le retour en force des françaises
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le retour en force des françaises
BiotechFranceV6.qxp 66 30/08/06 19:43 Page 32 Dossier BIOTECHS LE RETOUR EN FORCE DES FRANÇAISES Les sociétés de biotechnologies basées dans l’Hexagone semblent retrouver de la vigueur, en même temps que des moyens financiers. Leurs projets sont plus matures, leurs pipelines plus riches et les laboratoires pharmaceutiques s’y intéressent à nouveau. Le point pour un secteur en plein rebond. —————— es biotechs françaises font un retour en force sur le marché boursier. Ces derniers mois, les projets d’introduction se sont multipliés, avec des réussites remarquées (BioAlliance Pharma et ExonHit Therapeutics) et des candidatures en quête d’investisseurs nouveaux (Diatos, Innate Pharma, BMD, Genfit, DrugAbuse Sciences ou encore GenOway), le tout favorisé par la création d’Alternext, ouvert le 17 mai 2005 à l’initiative de la place Euronext, dédiée aux PME. Reste que le fossé entre les unes – sociétés de biotechnologie en quête de capitaux frais – et les autres – marchés boursiers français et européens – est encore large et peu enclin à se réduire si l’on considère les projets, souvent caractérisés par des bénéfices – risques élevés et des retours sur investissement souvent aléatoires, sinon inexistants sur le court ou moyen terme. « La faiblesse des montants “levables” sur le marché par les sociétés de biotechs et l’étroitesse de leur capitalisation amplifie la volatilité de leurs cours sur des places par ailleurs trop étriquées et manquant cruellement de liquidité », analyse à cet égard une récente étude de la société Precepta 1. L’année qui vient de s’écouler n’aura pas été du meilleur cru pour ces dernières, qui, après avoir levé 242 millions d’euros en 2004, n’ont pu engranger que 99 millions l’an passé. Si l’argent est bien le nerf de la guerre, les conditions de financement constituent, comme le souligne l’étude, « une garantie de stabilité et de croissance » pour des sociétés dont le modèle économique a été mis à rude épreuve ces dernières années. L Points faibles. Qui sont ces biotechs qui, pour les plus jeunes, tentent de se développer sur le marché français, et pour les plus anciennes de consolider leur position ? Les premières, jeunes pousses ou start-up, adoptent, nous précise Jean-Christophe Briant, expert de l’étude Precepta, des « modèles économiques mixtes » (fourniture de services, voire de produits, ajoutée à une R&D partenariale ou propriétaire au cœur de leur stratégie de développement). Au stade suivant, fort d’une solide propriété intellectuelle, elles aspirent à devenir des « biopharmas plus ou moins intégrées » en développant une activité en propre à forte (1) « Les sociétés de biotechnologie en France », modèles de développement et de financement, Precepta, juillet 2006. PHARMACEUTIQUES _ SEPTEMBRE 2006 BiotechFranceV6.qxp 30/08/06 19:43 Page 33 © BSIP 67 valeur ajoutée. Mais au regard des modèles observables, le secteur français demeure perfectible, notent les experts de l’étude : « outre la productivité douteuse de la recherche académique, l’acquisition d’une propriété intellectuelle (dépôt, délivrance de brevets) reste un point faible des biotechs françaises ». Des dépôts de brevets qui sont par ailleurs des conditions sine qua non du développement de ces mêmes sociétés. Et à cet égard le bilan pour la France n’est pas très élogieux : en 2005, plus de 40 % des biotechs n’ont pas déposé de brevets. Fragilisées à bien des égards, ces sociétés viennent de subir de surcroît une décision de la Cour de justice des communautés européennes (arrêté du 4 mai dernier) qui limite les possibilités d’extension des brevets pour les laboratoires pharmaceutiques et avec elles la reconnaissance des travaux des biotechs possédant des plateformes technologiques. Un pipeline de qualité. Dotées d’un pipeline de produits caractérisé selon Precepta « par une spécialisation particulièrement pertinente sur les