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espace Une logique de relation et d’émergences LE SENS DES MOTS, L’EXPERIENCE DU LIEN Chaque année, il y a des gens pour nous poser cette question à propos de l’ESC Pau: « Quelle est leur recette? » « Comment se faitil que l’ESC Pau progresse ainsi? Elle est la seule dans sa partie du tableau à recruter ses prépas en améliorant même ses performances année après année. » La question est excellente et, comme la réponse n’allait pas de soi, nous l’avons posée à Philippe Lafontaine, le directeur du Groupe ESC Pau. Ce n’est pas la première fois qu’on la lui pose et il a une réponse: « La recette, c’est qu’il n’y a pas de recette, justement. » Et qu’y a-t-il, alors? « Il y a une très forte envie, un projet et une mobilisation. Mais, comme le monde change, nous nous adaptons très vite pour être à la hauteur de notre mission fondamentale: former des jeunes maximiser leur employabilité dès la sortie de l’école. Nous sommes petits, certes, et nous voulons le rester. Mais cela n’empêche nullement l’école d’être grande à sa manière. Little big school, ce n’est pas uniquement un jeu de mot. » n Espace Prépas n° 103 orsque nous nous sommes rendus à Pau, en juin dernier, pour y suivre des oraux, nous avions rencontré le directeur du développement international de l’Ohio University (cf. n° 102). Cette université importante a passé un accord fort avec l’ESC Pau qui permet, entre autres choses, à des dizaines d’élèves palois de partir chaque année étudier sur le campus de l’Ohio University de Bangalore en Inde. Nous lui avions alors posé la question du choix de l’ESC Pau comme partenaire en France. Il n’a pas hésité pour nous répondre : « Parce que ce sont des gens de parole, qui tiennent leur engagement et avec lesquels on peut construire quelque chose. » Devant cet homme qui venait de l’autre bout de la planète travailler avec l’équipe paloise pour construire des projets à long terme, le prestige hexagonal, les rankings, les effets de notoriété, tout cela paraissait tout d’un coup inconsistant. « Et il n’est pas le seul à nous dire cela, confirme Francine Maubourguet, la responsable des relations internationales de l’école. Qu’il s’agisse des responsables du MBA de Stockholm University School of Business enseigné à Pau, des directeurs de l’Université DEUSTO de Bilbao, de nos interlocuteurs en Inde ou en Amérique Latine, tous nous expriment le plaisir qu’ils ont de travailler avec une équipe mobile, très en phase avec les besoins des étudiants, très ouverte sur les solutions à mettre en place. Nous n’avons pas de process lourd à mobiliser, il suffit que nous choisis- L 1 sions bien nos projets et, à ce momentlà, comme ils sont cohérents avec notre stratégie, les difficultés concrètes s’aplanissent vite. Il n’y a pas d’intermédiaires, il n’y a pas d’enjeux internes qui viendraient compliquer le projet, tout peut rouler très vite. C’est pourquoi nos amis indiens viennent de nous demander d’ouvrir un « MBA ESC Pau » à la rentrée prochaine à Bangalore pour une cinquantaine d’étudiants indiens. Ils savent qu’en seulement dix mois nous réussirons à construire cette nouvelle aventure. » Le choix de l’émergence D’ailleurs, s’il y avait un exemple à donner sur l’efficacité de la méthode, il suffirait de prendre le dossier que vous venez de lire sur l’Amérique latine. Lorsque nous avons parlé de nos projets éditoriaux pour l’année 2005/2006, au simple exposé de ce titre, Philippe Lafontaine s’est exclamé : « Ça, c’est pour nous ! » Pourquoi ? « Parce que nous n’allons pas systématiquement où tous les autres vont. Tout le monde se précipite en Chine parce qu’il y a de l’argent, parce qu’il existe une demande colossale, nous préférons aller en Inde. Le travail que nous pouvons y faire, les partenariats que nous y nouons, les projets que nous développons, la complexité des questions que nous traitons avec eux sont en phase avec l’objectif de notre institution et avec les compétences que nous souhaitons donner à nos élèves. De la même façon, les Grandes Écoles espace ont les yeux tournés vers l’Amérique du Nord. On ne peut l’éviter, et notre relation avec, entre autres, Ohio University, est importante pour nous. Mais nous voulons investir dans les économies émergentes du Sud et en particulier au Brésil. En Europe, le tropisme ambiant se dirige vers l’Angleterre, l’Allemagne… nous avons choisi l’Irlande. C’est une économie émergente dans laquelle s’expérimentent à ciel ouvert les solutions de demain, en particulier sur la télé-opération et la fidélisation de la clientèle. L’Amérique latine est une puissance montante, nous sommes une école qui apprend en avançant, c’est pour nous. » Cette manière de se sentir bien avec les petits qui grandissent, les faibles qui se renforcent, les exclus qui conquièrent, les