Le report en arrière des déficits. Opportunités et scénarios possibles

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Le report en arrière des déficits. Opportunités et scénarios possibles
CHRONIQUES
Le report en arrière des déficits
Opportunités et scénarios possibles
Principes du
report en
arrière des
déficits
Après un bre f
rappel des règles
générales, nous
Eric TORT
préciserons plus
spécifiquement
dans cette section le montant maximal
de déficit reportable conformément
à une jurisprudence récente.
Rappel des règles générales
L'article 220 quinquies-I du CGI prévoit la possibilité, pour une entreprise
soumise à l'IS, de reporter en arrière le
déficit constaté au titre d'un exercice,
sur les bénéfices non distribués des trois
exercices antérieurs (1) ayant effectivement supporté l'IS à taux plein. Cette
possibilité est subordonnée à l'exercice
d'une option valant décision de gestion
opposable à l'entreprise. Le mécanisme du report en arrière se traduit in
fine par la constatation d'une créance
sur le Trésor public utilisable globalement pour le paiement de l'IS et remboursable, à défaut d’imputation, à son
échéance de 5 ans (cf. tableau 1).
■
*. Abréviations : voir leur dévelop pement à la fin de l'article.
1. On notera au passage que les
règles d’imputation obligent à com mencer par les bénéfices disponibles
les plus anciens.
2. Al'exclusion des contributions addi tionnelles, de l'IFAet du précompte.
■
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Tableau 1 : Principales dispositions du CGI (article 220 quinquies-I)
Bénéfices d'imputation
Ils sont définis comme les résultats fiscaux soumis au taux de
droit commun, « dans la limite de la fraction non distribuée de
ces bénéfices, à l'exclusion de certains bénéfices exonérés
(...) ou qui ont donné lieu à un impôt payé au moyen d'AF ou
de CI ou qui ont ouvert droit au crédit d'impôt prévu aux articles
220 quater et 220 quater A».
Sort du déficit
reporté en arrière
«Le déficit imputé (...) cesse d'être reportable sur les résultats
des exercices suivant celui au titre duquel il a été constaté».
Constatation
de la créance CB *
« L'excédent d'IS résultant de l'application (...) de cette option
fait naître au profit de l'entreprise une créance égale au produit du déficit imputé (...) par le taux de l'IS applicable à l'exercice déficitaire. La constatation (la comptabilisation) de cette
créance, qui n'est pas imposable, améliore les résultats de
l'entreprise et contribue au renforcement des fonds propres ».
Gestion
de la créance CB
« La créance est remboursée au terme des cinq années suivant celle de la clôture de l'exercice au titre duquel l'option (...)
a été exercée. Toutefois, l'entreprise peut utiliser la créance pour
le paiement de l'IS (2) dû au titre des exercices clos au cours
de ces cinq années. Dans ce cas, la créance n'est remboursée qu'à hauteur de la fraction qui n'a pas été utilisée dans ces
conditions».
Résumé
En situation déficitaire, il est possible d’op ter en faveur du report en arrière des pertes
fiscales. En effet, en application de l’article
220 quinquies-I du CGI, les entreprises
soumises à l’IS peuvent avoir accès, sous
certaines conditions, à ce régime optionnel
qui présente des avantages incontestables.
Véritable alternative au régime de droit com -
mun, l’option pour le carry-back constitue
un instrument à part entière de la politique
de gestion des déficits des entreprises sou mises à l’IS.
L’objet de cet article est d’analyser les situa tions dans lesquelles une telle option est
opportune comme celles pour lesquelles
des arbitrages spécifiques s’imposent.
