La stratégie américaine en Méditerranée

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La stratégie américaine en Méditerranée
La stratégie américaine
en Méditerranée
Sami Makki
La Méditerranée, couloir stratégique majeur pour les
ressources énergétiques du Moyen-Orient et d'Asie
centrale, demeure un espace essentiel à la puissance
navale américaine. Par ailleurs, dès le début de la
campagne militaire, la Méditerranée a joué un rôle de
premier plan dans la préparation et le déploiement des
forces armées américaines engagées en Afghanistan.
Cependant, une réorientation stratégique globale a été
lancée par l'administration Bush dès son arrivée au
pouvoir. Elle se caractérisera à terme par une réduction de
la présence avancée en Europe pour un rééquilibrage vers
le Pacifique, la mise en œuvre de nouveaux modes de
projection de puissance et surtout un renforcement des
moyens de défense du territoire américain. Une présence
navale américaine en Méditerranée plus réduite semble
donc probable à longue échéance. Ceci exigera une délégation aux Alliés de la gestion de certaines missions et un
renforcement des capacités à former des coalitions.
L
'administration Bush, longtemps incertaine sur les orientations définitives de sa politique étrangère et de sa stratégie
militaire, se trouve engagée, après moins d'un an d'exercice
du pouvoir, dans une longue campagne militaire de lutte contre le
terrorisme alors qu'en parallèle est lancée une réévaluation de la
posture stratégique globale des Etats-Unis. En Méditerranée, les stratégies américaines à la fois diplomatique, militaire, économique et
commerciale interagissent et forment un ensemble multiforme.
L'organisation de la riposte aux événements du 11 septembre a, une
nouvelle fois, mis en lumière les capacités militaires de la superpuissance américaine et le soutien diplomatique apporté à la constitution
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d'une forte coalition dans cette lutte contre le terrorisme international.
La Méditerranée fait l'objet de diverses représentations stratégiques
américaines qui structurent les modes d'action dans le bassin méditerranéen dans son ensemble et les relations avec les pays des rives
sud et nord du bassin. La dimension militaire en Méditerranée est
sans aucun doute la plus importante compte tenu d'une localisation à
la croisée de tous les enjeux stratégiques majeurs. La présence navale
américaine permanente en Méditerranée et en mer Noire assurée par
la VIe flotte est un pilier important de la posture globale des EtatsUnis dans le monde. Pourtant, et aussi paradoxal que cela puisse
paraître, les événements du 11 septembre et les déploiements qui s'en
sont suivis, ne feront que ralentir un processus de désengagement
partiel de la présence américaine en Méditerranée au profit d'un glissement de la présence avancée vers le golfe Persique et l'Asie, qui cristallisent les facteurs d'instabilité et de futures menaces.
L'étude des stratégies américaines en Méditerranée doit être
analysée relativement à la posture stratégique américaine globale. A
l'aube du XXIe siècle, les Etats-Unis repensent leur stratégie en tirant
les leçons des opérations de paix en Méditerranée orientale ou des
frappes punitives contre les rogue states (Irak, Libye, Soudan) de la
région du Grand Moyen-Orient. Parallèlement à cette réflexion, se
développent de nouveaux modes de projection de puissance permettant une rationalisation et une sélectivité dans les engagements armés
selon une réévaluation des missions et des espaces stratégiques prioritaires. Ce n'est donc pas la valeur intrinsèque de la Méditerranée qui
semble être remise en cause mais bien plus son importance stratégique relativement aux espaces eurasiatiques où se concentrent les
intérêts vitaux américains de demain. Mais la superpuissance américaine, si elle ne renonce pas à ses capacités d'actions unilatérales en
Méditerranée et dans les régions adjacentes, accorde une importance
croissante à un partage du fardeau de la superpuissance par une
forme de division du travail qui s'apparente à la délégation de
certaines missions aux Alliés européens de l'OTAN pour des missions
«gendarmiques» et par un renforcement des capacités d'action par des
systèmes de coalition comme c'est le cas actuellement.
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Stratégie américaine en Méditerranée
Représentations stratégiques et dispositif militaire américains en
Méditerranée
La Méditerranée, à la croisée des espaces balkaniques, moyen-orientaux et eurasiatiques, est le lieu de différentes représentations stratégiques américaines interdépendantes qui structurent les stratégies
opérationnelles des Etats-Unis dans la région au lendemain du 11
septembre. Cette localisation si particulière de la Méditerranée relativement aux zones d'intérêts majeurs pour les Etats-Unis est visible
dans l'architecture militaire des commandements régionaux de la
puissance américaine. Ce zonage établit un espace de commandement
européen (EUCOM) qui comprend notamment, en plus des pays
d'Afrique du Nord, la Syrie, le Liban et Israël, alors que l'Egypte se
trouve dans l'ère de responsabilité du commandement central américain (CENTCOM) tourné vers le Grand Moyen-Orient.
