6 Ecoulements à nombre de Reynolds faible.
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6 Ecoulements à nombre de Reynolds faible.
6 Ecoulements à nombre de Reynolds faible. L’analyse d’un écoulement caractérisé par un nombre de Reynolds faible (Re ≪ 1) peut être réalisée de façon approximative lorsque certains termes dans les équations de Navier-Stokes deviennent négligeables. Un exemple provient du cas d’un écoulement à vitesse très faible: les termes non linéaires (d’inertie) peuvent devenir plus petits que les termes visqueux puisque |(v · ∇)v| = O(U 2 /L), (terme d’inertie) |ν ∇2 v| = O(ν U/L2 ), (terme visqueux) et le rapport entre les deux termes devient 2 |(v · ∇)v| U /L =O = O(Re). |ν ∇2 v| ν U/L2 (269) (270) Par conséquent, pour un écoulement qui est suffisamment lent (U ≪ 1) et en supposant que l’écoulement est stationnaire (ou presque), (235) se simplifie en les équations stationnaires de Stokes: 0 = −∇p + η ∇2 v, ∇ · v = 0. (271) (272) Une autre manière d’obtenir le même résultat est d’introduire les nouvelles variables adimensionnelles x∗ = x/L, t ∗ = t/(L/U), v ∗ = v/U, p∗ = p/(η U/L). Cette fois on obtiendra Dv ∗ = −∇∗ p∗ + ∇∗ 2 v ∗ . (273) Dt ∗ Si on suppose que les termes dans la dérivée matérielle restent bornée lorsque Re → 0 on obtient la même équation de Stokes en laissant tendre vers zéro le nombre de Reynolds. Re 6.1 Unicité des écoulements lents Soit V un volume occupé par un fluide visqueux et borné par une frontière fermée S. On suppose que la vitesse v est prescrite comme v = vB sur S. Il y a alors tout au plus une solution v des équations de Stokes en V qui satisfait cette condition limite. Démonstration. Supposons qu’il existe une autre vitesse v ∗ qui satisfait aussi les équations de Stokes (avec une pression correspondante p∗ , disons) et la condition limite v ∗ = vB sur S. On définit u = v ∗ − v et P = p∗ − p. En soustrayant les équations de Stokes pour (v, p) et (v ∗ , p∗ ) on obtient 0 = −∇P + η ∇2 u, ∇ · u = 0, 58 (274) avec u = 0 sur S. Sous la forme des composantes les équations (274) s’écrivent 0=− ∂ 2 ui ∂ ui ∂P , +η = 0. ∂ xi ∂ x j 2 ∂ xi (275) On multiplie la première de ces équations par ui pour arriver à l’équation 0=− ∂ ∂ 2 ui , (Pui ) + η ui ∂ xi ∂ x j2 (276) puisque ∂ ui /∂ xi = 0. On intégre sur V et on emploi le théorème de la divergence pour voir que Z Z ∂ 2 ui 0 = − Pui ni dS + η ui dV. (277) ∂ x j2 S V Le premier membre de droite disparait et donc " # Z ∂ ∂ ui ∂ ui 2 η dV = 0, ui − ∂xj ∂xj V ∂ xi Z Z ∂ ui ∂ ui 2 ⇒ η ui n j dS − η dV = 0, ∂xj S ∂xj V Z ∂ ui 2 dV = 0. ⇒ ∂xj V (278) On conclut que u est une constante partout. Puisque u = 0 sur S cette constante est égale à zéro et donc v = v ∗ . Une conséquence de l’unicité de la solution v des équations de Stokes avec des conditions limites de type Dirichlet v = vB est que lorsqu’on remplace vB avec −vB , la solution du problème ainsi “inversé" est −v. La nouvelle pression