Les comités d`éthique biomédicale aux Etats

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Les comités d`éthique biomédicale aux Etats
KENIS Y. Dans : M. Moulin (éd.), Contrôler la science ? La question des comités
d’éthique. Bruxelles, De Boeck-Université, 1990, 53-64.
Les comités d’éthique biomédicale aux Etats-Unis
« Quand les politiciens américains hésitent, par crainte d’éventuelles répercussions
politiques, à s’aventurer sur le terrain dangereux de la morale, ils ont tendance à
répondre aux préoccupations de leurs citoyens en créant des comités » 1 .
Cette observation un peu désabusée du directeur du Centre pour l’éthique
biomédicale de l’Université du Minnesota ne s’applique sans doute pas au premier comité
d’éthique 2 créé aux Etats-Unis. Celui-ci a été mis en place peu de temps après la création,
en 1953, du centre clinique des National Institutes of Health (NIH), le gouvernement
fédéral se trouvant confronté à la question de l’expérimentation humaine dans une
institution qui dépendait directement de lui 3 - 4 . Ce comité a établi des règles applicables
aux recherches pratiquées au NIH ou dans des institutions financées par lui : Group
consideration of ethical research procedures deviating from accepted medical practice or
involving unusual hazard. Cet énoncé montre bien les limites de cette réglementation et
on doit constater que, même dans ces limites étroites, l’exemple donné par les milieux
officiels n’a pas été suivi dans d’autres institutions, fédérales ou privées. Les médecins
expérimentateurs s’en sont tenus, d’une façon générale, à leur conscience individuelle, à
la tradition du serment d’Hippocrate, c’est-à-dire aux règles de la déontologie
traditionnelle, et au jugement professionnel de leurs pairs; au nom de la défense de la
« liberté de la recherche », ils ont surtout manifesté leur méfiance à l’égard des règles
imposées par les autorités fédérales. Il faudra attendre une dizaine d’années pour que le
concept de contrôle de la recherche soit repris, et plusieurs années encore 5 pour qu’il se
généralise et que des comités d’éthique ou plutôt des « comités institutionnels de
révision » (Institutional Review Board – IRB), organismes chargés par la loi de veiller à
la protection des êtres humains soumis à une expérimentation, soient constitués dans les
grands centres hospitaliers 6 .
Le développement de ces organismes de contrôle a été stimulé dans les années
soixante par la révélation de plusieurs affaires judiciaires ou scandales mettant en cause
1
CAPLAN, A.L., « Etats-Unis : un débat public ? », Autrement, 1987, 93, pp. 96 à 103.
Les premiers comités créés pour contrôler la recherche clinique et plus spécialement l’expérimentation
humaine à risque n’ont pas pris le titre de comité d’éthique, mais des appellations variées qu’il n’y a pas
lieu de détailler ici.
3
VEATCH, R.M., « Human experimentation committees : professional or representative ? », Hastings
Center Report, 1975, 5/5, pp. 31 à 40.
4
FADEN, R.R., BEAUCHAMP, T.L., A history and theory of informed consent, New York and Oxford,
Oxford University Press, 1986.
5
CALLAHAN, D., « The development of biomedical ethics in the United States », Annals of the New York
Academy of Sciences, 1988, 530, pp. 1 à 3.
6
Cf. note 1.
2
1
des médecins qui pratiquaient des expériences critiquables sur des sujets mal ou non
informés. En 1964, une enquête est demandée au sujet d’expériences commencées
l’année précédente au Jewish Chronic Disease Hospital (JCDH) de Brooklyn. Le docteur
Chester Southam, médecin attaché au très renommé Memorial Hospital Sloan-Kettering
Institute for Cancer Research de New York, avait entrepris depuis plusieurs années des
recherches sur la défense immunitaire à l’égard des cellules cancéreuses. Avec l’accord
du docteur E. Mandel, directeur médical du JCDH, il avait injecté, sous la peau de
l’avant-bras ou de la cuisse, des cellules cancéreuses à des patients non cancéreux de cet
hôpital. Aucun malade n’avait été informé de la nature de l’expérience réalisée et
plusieurs patients étaient dans un état de conscience qui les aurait de toute façon rendus
incapables de donner un consentement valable. Il faut signaler que des expériences
semblables étaient en cours depuis près de dix ans au Memorial Hospital sur des malades
cancéreux et sur des volontaires sains. Elles avaient montré que les cellules cancéreuses
étrangères (provenant d’un autre individu) étaient rapidement rejetées par le sujet sain et,
avec plus de lenteur, par le malade cancéreux. L’enquête judiciaire mise en route à la
demande d’un membre du conseil d’administration du JCDH aboutit à l’interdiction de
poursuivre ces expériences et à une sanction (suspension de la pratique médicale, avec
sursis) pour les médecins impliqués 7 - 8 .
En 1966, dans un article retentissant publié dans le New England Journal of Medicine
(le périodique médical de très haut niveau le plus répandu aux Etats-Unis et dans le
monde), H.K. Beecher dénonçait, parmi d’autres, des expériences en cours depuis 1956
dans une institution pour enfants arriérés, la Willowbrook State School 9 . Cette institution,
prévue pour trois mille pensionnaires, en accueillait plus de six mille. Les deux tiers des
enfants avaient un quotient intellectuel inférieur à 20. On avait observé depuis longtemps
que la majorité des pensionnaires contractaient l’hépatite virale dans les mois qui
suivaient leur admission. Pour tente de trouver un remède à cette situation et pour étudier
dans des conditions « idéales » la propagation de cette maladie et les moyens de défense
mis en œuvre par les sujets infectés, Saul Krugman avait entrepris une étude qui
comprenait l’inoculation du virus à des enfants nouvellement admis. Ces travaux étaient
soutenus financièrement par l’armée et par le Health Research Council de la Ville de
New York, et approuvés par le comité sur l’expérimentation humaine de l’université de
New York 10 . Bien que l’accord des parents ou des tuteurs des enfants ait été obtenu dans
des conditions qui furent ultérieurement critiquées, ces recherches se sont poursuivies
jusqu’au bout des années soixante-dix, entraînant des prises de position contradictoires de
la part de médecins, de philosophes, de théologiens et d’éditeurs de journaux médicaux.
La défense de Krugman était basée sur le fait que ces enfants couraient de toute façon un
grand risque d’attraper l’hépatite, que les sujets soumis à l’expérimentation bénéficiaient
d’une surveillance médicale meilleure et qu’on pouvait espérer qu’ils fussent « vaccinés »
7
KATZ, J., Experimentation with human beings, New York, Russel Sage Foundation, 1973, pp. 9 à 65.
FADEN et BEAUCHAMP, op. cit. (note 4); pp. 161 à 162. Voir également Marie-Luce Delfosse « Les
comités d’éthique en Belgique – Aspects d’une évolution ». Dans : M. Moulin (éd.) Contrôler la science ?
La question des comités d’éthique. Bruxelles, De Boeck Université, 1990, pp. 84 à 85.
9
BEECHER, H.K., “Ethics and clinical research”, New England Journal of Medicine, 1966, 274, pp. 1354
à 1360.
10
KRUGMAN, S., GILES, J.P., « Viral hepatitis : new light on an old disease », Journal of the American
Medical Association, 1970, 212/6, pp. 1019 à 1029.
8
2
contre une forme plus grave de la maladie. Malgré les prises de position favorables de
certains, il ne semble pas douteux qu’une telle étude serait aujourd’hui considérée comme
inacceptable sur le plan éthique 11 .
Le troisième événement qui a pu influencer les développements de l’éthique
biomédicale au Etats-Unis vers les années 1965-1970 remonte à beaucoup plus loin. Il
s’agit de l’étude commencée dans les années trente et portant sur quatre cents Noirs
syphilitiques, laissés sans traitement – il n’y en avait pas de très efficace avant
l’introduction de la pénicilline en 1945 – et comparés à un groupe de sujets sains. Cette
étude fut poursuivie jusqu’en 1972, date où un article en première page du New York
Times attira l’attention sur ce scandale et aboutit à une enquête confiée à un comité ad
hoc désigné par le Department of Health, Education and Welfare (DHEW). Celui-ci
exigea l’arrêt de l’expérience et recommanda, dans le but d’éviter de tels abus, la création
d’un organisme permanent chargé du contrôle des recherches réalisées chez l’homme
avec l’aide financière de l’Etat fédéral. En réponse à cette recommandation, le Congrès
constitua en 1974 la National Commission for the Protection of Human Subjects of
Biomedical and Behavioral Research 12 .
Nous analyserons plus loin les travaux de cette commission, mais nous devons
revenir en arrière, en 1964, au moment de l’affaire du JCDH. C’est à cette époque – et il
y a sans doute un lien entre les deux faits – que James A. Shannon, le directeur du NIH,
chargea Robert B. Livingston d’établir un rapport sur les problèmes éthiques liés à la
recherche 13 . Ce rapport, soumis en novembre 1964, fait explicitement mention des
remous soulevés dans l’opinion publique par l’affaire du JCDH. Il met l’accent,
conformément à l’optique générale de l’époque, sur la nécessité de diminuer les risques
encourus par les sujets de l’expérience plutôt que sur la protection de leur autonomie.
C’est sur la base de ce rapport que le directeur de NIH obtint du National Advisory
Health Council une résolution (décembre 1965) assurant la protection des droits et du
bien-être des sujets soumis à une expérience. Les mesures prises comprenaient
notamment l’examen préalable obligatoire du protocole expérimental par un comité (peer
review), la nécessité d’obtenir un consentement valable du sujet (informed consent) et les
moyens pour y parvenir, l’examen critique des risques et bénéfices potentiels de
l’expérience.