Après les événements du 11 septembre, les Etats-Unis voudront sans
doute intensifier les stratégies d'engagement avec les pays de la rive
sud qui participent déjà à de nombreuses activités de coopération
sécuritaire (les exercices et les échanges dans le cadre de l'initiative
méditerranéenne de l'OTAN, bilatéralement par la diplomatie et la
défense préventives et enfin par les contacts de militaires à militaires
lors d'exercices organisés par le CENTCOM ou l'EUCOM). Un tel maillage
permet de mettre en ordre l'espace méditerranéen conformément aux
normes (la stratégie du shaping) et aux priorités stratégiques américaines, de lutter plus efficacement contre la prolifération des armes de
destruction massive et de consolider la coalition antiterroriste.
Par ailleurs, l'organisation de la riposte après les attentats du 11
septembre nous rappelle que la Méditerranée est avant tout un
passage stratégique essentiel à la puissance navale américaine. Voie
maritime d'accès aux espaces vitaux, elle permet aussi, en temps de
guerre, une application des stratégies navales opérationnelles comme
le littoral warfare pour un contrôle et une influence des événements
terrestres par l'exercice de la puissance maritime (seapower) grâce à des
moyens renouvelés d'exercice dissuasif ou répressif de la puissance
comme les missiles de croisière Tomahawk ou les avions de chasse de
type F/A-18 E/F Super Hornet. Cette définition instrumentale de la
Méditerranée est la représentation stratégique américaine dominante.
La protection des lignes de communication maritimes et aériennes
est un pilier de la stratégie américaine en Méditerranée, tout comme
l'accès aux ressources énergétiques majeures. S'assurer d'une maîtrise
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absolue des flux énergétiques est essentiel à la pérennité de la puissance américaine et à la stabilité économique et financière, d'où l'importance stratégique de l'essor de la production pétrolière du Caucase
et de l'Asie centrale. La mise en œuvre du projet d'acheminement
pétrolier par l'axe Aktau-Bakou-Tbilissi-Ceyhan (ABTC) permet le
débouché sur le port turc de Ceyhan en Méditerranée qui forme la
«passerelle vers les marchés mondiaux de consommation pétrolière». Ce
projet demeure activement soutenu par l'administration américaine
au détriment d'autres options d'acheminement géopolitiquement
inconcevables pour les États-Unis1. Cette dynamique économique et
militaire Est-Ouest faisant de la Méditerranée une base avancée2
(forward presence) et un couloir stratégique (strategic way-point) vital à
l'exercice de la puissance dans l'espace eurasiatique repose aussi sur
un rôle important de la Turquie, d'Israël ou de l'Egypte comme États
pivots de la puissance américaine en Méditerranée et au-delà.
La représentation de la Méditerranée comme espace sud de l'Europe
semble désormais occuper une place plus réduite dans la nouvelle
posture stratégique américaine qui semble vouloir déléguer à l'Union
européenne certaines responsabilités. Cette approche concerne particulièrement la gestion des dynamiques socio-économiques conflictuelles (risques d'instabilité par les migrations, la pauvreté, …) et le
lancement d'initiatives diplomatiques de résolution des crises en
Méditerranée (Chypre notamment et le conflit israélo-palestinien
dans une moindre mesure), alors que les efforts américains se concentrent depuis le 11 septembre sur l'Afghanistan et une surveillance
renforcée des rogue states potentiellement impliqués dans cette renaissance du «terrorisme catastrophe».
La Méditerranée, au «centre d'une région géopolitiquement volatile», arc de crise et espace de fragmentations économiques et sociales
nord-sud, donne naissance à des facteurs complexes de déstabilisations régionales et de menaces transnationales (par une interpénétration des trafics mafieux comme la drogue, l'argent, les commerces illicites d'armements, le terrorisme ou le crime national et international)
nécessitant un recours accru à des moyens de sécurité (soft security)
que les Européens semblent prêts à développer et à déployer.
Enfin, certains commentateurs américains se sont empressés de voir
dans les événements du 11 septembre la validité de la thèse du «choc
entre civilisations», la Méditerranée constituant un espace de fracture
entre les mondes occidental et arabo-musulman. C'est cette représentation de la Méditerranée, impossible à tenir officiellement dans cette
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campagne contre le terrorisme dans le Grand Moyen-Orient, que
l'Europe, par son histoire et sa proximité géographique avec son Sud
méditerranéen, entend justement décrédibiliser par des initiatives
diplomatiques telles que le forum euro-méditerranéen qui pourrait
désormais reprendre un certain souffle.
