Interprété par Arnold Schwarzenegger Les années 80

Transcription

Interprété par Arnold Schwarzenegger Les années 80
100 icônes badass du cinéma
Les années 80
• David Bianic •
MAJOR
ALAN “DUTCH”
SCHAEFER
Interprété par Arnold Schwarzenegger
’
L
• Le film : Predator (1987). Réalisé par John McTiernan •
année : 1987. J’ai 13 ans. Ma
grande taille m’avait jusqu’ici permis de duper la dame au guichet
et ainsi de braver l’interdiction au
moins de 13 ans. Mais cette fois,
je suis un “ grand ”, je rentre la
tête haute. De toutes façons,
j’avais déjà vu Commando deux
ans plus tôt, ça ne me faisait plus rien. Mieux,
j’aimais ça, cette débauche de violence des actioners
produits par Golan-Globus de la Cannon Group
ou Joel Silver. Peut-être s’agissait-il de compenser
l’adolescence qui poussait sur mon visage et dans
ma culotte, mais toujours est-il que Schwarzie me
confortait dans l’idée d’un idéal masculin (avec
Michael Dudikoff aussi, dans la série American
Ninja, mais pour d’autres raisons). Mais rien ne
m’avait préparé à Predator. Jusqu’ici le cinéma du
mercredi (merci maman pour ton abnégation) était
soit un film de guerre, soit un film de science-fiction, mais pas les deux.
Tous les rendez-vous du cinéma badass sont
présents dès les premières minutes du film : les
mercenaires musculeux qui n’ouvrent le bec que
pour jurer ou cracher leur chique, venus sauver un
officiel. Ça me rappelait cette VHS que j’avais vu
en douce chez des amis un soir… comment déjà ?
Ah oui, New York 1997. À 13 ans, le Major
“ Dutch ” et sa bande sont mes douze salopards,
mes indestructibles : “ C’est coton, j’y enverrai pas
un chien vérolé ”. Putain que ça sonne juste. À vrai
dire, je préfère encore cette VF un peu empruntée
à ce jour. La madeleine de Proust sûrement… Sauf
que rapidement, là dans la forêt, se cache quelque
chose qui fait trembler même ces durs à cuire, et
moi par la même occasion. Comme le requin de
Jaws qui occupe l’espace grâce à la musique de
John Williams, sans que jamais la bête n’apparaisse, c’est ici l’écho forestier créé par le compositeur Alan Silvestri qui me glace le sang, avant
que le bruit de mandibule du Yautja/Predator ne
vienne en rajouter une couche (de frisson).
Le tour de force de McTiernan sera pourtant
de déconstruire totalement cette apologie militaire,
montrant peu à peu le caractère vain de l’arsenal
des mercenaires et de leur logique de gros américains impérialistes face à cette menace non-humaine. L’absurdité de la guerre, tout ça, défile dans
ma caboche, et l’engagement de Dutch m’ouvre
sans le savoir au concept d’existentialisme. D’éminemment badass, Dutch devient une proie fragile,
violentée par cette bestiole qui n’a pas “ une gueule
de porte-bonheur ”.
Complètement vampirisé à ce stade par le film,
son dernier tiers me propulse dans une autre dimension et me permet de comprendre cette leçon
de cinéma : “ less is more ”. Le cache-cache puis
face-à-face entre Dutch et le Predator se passe alors
de mots ou presque. De décor, la forêt passe au
statut de rôle principal, d’arbitre de l’affrontement
(et pourtant ces séquences sont tournées en partie
en studio).
La fatalité du combat ne fait plus aucun doute,
il n’y a plus d’enjeu : que Schwarzie ou le Yautja
l’emporte n’est plus important à mes yeux, la
beauté est dans la mise en scène, dans ce moment
de vie. Je voudrais que le temps demeure suspendu.
McTiernan venait de tuer (pour un moment) le
mythe du héros badass chez moi. Cette posture
de coolitude dans la violence venait de s’envoler,
Schwarzie était redevenu mortel et allait laisser
place à un nouveau personnage badass, plus
faillible : John McClane.
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