Ces recommandations ne restèrent pas lettre morte puisqu’elles aboutirent à la
création de comités de révision (Institutional Review Board, IRB) dans toutes les
institutions pratiquant de la recherche clinique avec des fonds fédéraux, c’est-à-dire la
grande majorité. Au début, ces comités étaient exclusivement constitués des associés de
l’investigateur responsable 14 - 15 , représentant un bon exemple de ce que F.A. Isambert a
11
FADEN et BEAUCHAMP, op. cit. (note 4) ; pp. 163 à 164.
Ibid., pp. 165 à 167.
13
McCARTHY, C.R., « Le développement de la politique américaine de protection des sujets humains en
recherches biomédicales et comportementales », Cahiers de bioéthique, 1982, 4, pp. 121 à 138.
14
Cf. note 3.
15
VEATCH, R.M., « The national commission on IRBs : an evolutionary approach », Hastings Center
Report, 1979, 9/1, pp. 22 à 28.
12
3
appelé l’idéologie de l’autorégulation 16 . Ils furent ensuite élargis et ouverts à des nonmédecins : infirmiers, juristes, théologiens, philosophes, etc. Dans certains hôpitaux,
l’IRB était distinct d’un comité d’éthique proprement dit, le premier chargé, selon la
réglementation fédérale, d’examiner les protocoles de recherche, le second intervenant
dans le domaine de la pratique médicale et jouant le rôle d’ « aider à la décision
médicale » dans des cas cliniques qui posent des problèmes éthiques difficiles 17 .
L’influence des IRB sur la recherche, les sujets et les chercheurs a été étudiée par Gray
et Cooke qui ont publié en 1980 les résultats d’une enquête réalisée auprès de plusieurs
centaines de chercheurs et membres des comités 18 . On peut estimer que la recherche n’en
a pas souffert, que les sujets d’expériences en ont bénéficié (ils ont été mieux protégés) et
que les chercheurs ont vu leur tâche alourdie 19 . Les rejets de projets de recherche ont été
rares, mais beaucoup de protocoles ont dû être modifiés, ce qui a entraîné des retards. La
majorité des chercheurs a estimé que les changements proposés étaient judicieux et une
petite minorité seulement a considéré que les inconvénients l’ont emporté sur les
avantages. D’un point de vue plus général, l’intérêt des comités institutionnels de révision
est mis en doute pour les recherches qui n’entraînent pratiquement aucun risque, comme
par exemple les études sur dossiers ou les expériences faites sur du sang ou des tissus
prélevés dans un autre but.
Un troisième élément est venu s’ajouter, aussi en 1964, à la révélation de l’affaire du
JCDH et au rapport Livingston : la déclaration d’Helsinki sur les recherches
biomédicales, adoptée par la 18e Assemblée Médicale Mondiale et amendée en 1975 et
en 1983 par les assemblées de Tokyo et de Venise. On y retrouve les points saillants
évoqués plus haut à propos de la résolution du National Advisory Health Council :
examen obligatoire du protocole par un comité indépendant, consentement éclairé du
sujet, évaluation des risques et avantages du projet 20 . La déclaration affirma aussi que
« les intérêts de la science et ceux de la société ne doivent jamais prévaloir sur le bienêtre du sujet » 21 .
Ce sont enfin des progrès considérables de la médecine qui ont mis les médecins et
chercheurs dans des situations absolument nouvelles leur posant des problèmes moraux
inédits : les greffes d’organes, les soins intensifs (réanimation) aux nouveau-nés et aux
patients comateux, la procréation assistée, les manipulations génétiques. Ceci explique la
création de comités spécialisés, par exemple en neurochirurgie, ou l’établissement de
règles pour les transplantations d’organes par l’American Medical Association (AMA
Guidelines for Organ Transplantation 22 ), ou plus tard pour la procréation assistée par
16
ISAMBERT, F.-A., « Révolution biologique ou réveil éthique ? », Cahiers S.T.S. (Editions du C.N.R.S.),
1966, 11, pp. 9 à 41.
17
PARIZEAU, M.-H., « Clarification progressive du champ de la bioéthique et de ses méthodes »,
Réseaux. Revue interdisciplinaire de philosophie morale et politique, 1987-1988, 53-54, pp. 51 à 65.
18
GRAY, B., COOKE, R.A., « The impact of institutional review boards on research », Hastings Center
Report, 1980, 10/1, pp. 36 à 41.
19
FAGOT-LARGEAULT, A., L’homme bio-éthique. Pour une déontologie de la recherche sur le vivant,
Paris, Ed. Maloine, 1985 ; p.165.
20
Ibid. ; pp. 154 à 159.
21
Ethique médicale et droits de l’homme, Arles, Ed. Actes Sud et INSERM, 1988 ; p.172.
22
C’est au même moment qu’un comité ad hoc définit la mort cérébrale, et les deux choses sont
4
l’American Fertility Society. L’aspect peut-être le plus spectaculaire du lien entre progrès
technico-scientifiques et éthique est le moratoire décidé en 1974 par plusieurs chercheurs
de très haut niveau sur certaines recherches avec l’acide désoxyribonucléique recombiné,
souvent désignées sous le nom de « manipulations génétique ». Cette décision aboutit à la
réunion de la Conférence d’Asilomar en 1975 qui leva l’interdit mais établit certaines
normes 23 - 24 . Remarquons à ce sujet que les préoccupations des savants réunis à Asilomar
concernaient les risques courus par l’ensemble de la société, alors que toutes les
initiatives citées auparavant avaient pour but la protection de l’individu soumis à une
recherche. Notons aussi que, comme dans le cas des premiers IRB, les règles établies à
Asilomar l’avaient été par des scientifiques pour des scientifiques, sans participation de
« l’opinion éclairée » 25 .
Le concept et les activités de bioéthique ont pris un développement important autour
de l’année 1970. Le mot lui-même semble avoir été créé par V.R. Potter en 1971, date de
la parution de son livre Bioethics, Bridge to the Future qui peut être considéré comme un
jalon 26 . C’est en 1969 que fut fondé le Hastings Center, Institute of Society, Ethics and
the Life Sciences, précédant de deux ans la création du Kennedy Institute of Ethics. Le
Hastings Center publie l’indispensable Hastings Center Report et les travaux de ses
chercheurs ont été réunis, entre autres, dans les quatre volumes des Foundations of
Ethics, and its Relationship to Science 27 . Le Kennedy Institute of Ethics, installé dans
l’université Georgetown à Washington, a été créé grâce à la Fondation Joseph P.
Kennedy 28 . Il a pour but principal la recherche interdisciplinaire dans le domaine de la
bioéthique mais il assure aussi une fonction d’enseignement et d’information. C’est ainsi
que fut créé un programme d’études de quatre ans aboutissant à un doctorat en
philosophie avec spécialisation en bioéthique. L’institut publie le Journal of medicine
and philosophy. Sous la direction de Warren T. Reich fut éditée la monumentale
Encyclopedia of Bioethics en quatre volumes à laquelle collaborèrent 285 auteurs 29 . La
bibliothèque rassemble plus de douze mille volumes et des dizaines de milliers d’articles
répertoriés. Elle est abonnée à près de deux cents périodiques 30 .
évidemment liées, une définition de la mort basée sur le fonctionnement du cerveau étant indispensable
pour permettre le prélèvement d’organes destinés à la greffe. (Ad hoc Committee of the Harvard Medical
School to examine the definition of brain death, « A definition of irreversible coma », Journal of the
American Medical Association, 1968, 205, pp. 336 à 340.
23
BERG, P. et al., « Asilomar conference on recombinant DNA molecules », Science, 1975, 188, pp. 991 à
994.
24
AMBROSELLI, C., Comités d’éthique à travers le monde. Recherches en cours 1986, Paris, Ed. Tierce
et INSERM, 1987, pp. 5 à 12.
25
PARIZEAU, M.-H., « Génie génétique : exemple d’un débat », Après-demain, 1984, 26, pp. 21 à 22.
26
Cf. note 16.
27
ENGELHARDT, H.T., JR., CALLAHAN, D., (Ed.), The foundations of ethics and its relationship to
science, 4 vol., Hastings-on-Hudson, Institute of society, ethics and the life sciences, 1976-1980.
28
WALTERS, L., « Le centre de bioéthique du Kennedy Institute of Ethics », Après-demain, 1984, 266,
pp. 45 à 47.
29
REICH, W.T. (ed.), Encyclopedia of bioethics, 4 vol., New York, Free Press, 1978.
30
Staff of the Kennedy Institute of Ethics, « The Kennedy Institute of Ethics », Réseaux. Revue
interdisciplinaire de philosophie morale et politique, 1987-1988, 53-54, pp. 27 à 34.
5
L’activité en bioéthique ne s’est pas confinée dans la réflexion philosophique
théorique. L’obligation de soumettre les projets de recherche à un IRB préalablement à
toute attribution de crédits par le Department of Health, Education and Welfare a été
réaffirmée. La politique du DHEW a été méticuleusement précisée dans une publication
officielle parue en 1971 (The Institutional Guide to DHEW Policy on Protection of
Human Subjects), rapidement connu sous le nom de « livre jaune » en raison de la
couleur de sa couverture. On y retrouve des règles inspirées des recommandations
antérieures du NIH. A titre d’exemple et afin de montrer le souci de précision des auteurs
de ce guide, nous donnerons les règles qui doivent être suivies pour obtenir un
consentement considéré comme valable (informed consent) : 1) une explication honnête
(fair) des méthodes utilisées pour l’expérimentation, 2) une description des risques et
inconvénients, 3) une description des bénéfices, 4) un exposé des pratiques de rechange
possibles, 5) une offre de répondre à toute question, 6) une possibilité de cesser à tout
moment sa participation à l’expérience 31 .
