PULSION - Louise Grenier

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PULSION - Louise Grenier
PULSION : DE FREUD À LACAN
UN MONDE DE DÉSIR
LA RÉALITÉ SEXUELLE DE L'INCONSCIENT
CAP 5
31 mars 03
PLAN
Introduction
1. Freud :Notion de conflit
les dualités pulsionnelles
2. Klein
la pulsion de mort et les défenses contre l'angoisse
3. Freud vs Lacan
4. Quelles pulsions ?
5. Laplanche : l'objet-source et le masochisme primaire
6. Portier de nuit :commentaire de Jany Boulanger
Discussion pour conclure
CAP 5 : 28 AVRIL 03 19 h - 21 H
Suggestions : choisir une des trois
 Les trois registres lacaniens : du Réel, de l'Imaginaire, du Symbolique
 Le primat du signifiant vs le primat du phallus
 La notion d'objet en psychanalyse vs le fantasme
Introduction
(L'expérience freudienne) commence par poser un monde de désir.
(Lacan, 1978, 262)1
- …le désir de l'homme est le désir de l'Autre. (Lacan, 1966, 628) 2
D'une façon générale, écrit Freud, ce sont les mêmes organes et les même systèmes
d'organes qui sont à disposition des pulsion sexuelles et des pulsions du Moi (notion
d'étayage). Ainsi, la bouche sert au baiser aussi bien qu'à manger et à communiquer
par la parole, les yeux ne servent pas qu'à la perception du monde extérieur et à notre
orientation dans celui-ci, mais ils servent aussi à percevoir les traits et caractéristiques
des objets que nous élevons au rang d'objets du choix amoureux, ce qui constituent «
leurs attraits »3 et les organes génitaux sont destinés à la reproduction. Ainsi, la
pulsion partielle qui se sert du regard, la scoptophillie sexuelle, peut attirer sur elle
une contre-offensive du Moi (défense) qui peut aller jusqu'à provoquer une cécité
hystérique ou d'origine psychogène. Le sujet jette le bébé avec l'eau du bain : le « je
ne veux pas voir cela » devient un ne plus rien voir du tout ». L'œil est alors traité
comme un organe sexuel (ce que Freud appelle la complaisance somatique des
organes ) et il est puni pour ses prétentions à la satisfaction.
Qu'est-ce qu'une pulsion ? Rappel
1
J. Lacan, Le séminaire livre II. Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse,
Seuil, 1978.
2
J. Lacan, « La direction de la cure et les principes de son pouvoir», 1958.
3
Ibd. 171.
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Concept-limite entre le psychique et le somatique, c'est la représentation dans le
psychisme d'une excitation issue de l'intérieur du corps. Le terme « pulsion », en
allemand Trieb qui veut dire poussée, force motrice, n'est pas à confondre avec l'instinct.
La pulsion ne correspond pas à un schème de conduites héréditaire et pré-formé comme
pour l'instinct, c'est une tendance psychique qui a sa source dans le corps, un organe plus
précisément (zone érogène comme la bouche, l'anus, l'œil,…) et dont le but est la
satisfaction ou suppression d'une excitation au moyen d'un objet. C'est grâce au «
représentant-représentation » (Vorstellungrepräsentaz) que la pulsion se délègue dans le
psychisme. Donc, la représentation permet la médiation de la pulsion dans la vie
psychique. Celle-ci est en outre dotée d'un facteur non représentatif qui est l'affect.
Comme tendance, la pulsion aspire à l'idéal impossible d'une satisfaction sexuelle absolue
(inceste), ce qui est impossible. Pour le fétichiste, le pied d'une femme peut représenter
l'objet sexuel absolu, nécessaire à l'atteinte de l'orgasme. Dans ce cas, le pied est le
substitut conscient d'un objet inconscient, à savoir le phallus dont il dénie le manque chez
la femme. Le fétichiste prend plaisir à se faire le phallus de la mère ( la réalisation
imaginaire d'un fantasme préœdipien ). L'enfant qui suce son pouce prend plaisir non au
pouce lui-même mais à un objet fantasmé qui lui est sous-jacent, le sein maternel par
exemple.