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Sur le plan déclaratif, cette option
nécessite l'établissement d'une déclaration spécifique (Cerfa n° 2039) qu’il
convient de déposer, auprès du Centre
des impôts, conjointement à la déclaration annuelle des résultats sous peine
de nullité. En effet, selon un arrêt
récent (3), le dépôt tardif de la déclaration n°2039 jointe à une déclaration rectificative des résultats déposée hors délai est non recevable en
application des dispositions de l’article 46 Quater-OW de l’annexe III du
CGI. On remarquera néanmoins que
« la sévérité de cette solution peut être
atténuée par la faculté reconnue par le
Conseil d’Etat de reporter en arrière des
déficits subis au cours des exercices anté rieurs encore reportables » (4) comme
nous l’exposons plus précisément ciaprès.
Montant du déficit reportable (5)
Au sens de l’article 220 quinquies-I
du CGI, les déficits reportables s’entendent de la totalité des déficits non
imputés à la clôture de l’ e xe rc i c e .
Nonobstant, la position de l’administration est particulièrement restrictive
Abstract
In loss-making situations, it is possible to
opt for the carry-back of tax losses. In
effect, in terms of article 220 para 5-I of
the Tax Code (CGI), enterprises subject
to Corporation Tax (IS) may claim, under
certain conditions, to be taxed under this
optional rule, which affords undeniable
advantages.
The option to carry-back, which is a veri table alternative to the Common Law rule,
constitutes a complete instrument for the
strategy of managing losses of enterprises
that are subject to Corporation Tax (IS).
The purpose of this article is to analyse
the situations in which such an option is
opportune, such as those for which spe cific choices are involved.
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en la matière puisqu’elle limite l’option
CB au seul déficit constaté au titre de
l’exercice d’option contrairement aux
dispositions du CGI.
Dans son interprétation actuelle du
code, la doctrine administrative exclut
donc la possibilité de reporter en arrière les déficits antérieurs à l’exercice au
titre duquel l’option est pratiquée. Or,
les décisions rendues récemment par
les instances judiciaires (6) tendent à
contester cette position en réaffirmant
les dispositions prévues par le CGI
selon lesquelles « les déficits reportables
en arrière sont constitués non seulement
par le déficit de l’exercice au titre duquel
l’option est exercée mais aussi par les
déficits des exercices antérieurs qui res tent reportables ».
En s’appuyant sur cette jurisprudence, il est donc possible de pratiquer
une option CB pour l’ensemble des
reports déficitaires non prescrits quelle que soit leur année d’ o r i g i n e .
Toutefois, les entreprises décidées à
opter pour le CB auront tout intérêt
à ne pas attendre les exercices suivants
au risque de perdre des bénéfices d’imputation. En effet, les bénéfices disponibles se limitent à ceux des trois
derniers exercices précédant l’exercice d’option et non l’exercice déficitaire.
■
3. TA Strasbourg du 15/12/1998,
n° 90-1168, Sté CMR-SMR.
4. RJF, Editions F. Lefebvre, mars
1999, § 293.
5. Cf. Report en arrière des défi cits: montant reportable, Revue fiduciaire comptable, n° 233, pp. 16-17.
6. TA Orléans du 7/12/93, n° 90766, CAA Nantes du 21/12/95, n°
94-149, CE du 30/06/97, n°1 78742.
7. Cf. Choix du système d'imputa tion : report en avant ou en arrière
des déficits, in Feuillet, F.Lefebvre
FR 16-96, pp. 10-15, titre II - § 16 à
§ 24.
■
Opportunités du report en
arrière des déficits
En présence d'une situation fiscale
déficitaire en fin d'exercice, se pose la
question traditionnelle mais non
moins importante du traitement de
cette perte fiscale. Il apparaît en réalité qu'une des interrogations majeures
est celle du report en avant ou arrière des déficits. En effet, comme l'indique le tableau 2 (7), les modalités de
report sont globalement très différentes tant au regard des règles de prescription que du point de vue des incidences comptables.
Le choix entre ces modalités de report
est finalement fonction de différents
critères objectifs. C'est pourquoi, dans
certaines situations, la décision de gestion d'un report en arrière sera évidente car justifiée par un faisceau d'éléments objectifs convergeant vers une
solution commune. Dans d'autres cas,
il pourra y avoir contradiction des facteurs de motivation. L'option pour le
CB sera alors la résultante d'un arbitrage entre plusieurs scénarios possibles.
