article paru dans le bulletin des élus locaux

› TRIBUNE LIBRE
Coopération décentralisée et
partenariat pour la Méditerranée
Par Nicole Ameline, députée du Calvados
L
DR
e moment est venu pour la France
des projets, en créer de nouveaux. À titre
de prendre l’initiative d’un nouveau
d’exemple citons le très important plan de
partenariat politique et économique
formation pour des centaines de jeunes filles
en Méditerranée. La démarche
pauvres du Caire (quartier des chiffonniers
s’impose, elle est urgente.
de sœur Emmanuelle) que nous menons
La France est engagée. D’abord en Égypte
avec l’appui des Nations unies en lien avec
dont le rôle dans la stabilité régionale est
les plus grandes entreprises françaises, très
crucial. Elle l’est aussi en Libye à travers
épaulés dans cette volonté d’accompagner la
un soutien déterminé à la consolidation du
transition sociale par les plus hautes autorités
nouveau gouvernement de Fayez al-Sarraj et
égyptiennes.
elle le sera demain dans l’assistance à la sécuL’aménagement du canal de Suez doit être
risation d’un pays confronté au terrorisme et
aussi une opportunité pour l’Europe de mobià tous les trafics. Mais comment ne pas voir
liser son savoir-faire et ses entreprises pour
que c’est à l’échelle méditerranéenne, et à celle
accompagner ce projet d’avenir. Il en est de
de l’Europe, que doit s’engager ce nouveau
même pour la Tunisie et la Libye qui doivent
partenariat.
obtenir le concours spécifique de l’Europe
La Méditerranée a besoin d’une vision stratégique, à
pour retrouver une gouvernance durable, consolidée et respecl’image de l’initiative malheureusement inachevée de l’Union
tueuse des droits fondamentaux. Cela exige une mobilisation,
pour la Méditerranée, menée par Nicolas Sarkozy. Prendre
une répartition du travail qui peut inclure utilement la coopéla mesure de cet enjeu est une priorité pour les Européens.
ration décentralisée des régions et autres collectivités, ellesPrendre conscience aussi que faire de ces pays de véritables
mêmes dépositaires de l’intérêt général autant que local. Les
partenaires économiques, c’est assurer leur avenir, c’est leur
collectivités pourraient être l’avant-garde de cette prise de
permettre de redonner un espoir véritable à leur peuple, et
conscience, et trouver dans ces partenariats stratégiques orgaau-delà de refaire de la Méditerranée un espace de projets et
nisés à l’échelle nationale une finalité politique en même temps
d’avenir, et non plus de morts et de tragédies quotidiennes.
qu’une stratégie de développement et d’influence. Ne pas voir
Le prochain sommet de l’Otan, qui se tiendra à Varsovie
l’importance de ce défi constituerait une faute irréparable.
en juillet, prônera cette vision globale dans le domaine de la
La crise migratoire a démontré le défaut d’anticipation de
sécurité collective, sans hiérarchiser les crises, ni les régional’Union européenne, et l’effet de panique généré par l’afflux
liser. L’Union européenne, si elle souhaite s’imposer comme
des réfugiés donne l’image accablante de l’imprévoyance.
acteur global, notamment dans le règlement des crises, doit
Mais, plus encore, ce qui serait irresponsable, ce serait le fait
s’engager de la même façon
de ne pas voir dans les pays
dans cette approche stratéde notre frontière sud de la
La crise migratoire a démontré le défaut
gique, à deux niveaux : celui
d’anticipation de l’Union européenne, et l’effet de Méditerranée des pays alliés,
de la prise de conscience que panique généré par l’afflux des réfugiés donne l’image
qu’il faut impérativement aider
c’est en contribuant au redres- accablante de l’imprévoyance.
pour nous aider nous-mêmes.
sement de ces pays, et non en
Loin d’une vision défensive
s’en protégeant, qu’elle assurera sa propre sécurité ; celui du
uniquement fondée sur la crainte de l’immigration, qui n’est ni
soutien au développement des pays en transition et à la consoà la hauteur des enjeux, ni une vision politique mature, c’est
lidation de leur État de droit.
le choix d’un avenir solidaire, fondé sur nos valeurs univerUn redéploiement stratégique et rapide des aides au déveselles autant que sur un héritage commun, qui constitue la
loppement, européennes, multilatérales, bilatérales, dans une
force pour agir. Il faut surmonter les barrières des peurs entreapproche coordonnée, ciblée sur la formation, le développetenues et ne pas se contenter de déplorer les situations, ou
ment économique, le soutien au redémarrage du tourisme,
pis de les condamner, sans agir. L’avenir ne se prédit pas, il
s’impose.
se construit. N’oublions pas Gabriel Garcia Marquez : « Ne
Nous sommes quelques-uns à conforter cette volonté, et à
vous demandez pas ce que l’avenir va vous apporter, ditesnous rendre régulièrement dans ces régions pour y soutenir
vous qu’il attend tout de vous ! » n
“
‹ 34 › Bulletin des élus locaux › www.andl.fr
”
Numéro 317 › mai 2016