J`ai été invitée avec deux autres artistes, Sam Samore et Richard

Transcription

J`ai été invitée avec deux autres artistes, Sam Samore et Richard
Sugar Hiccup
J’ai été invitée avec deux autres artistes, Sam Samore et Richard Wright qui se sont partagés les murs, tandis que l’on me consacrait la surface du sol. A l’origine, la salle d’exposition était utilisée comme local d’entretien pour les tramways de Glasgow. L’espace baigné de lumière zénithale est entouré de quatre murs très hauts ; deux rangées de colonnes en fonte, et au sol six rails en acier affleurant à peine le ciment, partagent la largeur de la salle en trois travées. Dans le cas d’un espace clos, les parois des murs participent matériellement à l’élaboration de mes sculptures. Les sculptures sont reliées méthodiquement, des murs vers le centre de la salle (voir Deux bords ou Face-­à-­main); je ressent la sculpture, physiquement, comme une ceinture autour de moi ; les murs séparant « le monde extérieur » de mon travail à l’intérieur de l’espace. À partir de ma perception de l’espace, je défini un programme qui règle mes envies et ma manière de travailler. À Tramway, je ne pouvais utiliser les murs de la salle d’exposition. Je me suis demandée comment procéder, sans dispositif sur les murs pour créer de nouvelles pièces en les reliant au centre de cet immense espace. Ma première résolution a été de construire des sculptures qui, dans leur composition, enfermaient une portion du sol. Nous étions en hivers lorsque je fis ma seconde visite à Glasgow pour revoir la salle d’exposition ; la neige recouvrait les rues de blanc, neutralisant les choses et les couleurs. C’est en rentrant à Paris, alors que j’étais déjà en train de construire Cale, que j’ai eu l’idée de couvrir la surface du sol de tramway avec du sel fin très blanc. Cale entoure un espace vide, j’aimais que l’on puisse le regarder sans qu’il soit physiquement possible de l’atteindre. J’ai tamisé le sol de mon atelier avec du sel (à l’intérieur et à l’extérieur du périmètre de la sculpture). En marchant autour d’elle, je laissais les traces de mes pas, tandis qu’au centre la surface du sel restait intacte. La neige fraichement tombée procure la sensation de paysage miraculeusement vierge, cette étrange impression est aussitôt détruite par l’inscription des premières traces de pas. Les quatre sculptures Cale, Contrôle 3, Delta et Des idées délimitent un espace clos dans leurs contours. Le sol de Tramway uniformément blanc s’est couvert de traces de pas pendant le vernissage. C’est le moment que j’attendais pour que mon travail soit enfin terminé. En visitant l’exposition, les gens sont allés d’une œuvre à l’autre, le trajet qu’ils ont emprunté est resté imprimé en mémoire sur le sol durant les trois mois d’ouverture de l’exposition. Le dessin des pas sur la blancheur du sel relie les sculptures en des tracés particuliers pour chaque personne. En restant intact, vierge de toute marque sur le sel, les espaces enclos des sculptures insistent sur le caractère privé de mon travail par contraste avec l’espace public autour des œuvres, ouvert à toutes les libertés.