Les situations favorables
à l'option pour le carry-back
Au moins trois situations dominantes
justifient la mise en œuvre de l'option pour le CB. Globalement, les
risques de prescriptions temporelles
et structurelles liées aux déficits et aux
crédits d'impôt sont à l'origine de ces
préconisations.
■ Déficits importants avec forte
probabilité de prescription : dans
ce cas de figure, il est évident que
l'option pour le CB est préférable
puisqu'elle permet de limiter le montant global des DO reportés en avant
pour lesquels le risque de prescription est important du fait principalement de :
- l'ancienneté des déficits et donc de
la proximité de l'échéance de prescription définitive ;
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Tableau 2 : Comparatif entre report en arrière et en avant des déficits
ITEMS
Report en arrière
Report en avant
Prescription
Néant
Oui, si déficits ordinaires (DO)
- liquidation
Néant
Perte DO, ARD, MVLT
- transfert / APA
Néant
Banalisation ARD
Perte sauf agrément
Perte sauf agrément
Distribution de dividendes
Précompte si distribution du résultat fiscal "imputé"
Idem à ceci près que les résultats imputés sont récents
PVLT taxée à taux réduit
CB imputable sur IS à taux réduit
Déficit imputable sur la base taxable
Neutre
Effet minorant
Amélioration du résultat et majoration de l'actif
Néant
Effets des restructuration
- fusion
Utilisation AFet CI
Contributions additionnelles
Participation aux résultats
Incidences comptables de la
constatation de créance CB
- la faible probabilité de réalisation de
bénéfices fiscaux au cours des années
d'imputation.
Dans cette situation, l'option pour le
CB a l'avantage de faire naître immédiatement une créance fiscale dont le
caractère certain est totalement indépendant de la contingence liée au
niveau des résultats dégagés au cours
des exercices suivants contrairement
aux modalités de report en avant des
déficits.
■ Présence d'AF et CI significatifs
récurrents : il sera particulièrement
indiqué de pratiquer un report en
arrière des déficits si de façon régulière (ou prévisible), l'entreprise dispose (ou disposera) d'une masse
d'avoirs fiscaux et/ou de crédits d'impôts imputables sur l'IS au cours des
années suivantes. On se place, ici, dans
l'hypothèse où il est attendu des bénéfices fiscaux ultérieurs permettant
d'envisager l'imputation desdits AF
et CI au titre des exercices considérés. Dans ce cas précis, le report en
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avant des déficits est à proscrire puisqu'il aurait mécaniquement pour effet
de minorer voire d'annuler la base
taxable, et de facto les possibilités d'imputation des AF et CI ; d'où le risque
d'une perte substantielle d'économie
d'impôt.
■ Opérations ultérieures de cessation d'activité, transfert ou APA : si
des opérations de cessation ou de
transfert d'activité sont programmées
au delà de l'exercice en cours, l'option pour le CB est sans aucun doute
à privilégier. A cet égard, on rappellera que les positions de la doctrine
administrative et de la jurisprudence
sont convergentes en matière de trans-
■
8. Voir en ce sens, par exemple,
Créance de carry-back : faut-il un
agrément pour son transfert ?,
Bulletin comptable et financier ,
10/96, pp. 27-28.
■
fert (8) de créance CB. En voici, les
principaux termes :
- la cessation d'activité (liquidation)
n'entraîne pas la perte du droit au
remboursement de la créance à son
échéance ; « celle-ci devient alors une
créance indivise des anciens associés » ;
- une opération de transfert d'activité ou d'APA n'est pas de nature à
remettre en cause le caractère certain
de la créance.
A contrario, les opérations de cessation d'activité comme celles visant des
transferts ou des APA ne sont pas sans
effet sur les déficits reportés en avant.
Les premières entraînent de facto la
perte définitive du droit au report tandis que les secondes sont susceptibles
de conduire à la banalisation des ARD
sauf agrément préalable ou transfert de
faible importance.
