questions - Courrier des maires

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questions - Courrier des maires
Cahier n° 49 - Novembre 2011 - No 251 - www.courrierdesmaires.fr
QUESTIONS
LA MAITRISE
D’OUVRAGE
PUBLIQUE
LOGO_CDM_50Q.indd 1
4/12/06 15:31:02
De 1 à 6
De 7 à 19
De 20 à 37
De 38 à 50
« Loi MOP », maître
d’ouvrage (MOA),
mandataire…
Le maître d’œuvre,
les AMO ; organisme
gérant l’OPC…
Marchés, paiement,
réception
des ouvrages…
Résiliation,
indemnisation,
garanties…
DÉFINITION ET
ORGANISATION
P. III
LA MOA ET SES
PARTENAIRES
P. V
LA MOA ET LES
ENTREPRISES
P. VIII
LA GESTION
DU CONTENTIEUX
P. XII
◗ Les sites et documents à consulter
« Guide des maîtres d’ouvrage pour le choix d’un conducteur d’opération
ou d’un mandataire », MIQCP ; www.miqcp.gouv.fr
« Droit public des affaires », sous la direction de L. Rapp, P. Terneyre et N. Symchowicz,
éd. Lamy 2009.
« Droit de contrats administratifs », L. Richer, éd. Dalloz
« Les marchés de maîtrise d’œuvre dans la construction publique »,
éd. Le Moniteur, p. 89, § 4.40
◗ Les références
Loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec
la maîtrise d’œuvre privée (JO du 13 juillet 1985, p. 7914)
Ordonnance n° 2004-566 du 17 juin 2004 portant modification de la loi n° 85-704 du 12 juillet
1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée
(JO du 19 juin 2004, p. 11020)
Décret n° 86-520 du 14 mars 1986 pris pour l’application de l’article 1 de la loi n° 85704
du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise
d’œuvre privée (JO du 16 mars 1986, p. 4395)
Décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d’œuvre confiées par
les maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé (JO du 1er décembre 1993,
p. 16603)
Décret n° 2011-1000 du 25 août 2011 modifiant certaines dispositions applicables aux
marchés et contrats relevant de la commande publique (JO du 26 août 2011, p. 14453)
Principal actionnaire : Groupe Moniteur Holding. Société éditrice : Groupe Moniteur SAS au capital de 333 900 euros.
RCS : Paris 403 080 823 - Siège social : 17, rue d’Uzès 75108 Paris cedex 02. Numéro de commission paritaire : 1008 T 83807 ISSN : 0769-3508 - Président / Directeur de la publication : Guillaume Prot - Directeur général : Olivier de la Chaise.
Impression : Imprimerie de Champagne, ZI Les Franchises, 52200 Langres - Dépôt légal : novembre 2011.
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Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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DE 1 À 6 MAITRISE D’OUVRAGE PUBLIQUE : DÉFINITION ET ORGANISATION
LA MAITRISE
D’OUVRAGE PUBLIQUE
Par Sophie Banel, Cyril Coupe et Eve Line Bernardi,
sous la direction d’Yvon Goutal, cabinet d’avocats Goutal, Alibert et associés
A la fin d’un mandat, que reste-t-il du passage d’une équipe municipale,
départementale ou régionale ? Pour une bonne part, ce sont les ouvrages réalisés :
un équipement culturel, un établissement scolaire, une halle, un centre social,
une piscine… Pour mener à bien ces projets, les collectivités sont investies
d’une mission de « maîtrise d’ouvrage publique » (MOA) dont les caractéristiques
sont définies par la loi. Il convient de recenser les principales questions que suscite
ce rôle particulier, qui suppose des réflexes spécifiques, une prudence particulière,
mais comporte également des atouts précieux.
1
2
Qu’est ce que la « loi MOP » ?
Qui est « maître d’ouvrage » ?
La loi du 12 juillet 1985 s’applique à la réalisation
de tous ouvrages de bâtiment ou d’infrastructure ainsi
qu’aux équipements industriels destinés à leur
exploitation. Elle ne s’applique qu’aux maîtres d’ouvrage (MOA) expressément visés : l’Etat et ses
établissements publics ; les collectivités territoriales,
leurs établissements publics, parmi bien d’autres.
Relever de la MOP suppose le respect d’un régime
juridique contraignant : octroi de prérogatives importantes au MOA dont il ne peut, en principe, se
départir ; obligation pour le MOA de dissocier
conception et construction des ouvrages ; obligation,
lorsqu’elle n’est pas directement exercée en interne,
d’associer la présence d’un maître d’œuvre à la plupart des opérations dans des conditions et selon
des modalités encadrées. Cependant, les dispositions
de la MOP ne s’appliquent pas, notamment, « aux
ouvrages de bâtiment ou d’infrastructure destinés
à une activité industrielle dont la conception est
déterminée par le processus d’exploitation (décret
du 14 mars 1986) ». La personne publique en charge
de la construction d’un incinérateur de déchets, peut,
par exemple, recourir à la procédure de dialogue
compétitif pour confier sa conception, sa construction
et éventuellement son exploitation.