Le rôle des autorités fédérales et le souci du Congrès de contrôler la recherche
biomédicale sont confirmés par la création de la National Commission for the Protection
of Human Subjects of Biomedical and Behavioral Research, instituée par une loi de juillet
1974 (National Research Act). Le texte de la loi stipulait la composition de onze
membres, cinq experts dans le domaine de la recherche sur des sujets humains et six
membres n’exerçant pas des disciplines scientifiques. Les membres de la Commission
étaient nommés par le secrétaire du DHEW. La première équipe comprenait trois juristes,
deux philosophes et une personne spécialisée dans les affaires publiques. Le mode de
fonctionnement a été bien défini par Yersley32 . Suite aux discussions d’une rencontre, on
rédigeait des ébauches de recommandations qui servaient de base aux discussions de la
rencontre suivante. Lorsqu’on arrivait à un accord, on passait à la rédaction des
recommandations définitives. Les rapports étaient accompagnés d’appendices très fournis
avec toutes les données examinées par la commission.
C’est à propos de la création de la National Commission qu’a été émise l’idée
exposée dans la citation qui ouvre cet article. M.S. Frankel exprime la même opinion :
Too often the appointment of a commission is a political strategy for delaying action on a
controversial issue 33 . Ne faut-il pas plutôt y voir une preuve de la sagesse de la
philosophie politique des Américains ? Il est certainement plus facile d’arriver à un
accord au sein d’un petit groupe de personnes qui s’attaquent longuement à un problème
précis que dans une assemblée représentative harcelée par d’innombrables problèmes et
pressée par le temps 34 . L’expérience montre d’ailleurs qu’il est souvent possible d’arriver
31
FADEN et BEAUCHAMP, op.cit. (note 4) ; p. 212.
YERSLEY, M.S., “La tâche accomplie par la commission pour la protection des sujets humains”,
Cahiers de bioéthique, 1982, 4, pp. 195 à 210.
33
FRANKEL, M.S., « Human experimentation : social and professional control », Encyclopedia of
bioethics, 1983, pp. 703 à 710.
34
Nous aimerions citer ici J. Michaud, conseiller à la Cour de Cassation et membre du Comité consultatif
national d’éthique (France) : « Les comités d’éthique qui se sont formés au cours des dernières années
constituent sans nul doute le meilleur relais entre les développements de la science et les législations
insuffisantes. On peut d’ailleurs penser que l’une des raisons de leur éclosion tient au vide législatif
qu’il fallait combler…Certes ces organismes ne tiennent pas lieu d’organes législatifs dont ils ne
32
6
à des consensus moraux « même en l’absence de tout accord sur les principes et
fondements théoriques en jeu » 35 . Jonsen et Brady expriment la même idée : « A une
époque où le pluralisme éthique est reconnu comme étant à la fois un fait et une valeur, la
commission est parvenue à atteindre l’unanimité sur plusieurs problèmes éthiques en
recherche…Ses membres ont constaté que souvent ils n’étaient pas d’accord sur les
« principes » mais qu’ils l’étaient sur les conclusions » 36 .
Il faut en tout cas admirer le travail accompli en quelques années per cette
commission. De 1974 à 1978, elle a publié neuf volumes de rapports et directives
accompagnés de neuf volumes d’appendices qui couvrent presque le champ entier de la
bioéthique en rapport avec la recherche clinique. Ces ouvrages examinent les aspects
éthiques de la psychochirurgie, de la recherche sur le fœtus, chez les prisonniers, les
malades mentaux en institutions, les enfants. Cet intérêt pour des populations
particulièrement vulnérables a sans doute été suscité par la révélation des scandales
évoqués plus haut et qui concernaient des malades séniles, des enfants arriérés ou des
Noirs. Il faut d’ailleurs remarquer que le titre officiel de la Commission contient le mot
protection 37 . Les rapports analysent et font des recommandations sur les IRB, sur la
liberté d’information, sur les services de santé. Pour Faden et Beauchamp 38 , les principes
de base reconnus par la commission et exposés dans le rapport de synthèse (The Belmont
Report : Ethical Guidelines for the Protection of Human Subjects of Research, 1978)
étaient non plus seulement la diminution du risque encouru mais le respect de
l’autonomie et la dignité de la personne, la bienfaisance et la justice 39 . Ces principes
devaient s’appliquer aux directives concernant le consentement éclairé, l’évaluation des
risques et des avantages, la sélection des sujets. Il y eut des discussions sur la nécessité
éventuelle d’appliquer des règles différentes aux recherches en sciences sociales et
comportementales d’une part et aux recherches en science biomédicale d’autre part. La
commission finit par préconiser, en principe, une seule politique pour toutes les
disciplines. Il n’empêche que les chercheurs en science sociale estimaient que les règles
établies valablement pour les sciences biomédicales n’avaient souvent aucune raison
d’être appliquées à des recherches d’un tout autre caractère réalisées dans leur domaine et
qui n’entraînaient pratiquement aucun risque, comme par exemple les enquêtes par
observation ou par interview. D’autre part, la commission « recommande que lorsqu’une
recherche doit se faire dans une population particulière, on ne sollicite pas seulement le
possèdent pas la force contraignante. Ils rendent seulement des avis et surtout ils sont des lieux de
réflexion et de stimulation à la réflexion ». In : MICHAUD, J., « Place et rôle du droit face à l’évolution
de la recherche scientifique », Comités d’éthique à travers le monde. Recherches en cours 1987, Paris,
Ed. Tierce et INSERM, 1988, pp. 157 à 162.
35
CALLAHAN, D., “L’éthique bio-médicale aujourd’hui”, Cahiers S.T.S. (Editions du C.N.R.S.), 1986,
11, pp. 43-55.
36
JONSEN, A.R., BRADY, J.V., « L’éthique en recherche : l’expérience des Etats-Unis », Cahiers de
bioéthique, 1982, 4, pp. 211 à 231.
37
TOULMIN, S., « Medical ethics in its american context. An historical survey”, Annals of the New York
Academy of Sciences, 1988, 530, pp. 7 à 15.
38
FADEN et BEAUCHAMP, op.cit. (note 4), pp. 216 à 217.
39
« Le principe de bienfaisance veut qu’on fasse du bien et qu’on s’abstienne de nuire… Le principe de
justice veut qu’on répartisse d’une façon équitable dans le corps social les risques de la recherche et les
avantages qu’elle procure » (Fagot-Lageault, op.cit. (note 19) ; p. 167)
7
consentement des sujets de recherche pris individuellement, mais on négocie un
consentement collectif avec des représentants de la population concernée » 40 .
La durée de vie de la commission avait été limitée dès sa création ; elle dut cesser ses
activités en 1978. Le secrétaire du DHEW créa à ce moment l’Ethical Advisory Board
qui fonctionna jusqu’en 1980 et s’occupa surtout des problèmes posés par la fécondation
in vitro avec transfert d’embryons (FIVETE). Dans l’intervalle, le DHEW avait été
remplacé par le Department of Health and Human Services (DHHS) qui établit de
nouvelles règles, plus souples, notamment pour les recherches dans les sciences
humaines, et celles-ci furent finalement bien acceptées.
Le Congrès avait été soucieux de ne pas laisser s’installer un vide après la dissolution
de la National Commission. En novembre 1978, il décidait de créer un nouvel organisme
qui reçut le titre de President’s Commission for the Study of Ethical Problems in
Medicine and Biomedical and Behavioral Research et qui tint sa première séance en
janvier 1980. Contrairement à la Commission nationale dont les membres étaient
nommés par le secrétaire du DHEW et dont les capacités et compétences se situaient dans
les limites de ce département, la commission du président reçut un mandat plus large et
ses membres étaient nommés par la Maison Blanche. Elle avait souvent recours à des
consultations d’experts et tenait des séances publiques 41 .
Le premier rapport rédigé par la commission présidentielle concerne la définition de
la mort. Nous le prendrons comme exemple de son mode de fonctionnement. C’est à la
suite d’un mandat du Congrès que cette étude avait été entreprise, avec comme but
d’arriver à une définition uniforme de la mort. Les conclusions, approuvées à l’unanimité
des onze membres de la commission, avaient été obtenues après consultation de
l’American Bar Association, de l’American Medical Association et de la National
Conference of Commissioners on Uniform State Laws, sans compter de nombreuses
auditions de personnalités et de spécialistes. La commission a finalement proposé
l’adoption d’un Uniform Determination of Death Act qui stipulait qu’un individu devait
être considéré comme mort s’il y avait 1) arrêt irréversible des fonctions circulatoires et
respiratoires, ou 2) un arrêt irréversible de toutes les fonctions du cerveau y compris le
tronc cérébral. Il est à noter qu’on a préféré avoir recours à des critères physiologiques
plutôt que techniques (par ex. électroencéphalogramme plat) qui risquaient d’être
rapidement obsolètes 42 .
Les neufs rapports (plus un dixième de résumés et conclusions) édités de 1981 à 1983
explorent un domaine plus large que celui étudié par la National Commission. S’ils
abordent, comme celle-ci, des problèmes de recherche biomédicale (le génie génétique, le
40
FAGOT-LARGEAULT, op.cit. (note 19) ; p. 75.
CAPRON, A.M., « Harmonies and conflicts in law and biomedical ethics », Annals of the New York
Academy of Sciences, 1988, 530, pp. 37 à 45.
42
President’s Commission for the Study of Ethical Problems in Medicine and Biomedical and Behavioral
Research, Defining death. Medical, legal and ethical issues in the determination of death, Washington,
U.S. Government Printing Office, 1981, 525 p.