En définitive, l'option pour le CB est
protectrice en matière de déficits fiscaux. De ce point de vue, elle permet,
à l'entreprise et à ses associés de se pré63
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munir contre les effets pénalisants des
éventuelles opérations ultérieures de
re s t ructuration, à l'exclusion des
fusions (9) qui induisent les mêmes effets
que l'on soit en report en avant ou en
arrière de déficit.
En dehors des trois cas précédents, on
peut citer également certaines circonstances propices à l'option CB
comme l'anticipation d'une PVLT
nette taxable au cours des exercices
futurs. Il pourrait s'agir notamment du
cas où des reprises importantes de provisions sur titres sont susceptibles d'intervenir sur les exercices suivant celui
ayant enregistré le déficit. Dans cette
hypothèse, l'option CB est très avantageuse puisque la créance CB est susceptible de s'imputer directement sur
l'impôt à taux réduit et non pas sur la
base taxable comme en régime de
report en avant (10).
Les situations contraires
à l'option pour le carry-back
On soulignera tout d'abord que certains cas définis expressément par le
CGI excluent toute possibilité de formuler l'option pour le CB. Il s'agit
principalement des situations dans
lesquelles des opérations structurelles
(cession, fusion, etc.) sont intervenues
au cours de l'exercice. Au delà de ces
cas précis, l'existence des contributions exceptionnelles assises sur l'IS
constitue le principal et unique obstacle à l'exercice de l'option pour le
CB. Ceci est particulièrement vrai
dans le cas d'entreprises foncièrement
rentables pour lesquelles le risque de
prescription des déficits est faible ou
inexistant.
■ Opérations structurelles excluant
toute option CB : l'article 220 quinquies II, alinéa 1 prévoit que l'option
pour le CB ne peut pas être exercée
au titre d'un exercice au cours duquel
les opérations suivantes sont intervenues :
1 - « cession ou cessation totale d'entre prise ;
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2 - fusion ou opération assimilée ;
3 - liquidation des biens ou liquidation
judiciaire ».
On précisera cependant qu'en matière de cession (cas 1), l'interdiction
d'option n'est pas applicable à la cessionnaire comme elle n'est pas opposable à l'entreprise absorbante ou bénéficiaire de l'apport (cas 2) pour ce qui
concerne son déficit propre, à l'exclusion donc des déficits éventuellement transférés par l'absorbée ou l'apporteuse sous le régime de l'agrément
spécial (11).
■
9. En cas d'opérations de fusion,
le transfert de la créance CB est
subordonné à l'obtention d'un agré ment conformément à l'article 220
quinquies II. Une jurisprudence
récente a en effet confirmé cette
interprétation qui rend donc inappli cable en l'espèce le principe de la
transmission universelle. (Cf. note
précédente).
10.Report en arrière - Guide pra tique de la déclaration n° 2039,
Documentation organique , n°
100670, 6 mars 1998, § 38.
11. Pour plus de détail, voir : Report
en arrière des déficits, Documentation
organique,n° 131388, 19 mars 1993,
§ 6 & § 7 et J.Y. Mercier, Fusions,
éditions Francis Lefebvre, Paris,
1995, § 210.
12.En l’état actuel des textes, le taux
de cette dernière contribution tem poraire est ramené à 10 % pour les
exercices clos en 1999.
13.On notera également que le
montant de la participation des sala riés est également affecté par les
modalités de report des déficits. En
effet, le calcul de la réserve spécia le de participation (RSP) est basé
sur le résultat fiscal soumis au taux
de droit commun et après imputa tion des déficits antérieurs. Le choix
du report en arrière conduit donc à
majorer la base de calcul de la RSP
au titre des exercices bénéficiaires
ultérieurs sur lesquels auraient pu
s’imputer ces déficits si le report en
avant avait été pratiqué.