N'oublions pas que ce sont les enfants et les pervers qui ont montré à Freud la vaste
étendue de l'idée de sexualité. On verra ça avec le commentaire de Jany sur Portier de
nuit ( 1974).
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Notion de conflit
les dualités pulsionnelles
Point de vue psychodynamique : le psychisme est le champ d'une lutte entre des forces
qui s'opposent. Parmi celles-ci, il y a les forces pulsionnelles ou dualités découvertes par
Freud dans cet ordre :
1
1905 (Trois essais sur la théorie de la sexualité et aussi en 1910) : avec l'étude
des névroses : conflits entre pulsions sexuelles et pulsion d'autoconservation
(MOI) : Notion d'étayage ;
2
1914 (Pour introduire le narcissisme) : libido du Moi vs libido d'objet. Provient
de l'étude des psychoses. Pour distinguer deux modes d'investissement
érotique soit la personne propre (Moi), soit un objet extérieur (objet) ;
Pulsions du Moi (intérêt)
Pulsions sexuelles (Libido)
Libido du Moi
Libido d'Objet
Ici, les pulsions sexuelles sont subdivisées en fonction de leur objet d'investissement et
non de leur source.
Donc, en 1914, Freud met en avant une nouvelle notion, celle du narcissisme l'amour que le sujet porte à un objet très particulier : lui-même. Ce nouveau concept lui
fournit une clé supplémentaire pour aborder une partie du champ des psychoses - des
psychonévroses narcissiques, comme il les appelle à l'époque - mais l'oblige aussi à
reconsidérer cette opposition qu'il tenait pour fondamentale entre pulsions sexuelles et
pulsions du moi. En effet, à partir du moment où il admet qu'il existe un véritable rapport
d'amour entre le sujet et son propre moi, il lui faut aussi admettre qu'intervient une
libidinalisation de l'ensemble des fonctions du moi - que celles-ci ne répondent pas
simplement à la logique de l'autoconservation mais sont également érogénéisées -, que la
préservation du moi ne rentre pas uniquement dans le registre du besoin mais aussi, et
finalement surtout, dans celui du désir. Dès lors, donc, que le moi est aussi objet sexuel, il
en découle que la distinction entre pulsions sexuelles et pulsions du moi n'a plus lieu
d'être. Freud la remplace alors par celle de libido du moi et libido d'objet. Très
provisoirement car il lui apparaît assez vite que cette deuxième opposition n'est pas plus
tenable : c'est la théorie du narcissisme elle-même qui la dément puisqu'elle montre
précisément que le moi est un véritable objet pour le sujet. Moi et objet son donc, en fait, à
mettre sur le même plan, en tout cas pour ce qui concerne les pulsions.
Une autre étape, presque simultanée, l'amène à parfaitement préciser les
caractéristiques des pulsions. Elle intervient avec la "Métapsychologie" 1917, recueil initial
de douze articles qui ont pour objet de livrer les fondements de la psychanalyse. L'article
princeps - l'un des cinq à ne pas avoir été détruit par Freud lui-même - est intitulé "les
Pulsions et leurs destins". la première partie, après un très bel avertissement
épistémologique, définit la nature de la pulsion : une force constante, d'origine somatique,
qui représente "comme une excitation" pour le psychique. Sont énoncées ensuite les
caractéristiques de la pulsion : source, poussée, objet et but. La source, on vient de le
répéter, est corporelle; elle procède de l'excitation d'un organe, qui peut être n'importe
lequel. La poussée est l'expression de l'énergie pulsionnelle elle-même. le but est la
satisfaction de la pulsion, autrement dit la possibilité pour l'organisme d'accéder à une
décharge pulsionnelle, c'est-à-dire de ramener la tension à son point le plus bas et
d'obtenir ainsi l'extinction (temporaire) de la pulsion. Quant à l'objet, c'est n'importe quoi
qui permet la satisfaction pulsionnelle - qui permet au but d'être atteint. De tout cela, il
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ressort que les objets pulsionnels sont innombrables mais aussi, et surtout, que le but de
la pulsion ne peut être atteint que de manière provisoire, que la satisfaction n'est jamais
complète puisque la tension renaît très vite et que, en fin de compte, l'objet est toujours en
partie inadéquat et sa fonction jamais définitivement remplie.
