Interprété par Bernard Giraudeau Les années 80

Transcription

Interprété par Bernard Giraudeau Les années 80
100 icônes badass du cinéma
Les années 80
• David Bianic •
«CHET»
Interprété par Bernard Giraudeau
S
• Le film : Rue barbare (1984). Réalisé par Gilles Béhat •
i Jean-Paul Belmondo commençait à se rouiller au début des
années 1980, usé par les cascades
et préférant désormais s’auto-parodier à renforts de “ youplabadaboum ”, il avait assuré sa relève. Leurs noms seraient Gérard
Lanvin et Bernard Giraudeau et,
à l’occasion, ils formeraient un tandem de buddy
badass à l’américaine dans Les spécialistes de
Patrice Leconte. Giraudeau, ce n’est pas un badass
de composition : militaire dans la Marine nationale
depuis ses 16 ans, il servira sur la Jeanne d’Arc,
avant d’arracher ses galons pour bourlinguer sur
les mers en homme libre. Mais sa palette de jeu ne
le confinera pas aux rôles de gros bras et, de
La boum à Et la Tendresse ? Bordel !, il joue le
caméléon.
En 1983, sort La lune dans le caniveau de JeanJacques Beineix, une adaptation de The Moon in
the Gutter, un roman noir de l’Américain David
Goodis. Si le film se veut fidèle à l’œuvre littéraire,
Beineix y met sa patte visuelle, trop belle pour
traduire la dureté du récit. Étonnamment, au même
moment se produit une autre adaptation du roman
de Goodis en France, réalisée par un quasi-inconnu, Gilles Béhat. Rue barbare. Rien que le titre
sonne autrement plus badass que le film de Beineix,
et il ne ment pas sur la marchandise. Violent,
jusqu’au-boutiste, nihiliste, Rue barbare emprunte
à Mad Max et aux Guerriers du Bronx sortis
peu avant, mais ici dans une banlieue française
fantasmée.
Giraudeau y joue Daniel Chetman, dit “ Chet ”,
un ancien membre d’une bande de barbares des
rues, désormais rangé des bourre-pifs. Jusqu’au
jour où il s’interpose lors d’un viol, et ses vieux
amis de le rappeler à son passé. Fuir ou se battre,
jusqu’à la mort, Chet n’a que peu d’options. Toute
la différence avec les films de baston, du moins
français, réside dans la déshumanisation de l’univers de Rue barbare. Cette noirceur fait que les
coups portés frappent encore plus fort dans l’esprit
du spectateur, le tout souligné par la bande-son
oppressante de Bernard Lavilliers.
Face à Giraudeau, le film aligne un beau panel
de gueules cassées, de Bernard-Pierre Donnadieu
à Jean-Pierre Kalfon, Jean-Claude Dreyfus et
même une apparition furtive du jeune Jean-Claude
Van Damme. Le personnage de Chet porte son
histoire sur son visage et dans sa “ panoplie ” : une
moustache de gitan, des tatouages de docker, un
bracelet de force et un poing américain iconique
de la rudesse du film. Totalement crédible, Giraudeau livre une prestation physique incroyable. Très
crus, les fist fights ne nous épargnent rien et s’achèvent dans une battle royale sanglante avec le vilain
Hagen (Donnadieu). Bestial, ce combat désignera
le nouveau mâle alpha de la rue, car seule la loi du
badass suprême vaut dans les rues barbares. ¶
103