■
■ Entreprises traditionnellement
bénéficiaires : l'exercice de l'option
pour le CB n'est pas indiqué s'agissant
d ' e n t reprises rentables ayant subi
ponctuellement une perte fiscale à la
clôture de leur exercice. En effet, au
regard des contributions additionnelles (10 % et 15 % (12)), le report en
arrière entraîne un surcoût fiscal non
négligeable. L'assiette de ces contributions étant basée sur l'impôt brut
sur les sociétés, il est préférable de pratiquer le report en avant de manière
à minorer la base taxable des futurs
exercices bénéficiaires et par là même
l'assiette des contributions additionnelles. A l'inverse, l'option pour le CB
ne permet pas à l'entreprise de bénéficier d'une quelconque restitution
des contributions antérieurement versées au Trésor public à l'instar du
mécanisme applicable à l'IS à titre
principal. En conséquence, la pratique
du CB est à exclure dans le cas d'entreprises traditionnellement bénéficiaires tant que le taux d'imposition
de ces contributions à l'origine temporaire, reste d'un niveau aussi élevé.
A l'exception du cas précité, il n'existe pas d'autres raisons fondamentales
pouvant expliquer le rejet de l'option
CB. A partir du moment où les conditions sont réunies pour exercer l'option pour le report en arrière, il faut
reconnaître que seul le surcoût lié aux
contributions additionnelles peut être
dissuasif (13).
Choix liés à des
situations particulières
Au delà des cas généraux abordés dans
la section précédente, certaines situations particulières peuvent influer sensiblement sur les modalités d’exercice de l’option CB. Il en est ainsi
lorsqu’un redressement fiscal vient à
remettre en cause les bénéfices d’imputation ou les déficits ayant fait l’objet d’un report en arrière. De la même
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manière, les mécanismes d’intégration fiscale et de taxation en régime
SNC-IR sont de nature à créer des
situations d’exception au regard de la
gestion des créances CB. Nous examinerons dans cette section les principales questions soulevées face à un
contrôle fiscal et dans un contexte de
groupe.
Option carry-back
et redressements fiscaux
Les effets des redressements fiscaux
sur la créance CB et sur les conditions
de report en arrière des déficits sont
sensiblement différents selon que la
notification consécutive à la vérification de comptabilité se situe avant ou
après l'exercice de l'option pour le
report en arrière des déficits.
■ Notification antérieure à la formulation de l'option CB : selon l'article 46 quarter O S (1° bis) de l'ann e xe III du CGI, les bénéfices
d'imputation sont constitués des bénéfices fiscaux déclarés non distribués
et ayant donné lieu à un paiement
effectif d'impôt. Toutefois, contrairement à ces dispositions, une jurisprudence récente (14) a autorisé le report
en arrière de déficits sur la base de
bénéfices redressés. En conséquence,
il paraît possible et judicieux d'opter
pour un report en arrière des déficits
en retenant, comme bénéfice d'imputation, des résultats rehaussés suite
à un redressement fiscal à partir du
moment où :
- la notification est intervenue antérieurement ;
- le recouvrement et le paiement des
rappels d’impôts correspondants sont
effectifs à la date de formulation de
l'option. Cette double condition paraît
indispensable au regard des prescriptions prévues à l'article précité (15). En
définitive, selon cette jurisprudence,
« les rehaussements de bénéfices issus
d'un redressement ouvrent donc droit
à une augmentation du bénéfice d'imputation (16) ».
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■ Notification postérieure à l'exercice de l'option CB : à l'inverse, les
effets des redressements fiscaux intervenus postérieurement à l'option pour
le CB sont globalement défavorables
dans la mesure où :
- ils entraînent une diminution voire
une disparition de la créance CB initialement constatée en cas de remise
en cause (à la baisse) du déficit reporté ;
- ils interdisent, a contrario, toutes
options complémentaires en cas de
rehaussement des bénéfices d'imputation.