Le caractère multiple et opposé les unes aux autres des pulsions est aussi réaffirmé.
mais Freud est alors beaucoup moins net sur la nature de cette opposition, qu'il juge
d'ailleurs peu important de préciser. La distinction moi/objet qu'il prônait lui semble déjà
beaucoup moins pertinente et, s'il se réfère encore à celle de pulsions du moi/pulsions
sexuelles, c'est davantage pour montrer que les deux groupes ont finalement chacun pour
rôle de garantir la survie de quelque chose et que c'est cette chose qui les spécifie : survie
de l'individu pour le premier, survie de l'espèce pour le second. mais dès lors la pulsion
sexuelle, qui témoigne d'une continuité du germen au-delà de l'individu, a une affinité
essentielle avec la mort.
3
1920 ( Au-delà du principe du plaisir ) : troisième dualité
Pulsions de vie (Éros)
Pulsions de mort (Thanatos)
p. sexuelles vs p. du Moi
tendent à rétablir état
tendent vers des unités toujours
anorganique (Nirvana)
plus grandes
N.B. Dans la mesure où les pulsions de vie sont assimilées aux pulsions sexuelles, Freud
cherche à faire coïncider pulsions du moi et pulsions de mort, il voit dans les pulsions
d'auto-conservation «… des pulsions partielles destinées à assurer à l'organisme sa
propre voie vers la mort. » (cité par Laplanche et Pontalis, Vocabulaire de la
psychanalyse, PUF, 1976, 383) Elles ne se distinguent de la tendance immédiate au
retour à l'inorganique que dans la mesure où : «… l'organisme en veut mourir qu'à sa
manière ;les gardiens de la vie ont eux-mêmes été à l'origine des suppôts de la mort ».
(383)
Pourquoi les pulsions de mort ?
A
Phénomènes de répétition qui ne se saillent pas réduire à une recherche de
satisfaction libidinale où à une simple tentative de maîtriser les expériences désagréables
;Freud y voit la marque du «démoniaque», d'une force irrépressible, indépendante du
principe du plaisir et susceptible de s'opposer à lui. (Laplanche, 372)
B
Réaction thérapeutique négative : refus de guérir
C
jeu de la bobine observé par Freud :
N.B. : Pulsion de mort = pulsion par excellence, caractère régressif. Elle est invisible, on
ne la détecte qu'à travers ses alliages avec les pulsions sexuelles (agressivité, haine,
sadisme, masochisme). D'emblée, la haine est apparue à Freud comme impossible à
déduire des pulsions sexuelles. Dans Pulsions et destins des pulsions (1915), le sadisme
et la haine sont mis en relation avec les pulsions du moi (lutte du Moi pour sa conservation
et son affirmation). Freud voit dans la haine une relation aux objets plus ancienne que
l'amour.
Le but des pulsions de vie est la liaison libidinale, c'est-à-dire le nouage des liens via
la libido entre notre psychisme, les êtres et les choses. Les pulsions de mort visent la
déliaison, le détachement de la libido des objets, et le retour inéluctable de l'être vivant à
la tension zéro, la mort. Sa propre mort en fait. Toute pulsion cherche à rétablir un état
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antérieur dans le temps,. La pulsion de vie cherche à augmenter la tension, la pulsion de
mort aspire au calme et au retour à zéro, toutes deux cherches à reproduire ou à répéter
une situation passée, que celle-ci ait été agréable ou désagréable. Notre vie témoigne de
cette tendance à répéter nos échecs et nos souffrances avec une force puissante, parfois
plus puissante que celle qui nous conduit à rechercher des événements s agréables.
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Klein la pulsion de mort et l'angoisse
Toute la théorie de Melanie Klein est construite sur un dualisme systématique où
s'opposent vie-mort, amour-haine, gratitude-envie, bon-mauvais, etc. De plus, les
premiers termes de chaque couple sont regroupés et il en est de même pour les
deuxièmes termes. Ce lien systématique entre l'amour et la pulsion de vie et entre la haine
et la pulsion de mort, Freud lui-même s'était montré réticent à l'établir.