Présence militaire américaine en Méditerranée après le 11
septembre
La Méditerranée a été le lieu d'importantes activités militaires et de
nombreux mouvements des forces navales américaines depuis les
dernières semaines de septembre. L'organisation de la riposte contre
l'Afghanistan a démontré une fois de plus que le libre passage du
couloir méditerranéen et du canal de Suez sont des piliers essentiels
de la capacité de déploiement rapide des forces aéronavales sur le
théâtre des opérations d'Asie du Sud-Ouest. Très rapidement, les
premières forces américaines ont transité par la Méditerranée3. Le 21
septembre était donné le second ordre de déploiement pour un renforcement du dispositif de riposte avec l'arrivée de l'USS Kitty Hawk avec
5500 hommes et près de 70 appareils4. Une unité d'élite chargée des
opérations spéciales de la 15e unité expéditionnaire de la marine avec
près de 2000 marines à bord de l'USS Peleliu escortant le Carl Vinson
était prête à un déploiement en Afghanistan, alors que la 26e unité
expéditionnaire appartenant à l'escadre du Théodore Roosevelt participait à un exercice amphibie de débarquement sur les côtes méditerranéennes de l'Egypte dans le cadre de l'exercice multilatéral Bright
Star5 qui était finalement conduit pour une préparation au combat et
le développement de contacts de militaires à militaires renforçant l'esprit de coalition antiterroriste. Ces deux unités de marines, désormais
stationnées sur la base opérationnelle avancée en Afghanistan
(Forward operating location, FOL), sont au premier plan de la seconde
phase de la destruction du régime taliban autour de Kandahar.
La 11e édition de Bright Star, exercice bi-annuel entre les Etats-Unis
et l'Egypte géré par le CENTCOM, fut maintenue (du 25 octobre au 1er
septembre 2001) malgré l'engagement des forces en Afghanistan6. Cet
engagement vise à augmenter le niveau de préparation et d'opérationnalité des forces à toutes les formes d'opérations, à développer
l'interopérabilité entre forces alliées et à construire des liens entre
forces armées de la région comme moyen de prévention.
Habituellement conduit en temps de paix, Bright Star 01/02 fut
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conduit pour la première fois alors que les troupes américaines étaient
placées en état d'alerte (celui de 1992 ayant été annulé pour cause de
guerre du Golfe) avec la participation de 74 000 hommes (23 000
troupes américaines, plus de 43 000 Egyptiens, près de 4 300
Européens dont 1 500 Français). Le déroulement de cet exercice a par
ailleurs renforcé un climat de confiance entre les Etats-Unis et
l'Egypte, alors qu'une certaine presse américaine avait évoqué un
double jeu de l'Egypte jugée inactive au sein de la coalition de lutte
antiterroriste, obligeant Rumsfled à intervenir pour mettre fin à cette
campagne médiatique.
La Turquie, autre Etat-pivot essentiel à la pérennité de la stratégie
américaine dans le bassin, joue plusieurs fonctions dans le dispositif
de riposte, avec la base aérienne d'Incirlik sur la côte méditerranéenne
(base terrestre avancée pour les opérations de Northern Watch au
nord du 36e parallèle irakien), mais aussi avec le déploiement
annoncé le 1er novembre de conseillers militaires dans un premier
temps puis de troupes, à la suite d’une demande de Washington
parvenue à Ankara le 26 octobre. Une unité des forces spéciales
composée de 90 hommes a ainsi participé aux opérations militaires, à
des actions humanitaires et à l'entraînement des troupes de l'Alliance
du Nord7. Enfin, l'administration républicaine a reconnu le rôle
important de la Turquie dans les activités de consultation et de
réflexion sur l'avenir de l'Afghanistan.
Dans cette nouvelle guerre contre le terrorisme, les menaces militaires conventionnelles, la prolifération, par le commerce illicite
notamment, des armes chimiques, biologiques, radiologiques,
nucléaires et hautement explosives (CBRNE) et la dispersion des technologies duales présentent autant de moyens de coercition à l'encontre des régimes soutenant les Etats-Unis ou des troupes américaines pré-positionnées dans la région. Réévaluant la portée des
menaces terroristes au lendemain des événements du 11 septembre, le
Pentagone dresse un tableau assez noir de «la diffusion du pouvoir et des
capacités militaires vers les acteurs non-étatiques [qui] présente une menace
particulière de terrorisme international, par la prolifération rapide des technologies CBRNE»8.
C'est à l'encontre de ces menaces réelles dans cette nouvelle ère
d'hyperterrorisme que se concentreront les efforts diplomatiques
américains de demain. La stratégie américaine en Méditerranée et
dans le Golfe sera nécessairement caractérisée par un sérieux renforcement de la lutte contre la prolifération des armes de destruction
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massive. Le commandement central américain est en charge de
l'Initiative de défense coopérative (Cooperative defense initiative, CDI)
qui rassemble derrière les forces américaines les forces armées des
États du Conseil de la coopération du Golfe (CCG : Bahreïn, Koweït,
Arabie saoudite, Oman, Qatar et Emirats Arabes Unis), d'Egypte et de
la Jordanie. Cette initiative, centrée sur la lutte contre la prolifération
et les menaces liées aux armes de destructions massives dans l'Asie du
Sud-Ouest, est surtout élaborée en fonction des menaces posées par
les rogue states de la région et notamment l'Irak et l'Iran. Elément
important d'une approche intégrée de la politique de contre-prolifération pour la région par le CENTCOM, cette initiative est une étape de la
mise en œuvre du Pacte de défense du CCG de décembre 2000 qui doit
déboucher des capacités régionales de gestion des crises.