En effet, en cas de réduction ou annulation du déficit reporté ou des bénéfices d'imputation (cf. cas 1) suite à
contrôle fiscal, la créance CB corres■
14.Cf. CAAde Paris du 15.12.1994,
n° 94-140 et TA de Versailles du
16.11.1993, n° 87-83.
15.Voir en ce sens, par exemple,
l'avis des auteurs de la Revue fidu ciaire comptable in R.f.comptable,
n° 224, p. 43.
16.Cf. Mémento pratique fiscal, édi tions Francis Lefebvre, mars 1999,
§ 3180.
17.S'agissant des modalités pré cises de réduction de la créance CB,
voir notamment, D.O. n° 131388, §
44 à § 50.
18. La jurisprudence précitée (CAA
Paris du 15.12.1994) ne saurait s'ap pliquer en l'espèce s'agissant de
redressements postérieurs à l'op tion pour le carry-back.
19. En conséquence, si une procé dure de vérification fiscale annon cée ou en cours de déroulement est
susceptible de remettre en cause
les bénéfices d’imputation ou le défi cit à traiter, l’entreprise pourra avoir
intérêt à attendre la notification défi nitive de redressement avant de pra tiquer le report en arrière de son défi cit, quitte à différer la formulation de
l’option CB d’une année comme l’au torise la jurisprudence récente du
CE du 30/06/1997.
■
pondante est susceptible d'être diminuée voire annulée. Notons toutefois
que la réduction (17) du montant de
cette créance n'est pas automatique,
ni forcément pro p o rtionnelle à la
diminution :
- du déficit contesté qui affecte prioritairement l'éventuelle fraction reportée en avant et dans un deuxième
temps seulement, la fraction résiduelle
ayant fait l'objet d'un report en arrière ;
- du bénéfice d'imputation rectifié si
celui-ci demeure au moins égal au
triple du montant de la créance ou
fraction de la créance CB.
A l'inverse comme indiqué ci-avant
(cf. cas 2), les rehaussements de bénéfice d'imputation ne permettent pas
un accroissement des possibilités de
report en arrière et donc l'exercice
d'options complémentaires, à moins
de se retrouver en infraction vis-à-vis
des dispositions de l'article 46 quarter O S de l'annexe III du CGI limitant le bénéfice d'imputation au seul
résultat fiscal déclaré (18).
En définitive, au regard de la créance
CB, les conséquences d'un redressement fiscal ultérieur sont généralement pénalisantes, parfois neutres.
Dans tous les cas de figure, elles n'ouvrent droit à aucune opportunité d'options complémentaires à raison des
rectifications opérées (19).
Option carry-back
et contextes de groupe
En régime d’intégration fiscale comme
en situation de transparence fiscale
(filiale SNC-IR), l’option pour le CB
s’exerce dans des contextes spécifiques.
Dans le premier cas, la position centrale de la tête de groupe motive la
cession des créances CB propres des
filles à la mère intégrante. Dans le
second cas, il y a lieu de procéder, en
fonction des situations, à un arbitrage entre la gestion d’ARD au niveau
des SNC déficitaires et l’option pour
le CB au niveau de l’associé.
65
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■ Régime de groupe au sens de
l'Instruction du 9 mai 1988 : les dispositions prévues par l'article 223 G
du CGI fixent des règles précises en
matière d'intégration fiscale comme le
rappelle le tableau 3. Une des spécificités du régime de groupe tient à la
faculté de pouvoir transférer à la mère
intégrante une créance CB propre.
A notre avis, ce transfert au profit de
la tête de groupe doit être systématiquement pratiqué sauf imminence de
l'échéance de remboursement. En effet,
unique redevable de l'IS pour le compte des filiales intégrées, la mère intégrante est la seule à pouvoir utiliser (21)
les créances CB existantes dans le groupe pour le paiement de l'impôt à verser au Trésor public. De manière plus
secondaire, ce transfert permet aussi
de prémunir le groupe contre les
risques de remise en cause du caractère remboursable des créances CB en cas
d'opérations de restructuration d'une
filiale intégrée. Enfin, ajoutons last but
not least, que l'utilisation de ces
créances pourra être utilement optimisée. En effet, l'ordre d'imputation
prévu par les textes n'empêche pas de
commencer, si le choix se fait sentir, par
les créances CB les plus récentes à partir du moment où il s'agit de créances
détenues par des filiales distinctes (22).