La théorie des pulsions a subi chez Melanie Klein un glissement de sens que nous
allons tenter de retracer. Paula Heimann, exprimant le point de vue kleinien, écrit : «
L'expression psychologique de la pulsion de vie se trouve dans l'amour, dans les
tendances constructives, dans le comportement de coopération, toutes choses qui
surgissent essentiellement du désir d'union; l'expression poétique "Éros, la force qui lie",
est souvent citée dans la littérature psychanalytique. La pulsion de mort s'exprime dans la
haine, la destructivité et les tendances négatives, en un mot dans tous les modes de
comportement qui s'opposent à l'établissement ou au maintien des liens sur le plan intra
psychique, aussi bien que sur le plan social.
Le glissement que nous pouvons apercevoir dans la théorie de Melanie Klein nous amène
d'une conception neurophysiologique de la pulsion à une théorie basée sur une relation de
satisfaction-frustration. Mais, plus encore, c'est une dialectique de l'amour et de la haine
que sous-tend œuvre de Melanie Klein. Le but de la vie, c'est la victoire de l'amour sur la
haine. L'amour chez Klein est fortement en relation avec la satisfaction apportée par
l'objet et la capacité du nourrisson d'éprouver de la gratitude envers son objet "bon". En
ce sens, nous comprenons, à l'exemple de Petot, l'affirmation selon laquelle l'enfant a une
pré-conception du bon sein, donnée que Melanie Klein dit biologiquement innée, comme
une indication que le nourrisson est de façon innée orienté vers le sein, et non plus
seulement vers la satisfaction orale, comme Freud le pensait. Retournons à ses textes.
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3 Freud vs Lacan
Lacan, en particulier dans le livre XI du séminaire "les Quatre Concepts
fondamentaux de la psychanalyse" (1973), s'emploie à radicaliser ces conceptions. Le fait
que les pulsions ne se présentent jamais que comme pulsions partielles lui paraît
déterminant en ce qu'il introduit le lien nécessaire entre sexe et mort et en ce qu'il fonde
une dynamique dont le sujet est le produit. Ce sujet est aux prises avec deux logiques
volontiers antagonistes : celle qui le fait différent de tout autre vivant, et donc avant tout
préoccupé de sa propre survie, et celle qui le veut un parmi les autres et donc au service,
même s'il ne s'en rend pas compte, de son espèce. Par ailleurs, en revenant sur les
caractéristiques des pulsions, Lacan va insister sur le fait que le propre de l'objet
pulsionnel est de n'être jamais à la hauteur de l'attente. Ce caractère de l'objet a toutes
sortes de conséquences : d'abord, de rendre le but pulsionnel impossible à réaliser
directement, et cela pour des motifs non pas contingents mais structuraux ; ensuite, de
situer la raison de la nature partielle de la pulsion dans cet inachèvement ; puis, aussi, de
pouvoir décrire le trajet de la pulsion : en ratant son objet, celle-ci décrit en quelque sort
une boucle autour de ce dernier, qui la ramène à son point d'origine et la dispose à
réactiver sa source, c'est-à-dire la prépare à entamer alors un nouveau trajet quasi
identique au premier ; enfin, de permettre de rajouter deux autres objets pulsionnels à la
liste établie par Freud : "la voix et le regard".
Comment le désir s'articule avec le sexuel inconscient ?
La pulsion introduit dans le simple besoin organique un coefficient – une
qualification- érotique. (Fagès, 1997, 31) 4 Elle n'intervient dans la vie psychique
que par l'intermédiaire d'une représentation inconsciente.
Lacan fait une
corrélation entre le besoin et le manque. Pour lui, la pulsion -essentiellement
incestueuse- naît du manque radical résultant de la sortie du sein maternel.
Incomplétude et impuissance foncières. Pour Lacan la pulsion ne se décharge pas,
elle coule ou elle bat (Écrits, 847). Lacan reprend le mythe de l'androgyne –être
humain primordial antérieur à la différenciation des sexes- décrit par Aristophane
dans le Banquet de Platon. De même que l'androgyne se divise en deux être
sexués, de même le nouveau-né, dès la section du cordon ombilical est arraché au
placenta et se trouve séparé de la mère. Comme un œuf cassé qui se répand en «
hommelette». La pulsion dans ce contexte est le mouvement envahissant de
l'enfant, un écoulement de l'être qui traduit le manque du complément maternel.