Des activités diplomatiques tournées vers le renforcement de la
coalition anti-terroriste
L'activité diplomatique américaine dans le Moyen-Orient a pour
objectif essentiel, dans un premier temps, de s'assurer d'un soutien
fort et d'obliger les capitales arabes à clarifier leurs positions dans la
lutte contre le terrorisme9. Ainsi la Syrie demeure sous surveillance
renforcée, même si elle ne semble pas figurer sur la liste officieuse des
prochaines cibles de la campagne antiterroriste. Malgré la condamnation publique des actes terroristes du 11 septembre par le président
Assad qui appelait à une «coopération internationale pour éradiquer
toutes les formes de terrorisme», le secrétaire d'Etat américain Powell
s'avouait personnellement «sans illusions sur la nature du gouvernement
syrien»10.
En Méditerranée occidentale, la Libye, classée parmi les rogue states,
semble peu à peu sortir de sa marginalité et retrouver une place sur la
scène internationale. L'évolution de la politique américaine à l'égard
de ce pays pourrait apparaître comme un test de crédibilité de la
«capacité de Washington à réintégrer la Libye dans la communauté des
nations»11 pour l'ensemble des pays de la région et notamment l'Iran
qui subit des sanctions au titre de l'Iran-Libya sanctions act depuis 1996.
Cependant, les événements du 11 septembre rendent ce changement
de cap de la politique des Etats-Unis quasiment impossible.
Concernant le règlement du conflit israélo-palestinien, les déclarations de George W. Bush en faveur d'un Etat palestinien n'ont pas été
suivies d'effets concrets sur le terrain. Bien au contraire, alors que la
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diplomatie classique ne semble pas pouvoir faire de grandes avancées
du fait des blocages et de l'escalade de la violence actuels, le président
Bush a choisi l'ancien commandant en chef du Commandement
central américain, le général en retraite Anthony Zinni, comme
envoyé spécial pour le Moyen-Orient pour le règlement des questions
sécuritaires dans le conflit12. Ardent défenseur de la diplomatie par
l'engagement de militaires à militaires, Zinni fonde son travail de
médiation sur le rapport Mitchell qui demeure le point de référence
américain pour toute relance du processus de paix. Alors que l'Union
européenne avait tenté à la fin de l'année 2000 de relancer une dynamique euro-méditerranéenne en perte de vitesse, l'engagement des
Etats-Unis contre Ben Laden semble avoir laissé un certain vide diplomatique, au lendemain du 11 septembre, que les Européens espéraient
pouvoir combler par une «relance du dialogue entre les civilisations, les
cultures et les religions» lors du sommet d'Agadir d'octobre dernier et
par l'examen de la proposition espagnole d'un code de conduite en
matière de terrorisme comprenant notamment un projet d'harmonisation des législations nationales et le développement des échanges
d'information13.
En Méditerranée occidentale, l'identification du cadre et du niveau
de contribution de l'Union européenne apparaît désormais prioritaire
pour pouvoir en fixer les limites alors que la stratégie américaine dans
la sous-région méditerranéenne a longtemps semblé relativement
inexistante, à l'égard de l'Algérie notamment, car largement perçue
comme d'intérêt stratégique mineur14. La politique américaine en
Méditerranée orientale semble en voie de transformation avec notamment une volonté de gérer et résoudre «les différends dans le triangle
Grèce, Turquie et Chypre» en laissant plus d'espace pour les initiatives
locales et en replaçant la question dans une perspective plus européenne notamment celle de l'élargissement. Les Etats-Unis voient
dans l'intégration de la Turquie aux structures de la politique européenne de sécurité et de défense une étape indispensable, alors
qu'économiquement et socialement la Turquie sort à peine d'une
période de tumultes économiques et politiques qui démontrent une
certaine fragilité socio-économique15.
La diplomatie américaine à l'égard des pays de la rive sud de la
Méditerranée passe aussi par une diplomatie commerciale et par une
intégration progressive à la sphère économique néo-libérale comme
moyen d'imposer la stabilité par la stratégie de l'enlargement engagée
sous Clinton. Les programmes de privatisation et la hausse des
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investissements américains dans la région vont sans nul doute se
poursuivre après le 11 septembre, construisant ainsi une communauté
d'intérêts par l'intégration économique. On se dirige donc dans ce
domaine vers une continuation de la «construction de ponts vers la paix
par le libre commerce» comme un élément marquant de la politique
commerciale américaine dans le Moyen-Orient16.
Alors que l'accord économique américano-nord-africain résultant de
l'initiative Eizenstat ne semble pas avoir été particulièrement réactivé
par l'administration Bush, d'autres initiatives ont vu le jour comme la
signature d'un accord sur le développement des relations commerciales et des investissements avec l'Algérie en juillet 2001, facteur de
rapprochements diplomatiques entre Washington et Alger17. L'Egypte,
second partenaire commercial des Etats-Unis (avec des échanges
commerciaux d'une valeur de 4,2 milliards de dollars pour 2000),
second bénéficiaire mondial de l'assistance américaine avec une aide
économique de 655 millions et d'une assistance militaire stable de 1,3
milliard pour 2002, est un pilier fondamental de cette diplomatie. En
avril 2001, les Etats-Unis et l'Egypte ont ainsi mis en place des
mesures de renforcement de la coopération économique bilatérale.