41
8
conseil génétique, la réglementation de la recherche au niveau fédéral), ils s’attaquent
aussi à des problèmes plus directement liés aux soins des malades et à la décision
thérapeutique (la définition de la mort, l’acharnement thérapeutique et l’euthanasie, le
consentement éclairé et la relation patient-médecin) et même à des aspects sociopolitiques comme l’accès aux soins de santé. Alexandre M. Capron, qui en dirigea les
travaux (executive director), a attribué ses succès à la méthode de travail adoptée.
L’étude d’un problème particulier commençait par un inventaire des points d’accord
permettant d’établir une base commune aux discussions ultérieures, plutôt que de tenter
de définir d’emblée les grands principes, ce qui n’aurait pas manqué d’amener les
participants à des positions violemment heurtées (the clash of grand principles). Les
membres avaient aussi le souci de mener leurs réflexions et de rédiger leurs conclusions
prioritairement en fonction d’un public ciblé, par exemple les médecins et les législateurs
pour le rapport sur la définition de la mort, plus spécialement les chercheurs et les
fonctionnaires fédéraux pour les rapports consacrés à la recherche sur des sujets humains.
Un autre facteur de succès a été, selon Capron, le fait d’être pressé par le temps, ce qui a
stimulé l’activité de tous les participants 43 .
Comme la Commission nationale, la Commission du président avait en effet été
instaurée pour une durée illimitée. Créée en 1978, elle ne commença ses travaux qu’en
janvier 1980 et elle aurait dû les cesser le 31 décembre 1982. Sa vie ne fut prolongée que
de trois mois, alors que, de l’avis de son directeur exécutif, un délai de deux ans eût été
souhaitable, mais fut refusé « pour des raisons politiques » - qu’il ne précise d’ailleurs
pas 44 . Le président de la commission, Morris B. Abrams, quant à lui, redoutait plutôt le
danger d’un engagement permanent du gouvernement dans le contrôle de la recherche et
de la pratique médicale et se prononçait en faveur du soutien financier de travaux de
réflexion éthique réalisés dans le monde académique et dans des institutions privées ou
semi-privées, avec recours éventuel à des organes temporaires 45 .
Le rôle de la politique dans le contrôle de la recherche et l’affrontement de positions
difficilement conciliables sur ce sujet apparaissent clairement lorsqu’on essaye de faire
l’histoire de la régulation sociale durant la période qui a suivi la dissolution de la
Commission du président. En 1984, le président Reagan oppose son veto à une tentative
du Congrès de créer un nouveau conseil destiné à étudier les problèmes éthiques en
relation avec la recherche, particulièrement dans le domaine du génie génétique. Ces
problèmes étaient examinés depuis 1979 par un comité dépendant du NIH, le
Recombinant DNA Advisory Committee (RAC) qui n’avait, en principe, qu’à s’occuper
des recherches soutenues financièrement par le NIH, mais qui, dans les faits, et grâce au
sérieux de ses travaux quasi unanimement appréciés, avait une influence bien plus large.
Beaucoup de chercheurs auraient souhaités que les prérogatives de ce comité soient
étendues à l’ensemble de la recherche dans ce domaine 46 . En fait, le Congrès, passant
outre au veto du président, créa en novembre 1985 un Biomedical Ethics Board
43
Cf. note 41.
Cf. note 41.
45
HOSFORD, B., Bioethics committees. The health care provider’s guide, Rockville (Maryland), Aspen
Publication, 1986; p. 53.
46
JOHNSON, I.S., « Role of the recombinant advisory committee », Science, 1984, 224; p. 243.
44
9
dépendant directement de lui et composé de six sénateurs et de six représentants, les
Démocrates et les Républicains étant en nombre égal. A cette commission ou conseil était
adjoint un comité consultatif (Biomedical Ethics Advisory Committee) formé de douze
experts dans les différents domaines de l’éthique biomédicale (chercheurs, cliniciens,
philosophes, juristes, spécialistes des sciences sociales et des affaires publiques, etc.) et
de deux membres sans compétence particulière, des « citoyens ordinaires ». Le comité
consultatif devait préparer le travail pour la commission, qui elle-même devait faire
rapport annuellement devant le Congrès. Le champ d’action était défini très largement et
concernait les implications éthiques de la délivrance des soins et de la recherche
biomédicale et comportementale, la protection des sujets humains, particulièrement dans
le domaine du génie génétique. Mais toutes ces décisions restèrent lettre morte jusqu’en
avril 1989 ! Si les douze membres du Board furent effectivement désignés, ceux du
comité consultatif ne l’étaient pas encore en avril 1988 47 , certains membres du Board
exigeant qu’au moins cinq membres du comité consultatif aient une position
explicitement en faveur du mouvement pour les droits de la vie, c’est-à-dire opposée à
l’avortement et à l’euthanasie. Devant l’imminence de la dissolution de la commission,
une solution de compromis semble avoir été trouvée et le comité consultatif s’est réuni
pour la première fois le 27 septembre 1988 pour élire son président, Alexandre Capron,
l’ancien directeur exécutif de la commission du président et qui occupe actuellement la
chaire « médecine et loi » à l’université de la Californie du Sud 48 - 49 . Les premiers
travaux viennent de commencer (avril 1989). Le comité devrait livrer un premier rapport,
sur le génie génétique, en mars 1990, un second, sur l’alimentation et la nutrition des
mourants, en mai de la même année, et le troisième, sur la recherche sur fœtus humains,
en novembre. Nous n’avons pas la prétention de pénétrer les arcanes de la politique
américaine et des conflits entre exécutif et législatif, mais nous pouvons espérer qu’après
un retard de près de six ans, ce nouvel organe publie des travaux aussi remarquables que
ceux des deux commissions qui l’ont précédé.
47
MFS, « A once and future biomedical ethics board”, Hastings Center Report, 1988, 18/2, pp. 2 à 3.
MULLAN COOK-DEEGAN, R., « US bioethics board and advisory panel begin their tasks; chairman
elected”, Kennedy Institute of Ethics Newsletter, 1989, 3/2; p. 4.
49
CAPRON, A.M., « Bioethics on the congressional agenda », Hastings Center Report, 1989, 19/2, pp. 22
à 23.
48
10
KENIS Y., HEUSKIN L., Dans : M. Moulin (éd.), Contrôler la science ? La question des
comités d’éthique. Bruxelles, De Boeck-Université, 1990, 65-80.
Le comité national d’éthique en France.
La création du Mouvement universel de la responsabilité scientifique (MURS) en
1974, à la suite du colloque « Biologie et devenir de l’homme » organisé à la Sorbonne
par le recteur Mallet, est souvent regardée comme un événement précurseur de la
naissance du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la
santé (CCNE) 1 - 2 . C’est d’ailleurs la même année que fut créé le comité d’éthique de
l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) qui peut, lui, être
considéré comme le précurseur direct du CCNE 3 . Les membres de ce comité étaient tous
biologistes ou médecins. Quelques années plus tard étaient constitués, d’abord un comité
d’éthique local à Toulouse en 1978, et ensuite des comités rattachés à des centres
hospitalo-universitaires, à Marseille, à Rouen, à Lyon et à Paris (Assistance publique en
1981, Centre hospitalier universitaire, CHU, du Kremlin-Bicêtre en 1982) 4 .
Ces institutions furent la conséquence de prises de positions éthiques au niveau
international, en particulier la déclaration d’Helsinki (1964), révisée à Tokyo (1975) et à
Venise (1983), et la déclaration de Manille (1981) 5 qui préconisaient l’examen des
protocoles d’expérimentation humaine par des comités indépendants. Ceux-ci devraient
considérer à la fois les aspects éthiques et les aspects scientifiques des programmes de
recherche, étant entendu qu’une expérimentation sur l’homme qui serait sans valeur
scientifique serait ipso facto contraire à l’éthique.
1
FAGOT-LARGEAULT, A., L’homme bio-éthique. Pour une déontologie de la recherche sur le vivant,
Paris, Ed. Maloine, 1985.
2
BERNARD, J., « Discours inaugural », Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie
et de la santé, Rapport 1984, Paris, La Documentation française, 1985, pp. 17 à 20.
3
AMBROSELLI, C., « Les institutions en question », Après-demain, 1984, 266, pp. 5 à 10.
4
JOANNET, P., « Comités d’éthique : nécessité, contrainte ou parapluie ? », Autrement, L’éthique corps et
âme, 1987, 93 (octobre), pp. 75 à 82.
5
Il s’agit, pour la déclaration de Manille, de directives proposées par l’Organisation mondiale de la santé
(OMS) et par le Conseil des organisations internationales des sciences médicales (CIOMS). La déclaration
d’Helsinki a été adoptée par la dix-huitième Assemblée médicale mondiale et révisée par les assemblées
de Tokyo et de Venise. Il faut rappeler ici que les premières règles éthiques ont été établies à l’occasion
des procès des crimes commis dans les camps de concentration nazis (code de Nuremberg, 1947). Ces
différents textes sont reproduits dans : Conseil d’Etat (Section du rapport et des études), Sciences de la
vie. De l’éthique au droit, Paris, la Documentation française, 1988.
11
Création, composition et fonctions du Comité consultatif national
d’éthique
Le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé
(CCNE) a été créé par décret du président de la République en date du 23 février 1983 6 .