Tout en profitant des possibilités d'imputation immédiate, cette pratique
tend à favoriser le remboursement (à
l'échéance) des créances CB dont le
terme des 5 ans est proche.
■ Groupe constitué de filiales SNC
soumises à l'IR : dans ce contexte spécifique de groupe, le mécanisme de
taxation entraîne le transfert entre les
mains des associés (23) de leur quotepart de résultats, qu'ils soient d'ailleurs
positifs ou négatifs. Si cette remontée
est systématique en cas de résultats
bénéficiaires, il pourra en être tout
autrement en situation déficitaire. En
effet, le CGI autorise les entreprises
constituées sous forme de SNC soumises à l'IR à constituer des ARD
propres au même titre que les entreprises passibles de l'IS (24) (cf. tableau 4).
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Tableau 3 : Les règles principales régissant le carry-back en régime d’intégration fiscale
- Les filiales intégrées n'ont plus la possibilité de reporter en arrière leurs déficits propres
dégagés pendant la période d'intégration fiscale;
- La tête de groupe est en droit, quant à elle, d'opter pour un carry-back au titre de son déficit d'ensemble dans les conditions prévues à l'article 220 quinquies-I du CGI (20) comme
toute société indépendante ;
- Il est possible pour les filiales intégrées de céder, à la mère intégrante, les créances CB
propres constatées antérieurement à leur entrée dans le groupe. Celles-ci sont alors utilisables pour le paiement de l'IS groupe dans la limite de l'IS auquel aurait été soumise la
filiale si elle avait été imposée distinctement (art. 223 G-3 du CGI).
Tableau 4 : Le mécanisme de constatation des ARD dans les SNC soumises à l’IR (25)
Cette faculté reconnue également par la jurisprudence peut être une solution intéressante pour limiter le montant des déficits ordinaires (DO) transférés à la mère. En effet, après
constatation des ARD propres au niveau de la fille, ne sera remontée que l'éventuelle fraction résiduelle des DO. Ainsi, en cas de déficits importants chez l'associé, cette solution permet de rendre imprescriptible la fraction des déficits de la SNC éligible au régime des ARD
sans accroître pour autant la masse globale des DO accumulés au niveau du groupe.
Autrement dit, l'opération décrite ci-dessus revient à transformer des DO en ARD indéfiniment reportables. Naturellement, cette décision de gestion n'a de sens que si les SNC
concernées ont la capacité réelle de dégager ultérieurement des bénéfices permettant
d'absorber ces ARD dans des délais raisonnables.
Aussi conviendra-t-il d’examiner l’opportunité d’une option CB tout en
prenant en compte la possibilité de
constater des ARD propres au niveau
des SNC déficitaires. Naturellement, il
sera possible de retenir une solution
panachée conjuguant l’option CB au
niveau de l’associé et la constatation
d’ARD au niveau d’une ou de plusieurs
SNC déficitaires. En l’occurrence,
lorsque les bénéfices non distribués des
trois derniers exercices sont insuffisants
■
20. Cf. notamment, E. Tort, Fiscalité
des groupes intégrés, Revue française de comptabilité, n° 310, avril
1999, pp. 40-51.
mère soumise à l'IS et les filiales SNC
sont assujetties au régime des socié tés de personnes.
24.Ala différence près que les règles
d'imputation des ARD sont particu lièrement contraignantes pour les
SNC (IR). Contrairement aux règles
applicables aux sociétés (IS), les ARD
sont imputables de façon prioritaire
et exclusive sur les bénéfices propres
des SNC, c'est-à-dire sans possibili té de transfert à l'associé pour utili sation sur son assiette personnelle.