C'est sur ces bases économiques, commerciales et militaires que les
Etats-Unis entendent renforcer les fondements de leur présence dans
le monde arabo-musulman pour une exploitation sécurisée des
richesses énergétiques18. Traditionnellement, la Méditerranée a été une
zone de forte présence des forces navales et terrestres américaines.
Pourtant, malgré les événements du 11 septembre, un désengagement
partiel des forces navales américaines est envisageable compte tenu
des réévaluations stratégiques annoncées par l'administration Bush.
La Méditerranée dans la posture stratégique globale de
l'administration Bush
Pour mieux comprendre la stratégie américaine en Méditerranée, il
semble nécessaire de la replacer dans une perspective globale. Le
Pentagone affirme sa volonté de développer des moyens efficaces de
dissuasion avancée (forward deterrence) dans les régions vitales comme
le Moyen-Orient mais les réductions d'effectifs des forces armées et les
évolutions technologiques obligent à une réévaluation de la présence
américaine dans le bassin, les Etats-Unis ne pouvant être présents en
permanence partout dans le monde. C'est dans les zones les plus
stables et où les alliances sont les plus fortes qu'un désengagement
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partiel des forces est possible. En Méditerranée, l'équation de la distribution pétrolière est essentielle mais des alternatives existent soit par
le déploiement de forces expéditionnaires depuis le continent américain soit par une plus grande implication de l'OTAN.
Les experts consultés par les pouvoirs exécutif et parlementaire
américains ont majoritairement défendu une transformation de la
posture stratégique globale des forces armées à travers le monde. Le
déni d'accès aux zones d'intérêts stratégiques majeures ou les menaces
à l'encontre des forces pré-positionnées dans la région du Golfe
constituent les éléments des futures menaces asymétriques contre les
intérêts américains. Cependant, comme l'affirme le Pentagone, mise à
part une présence navale visible permettant un «renforcement de la paix
et de la stabilité en Europe», les bases terrestres à l'avant (forward basing)
forment des plates-formes pour la projection de puissance bien audelà de l'Europe qui est plus immédiate que le déploiement depuis le
territoire américain (CONUS), qui deviendra pourtant peu à peu prédominante. Les Alliés de la région comme l'Italie «présentent le double
avantage de posséder une profondeur stratégique et d'offrir une présence clé
de premier rang (key front-line presence) vers l'intérieur comme au travers
de la région méditerranéenne»19. Le retour à une stabilité durable en
Europe (hormis les Balkans) permet de disposer de «bases essentielles
situées en Europe et en Asie du Nord [qui] pourront servir par ailleurs de
centres avancés pour la projection de puissance (hubs for power projection) pour apporter un renfort aux troupes déployées depuis le CONUS lors
des futures contingences dans le monde».
Dans la redéfinition de la posture globale des Etats-Unis telle qu'elle
fut énoncée le 30 septembre 2001 dans le rapport de la Quadrennial
defense review (QDR) résultant d'un processus de consultation et de
réflexion lancé par l'administration Bush, une réorientation stratégique est annoncée. Le secrétaire à la Défense charge le secrétaire à la
US Navy de «développer des options permettant d'effectuer un glissement de
certains équipements des marine corps pré-positionnés en mer Méditerranée
vers l'océan Indien et le golfe Arabique afin de développer des capacités
accrues de réactivité aux contingences au Moyen-Orient»20.
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Stratégie américaine en Méditerranée
D'une conception instrumentale de la Méditerranée à un
désengagement gradué
Le débat stratégique américain du début de la présidence Bush fut
marqué par de nombreuses remises en cause de la nature de la
présence avancée des forces. Pour certains, des «ajustements dans la
stratégie de déploiement vers l'avant sont nécessaires qui mettront fin au
traditionnel eurocentrisme [des représentations] de l'establishment de la
politique étrangère américaine», alors que «la présence des troupes stationnées en Méditerranée» est jugée «inutile car sans effets réels et injustifiables
stratégiquement», compte tenu du «degré limité d'interdépendance économique et d'une stabilité certaine, relativement aux régions latino-américaines
comme les Caraïbes», plus prioritaires et nécessitant «un rééquilibrage des
forces là où les intérêts stratégiques américains [y] sont supérieurs»21.
Ces considérations géostratégiques rejoignent les arguments des
partisans d'une réduction et d'une redéfinition des modalités de ces
déploiements permanents de forces à l'étranger. Cette rationalisation
répond à l'argument d'un suremploi des forces armées en temps de
paix ayant un effet néfaste sur l'opérationnalité et la préparation au
combat (readiness). La menace d'un retrait unilatéral des Balkans avait
plané durant la campagne présidentielle. Le 11 septembre entraîne
une demande accrue pour la défense du territoire américain (homeland
defense) qui est au centre des nouvelles missions des forces armées,
réactualisant cette option.