Aux termes de l’article 2 de la loi du 12 juillet
1985, le maître d’ouvrage « est la personne
morale, mentionnée à l’article premier, pour
laquelle l’ouvrage est construit » ; dans le même
registre aux termes de l’article 2 du CCAG Travaux, le MOA « est le pouvoir adjudicateur pour
le compte duquel les travaux sont exécutés ».
La notion de maîtrise d’ouvrage est liée à la « propriété » finale des travaux réalisés. L’identification
du maître d’ouvrage peut s’avérer un exercice
délicat. Ainsi en est-il notamment des travaux
réalisés par un occupant régulier du domaine
d’une collectivité. L’occupant réalise-t-il des travaux pour son propre compte ou pour celui de
la collectivité qui, in fine, sera potentiellement
propriétaire ? Selon le Conseil d’Etat, lorsqu’un
occupant du domaine réalise des travaux pour
les besoins de son activité, il est maître d’ouvrage
des travaux qu’il met en œuvre, ce qui conduit,
parfois, à écarter le Code des marchés publics
(CE, 3 décembre 2010, Ville de Paris, req.
n° 338272 et 338527, publié au Recueil Lebon).
Cette solution ne doit évidemment pas inciter
à la fraude…
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III
DE 1 À 6 LA MAITRISE D’OUVRAGE PUBLIQUE : DÉFINITION ET ORGANISATION
3
IV
4
Peut-on librement disposer
de sa qualité de MOA ?
Quelles sont les attributions
du mandataire de MOA ?
Assurément non : être MOA confère des prérogatives dont la personne publique ne peut disposer
librement. Ainsi ressort-il de l’article 2 de la loi
MOP que le MOA, « responsable principal de
l’ouvrage, (…) remplit dans ce rôle une fonction
d’intérêt général dont il ne peut se démettre ».
Cette solution de principe connaît cependant
deux exceptions. La première exception est bien
connue des maîtres d’ouvrage : c’est le mandat
de maîtrise d’ouvrage. Concrètement, il s’agit
de permettre à une collectivité qui ne dispose pas
de l’expérience et des ressources – humaines
et techniques – nécessaires à la prise en charge
d’une maîtrise d’ouvrage complète, de confier
à un tiers le soin de mettre en œuvre une partie
de ses attributions.
La deuxième exception (lire question 8) consiste
dans la possibilité offerte à un maître d’ouvrage
public, co-maître d’ouvrage dans une opération,
de se dessaisir temporairement de ses prérogatives au profit de l’autre MOA (ordonnance
de 2004 qui figure à l’article 2-II de la loi MOP).
Elles sont mentionnées à l’article 3 de la loi MOP :
« 1° Définition des conditions administratives et techniques selon lesquelles l’ouvrage sera étudié et
exécuté ; 2° Préparation du choix du maître d’œuvre,
signature du contrat de maîtrise d’œuvre, après
approbation du choix du maître d’œuvre par le maître
de l’ouvrage, et gestion du contrat de maîtrise
d’œuvre ; 3° Approbation des avant-projets et accord
sur le projet ; 4° Préparation du choix de l’entrepreneur, signature du contrat de travaux, après
approbation du choix de l’entrepreneur par le maître
de l’ouvrage, et gestion du contrat de travaux ; 5° Versement de la rémunération de la mission de maîtrise
d’œuvre et des travaux ; 6° Réception de l’ouvrage.
Les relations MOA/mandataires de MOA sont inscrites dans une convention.
5
6
ATTENTION
Le mandataire de MOA ne peut se voir confier d’attributions
relatives à la définition du programme des travaux ainsi
qu’à la fixation de l’enveloppe financière.
Il appartient exclusivement au maître d’ouvrage de choisir
(ou a minima d’approuver le choix) du maître d’œuvre
de l’opération et des titulaires des marchés de travaux.
Comment désigner
un mandataire de MOA ?
Quelle est la place du MOA
sur le chantier ?
L’ordonnance n° 2004-566 du 17 juin 2004 portant
modification de la loi du 12 juillet 1985 a supprimé
le droit d’exclusivité offert aux SEML. Ce sont à présent les sociétés publiques locales (SPL), souvent
issues de la transformation de SEML, qui pourront
espérer devenir mandataires de maîtrise d’ouvrage
hors de toute contrainte de publicité et de mise
en concurrence.
En dehors de cette hypothèse bien précise, les mandats de maîtrise d’ouvrage, en tout cas ceux dont
le contenu dépasse le cadre strict de la représentation
juridique – les plus nombreux en pratique –, sont
­soumis au droit commun de la commande publique
(les rares autres relevant de l’article 30 du CMP).