Il « a pour mission de donner son avis sur les problèmes moraux qui sont soulevés par la
recherche dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé » 7 . Dans son
allocution inaugurale, le président François Mitterand s’est demandé « qu’elles seraient
les conséquences d’un avis formulé par le comité », ce qui n’est pas explicitement
formulé dans le décret de la fondation. La réponse a été : « Dans tel ou tel cas, le
Gouvernement pourra être appelé à réglementer, le Parlement à légiférer, les
organismes de recherche à orienter leurs programmes : et c’est précisément parce qu’on
ne saurait tout prévoir que ce texte reste ouvert » 8 . Dans l’éditorial du numéro de
septembre 1989 de la Lettre d’information du CCNE, Jean Michaud, conseiller de la
Cour de Cassation et membre du comité, confirme et précise même cette attitude : « On
le (le CCNE) soupçonne ici ou là de se prendre pour le législateur, de manifester quelque
imperium. C’est bien entendu parfaitement inexact, puisque nous ne faisons que
poursuivre la tâche entreprise à nos débuts et que nous assigne le texte qui nous institue :
rendre des avis dont nous ne cessons de proclamer qu’ils n’ont aucune force
obligatoire ». Remarquons que la mission du comité, telle qu’elle est définie dans le
décret de 1983, est limitée en principe à la recherche et ne concerne donc pas les
problèmes moraux liés à la pratique médicale.
Le comité comprend, outre son président, nommé par le président de la République,
cinq personnalités, désignées elles aussi par ce dernier, et appartenant aux principales
familles spirituelles et philosophiques 9 , et seize personnalités qualifiées, choisies en
raison de leur compétence et de leur intérêt pour les problèmes éthiques 10 , désignées par
les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, le vice-président du Conseil d’Etat,
le premier président de la Cour de Cassation et divers ministres (de la santé, de la
recherche, de l’éducation, etc.). Il comprend aussi quinze personnalités appartenant au
secteur de la recherche (Académie des sciences, Académie de médecine, Collège de
France, les universités, le CNRS, l’INSERM, etc.) 11 . Ces personnes – qui peuvent être
qualifiées de « chercheurs » ou de « spécialistes » – sont nommées par les dirigeants de
ces organismes. Aucun membre n’est élu par ses pairs.
6
Décret n° 83-132 du 23 février 1983 (Journal officiel du 25 février 1983), modifié par les décrets n° 83740 du 9 août 1983 (J.O. du 11 août 1983 et Rect. J.O. du 26 novembre 1983) et n° 86-174 de février 1986
(J.O. du 7 février 1986).
7
Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, Rapport 1984, Paris, La
Documentation française, 1985; p. 11.
8
Ibid; p. 15.
9
Quatre membres dans le décret initial du 23 février 1983, dont à titre d’exemple, une théologienne
protestante, un philosophe marxiste et le directeur du journal La Croix.
10
Le nombre initial a été de quatorze, porté ensuite à quinze (1986), puis à seize (1987).
11
Le nombre initial était de quatorze.
12
L’article 6 du décret stipule que le comité est renouvelé par moitié tous les deux ans,
un tirage au sort devant être effectué à la fin de la première période. Ceci n’implique pas
un changement obligatoire des personnes, comme le montre sa composition actuelle qui
comprend encore de nombreux membres désignés au moment de sa création. C’est
notamment le cas de son président, le professeur Jean Bernard.
Une section technique constituée de onze membres est chargée « d’instruire les
dossiers qui seront soumis à l’examen du comité et de traiter toutes les autres demandes
d’avis qu’il ne serait pas jugé utile d’examiner en comité plénier » 12 .
Depuis 1985, le comité étudie, au sein de trois groupes de réflexion, et en dehors de
toute demande d’avis, des problèmes plus fondamentaux qui concernent, respectivement
les neurosciences, la connaissance, et la notion de personne humaine. Ces groupes de
travail peuvent faire appel à des correspondants et à des experts étrangers au comité. Le
rapport Recherche biomédicale et respect de la personne humaine a été publié en
décembre 1987 13 . Nous y reviendrons plus loin.
Le comité est chargé d’organiser à Paris et dans diverses villes de province, des
journées annuelles ouvertes au public, au cours desquelles sont exposés les résultats des
travaux de l’année écoulée et où un grand thème se rattachant à la mission du comité est
discuté, en principe, avec les auditeurs. Nous avons eu l’occasion d’assister aux journées
de 1987 et de 1988 où les thèmes choisis étaient « éthique, formation et information »
pour les premières et « éthique et connaissance » pour les secondes. Nous avons été
frappés par le caractère solennel, pompeux même de ces séances (le local choisi était le
grand amphithéâtre de la Sorbonne) et par le peu de place laissé à une discussion
approfondie, rendue difficile par le cadre et par le nombre des intervenants – peut-on dire
des participants ? Le compte rendu des journées annuelles paraît dans un Rapport publié
chaque année par la Documentation française et qui contient aussi les textes des avis,
recommandations et rapports émis l’année précédente. Le comité publie enfin une Lettre
d’information trimestrielle.
Autres instances officielles ou officieuses
Avant de présenter le contenu des principaux avis émis par le CCNE, il nous paraît
utile de citer ici quelques autres textes élaborés en France par des instances plus ou moins
officielles au cours des quatre ou cinq dernières années et qui touchent à des problèmes
de bioéthique.
En octobre 1986, paraît un rapport sur les procréations artificielles rédigé par un
groupe de cinq personnalités qui avaient été chargées par le Premier ministre de recueillir
les avis et réflexions des experts et de l’opinion sur ce sujet. Les rapporteurs font des
12
13
Comité consultatif national d’éthique, op.cit. (note 7); p. 95.
Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, Recherche biomédicale et
respect de la personne humaine. Explicitation d’une démarche, Paris, La Documentation française, 1987.
13
propositions qui ont pour but, entre autres, d’assurer la transparence des pratiques de la
procréation médicalement assistée et la gratuité des dons de gamètes et d’embryons,
d’engager un programme de prévention des maladies sexuellement transmissibles,
d’approfondir la réflexion bioéthique par la multiplication des comités d’éthique locaux
et par la création d’un enseignement interdisciplinaire, d’inscrire la politique française en
matière de procréation médicalement assistée dans une démarche internationale et
d’étudier l’état du droit dans la filiation et le problème de l’accès aux origines, c’est-àdire la levée éventuelle de l’anonymat du donneur 14 .
Un autre document important émane du Conseil d’Etat qui, à la suite d’une demande
du Premier ministre, a étudié les aspects juridiques de l’éthique ou, pour reprendre les
termes mêmes du titre de l’étude, le passage « de l’éthique au droit » 15 . Comme il est dit
dans l’avant-propos, « il est apparu que l’éthique, qui demeure évidemment nécessaire,
ne suffit pas. Des règles et des institutions sont indispensables, pour tirer les
conséquences des procédés nouveaux, par exemple en matière de filiation ou pour éviter
leurs dérives telles que les manipulations génétiques » 16 . Le travail a été réalisé par un
groupe de spécialistes du droit public et du droit privé, en liaison étroite avec le CCNE.
Cette collaboration était assurée par la participation de tous les juristes du comité aux
travaux du groupe. Ce travail, très complet, envisage les problèmes posés par
l’expérimentation humaine (les essais sur l’homme) et l’utilisation des éléments et des
produits du corps humain, les questions en relation avec la procréation humaine
(procréation médicalement assistée, diagnostic prénatal, utilisation de l’embryon humain)
et le cadre institutionnel (registres épidémiologiques, comités d’éthique, garanties et
sanctions). Il présente en annexe une étude de droit comparé (couvrant huit pays et le
Conseil de l’Europe) et les textes du Code de Nüremberg, de la Déclaration d’Helsinki,
de la Déclaration de Manille, ainsi que des extraits du Code pénal, du Code civil et du
Code de la santé publique.
Certains aspects de la bioéthique sont abordés dans un ouvrage publié en 1989 par la
Commission nationale consultative des droits de l’homme à l’occasion du bicentenaire de
la Révolution française 17 . On y trouve notamment un chapitre rédigé par France Quéré,
théologienne protestante, membre du CCNE, qui attire l’attention sur les dangers
possibles des succès de la biologie et de la médecine et le risque de passer par
d’imperceptibles transitions du zygote à l’enfant, en passant par l’embryon et le fœtus, de
la mort au sommeil, par les intermédiaires du coma dépassé, de l’état végétatif chronique
et de la syncope ! D’où la nécessité de « revenir à une perception de la personne qui
ouvrirait le plus largement possible le compas, jusqu’à inclure ses formes potentielles ou
14
ALNOT, M.O., LABRUSSE-RIOU, C., MANDELBAUM-BLEIBTREU, J., PEROL, Y.,
ROSENCZVEIG, J.P., Les procréations artificielles. Rapport au Premier ministre, Paris, La
Documentation française, « Collection des rapports officiels », 1986.
15
Conseil d’Etat, Section du rapport et des études, Sciences de la vie. De l’éthique au droit, Paris, La
Documentation française, Coll. « Notes et études documentaires », 1988.
16
Ibid; p. 7.
17
Commission nationale consultative des droits de l’homme, 1989, Les droits de l’homme en question,
Paris, La Documentation française, 1989.
14
rétrospectives, où les interventions de la science ne seraient autorisées qu’en des cas
impérieux et sous contrôle de comités d’éthique » 18 .
Trois chapitres traitent plus spécifiquement des rapports entre la bioéthique et les
droits de l’homme. Michel Tibon-Cornillot, chercheur à l’Ecole des hautes études en
sciences sociales, dans un chapitre intitulé « Respect éthique et instrumentalisation des
corps en biologie et en médecine; du génie génétique aux manipulations d’embryons » 19
fait un bon exposé des principales découvertes dans ce domaine et propose trois attitudes
possibles en face de ces découvertes, soit une valorisation de la subjectivité avec comme
conséquence une prééminence de l’individu sur la société, soit une conception holiste de
l’éthique qui privilégie l’esprit communautaire, le groupe social, la famille, soit enfin
l’attitude de beaucoup de chercheurs qui considèrent que le progrès dans la connaissance
et la discipline dans la recherche sont déjà en soi des valeurs éthiques.