traitements », avec, en 2005, 108 produits en préclinique, 41 en phase 1, 39 en phase 2 et 7 en phase 3, le tout assorti d’un « pipe » encore plus prometteur pour 2008, les biotechs françaises se retrouvent face au problème de l’accès au marché des médicaments candidats et de leur difficile financement. « Au final, précisent les auteurs de l’étude, la sortie des premiers produits thérapeutiques issus des pipelines des sociétés de biotechs françaises n’a de cesse d’être retardée ». Ce faisceau de contraintes plaide ainsi en faveur d’une externalisation des activités de développement, soit auprès de Cro’s spécialisées, soit auprès de laboratoires pharmaceutiques. Ainsi les industriels du médicament, en France comme en Allemagne ont-ils, ces derniers mois, accéléré leurs partenariats avec leurs voisines des biotechs, la relation entre les uns et les autres dépassant même le simple cadre de l’externalisation des fonctions R&D. Une stratégie opportuniste qui poussée à l’extrême, conduit souvent les laboratoires à absorber purement et simplement leurs partenaires les plus prometteurs. Parfois, comme dans le cas de Genentech-Roche, en maintenant l’indépendance managériale de la structure. « Les liens capitalistiques et financiers entre biotechs et laboratoires ne cessent de se renforcer, tandis que les accords de licence se multiplient entre les deux univers, note encore l’étude qui conclue sur ce registre pour la France : « Si la faible maturité des sociétés ne leur permet pas (encore) d’accéder au rang de cible potentielle pour les laboratoires, plus des deux tiers d’entre elles continuent à en faire les partenaires privilégiés de leur développement ». L’étude rappelle que si la France s’affirme à ce jour comme le 3ème acteur du secteur, elle se situe encore loin derrière l’Allemagne ou le Royaume-Uni. Nos « frenchies » sont certes nombreuses mais de petite taille. Seules quatre d’entre elles (BioMérieux, Cerep, Nicox et Transgene) sont cotées en France à la fin août 2005 (deux autres depuis), contre 42 outre-Manche et 15 outre-Rhin. Les 223 sociétés identifiées dans l’Hexagone emploient plus de 9 000 salariés, pour des revenus estimés à 2,2 milliards d’euros et des dépenses de R&D de 589 millions d’euros. « La R&D biologique française n’a pas à rougir de sa performance, la qualité du pipeline national augure des jours meilleurs », conclut Precepta. Sans doute lui faudra-t-il aussi, comme en Allemagne, des conditions cadre encore plus porteuses. ■ J-J. CRISTOFARI Un rythme de croissance soutenu Le rythme de croissance des sociétés de biotechnologie opérant en France demeurera soutenu à l’horizon 2007, à + 22 % en moyenne, indique Precepta, et s’appuiera sur les revenus issus des prestations de services et de la cession de licences ou de droits sur des technologies confirmées ou des médicaments en développement. En raison de leur jeunesse, nos biotechs ne vendent quasiment aucun médicament. Quelques unes, telles BioAlliance Pharma ou IDM Pharma ont cependant des candidats médicaments. Plus largement, leurs partenariats en R&D avec les laboratoires génèrent des revenus d’activité en progression. Les plus grosses du secteur qui ont misé sur des technologies utiles à la recherche des groupes biopharmaceutiques affichent une croissance forte et régulière depuis 1998. Des sociétés comme Transgene ou Nicox sont confrontées à la forte volatilité de leur activité malgré la montée en puissance des revenus tirés des licences de leurs technologies phares. Quant aux petites sociétés soutenues par les mesures incitatives adoptées par les pouvoirs publics pour favoriser le développement du secteur, la croissance explosive de leur CA trouve pour l’essentiel son assise dans les prestations de services qu’elles délivrent pour d’autres opérateurs. Au total, les biotechs devraient croître plus vite que l’industrie pharma classique grâce à des produits innovants issus de leurs rangs et bénéficiant de prix de meilleur niveau. SEPTEMBRE 2006 _ PHARMACEUTIQUES