Mais cette poussée rencontre des limites de son corps. Pour s'épancher la pulsion
est alors canalisée vers les zones érogènes qui sont comme des soupapes ouvertes
vers l'extérieur et … par l'extérieur.
Le désir fait suite à ce manque essentiel dont je viens de parler, soit d'être coupé de
la mère. L'enfant tend à colmater cette faille-castration- en s'identifiant au désir de la
mère (désir d'être le phallus), le complément de son manque.
Précisons ceci avec Joël Dor, : «il n'existe pas à proprement parler de satisfaction du désir
dans la réalité. » (182) La dimension du désir n'a d'autre réalité que psychique. Le désir
mobilise le sujet vers l'objet pulsionnel. C'est donc la pulsion qui trouve (ou non) un objet
4
J.B.Fagès, 1971, Comprendre Jacques Lacan, 1997, Dunaud, 31.
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de satisfaction dans la réalité et elle le peut précisément en fonction du désir. Donc, pas
d'incarnation réelle de l'objet du désir. Avec Lacan, la dimension du désir apparaît
intrinsèquement lié à un manque qui ne peut être comblé par aucun objet réel. L'objet
pulsionnel ne peut donc être que l'objet métonymique de l'objet du désir lui-même. Un
substitut.
Pour Freud, vous l'avez vu, la pulsion, est caractérisée par une « poussée constante »
(Freud) et par une quête d'objets et de satisfaction. Pour Lacan la pulsion n'est pas la
poussée (avec tendance à la décharge venant de l'intérieur) mais plutôt, écoulement,
battement. Il ne s'agit pas ici de la pression d'un besoin comme la faim ou la soif. 5
La pulsion orale vise le plaisir de bouche, pas le lait. Par ailleurs, la pulsion ne serait
pas nécessairement satisfaite par son objet : c'est ce que démontrer la sublimation (
inhibée quant au but et détourné vers d'autres objets) Par ailleurs, la clinique
démontre que les patients ne se satisfont pas ce qu'ils sont, mais à travers des
symptômes dont ils se plaignent. On peut dire qu'ils satisfont à quelque chose qui va à
l'encontre de ce dont ils pourraient se satisfaire. Pourquoi ? À cause de la différence
radicale entre le registre du besoin et celui de la pulsion. Le seul objet capable de le
satisfaire serait l'objet du désir (objet a) lequel inscrit un creux que n'importe quel
objet pourra occuper. Le but de la pulsion n'est donc rien d'autre que le retour en
circuit de la pulsion sur sa source ce qui permet de saisir en quoi une pulsion peut être
satisfaite sans atteindre son but. Elle fait le tour de l'objet et revient à sa source : ex.
: le voyeuriste, l'objet est le regard, non le corps de l'autre. « Le regard est cet objet
perdu, et soudain retrouvé, dans la conflagration de la honte, par l'introduction de
l'autre.» (Lacan, 166). Autrement dit, dans la trajectoire pulsionnelle, c'est le désir qui
se met en scène et qui vise la jouissance de l'Autre, dans l'autre.
5
Lacan, Le séminaire livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, 1973, Chap.XIII
Démontage de la pulsion, p.147-157.
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4 Quelles pulsions ?
Le rapport à l'Autre fait surgir non la polarité sexuée masculin-féminin, mais le rapport
du sujet vivant à ce qu'il perd de devoir passer, pour sa reproduction par le cycle
sexuel ( parenté de toute pulsion avec la mort). Les deux faces de la pulsion : le sexe
et la mort.
Pulsions : orale et anale, scopique (voir-être vu), invoquante (entendre –être
entendue), épistémologique (curiosité sexuelle infantile), regard, voix, bouche, anus,
etc.
Avant le stade du miroir, l'infans est plongé dans une expérience chaotique faite de
sensations et de perceptions, un vécu pulsionnel polymorphe que Lacan désigne
comme fantasme du corps morcelé. L'identification primordiale - ou structuration du «
Je » - au cours de laquelle l'enfant conquiert l'image de son propre corps met fin à ce
vécu psychique.