invisibles qui s’affichent, a quelque chose de vraiment moderne et d’incontestablement tonique. entreprise, initiative associative internationale, voyage d’étude pour le compte d’une entreprise, le contenu doit être construit avec son professeur conseiller. » Et les objectifs sont clairs, il s’agit de développer les capacités linguistiques et opérationnelles de chacun, avant que ne se choisissent les options de formation de la partie Master. En personnalisant sa première expérience professionnelle internationale, chaque étudiant sort de sa « zone de facilité » pour envisager la complexité du multiculturel, la globalisation des pro- tous nos diplômés soient très à l’aise dans des situtations professionnelles internationales multiculturelles – ce qui est l’un de nos objectifs pédagogiques majeurs –, nous demandons à nos élèves de repartir un semestre en deuxième année de Master soit en entreprise, soit dans une université partenaire. Et si l’étudiant est très motivé, il peut rester six mois supplémentaires pour acquérir un double diplôme. » Et cet ensemble demande un accompagnement régulier. On se dit que certains professeurs doivent Une vraie stratégie de Grande École Et ceci fait réfléchir à cela : dans le slogan Little Big School, tous les mots sont importants et tous les mots exigent des réponses. « Little » signifie de taille modeste, humble et connaissant ses limites, mais cela ne veut pas dire sans ambition et sans avenir, ni pauvre, court, insignifiant, étroit ou borné. L’ESC Pau est petit, comme tous les David face à n’importe quel Goliath ou comme le « petit » jour annonce le soleil de midi ou la « petite amie » est le mot sans emphase pour « l’élue ». Se dire petit, c’est tout simplement accepter qu’il existe plus grand que soi. À vrai dire, cela devrait nous arriver plus souvent à tous. « Big School », traduction à la fois littérale et détournée de Grande École, c’est précisément l’ambition et l’objectif de l’ESC Pau. Car, pour modestes que soient ses mensurations, l’école paloise ne renonce pas du tout à son objectif fondamental de former des managers de premier plan. Et la récente réforme pédagogique qui se met progressivement en place en est une preuve supplémentaire. « L’international devenant une impérieuse nécessité, argumente Jean-Pierre Lahille, le directeur du programme ESC Pau et, à ce titre, le pilote de la réforme en cours, nous avons proposé un stage obligatoire de six mois à l’étranger pour terminer la période Bachelor. Mission en The Little Big School, un slogan inventé il y a quatre ans, mais une identité qui se régénère à chaque initiative. « À l’international, déclare Philippe Lafontaine, nous pouvons parler à n’importe qui, quelle que soit sa taille, il suffit de porter un projet qui intéresse notre interlocuteur!» blèmes, la responsabilité individuelle dans les solutions, et la dimension collective des questions. « De la même façon, nous avons lancé un programme de mission internationale par l’apprentissage qui permet de passer dix-huit mois à l’étranger dans un même groupe international. La mission proposée par l’entreprise étant d’auditer les meilleures pratiques commerciales, organisationnelles ou managériales et de les restituer à la fin dans l’entreprise d’accueil. Ces séjours doivent être doublés par au moins deux trimestres dans une université étrangère des pays visités. » Cette approche toute faite de confrontation, de curiosité, d’ouverture, c’est ce que l’école vous demandera car les entreprises qui proposent ces missions comptent sur la motivation et la performance de ceux qui la rempliront. C’est un contrat de confiance qui est engagé. « Mais six mois à l’étranger en fin de première année, ce n’est pas suffisant, explique Jean-Pierre Lahille. Pour que 2 trouver pesant d’avoir à accompagner les choix quotidiens des étudiants, surtout ceux qui se lancent dans des partenariats de recherche. « Pas du tout, au contraire, assure Jean-Michel Quentier, professeur de Stratégie, nouvelle recrue paloise, docteur de l’université de Californie, ancien analyste de la Banque mondiale, et ancien auditeur senior de KPMG, l’implication de toute l’école et la proximité affichée facilitent plutôt les choses au quotidien. Nous pouvons mobiliser les élèves sur des projets. Nous les connaissons, ils savent que ce que nous disons est lié à notre antécédence sur les questions et que nous ne sommes pas des donneurs de leçon systématiques. Comme l’école montre un attachement vis-à-vis des projets des professeurs et des étudiants, l’accompagnement vient assez naturellement. » On comprend mieux maintenant ce que signifie la phrase : « La recette, c’est qu’il n’y a pas de recette. ». Le poids de l’engagement, la force des liens, la réactivité, la valorisation au quotidien, à sa façon, c’est grand ! = Octobre 2005 n