devient cte − p. 59 6.2 Mouvement lent d’une sphère On cherche une solution aux équations de Stokes pour l’écoulement uniforme autour d’une sphère, et donc un champ de vitesse axisymétrique sous la forme v = (vr , vθ , vϕ ) = (vr (r, θ ), vθ (r, θ ), 0), (279) où on utilise des coordonnées sphériques (r, θ , φ ). Pour satisfaire la condition d’incompressibilité exactement on peut introduire une fonction de courant ψ sous la forme vr = 1 ∂ψ 1 ∂ψ . , vθ = − r2 sin θ ∂ θ r sin θ ∂ r (280) Alors, ∇ × v = 0, 0, − 1 2 E ψ , r sin θ (281) où E 2 désigne l’operateur différentiel E2 = sin θ ∂ ∂2 + 2 2 ∂r r ∂θ 1 ∂ sin θ ∂ θ . (282) En écrivant l’équation (271) sous la forme ∇p = −η ∇ × (∇ × v), (283) on obtient ∂ 2 ∂p η E ψ, = 2 ∂r r sin θ ∂ θ 1 ∂p η ∂ 2 E ψ, =− r ∂θ r sin θ ∂ r (284) et en éliminant la pression (par différentiation) on trouve que E 2 (E 2 ψ ) = 0, c.à.d., sin θ ∂ ∂2 + 2 ∂ r2 r ∂θ 1 ∂ sin θ ∂ θ 2 ψ = 0. (285) Les conditions limites sont ∂ψ ∂ψ = 0 en r = a, = ∂r ∂θ (286) avec la condition que l’écoulement devient uniforme lorsque r −→ ∞: vr ∼ U cos θ et vθ ∼ −U sin θ lorsque r −→ ∞. (287) La condition ci-dessus peut être reécrite 1 ψ ∼ Ur2 sin2 θ lorsque r −→ ∞, 2 60 (288) et on essayera de trouver une solution de la forme ψ = f (r) sin2 θ . On voit que 2 2 sin θ ∂ 2 ∂ ∂ 1 ∂ 2 2 E ψ= f sin2 θ , f sin θ = + 2 − ∂ r2 r ∂ θ sin θ ∂ θ ∂ r2 r2 (289) (290) et donc que 4 E ψ= ∂2 2 − ∂ r2 r2 2 f sin2 θ . (291) Par conséquent, une solution de type (289) est possible pourvu que d2 2 − 2 2 dr r 2 f = 0. (292) Cette équation a des solutions de la forme f = rα à condition que (α (α − 1)(α − 2)(α − 3) − 2(α − 2)(α − 3) − 2α (α − 1) + 4)rα −4 = 0, ⇒ [(α − 2)(α − 3) − 2][α (α − 1) − 2] = 0, ⇒ α = −1, 1, 2 ou 4, (293) et donc A + Br +Cr2 + Dr4 . r Les conditions vers l’infini impliquent que f (r) = (294) 1 f ∼ Ur2 , 2 lorsque r → ∞ ce qui nécessite que C = U/2 et que D = 0. D’après les conditions limites (286) nous avons f (a) = f ′ (a) = 0 ⇒ A = Ua3 /4 et B = −3Ua/4. La solution ψ est maintenant écrite U a3 2 ψ= 2r + − 3ar sin2 θ , (295) 4 r d’où on obtient les composantes de vitesse: U a3 a U a3 a vr = 2+ 3 −3 cos θ , vθ = − 4− 3 −3 sin θ . 2 r r 4 r r Pour calculer la traînée D de la sphère on commence en calculant 2 a3 2 U 3aU 2 d 2 2 2 2r + − 3ar sin θ = − sin θ , E ψ= dr2 r2 4 r 2r 61 (296) (297) et après on intègre les equations (284) pour obtenir p = p∞ − 3Uaη cos θ . 2r2 (298) La formule pour D est D= Z 2π Z π ϕ =0 θ =0 σ · n · ea2 sin θ d θ d ϕ , (299) où n = er et e = er cos θ − eθ sin θ désigne un vecteur unitaire dans la direction de l’écoulement (suivant l’axe θ = 0). Donc D = 2π a2 = 2π a2 Z π θ =0 Z π θ =0 (σθ r eθ + σrr er ) · (er cos θ − eθ sin θ ) sin θ d θ , (σrr cos θ − σθ r sin θ ) sin θ d θ , = 6πη Ua, (300) où nous avons utilisé les résultats (voir (A.44) d’Acheson) ∂ vr , σrr = −p + 2η ∂r ∂ vθ η ∂ vr σrθ = η r , + ∂r r r ∂θ (301) avec vr et vθ données par (296) et la pression p donnée par (298). La vitesse terminale U d’un ballon qui tombe (lentement) dans une étendue infinie d’un fluide très visqueux peut être calculée maintenant du fait qu’en ce moment-là la traînée est en équilibre avec le poids net du ballon: 4 6πη Ua = π a3 (ρsphère − ρfluide )g. 3 6.3 (302) Ecoulement dans une couche mince Il s’agit d’un écoulement dans l’espace formé par deux parois rigides z = 0 et z = h(x, y). Soit U une vitesse horizontale typique et L une longueur caractéristique de l’écoulement. Supposons, en plus, que h ≪ L. Pour que la condition de non-glissement sur les parois en z = 0 et z = h soit satisfaite les composantes de vitesse dans les directions x et y changeront de l’ordre de U sur une distance de z de l’ordre de h. C’est à dire, ∂ u/∂ z ou ∂ v/∂ z sont de O(U/h) , et ∂ 2 u/∂ z2 ou ∂ 2 v/∂ z2 sont de O(U/h2 ). Cependant, les dérivées de u ou v par rapport à x ou y sont beaucoup plus faibles: ∂ u/∂ x est de O(U/L), ∂ 2 u/∂ x2 est de O(U/L2 ) avec des résultats pareils pour v. L’ordre de grandeur de la troisième composante de vitesse w est obtenu de l’équation d’incompressibilité: ∂u ∂v ∂w + + = 0, (303) ∂x ∂y ∂z 62 d’où on voit que ∂ w/∂ z est de O(U/L) et donc que w est de O(Uh/L). On obtient alors U U U + + (deux premières composantes), ν ∇2 v ∼ ν L2 L2 h2 Uh Uh Uh + + (z-ième composante w), ν ∇2 v ∼ ν L3 L3 Lh2 h U2 1, 1, . (304) (v · ∇)v ∼ L L On conclut de (304) que le terme visqueux des équations de Navier-Stokes peut être approximé par ∂ 2v ν ∇2 v ≈ ν 2 , (305) ∂z et que le terme d’inertie peut être négligé par rapport au terme visqueux si ! |(v · ∇)v| UL h 2 ≪ 1. (306) ∼O |ν ∇2 v| ν L On note qu’on n’a pas besoin que le nombre de Reynolds UL/ν soit petit pour que les forces visqueuses dominent. Les équations de Navier-Stokes sont réduites maintenant à ∂p ∂ 2u ∂ p ∂ 2v ∂ p ∂ 2w =η 2, =η 2, =η 2 , ∂x ∂z ∂y ∂z ∂z ∂z ∂u ∂v ∂w + + = 0. ∂x ∂y ∂z (307) Puisque w est plus petite par un facteur de h/L que les deux autres composantes de vitesse il s’en suit que ∂ p/∂ z est beaucoup plus petite que ∂ p/∂ x ou ∂ p/∂ y et que la pression p peut être considerée en fonction uniquement de x et de y. En intégrant les deux premières équations ci-dessus par rapport à z on obtient 1 2η 1 v= 2η u= ∂p 2 z + Az + B, ∂x ∂p 2 z +Cz + D, ∂y (308) (309) où ∂ p/∂ x, ∂ p/∂ y, A, B, C et D sont tous des fonctions de x et y seulement. En ce qui concerne le tenseur des contraintes ∂ vi ∂ v j σi j = −pδi j + η + , (310) ∂ x j ∂ xi on voit que puisque p ∼ O(η UL/h2 ) (voir (307)) et que la composante la plus grande du seconde membre de droite de (310) est O(η U/h), σi j ≈ −pδi j . 