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Laplanche : l'objet-source et le masochisme primaire
Dans un travail célèbre, Jean Laplanche en vient à ces conclusions: il n'existe qu'un
type d'énergie psychique et il la qualifie de sexuelle; cette énergie, lorsque libre ou nonliée, constitue une pulsion dite de mort, dans son désir anarchique d'anéantir toute
tension; lorsque cette énergie est liée, elle constitue ce que nous nommons la pulsion de
vie. Cette thèse de Laplanche nous apparaît utile dans notre compréhension de la théorie
de Melanie Klein. En effet, le lien qu'elle établit entre la pulsion de mort et l'envie (Melanie
Klein, 1957a) va, croyons-nous, dans ce sens. La haine est alors conçue comme une
frustration ressentie par le nourrisson désirant obtenir toutes les satisfactions qu'il
fantasme et que l'objet garde jalousement. Ce que le nourrisson désire alors, c'est ce qu'il
croit que l'objet possède: la jouissance totale et absolue.
Dans ses travaux, Freud a souvent opposé le principe de réalité et le principe de plaisir.
Mais, à partir de 1920, il allait ajouter un élément. Dans "Le problème économique du
masochisme" (1924a), Freud écrit: «Nous obtenons ainsi une courte mais intéressante
série de rapports: le principe de Nirvâna exprime la tendance de la pulsion de mort, le
principe de plaisir représente la revendication de la libido, et la modification de celui-ci, le
principe de réalité, représente l'influence du monde extérieur. » (p. 288)
Selon Laplanche, il n'existe qu'une seule énergie psychique et elle est sexuelle. Il pense
qu'à l'origine, il n'existe qu'une pulsion sexuelle agissant selon le principe de Nirvâna. La
tendance du nourrisson est alors d'annihiler toute excitation selon un principe absolu de
"tout ou rien" ou encore de vie ou de mort. Ne rien ressentir est alors le but ultime de
l'existence, un état de satisfaction absolue. Cet état qui semble dominé par la pulsion de
mort prédomine au début de la vie, mais ne peut qu'être un état passager, quasi mythique,
au cours duquel le nourrisson fait face à une totale non-intégration, un état de nonexistence. Mais l'être humain ne peut se maintenir longtemps dans un tel état et
l'excitation provenant de l'intérieur ou de l'extérieur ne peut tarder à se produire. L'enfant
éprouve alors une sensation de catastrophe que seul l'objet peut soulager. Le sein, vécu
comme un bon objet, forme ainsi le premier noyau du moi, le tout premier éveil à la réalité,
le tout premier lien, la première expression de la tendance du moi à (se) lier. La répétition
de l'expérience de tension suivie de la satisfaction amène l'établissement du principe de
plaisir, où le nourrisson accepte graduellement le plaisir procuré par la satisfaction même
si elle n'est pas aussi totale et immédiate qu'il le désire.
Pour Laplanche (239),la pulsion n'est ni un être mythique, ni une force biologique, ni un
concept-limite. Elle est l'impact sur l'individu et sur le moi de la stimulation constante
exercée de l'intérieur par les représentations – choses refoulées- qu'on peut désigner
comem objets-sources de la pulsion.
Dualisme pulsionnel
= de mort : l'objet est réduit à un seul aspect, unilatéral, parcellaire excitant, voire
destructeur.
=de vie : l'objet a des aspects unifiés, totalisés, même si c'est une partie du corps.
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Intervention de Jany
Jean Laplanche : la position originaire du masochisme dans le champ de la pulsion
sexuelle p.37-58.
Douleur : effraction de la limite (corporelle, cutanée, psychique ou du moi) et comme
afflux d'énergie non liée. (Freud : Au-delà du principe du plaisir)
Question :si le masochisme est conçu comme la recherche du déplaisir, donc d,une
augmentation de tension, comment le rattacher à l'autodestruction et à la tendance vers la
mort? (40)
Laplanche y répond à partir de :
1
la notion d'étayage dans la théorie sado-masochiste
2
la priorité du temps masochiste dans la genèse du sado-masochisme.