Alors que la présence en permanence de porte-avions dans l'ouest
du Pacifique et dans le golfe Persique est jugée stratégiquement
importante, la présence d'un porte-avions de 6 à 8 mois de l'année en
Méditerranée est parfois jugée «excessive», «la présence navale en
Méditerranée ayant beaucoup perdu de sa justification dès la fin de la guerre
froide»22. Par ailleurs, malgré la pertinence de tels déploiements pour
la dissuasion et les contacts par les exercices multinationaux, cette
force n'est pas l'outil le plus adapté à la résolution des conflits du
bassin méditerranéen. Cependant, le centre de gravité de la posture
stratégique globale glissant vers l'est aux marges du Grand MoyenOrient et de l'Asie centrale, les forces pré-positionnées dans le golfe
Persique, en Italie, en Turquie sont essentielles.
Enfin, l'incapacité à assurer un soutien prolongé au porte-avions
stationné en Adriatique lors du déclenchement de l'intervention de
l'OTAN contre la Serbie en 1999 aurait démontré selon certains experts
que ce déploiement permanent peut être «contre-productif». Une
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présence future de la flotte américaine en Méditerranée n'est pas jugée
«pertinente» pour la conduite d'opérations militaires «telles que les
frappes contre la Libye» (qui se sont déroulées en 1986 et qui ont préfiguré le modèle des pratiques punitives conduites contre le Soudan,
l'Irak ou l'Afghanistan en 1998) car un «déploiement rapide, lorsque
nécessaire, depuis les Etats-Unis vers la Méditerranée par des forces plus
flexibles pour des missions de dissuasion ou de combat» est la solution la
plus compatible avec le recentrage de la puissance américaine vers
l'Asie. Ceci pourrait impliquer un engagement plus important de
l'OTAN dans le bassin méditerranéen pour combler le déséquilibre. Un
rôle accru de l'Alliance atlantique concrétiserait la fin de l'ère de
marginalisation de la Méditerranée dans la stratégie d'une Alliance
qui «regarde de plus en plus vers le Sud»23 par un accroissement du rôle
des forces de l'OTAN dans des missions hors-zone, hier dans les
Balkans pour des opérations de gestion de crises ou aujourd'hui dans
des missions de défense collective du territoire et des populations de
l'Alliance contre les menaces transnationales criminelles et terroristes
dans le Grand Moyen-Orient.
Renforcement des coalitions et partage transatlantique des
tâches en Méditerranée
Le renforcement des capacités expéditionnaires autonomes24 depuis
le CONUS est jugé nécessaire car, comme le soulignait le rapport d'une
commission parlementaire bipartisane, «les Etats-Unis seront appelés
fréquemment à intervenir militairement dans une ère d'alliances incertaines
avec des coalitions épisodiques (episodic «posses of the willing») et dans
un cadre prospectif de réduction (et de vulnérabilité) croissante des forces
déployées vers l'avant, rendant difficile la conduite d'opérations militaires
multinationales»25. Il est cependant certain que la dimension transatlantique est fondamentale à ce rééquilibrage de la posture de défense
américaine. Alors que l'OTAN avait rapidement évoqué l'article 5 de la
charte (faisant de l'attaque contre les Etats-Unis une attaque contre
tous les membres de l'Alliance), une force navale multinationale avait
été déployée en Méditerranée orientale le 26 octobre par le commandement sud de l'OTAN (AFSOUTH)26.
Prenant au mot les Européens dans leurs objectifs de développer des
moyens autonomes d'intervention dans la proche périphérie du territoire de l'Union européenne, un nombre croissant d'experts américains pensent que «les Alliés de l'OTAN possédant des capacités maritimes
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Stratégie américaine en Méditerranée
d'importance devraient être encouragés à prendre des responsabilités et un
rôle plus grands dans des opérations vers l'avant en mer Méditerranée,
permettant aux forces maritimes américaines de se concentrer dans le golfe
Persique, en Asie du Sud et de l'Est»27. Ceci réduirait le tempo opérationnel (optempo) élevé imposé aux forces stationnées en
Méditerranée, tout en permettant une transformation des forces et
surtout ce recentrage stratégique vers le Pacifique.
Washington souhaite par ailleurs conserver une grande flexibilité
dans la formation des coalitions ad hoc selon les priorités stratégiques
américaines. Les alliances (bilatérales et multilatérales) dans la région
méditerranéenne sont le ciment de coalitions pour des contingences
futures. L'importance d'un renforcement durable des arrangements
sécuritaires régionaux est réaffirmée dans le rapport de la QDR du
secrétaire à la Défense qui estime que «les alliances des Etats-Unis ainsi
que le large ensemble des accords de coopération offrent une capacité inégalée
à développer des coalitions d'États pour affronter les défis les plus imprévisibles. Cette capacité a une importance essentielle dans la réponse au terrorisme».
