle du château confère,
même aux naïvetés et aux solécismes, le cachet d'autorité du grand style.
D’après Bernard Sournia et Jean-Louis Vayssettes. Inventaire Général, DRAC Languedoc Roussillon
Photos © commune d’Aubais

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