René Frydman, professeur de médecine, expose les aspects scientifiques des
techniques de procréation artificielle utilisées tant pour le traitement de la stérilité que
pour la recherche. Il aborde le problème des mères porteuses, de la fécondation in vitro et
du sort des embryons surnuméraires 20 . Les aspects juridiques de ces recherches sont
étudiés par Michelle Gobert, professeur de droit, qui distingue les progrès intervenus dans
la reproduction humaine et le traitement de la stérilité (insémination artificielle, dons
d’ovules, maternité pour autrui, FIVETE) de ceux intervenus ou à venir dans le devenir
de l’homme (identification des gènes, thérapie génétique, diagnostic prénatal) 21 . Elle
adopte en général une position très ouverte qui, tout en dénonçant elle aussi la tentation
de l’eugénisme, remarque que le principe de la thérapie génique sur les cellules
somatiques, sans modification du patrimoine génétique, est généralement admis et que
dès à présent l’avortement pour cause de détresse est possible librement jusqu’à la fin de
la dixième semaine et que l’avortement thérapeutique peut être pratiqué pendant toute la
grossesse si l’enfant à naître présente une affection particulièrement grave et incurable.
En résumé, ces trois ouvrages, dans leur ensemble, présentent en détail les faits
scientifiques récents qui posent le plus de problèmes éthiques, c’est-à-dire de façon tout à
fait prépondérante ceux qui touchent à la reproduction humaine. Ils abordent à peine la
question des essais thérapeutiques 22 et ignorent complètement le débat sur l’euthanasie.
Les solutions proposées dans le domaine de la reproduction sont remarquablement
18
QUERE, F., « Entre l’intolérable et l’inqualifiable », Ibid.; p. 76.
Ibid.; pp. 281 à 311.
20
FRYDMAN, R., « Incidences des progrès des sciences biologique et médicale sur le droit des personnes.
Aspects scientifiques », Ibid.; pp. 313 à 316.
21
GOBERT, M., « Incidences des progrès des sciences biologique et médicale sur le droit des personnes.
Aspects juridiques », Ibid.; pp. 317 à 322.
22
Il convient toutefois de signaler que l’expérimentation est traitée de façon plus approfondie dans un
ouvrage intitulé Expérimentation humaine et droits de l’homme, Paris, Presses universitaires de France,
1988, publié par la Fondation Marangopoulous pour les droits de l’homme (Athènes), dont nous ne
rendons pas compte parce qu’il s’agit des actes d’un colloque organisé dans l’île de Crête en mai 1988
par l’Institut de droit comparé de Paris et le Centre international de criminologie comparée de
l’Université de Montréal, et qui sort donc du cadre que nous avons choisi.
19
15
cohérentes et restent très ouvertes. Les seuls interdits absolus concernent les
manipulations du génome et le commerce du corps et des organes.
Les avis et rapports du CCNE
Depuis sa création, le CCNE a émis quatorze avis qui ont fait l’objet d’une publication
dans les rapports annuels parus de 1984 à 1988, plus quatre avis, non encore publiés, en
1989. Chaque avis est accompagné d’un rapport, parfois dissocié en rapports technique,
scientifique et éthique, qui est un document préparatoire n’engageant pas le comité. Il est
parfois signalé qu’une décision n’a pas emporté un accord unanime, mais il n’est donné
aucune indication sur des votes éventuels. A deux reprises, une note signée exprime
l’opinion divergente d’un membre.
L’annexe donne la liste des avis jusqu’au 16 décembre 1989. Nous en analyserons
sept qui peuvent être regroupés sous quatre rubriques : la reproduction humaine et la
procréation artificielle (au sens large), les états végétatifs chroniques et de mort cérébrale,
le sida, les essais de nouveaux traitements chez l’homme. La longueur des avis est très
variable : cinq fois ils ne dépassent pas une page, sept fois ils sont de une et demi à cinq
pages; les deux derniers ont respectivement neuf et dix-huit pages.
Le comité a aussi publié une brochure intitulée Recherche biomédicale et respect de
la personne humaine rédigée par Lucien Sève. Il s’agit du rapport d’un groupe de travail
mis en place en 1985 et dont le texte a été plusieurs fois discuté et modifié par le comité
plénier 23 .
Avis relatifs à la reproduction humaine
La prédominance des problèmes éthiques liés à la reproduction humaine apparaît
clairement lorsqu’on constate que le comité a émis six avis sur ce sujet (voir annexe).
Nous en retiendrons deux pour une analyse forcément un peu sommaire : le seul avis sur
la recherche sur les embryons in vitro et leur utilisation à des fins médicales et
scientifiques a dix-huit pages et les rapports qui l’accompagnent quarante-quatre pages.
Un point auquel le comité attache manifestement une grande importance puisqu’il est
repris dans chaque avis sur le sujet est la qualité de personne humaine potentielle
attribuée à l’embryon ou au fœtus 24 dès sa conception « et dont le respect s’impose à
tous ». Il est quasi symbolique que cette notion apparaisse dans la première phrase du
premier avis du comité (Avis sur les prélèvements de tissus d’embryons ou de fœtus
humains morts à des fins thérapeutiques, diagnostiques et scientifiques, avril 1984). On
23
24
Comité consultatif national d’éthique, op.cit. (note 13).
Dans tous les textes consacrés à la reproduction humaine, le comité ne fait pas de différence entre les
termes « embryon » et « fœtus » estimant que la limite entre ces deux stades ne peut être définie de façon
scientifique.
16
trouve dans ce document un rejet catégorique de toute utilisation commerciale ou
industrielle des embryons. Seule l’utilisation à des fins diagnostiques est considérée
comme légitime sans aucune réserve. L’utilisation des tissus embryonnaires dans un but
thérapeutique n’est admise que dans des cas exceptionnels, pour des maladies
particulièrement graves et pour lesquelles aucune autre méthode de traitement n’est aussi
efficace. L’usage pour la recherche ne doit être permis que dans des établissements
agréés et si le but poursuivi est spécialement important et utile au progrès des
thérapeutiques. L’avis d’un comité d’éthique doit avoir été obtenu. Lorsque le fœtus
provient d’un avortement provoqué, l’équipe de chercheurs doit être totalement
indépendante de celle qui procède à l’interruption volontaire de grossesse. Enfin, le père
et la mère ont un droit de veto. Ils peuvent s’opposer aux prélèvements et expériences
évoqués plus haut mais il n’est pas indispensable d’obtenir leur consentement.
L’autre avis que nous désirons commenter concerne les recherches sur les embryons
humains in vitro et leur utilisation à des fins médicales et scientifiques (1986). Il prolonge
et complète l’avis dont nous venons de parler. Il examine les conditions d’application de
la technique de la fécondation in vitro et transfert d’embryons (FIVETE) et de ce qui en
découle, le sort des embryons surnuméraires. Avant d’aborder l’aspect éthique, nous
décrirons très brièvement les aspects scientifiques et techniques de ces méthodes. Les
ovocytes (œufs non fécondés) sont recueillis chez la femme par une ponction réalisée
sous laparoscopie, après une période de stimulation hormonale. Celle-ci est rendue
nécessaire par les besoins de réimplanter, après fécondation in vitro, plusieurs œufs
fécondés (trois est le chiffre habituellement retenu) pour avoir une chance raisonnable de
grossesse. Dans ces conditions, le taux de succès par tentative est situé entre quinze et
vingt pour cent. La réimplantation d’un nombre supérieur d’ovocytes entraîne une
fréquence trop élevée de grossesses multiples, pouvant atteindre près de vingt pour cent,
alors qu’il n’est que de un pour cent normalement en moyenne. Comme le nombre
d’ovocytes obtenus par ponction dépasse souvent le chiffre de trois, on dispose donc d’un
certain nombre d’embryons surnuméraires qui peuvent être congelés et conservés
pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, et être utilisés après ce délai pour une
nouvelle tentative de grossesse (ou pour tout autre usage, comme nous le verrons plus
loin). Signalons à ce sujet que la conservation d’ovocytes non fécondés reste aujourd’hui
extrêmement aléatoire.
Les problèmes éthiques soulevés par ces méthodes sont multiples. L’avis reprend la
notion de personne humaine potentielle déjà évoquée plus haut. Il récuse par contre le
concept de pré-embryon que certains chercheurs auraient voulu distinguer de l’embryon
et auquel ne saurait s’appliquer la qualité de personne humaine (potentielle). Ce stade
irait pour certains jusqu’au moment de l’implantation (sixième jour), pour d’autres
jusqu’à l’apparition d’un axe de symétrie, la ligne primitive (quatorzième jour),
l’argument étant, dans ce dernier exemple, que la section du pré-embryon en deux parties,
jusqu’à ce stade, peut donner naissance à des jumeaux identiques. Il est affirmé que la
finalité de la FIVETE est la naissance d’enfants et qu’il est exclu d’utiliser cette
technique pour produire des embryons en vue de la recherche. Comme dans l’avis
précédent, il faut rejeter toute commercialisation. Les fécondations et autres interventions
17
médicales ou scientifiques sur ce matériel ne peuvent se faire qu’avec l’accord des
géniteurs.