63 (311) 6.3.1 Exemple 1: Palier portant bidimensionnel Il s’agit de l’écoulement dans un espace étroit formé par deux parois non parallèles. Une de ces parois est fixe et l’autre se meut à la vitesse U. La distance h(x) entre les deux parois est donc une fonction de x. Pour un palier portant le rapport hmax /L ≪ 1, où L est la longueur du saumon. L’équation de la continuité est exprimée en fonction du débit volumique, qui doit être le même à travers chaque section x = constante Q= Z h(x) u dz = constante. (312) 0 Les conditions limites sont z = 0 : u = U, z = h(x) : u = 0, x = 0 : p = pB , x = L : p = pB . (313) La solution de dp ∂ 2u =η 2, (314) dx ∂z est donnée par (308); en appliquant (313) pour obtenir les constantes A et B, on obtient z h2 d p z z − 1− . (315) u =U 1− h h h 2η dx Le gradient de pression est déterminé en faisant appel à (312). L’intégration par rapport à z de (315) donne ainsi Uh h3 dp Q= − . (316) 2 12η dx Puisque Q est une constante, on obtient donc la variation de la pression en intégrant (316) par rapport à x: p(x) = pB + 6η U Z x dx′ 0 h2 (x′ ) − 12η Q Z x dx′ 0 h3 (x′ ) , (317) où la condition p(0) = pB a été respectée. En utilisant également p(L) = pB , on obtient Z L Z U L dx′ dx′ Q= (318) 3 ′ 2 0 h2 (x′ ) 0 h (x ) Il s’en suit que le débit volumique et la distribution de pression sont fixés dès que la fonction h(x) est connue. Dans le cas spécial d’un palier portant plan avec h(x) qui se varie linéairement entre h1 en x = 0 et h2 en x = L: h2 − h1 h(x) = x + h1 , (319) L Q= Uh1 h2 , (h1 + h2 ) 64 (320) et donc p(x) − pB (h1 − h(x)))(h2 − h(x)) . = 6η UL (h22 − h21 )h(x)2 (321) Puisque h(x) se situe entre h1 et h2 il est clair que si h2 < h1 alors p sera superieure à pB partout dans la couche et donc qu’il y aura une force nette vers le haut pour porter une charge. Ce problème bidimensionnel a été traité par Reynolds en 1878. 6.3.2 Exemple 2: Ecoulement dans une cellule de Hele-Shaw (1898) Supposons que les frontières en haut et en bas sont tous les deux plates et parallèles tel que h est constante. On suppose que l’écoulement entre les deux plaques est engendré par des gradients horizontales de pression et est autour des cylindres ayant l’axe dans la direction z. En utilisant les conditions de non-glissement en z = 0 et z = h on trouve de (308) et (309) que 1 2η 1 v=− 2η u=− ∂p z(h − z), ∂x ∂p z(h − z). ∂y (322) Le fait que p n’est en fonction que de x et y veut dire que bien que la vitesse soit en fonction de z, le rapport v/u ne l’est pas. Donc, la direction de l’écoulement est indépendante de z et par conséquent les lignes de courant le sont aussi. En plus, l’élimination de la pression p de (322) donne ∂v ∂u − = 0. ∂x ∂y (323) Donc, dans n’importe quel plan z=constante, l’écoulement autour d’un cylindre correspondra à l’écoulement bidimensionnel et irrotationnel autour de ce cylindre. Notez, cependant, que la circulation Γ autour d’une courbe C fermée quelconque se situant dans un plan horizontal, qu’elle entoure le cylindre ou non, doit être zéro. Ceci découle de Γ= I C u dx + v dy = − 1 z(h − z) 2η 1 ∂p ∂p dx + dy = − z(h − z)[p]C = 0, (324) ∂y 2η C ∂x I où [p]C désigne le saut de pression en passant une fois autour de C. 65