Il est clairement indiqué qu'un «exercice effectif du leadership américain
au sein de l'OTAN constitue fondamentalement la garantie d'une défense des
intérêts sécuritaires en Europe. La présence avancée de la puissance américaine [est] essentielle à la projection de la puissance américaine». Pourtant,
les évolutions du contexte international et les avancées européennes
en matière de gestion des crises, par la création de structures institutionnelles et de moyens capacitaires, amènent le «Département à
adopter une approche plus globale d'évaluation du partage des responsabilités entre Alliés non seulement selon la définition traditionnelle centrée sur
les fardeaux militaires de la défense commune mais en considérant des contributions plus étendues à la défense collective»28.
Après le partage du fardeau (burdensharing) exigé lors de la guerre
du Golfe, une division des tâches (division of labor) entre Alliés se met
en place. Cette dynamique sera sans doute accélérée par la riposte aux
attentats du 11 septembre. Nous y avons vu des Américains volontairement engagés seuls dans une phase de bombardements intensifs,
laissant les Européens, lorsque les Etats-Unis le jugèrent opportun,
conduire des missions humanitaires mais refusant la pacification.
Une double logique à l'égard de l'Europe semble se mettre en place
dans la gestion des crises périphériques qui repose d'une part sur une
délégation des responsabilités dans la gestion des crises de faible
intensité à la proche périphérie de l'Union et d'autre part sur une
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dynamique d'engagement armé par un phénomène mécanique d'entraînement des Européens vers des opérations expéditionnaires dans
le golfe Persique ou jusqu'aux frontières du Grand Moyen-Orient
pour préserver le leadership américain29. Les divers éléments de la
mise en place de nouveaux modes expéditionnaires semblent participer d'une rupture stratégique recherchée par l'administration Bush
avant le 11 septembre.
Persistance d'une représentation fonctionnelle de la Méditerranée
par les Etats-Unis et rééquilibrage stratégique vers l'Eurasie
Compte tenu des nouvelles priorités stratégiques américaines en
Eurasie, le 11 septembre n'entraînera certainement pas un renforcement de la présence permanente de la puissance américaine (la VIe
flotte) en Méditerranée, mais au contraire un redéploiement
progressif vers l'Asie centrale. Les débats sur les orientations futures
de la stratégie américaine indiquent clairement que, compte tenu de la
transformation engagée des forces, de nouveaux modes de projection
de puissance voient le jour et un choix dans les bases terrestres avancées peut s'opérer aisément en Europe, dans le Golfe, en Turquie ou
éventuellement à plus long terme parmi des bases situées en Asie
centrale.
Les Etats-Unis se dirigeront certainement dans un proche avenir
vers un désengagement de la présence navale permanente américaine
en Méditerranée. Ceci se fera de manière progressive et graduée car
un retrait unilatéral trop soudain ne ferait qu'alarmer les Alliés et les
États amis de la rive sud. Par ailleurs, les Européens seront progressivement capables de gérer militairement les facteurs persistants d'instabilité. La Méditerranée comme base avancée de la puissance navale
tendra à s'effacer peu à peu. Elle demeurera pourtant un couloir stratégique important pour accéder depuis les Etats-Unis à l'espace
eurasiatique, placé sous le contrôle du commandement central américain, qui constituera le point de focalisation durable des intérêts stratégiques américains pour le prochain siècle.
Sami Makki est chercheur au Centre interdisciplinaire de recherche sur la
paix et d'études stratégiques (CIRPES/GSD-EHESS) à Paris.
Notes :
1. Clifford G. Bond ( Principal Deputy Special Adviser to the Secretary of State for the New
independent States), U.S. Policy Toward Central Asia, Subcommittee on International
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Stratégie américaine en Méditerranée
Relations, House of Representatives, 6 juin 2001. URL : www.house.gov/international_relations/bon0606.htm
2. Pour une présentation de la stratégie navale classique des Etats-Unis en Méditerranée voir
Donald B. Fennessey et Patrick J. Braker, «La Marine des Etats-Unis, une présence avancée
en faveur de la paix», Bulletin d'Etudes de la Marine, N°19-décembre 2000, pp.43-46
3. Ainsi le porte-avions USS Entreprise, impliqué dans les premières frappes contre
l'Afghanistan en octobre, au début des opérations, était en déploiement régulier depuis le 25
avril et passa par Suez le 28 octobre pour retourner à sa base de Norfolk en Virginie. Le jour
suivant, 4 navires (le USS Vella Gulf lanceur de missiles guidés, le sous-marin d'attaque USS
Hartford, le USS Peterson et un navire de soutien) rejoignaient le USS Roosevelt et son escadre
qui avaient quitté Norfolk le 19 septembre en transitant par ce même canal pour se diriger vers
l'Est en Mer d'Arabie. Il fut rejoint par la 26ième unité expéditionnaire des Marines qui
comprenant notamment le USS Bataan, soit un total de près de 15.000 navigateurs et Marines.