Le sort des embryons surnuméraires est longuement discuté. Leur destruction est
considérée comme un moindre mal. L’utilisation en vue d’une deuxième grossesse, après
succès d’une première FIVETE, n’a pas recueilli l’accord unanime du comité mais n’est
pas rejetée en principe. Le don d’embryon à un autre couple n’est envisagé que par
certains membres du comité et le souhait général est plutôt que des normes juridiques
soient établies, le don d’enfant n’étant pas licite dans le droit français. L’utilisation des
embryons à des fins de recherche n’est pas considérée comme souhaitable, mais elle n’est
pas exclue non plus a priori. Ces recherches doivent être contrôlées et ne pourraient être
entreprises qu’après que le projet procréatif ait été réalisé ou abandonné et seulement
après avoir reçu un avis favorable du CCNE. Un moratoire de trois ans est proposé pour
les recherches sur le diagnostic génique in vitro avant transplantation pour éviter le tri
génétique et l’eugénisme. Les recherches qui devraient être interdites sont la thérapie
génique germinale, c’est-à-dire la modification artificielle du génome humain, la
transplantation d’embryons entre l’homme et l’animal, la création de chimères, la
gestation masculine. Bien d’autres points sont développés dans ce long avis accompagné
d’un rapport plus long encore. Il n’est pas possible de les discuter ni même de les citer
ici. Notons seulement que l’accent est mis sur la détresse du couple stérile, mais que
l’intérêt des parents potentiels ne peut jamais avoir la prééminence sur l’intérêt du futur
enfant ou, pour reprendre une formule classique, qu’avant de réclamer le droit à l’enfant,
il faut penser aux droits de l’enfant.
Avis sur les états végétatifs chroniques et sur l’état de mort cérébrale
L'avis sur les expérimentations sur les malades en état végétatif chronique a été émis
en 1986 à la suite de ce qu'on a appelé « l'affaire Milhaud » : le docteur Alain Milhaud,
chef du département d'anesthésie-réanimation au Centre hospitalier universitaire
d'Amiens, avait réalisé en mai 1985 une expérience de transfusion sanguine à haut débit,
par voie intra-osseuse, chez un sujet jeune qui se trouvait dans un état végétatif chronique
depuis trois ans. L'expérience avait consisté à prélever un litre de sang au malade et à le
lui réinjecter immédiatement dans l'os iliaque en deux minutes. Le prélèvement du sang
avait entraîné une chute de tension, rapidement corrigée par l'administration d'un liquide
de substitution (le Plasmion). La transfusion du sang s'était déroulée sans incident et il n'y
eut pas de suites défavorables. Dans une lettre adressée en décembre 1985 au CCNE, le
docteur Milhaud demandait l'autorisation de répéter cette expérience chez d'autres
patients et, sur un plan plus large, de pratiquer des essais thérapeutiques sur des sujets en
état végétatif chronique. La réponse du comité fut négative sur les deux points. Elle
souligne, avec une certaine insistance, parfois même avec ironie, les insuffisances
techniques et les erreurs de la première expérience : prélèvement d'une trop grande
quantité de sang, conservation défectueuse des échantillons prélevés pour analyse,
inutilité et danger de la curarisation. Sur le plan éthique, l'avis et le rapport insistent sur le
fait que l'expérience ne pouvait avoir aucun intérêt pour le malade mais comportait des
risques non négligeables et était donc en contradiction avec l'avis sur les essais de
nouveaux traitements chez l’homme (voir plus loin) où il est nettement affirmé qu'un
18
malade ne peut pas faire l'objet d'un essai thérapeutique sans rapport avec le traitement de
la maladie qui l'atteint. Aucun accord du patient ne pouvait, pas définition, être obtenu.
Les proches du malade n'avaient pas été consultés et l'avis d'un comité d'éthique local
n'avait pas été demandé. En ce qui concerne la question plus générale des essais
thérapeutiques chez des patients en état végétatif chronique, le comité relève, pour s'y
opposer de façon absolue, la formule utilisée par le docteur Milhaud selon laquelle ces
malades seraient « des modèles humains presque parfaits et constitueraient des
intermédiaires entre l'animal et l'homme ».
On ne peut s'empêcher de penser à la lecture de cet avis que le comité a été choqué
par la demande du docteur Milhaud et qu'il a réagi d'une façon un peu précipitée et
affective, peut-être sans avoir envisagé d'une façon tout à fait sereine tous les aspects du
problème 25 . Sans utiliser les expressions contestées d'Alain Milhaud, on peut estimer que
le patient en état végétatif chronique pourrait, avec l'accord de ses proches et pour autant
qu'il n'ait pas manifesté auparavant son opposition de principe, être soumis à des
expériences difficilement réalisables dans d'autres conditions et d'un intérêt scientifique
particulièrement important.
En 1988, le comité a émis un avis sur des problèmes très proches de ceux qui ont été
examinés dans l'avis précédent, mais concernant cette fois des sujets en état de mort
cérébrale. Ce terme est considéré comme préférable à celui de «coma dépassé» qui risque
d'entraîner une confusion avec les comas prolongés. La mort cérébrale est définie comme
l'arrêt irréversible de toutes les fonctions du cerveau (hémisphères et tronc cérébral)
confirmé par cinq signes dont un électro-encéphalogramme plat constaté sur deux
enregistrements effectués à au moins six heures d'intervalle. Un tel état ne peut être
maintenu — artificiellement, grâce aux techniques de réanimation — que pendant
quelques jours. La mort cérébrale est la mort de l'individu; on peut à ce stade arrêter la
respiration et la circulation artificielles. Celles-ci peuvent être maintenues un certain
temps pour permettre le prélèvement d'organes en vue de la transplantation si le sujet n'a
pas manifesté d'opposition de son vivant (loi du 22 décembre 1976, dit loi Caillavet, et
décret du 31 mars 1978). L'avis est négatif en ce qui concerne l'expérimentation à ce
stade et stipule que la situation ne peut être comparée à celle qui vient d'être évoquée et
qui concerne le prélèvement d'organes en vue de la transplantation : «Il y a une différence
entre une transplantation d'organes susceptibles de sauver une vie humaine dans
l'immédiat, et une expérimentation dont le résultat n'est pas prévisible». Une telle
interprétation peut être contestée et l'est effectivement par Henri Caillavet lui-même dans
une lettre ouverte au professeur Jean Bernard et dont il est le co-signataire (14 décembre
1988). Il y est rappelé que l'article 2 de la loi stipule que «des prélèvements peuvent être
effectués à des fins thérapeutiques ou scientifiques, sur le cadavre d'une personne
n’ayant pas fait connaître de son vivant son refus d'un tel prélèvement». La lettre ouverte
poursuit: «Ainsi, le législateur s'est bien gardé de préciser qu'il s'agissait obligatoirement
d'organes; des prélèvements de tous types (liquides physiologiques ou pathologiques,
25
Cet avis a cependant été confirmé en 1988 en annexe au rapport qui accompagne l’avis sur
l’expérimentation médicale et scientifique sur des sujets en état de mort cérébrale (Comité consultatif
national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, Rapport 1988, Paris, La Documentation
française, 1989; p.22.
19
grandeurs physiologiques, images radiologiques ou vidéo, etc.) peuvent parfaitement
entrer dans le cadre de cet article 2». Une déclaration aussi nette de la part de l'auteur de
la loi nous paraît difficilement contestable et on peut s'étonner de l'opposition délibérée et
répétée du CCNE à toute expérimentation sur les patients en état végétatif chronique ou
en état de mort cérébrale, ces sujets ne pouvant, par définition, pas souffrir de ces
manoeuvres. Il nous semble que l'intérêt potentiel des recherches effectuées devrait être
pris en considération pour les accepter ou les refuser. Le bien futur de la société ne
devrait peut-être pas être systématiquement placé dans une situation d'infériorité par
rapport au «respect» de la dépouille mortelle. Est-ce d'ailleurs manquer de respect que
soumettre celle-ci à une expérimentation utile, dans des conditions rigoureusement
contrôlées ?
Avis sur les essais de nouveaux traitements
L'avis sur les problèmes éthiques posés par les essais de nouveaux traitements chez
l'homme (Rapport 1984) concerne non seulement les essais de nouveaux médicaments
mais l'ensemble des actes à visée curative, préventive ou diagnostique. Par souci de
simplicité et de brièveté, nous n'envisagerons ici que les traitements médicamenteux.
Il est admis aujourd'hui que les nouveaux médicaments, après avoir subi les
indispensables études pharmacologiques et toxicologiques en laboratoire, in vitro et sur
plusieurs espèces animales, doivent passer par une investigation clinique en trois phases.
La première consiste à déterminer chez l'homme, en première approximation, la tolérance
et la posologie. La phase II a pour but de préciser la posologie et surtout d'établir
l'efficacité du nouveau traitement. Ces deux types d'essai ne demandent en général qu'un
nombre relativement restreint de malades (quelques dizaines). La phase III est de loin la
plus importante. Elle vise à comparer le produit testé à un traitement «classique»,
d'efficacité établie. La méthode la plus utilisée consiste à constituer deux groupes de
malades aussi comparables que possible, ce qui se fait en général par «randomisation»,
c'est-à-dire par répartition des malades entre les groupes par tirage au sort. L'évaluation
doit se faire, dans toute la mesure du possible, «en double aveugle», c'est-à-dire sans que
l'investigateur (le médecin) ni le patient ne sachent si le traitement reçu est le produit à
l'essai ou le médicament de référence (voire un placebo si la maladie traitée est de peu de
gravité). Ces essais comparatifs exigent de nombreux malades, souvent quelques
centaines. Depuis 1975, à la suite des directives européennes du 20 mai, l'autorisation de
mise sur le marché en France devait obligatoirement avoir été précédée d'une évaluation
réalisée selon la méthodologie qui vient d'être sommairement décrite. Or ce type d'étude
était illicite et leurs promoteurs étaient passibles de sanctions pénales. La loi du 12
décembre 1988 sur «la protection des personnes qui se prêtent à des recherches
biomédicales» a heureusement mis fin à ce dilemme qui existait donc encore au moment
où le CCNE a rédigé son avis. Celui-ci présente d'emblée l'essai contrôlé comme la
méthodologie la plus rigoureuse. Ceci ne peut pas nous étonner puisque le rapporteur
était le professeur Daniel Schwartz, statisticien, et autorité mondialement reconnue dans
le domaine des essais thérapeutiques. L'avis n'admet le recours à des volontaires sains
que si le risque encouru est minime. Il exclut de toute façon les détenus, les incapables,
les malades atteints d'une affection étrangère à l'étude. Les participants à l'essai doivent
donner un «consentement libre et éclairé», de préférence par écrit, et dans ce but, doivent
20
recevoir une information complète sur les buts de l'essai et sur les risques. Toute
rémunération devrait être interdite. Le protocole de l'essai doit être présenté à un comité
d'éthique. Ces différents points ont été repris de façon presque identique dans le rapport
du Conseil d'État cité plus haut (page 68) et ont été adoptés dans la loi du 12 décembre
1988.