21.Naturellement, «la créance acqui se et non utilisée est remboursable
à la société mère au terme des cinq
années qui suivent l'exercice au cours
duquel la créance est née » (Inst. du
9.05.88).
22.En effet, l'instruction du 9.05.88
oblige uniquement la société mère à
imputer les créances CB en respectant l'ordre dans lequel elles sont
apparues dans chacune des sociétés concernées.
25.Plus généralement sur ce sujet,
voir l'excellente étude intitulée “ARD:
les entreprises non soumises à l'IS”,
Revue fiduciaire comptable, n° 242,
spécial gestion, juillet-août 1998, pp.
4-10.
23.Nous nous plaçons ici dans le cas
où l'associé principal est une société
■
R.F.C. 315 - Octobre 1999
CHRONIQUES
pour permettre le report en arrière de
la totalité des déficits, il pourra être
intéressant, par exemple, de pratiquer
des ARD au niveau des SNC pour traiter l’excédent de déficit prescriptible.
Conclusion
Dans la grande majorité des situations,
l’option en faveur du carry-back reste
très avantageuse bien qu’elle puisse
engendrer à terme un surcoût fiscal lié
Bibliographie
Morgenstern P. : Entreprises déficitaires :
les bons choix fiscaux, Revue fiduciaire
comptable, n°224, décembre 1996, pp. 3163.
Tort E. : Transformation d'une filiale SA
en SNC soumise à l'IR : contraintes et optimisations fiscales, Revue française de comp tabilité, n° 306, décembre 1998, pp. 6775.
à l’existence des contributions additionnelles. Bien utilisée, cette option
conserve un intérêt majeur au regard
des conséquences des prescriptions
temporelles et structurelles s’agissant
des déficits et des crédits d’impôt. A
ce titre, elle constitue un élément essentiel de la politique de gestion des déficits des entreprises soumises à l’IS.
AF
Avoirs fiscaux
APA
Apport partiel d’actif
ARD
Amortissements réputés différés
CB
Carry Back
CI
Crédits d'impôt
DO
Déficits ordinaires
Eric TORT
MVLT
Moins-value à long terme
Diplômé d'expertise comptable
Directeur administratif et financier
Doctorant en gestion à l'IAE de Paris
PVLT
Plus-value à long terme
RSP
Réserve spéciale de participation
Tort E. : Fiscalité des groupes intégrés :
audit du résultat d'ensemble et de l'IS groupe, Revue française de comptabilité, n° 310,
avril 1999, pp. 40-51.
XXX : Impôt sur les sociétés : reports déficitaires, Feuillet F. Lefebvre, FR 16-96, pp.
12-15.
XXX : Re p o rt en arrière des déficits,
Documentation organique, n° 131388,
19 mars 1993 et n° 10670 du 6 mars
1998.
Réf.: 9158
Prix : 241,20 francs
Le contrôle interne dans
les grandes entreprises de
bâtiment et travaux publics.
Proposition d'une
méthodologie d'évaluation
par le commissaire aux
comptes
par Pascal Blanc-Brude
R.F.C. 315 - Octobre 1999
XXX : Créance de carry-back : faut-il un
agrément pour son transfert ?, Bulletin comp table et financier, 10/96, pp.27-28.
Gestion des déficits, éditions Francis Lefebvre,
collection Dossiers pratiques, mars 1998.
Mémento pratique fiscal, éditions Francis
Lefebvre, mars 1999.
Code Genéral des Impôts.
L'expert-comptable du comité
d'entreprise : proposition de
guide d'intervention
par Sébastien Springer
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tant reportable, Revue fiduciaire comptable,
n° 233, pp. 16-17.
XXX : Report en arrière des déficits : mon-
Conséquences d'un
redressement fiscal sur la
participation des salariés :
gestion des fonds de
participation au sein
de l'entreprise
par Nicolas Tissot
Liste des abréviations
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Tél : 01 44 15 95 95
accompagnées de leur règlement à l’ordre de ECM.
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industriels, aspects
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