Parallèlement, le Pentagone ordonnait le déploiement de bombardiers lourds B-52 et avions de
ravitaillement KC-135 vers le Golfe persique pour la mise en place de la première phase du
dispositif en mer d'Arabie (USS Entreprise), dans le Golfe (où se trouvait déjà le porte-avions
USS Carl Vinson) et dans l'Océan Indien avec la base navale de Diego Garcia, alors que les
appareils de chasse de la Air Force pouvaient être stationnés au Koweït, en Arabie Saoudite
(Prince Sultan Air Base) ou au Bahreïn (QG de la 5ième flotte de la US Navy), offrant diverses
options tactiques.
4. Associated Press, Military buildup intensifies; second deployment order signed, 21
septembre 2001
5. Sarah El Deeb, US Marines in Egypt Ready, Associated Press, 23 octobre 2001
6. American Forces Information Service, Bright Star planner say exercice was necessary after
September 11, AFRTS Radio News, 11 November 2001
URL: www.defenselink/mil/news/radio/Nov2001/index.html
7. Nouvelles Atlantiques, L'Italie et la Turquie annoncent des contributions, Bruxelles, 7
novembre 2001, p.2
8. US Department of Defense, Report of the Quadrennial Defense Review (QDR), 30
septembre 2001, p. 5
URL: www.defenselink.mil/pubs/qdr2001.pdf
9. Kathleen T. Rhem, «Rumsfeld not in Middle East to Negotiate», Armed Forces Press
Service, 3 octobre 2001
10. Alfred B. Prados, Syria: US Relations and Bilateral Issues, Issue Brief for Congress
IB92075, Congressional Research Service, Foreign Affairs, Defense and Trade Division, mis à
jour au 1er octobre, 2001
11. Ray Takeyh, «The Rogue Who Came in From the Cold», Foreign Affairs, mai/juin 2001
12. Elaine M. Grossman, «Zinni may play Pivotal Role: Bush Considers Naming former
Marine General as new Mideast Envoy», Inside The Pentagone, Vol 17, n°44, 1er novembre
2001.
13. Reuters Mediterranean Envoys agree to boost dialogue, 26 octobre, 2001
14. William Lewis, «Gravitational Forces in the Mediterranean Basin», Mediterranean
Quarterly, Spring 2001, p. 33
15. Ian Lesser, Turkey, Greece and the U.S. in a Changing Strategic Environment,
Testimony Before the House International Relations Committee, Rand Corp., CT-179, 2001.
URL: www.rand.org/publications/CT/CT179
16. Expression de l'Ambassadeur Charlene Barshefsky, représentant du commerce américain
au Moyen-Orient lors de la signature de l'accord de libre commerce entre les Etats-Unis et la
Jordanie en octobre 2000
17. Ian Lesser, «Policy toward Algeria after a Decade of Isolation», Mediterranean
Quarterly, Spring 2001, p.21
18. Clyde Mark, Egypt-United States Relations, CRS Issue Brief IB93087, mis à jour le 1er
octobre, p. 9
19. Secretary of Defense, Report on Allied Contributions to the Common Defense to the
United States Congress, March 2001, pp. II-4 et II-8.
URL: www.defenselink.mil/pubs/allied_contrib2001/allied2001.pdf
20. US Department of Defense, QDR, p. 27
21. James Miskel, «Being There Matters-But Where», Naval War College Review, Summer
2001 http://www.nwc.navy.mil/press/review/2001/summer/art2%2Dsu1.htm
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22. Michael O'Hanlon, «Come Partly Home, America: How to Downsize U.S. Deployments
Abroad», Foreign Affairs, March-April 2001
URL: http://www.brook.edu/views/articles/ohanlon/2001foreignaffairs.htm
23. Ian Lesser, NATO Looks South: New Challenges and New Strategies in the
Mediterranean, RAND Report MR-1126-AF, 2000.
URL: www.rand.org/publications/MR/MR1126/
24. Voir Sami Makki, «Réévaluation stratégique et transformations capacitaires des forces
expéditionnaires américaines», chapitre III, Cahier d'Etudes Stratégiques Etats-Unis
2001/2002 «Vers la Grande transformation stratégique?», CIRPES-EHESS, décembre 2001
25. US Commission on National Security/21st Century, Road Map for National Security:
Imperative for Change, the Phase III Report, 15 février 2001, p.77
26. Voir Allied Forces Southern Europe, NATO Naval Force deploys to Eastern
Mediterranean, AFSOUTH Press Release, 9 octobre 2001 www.afsouth.nato.int/
27. Andrew Krepinevich Jr., Beyond the Two-MTW Posture, Armed Forces Committee,
House of Representatives, 20 juin 2001
28. US Department of Defense, Report on Allied Contributions to the Common
Defense…, pp. I-1 et I-2
29. Voir les travaux de la RAND Corporation et notamment Richard Sokolsky, Stuart
Johnson, and Stephen Larrabee, Persian Gulf Security: Improving Allied Military
Contributions, Rand Report MR-1245-AF, 2001.
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