Avis concernant le sida et l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine
Le premier avis au sujet du sida a été donné en 1985. Il concerne les problèmes
éthiques posés par l'appréciation des risques du sida, par la recherche d'anticorps
spécifiques chez les donneurs de sang (Rapport 1985). Comme il est court, il paraît utile
de le transcrire ici dans son intégralité, ce qui donnera aussi un exemple du «style» du
comité :
« Le Comité rappelle qu'en l'état actuel des données scientifiques, il existe des
incertitudes. Celles-ci concernent sans doute moins les techniques elles-mêmes que
l'interprétation qu'on peut donner d'une séro-positivité. Encore convient-il de
souligner qu'il serait inadmissible que par l'effet d'une excessive pression
commerciale on en vienne à devoir suspecter les conditions d'exploitation des tests
sérologiques. Quoiqu'il en soit de cet aspect aléatoire du diagnostic sérologique, le
Comité estime qu'il est indispensable de faire dans des conditions techniques
irréprochables le dépistage de l'infection chez les donneurs de sang, mais que ceux-ci
devraient au préalable en être informés.
Devant la constatation d'une séro-positivité et compte tenu de la possibilité d'une
grave évolution de l'infection et des risques de diffusion de la maladie, le Comité
estime que le médecin du centre de transfusion doit observer une attitude de totale
franchise à l'égard de l'intéressé qui sera informé de ses responsabilités personnelles,
familiales et relationnelles.
Il convient qu'en pareille circonstance les médecins soucieux d'adapter leurs propos
à chaque cas particulier soient en mesure de transmettre, dans des conditions
acceptables souvent difficiles, un message efficace concernant le nombre, l'étendue
des investigations complémentaires et les précautions à observer vis-à-vis de
l'entourage.»
Le CCNE avait été saisi par le ministre de la Solidarité, de la Santé et de la
Protection sociale, d'une demande d'avis sur les problèmes éthiques posés par la
progression de l'infection par le virus de l'immuno-déficience humaine (Rapport
1988). Il a rédigé un long rapport de quarante-cinq pages qu'il serait évidemment
impossible de résumer ici. On ne peut rendre compte de l'avis lui-même qu'en faisant
abstraction d'un grand nombre de détails. Cet avis signale d'emblée que la gravité de la
situation justifie «une action soutenue pour prévenir cette transmission, action
légitimant des sacrifices importants, tant sur le plan financier que par les limitations
qu'elle pourrait apporter aux libertés individuelles et collectives» 26 . Une première
26
Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, Ethique et recherche
21
question posée concernait la justification du dépistage, par exemple à l'occasion d'un
examen prénuptial, en début de grossesse, lors d'une hospitalisation en vue d'une
intervention chirurgicale. Il est rappelé que la déclaration de l'infection par le virus de
l'immuno-déficience humaine (VIH) au stade de sida avéré est obligatoire depuis un
décret pris en 1986. L'avis rappelle aussi que les pouvoirs publics ont pris une série
d'arrêtés ministériels et de circulaires qui rendent le dépistage obligatoire pour les
donneurs de sang, d'organes, de cellules, notamment de sperme. Il approuve cette
obligation. Le comité considère que le dépistage devrait être systématiquement
proposé, mais non imposé aux patients hospitalisés en vue d'une intervention
chirurgicale ou d'un examen endoscopique. En ce qui concerne le dépistage à
l'occasion de l'examen prénuptial, l'avis se contente de citer les arguments en faveur
d'un dépistage obligatoire et les raisons qui peuvent être invoquées dans le sens de la
simple obligation de proposer le test, sans prendre position. A propos de la femme
enceinte, la même ambiguïté existe. Les membres du comité se sont partagés entre ceux
qui donnaient la préférence à une proposition systématique et ceux qui jugeaient que
l'obligation aurait une grande portée symbolique et «renforcerait les pressions en faveur
de l'interruption de grossesse clans le cas où une séro-positivité serait découverte chez
la future mère» 27 . Le comité estime qu'il ne lui est pas possible de conclure à ce sujet
dans les courts délais qui lui ont été impartis.
Il considère par contre qu'il a pu se livrer à une étude complète du problème de
l'information et de l'éducation du public. Il reconnaît que d'importants efforts ont été
faits en faveur de l'information des personnes appartenant aux catégories dites « à
risque», c'est-à-dire les homosexuels, les drogués, les prostituées. Par contre, un effort
supplémentaire devrait être fait en direction de l'ensemble des personnes en âge d'activité
sexuelle, et plus particulièrement chez les jeunes. Il propose la création de groupes de
travail avec des responsables d'associations et se prononce en faveur d'un enseignement
spécialement destiné aux personnes qui sont amenées par leur profession à donner des
avis et des conseils ou à répondre à des questions sur ce sujet : les membres des professions
médicales et paramédicales et les «catégories sociales et professionnelles les plus
directement concernées» (sans préciser davantage).
Le CCNE s'est aussi prononcé, dans ce même avis, sur un certain nombre de questions
en rapport avec la lutte contre la transmission de l'infection VIH. La personne séropositive doit non seulement être informée de cette séro-positivité, mais aussi des
conséquences probables de l'infection à court, moyen et long terme, des répercussions sur
elle-même et sur ses proches, des mesures à prendre pour en limiter la propagation et des
conditions de la prise en charge médicale et sociale de ces conséquences et répercussions.
Les résultats du dépistage doivent être couverts par le secret médical. La constatation
d'une séropositivité ne devrait pas avoir d'influence sur l'embauchage ou sur l'exercice
de la profession.
Le CCNE a été le premier organisme permanent, créé à l'échelle nationale, ayant
pour mission d'étudier les problèmes moraux créés par la recherche dans le domaine de
la biologie humaine. Il est un exemple quasi unique, la plupart des autres pays ayant plutôt
27
biomédicale, Rapport 1988, Paris, La Documentation française, 1989; p.87.
Ibid; p.94.
22
opté, jusqu'à présent, pour des commissions temporaires (comme aux Etats-Unis) ou pour
des comités régionaux ou liés à des établissements hospitaliers. Le Danemark constitue l'une
des exceptions; il y a été créé en 1987 un Conseil national d'éthique pour la santé et la
recherche biomédicale. L'Australie s'est doté d'un Comité national d'éthique en
1989 28 . Plusieurs Etats semblent avoir dans leurs projets la création de comités
nationaux, mais les décisions à prendre à un niveau élevé sont difficiles et souvent très
lentes, parfois freinées par des conflits de compétence. Il nous semble qu'on peut
néanmoins prévoir la création, dans plusieurs pays et dans un avenir plus ou moins
proche, d'autres comités nationaux sur le modèle du CCNE français.
28
BERNARD, J., De la biologie à l’éthique, Paris, Ed. Buchet/Chastel, 1990; p.264.
23
Annexe
Avis et rapports émis par le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la
vie et de la santé (liste arrêtée au 16 décembre 1989).
1984
− Prélèvements de tissus d'embryons ou de foetus humains morts à des fins
thérapeutiques, diagnostiques et scientifiques*
− Problèmes éthiques posés par les essais de nouveaux traitements chez l'homme
− Problèmes éthiques nés des techniques de reproduction artificielle*
1985
− Les registres médicaux pour études épidémiologiques et de prévention.
− Problèmes éthiques posés par l'appréciation des risques du sida par la recherche
d'anticorps spécifiques chez les donneurs de sang
− Problèmes posés par le diagnostic prénatal et périnatal
1986
− Expérimentations sur les malades en état végétatif chronique
− Recherches sur les embryons humains in vitro et leur utilisation à des fins médicales et
scientifiques*
1987
− Problèmes posés par le développement des méthodes d'utilisation de cellules humaines et
leurs dérivés
− Utilisation de la mifépristone (RU 486)
− Expérience de simulation des modifications cardio-vasculaires et des tissus de soutien
observées chez l'homme en apesanteur réalisée sur des sujets volontaires sains
1988
− Expérimentation médicale et scientifique sur les sujets en état de mort cérébrale
− Comités d'éthique locaux
− Problèmes éthiques posés par la lutte contre la diffusion de l'infection par le virus de
l'immuno-déficience humaine (VIH)
1989
−
−
−
−
Dépistage des toxicomanies dans l'entreprise
Greffes de cellules nerveuses dans le traitement de la maladie de Parkinson
Techniques des empreintes génétiques
Don d'embryon et recherche sur l'embryon
Les avis sont accompagnés de rapports, les rapports technique et éthique étant parfois
distincts. Au cours de la première année, ils étaient accompagnés de «réflexions et
propositions» ou d'un «document de travail». Tous ces documents sont publiés dans un
rapport annuel (La Documentation française).
24
* Ces avis et rapports ont paru aussi dans : Comité consultatif national d'éthique, Avis
de recherche sur l’embryon, édition bilingue français-anglais, Actes Sud et INSERM, Coll.
«La fabrique du corps humain», 1987, 180 p.
25