Ces marchés doivent être conclus selon une pro­
cédure adaptée dès lors que le montant du besoin
est inférieur à 193 000 euros HT, avec un seuil
­intermédiaire à 90 000 euros HT emportant une
­obligation de publicité formalisée, et un appel
d’offres de seuil communautaire dès lors que
le seuil de 193 000 euros HT est atteint ou franchi.
Le maître de l’ouvrage désigne une personne
­physique chargée de le représenter. En pratique,
cette fonction est généralement assurée par
le représentant légal de la collectivité dans
les limites de ses attributions (maire, président
de conseil général…) qui acquiert la qualité
de « personne responsable du marché » (PRM).
Cette personne notifie le marché, en délivre une
copie officielle à l’entrepreneur, accepte les soustraitants, signe les avenants, résilie le marché.
Durant l’exécution des travaux, elle intervient
également, mais uniquement pour adopter des
décisions importantes : poursuivre au-delà du
montant prévu, prolonger les délais d’exécution,
décider de la « réception » de l’ouvrage. Enfin,
la PRM intervient sur le plan financier : elle effectue les mandatements, elle signe le décompte
général et définitif et, en cas de différend, propose
à l’entrepreneur une solution pour son règlement.
A NOTER
Classiquement, le MOA s’entoure d’autres partenaires :
maître d’œuvre, OPC, coordonnateur SPS, bureau
de contrôle…
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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DE 7 À 19 LES RELATIONS ENTRE LA MOA ET SES DIFFÉRENTS PARTENAIRES
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8
Comment les marchés
sont-ils passés par
le mandataire de MOA ?
Comment coordonner
l’intervention de plusieurs
MOA ?
Le mandataire est soumis aux mêmes règles
que le mandant (article 4 de la loi MOP).
Le MOA conserve la prérogative du choix
du maître d’œuvre et des titulaires des marchés
de travaux. Le mandataire de maîtrise d’ouvrage
se charge de toute la phase administrative d’organisation des procédures de consultation :
élaboration et diffusion des avis d’appel public
à la concurrence, élaboration des pièces
de la consultation, analyse des offres, établissement des différents rapports… mais il appartient
­toujours, in fine, à la collectivité de choisir
les attributaires.
L’ordonnance du 17 juin 2004 introduit un « II »
à l’article 2 de la MOP, aux termes duquel,
« lorsque la réalisation, la réutilisation ou la réhabilitation d’un ouvrage ou d’un ensemble d’ouvrages
relèvent simultanément de la compétence de plusieurs maîtres d’ouvrage, ces derniers peuvent
désigner, par convention, celui d’entre eux qui assurera la maîtrise d’ouvrage de l’opération. Cette
convention précise les conditions d’organisation
de la maîtrise d’ouvrage exercée et en fixe le terme ».
Le bénéficiaire du transfert conclura donc, dans
ce cadre, comme pour répondre à ses besoins propres
tous les contrats nécessaires à la bonne fin de l’opération. La convention organisant le transfert de maîtrise
d’ouvrage en fixera les conditions, notamment
financières.
A NOTER
Le meilleur moyen de garantir le respect de cette règle
est de faire intervenir dans les procédures lancées
par le mandataire les organes collégiaux de la collec­
tivité : jury, commission d’appel d’offres (CAO) et organe
délibérant pour le choix final ou l’exécutif éventuelle­
ment titulaire d’une délégation en la matière.
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Qu’est-ce que la maîtrise
d’œuvre (MOE) ?
Quelles sont les missions
confiées à un MOE ?
Le maître d’œuvre est a minima celui qui va représenter le MOA sur le chantier. La maîtrise d’œuvre peut
parfaitement être prise en charge en interne par
la personne publique, si cette dernière dispose
des ressources humaines nécessaires. Le plus souvent, cependant, la maîtrise d’œuvre est confiée
à un tiers, architecte ou bureau d’études techniques.
En fonction des opérations concernées, l’étendue
de la mission de maîtrise d’œuvre variera, intégrant
ou non des missions de conception. C’est alors, obligatoirement, un architecte qui interviendra.
Le maître d’œuvre est un partenaire de la maîtrise
d’ouvrage chargé du suivi de l’opération, dans ces
aspects techniques (réalisation des études nécessaires
à l’accomplissement du projet, élaboration des plans
d’exécution ou validation de ces plans…) et financiers (réception et traitement des demandes
d’acomptes, préparation du projet de décompte, traitement des réclamations des entreprises, traitement
des pénalités…).
En pratique, la maîtrise d’œuvre est souvent prise
en charge par une équipe pluridisciplinaire.
L’article 7 de la loi MOP les énumère : les études
d’esquisse ; les études d’avant-projets ;
les études de projet ; l’assistance pour la passation
du contrat de travaux ; les études d’exécution
ou l’examen de la conformité au projet ; l’exécution du contrat de travaux ; le pilotage et
la coordination du chantier ; l’assistance lors
des opérations de réception et pendant la période
de garantie de parfait achèvement.
Les missions « de base » doivent être confiées
au maître d’œuvre, au travers d’un marché
unique (article 15 du décret du 29 novembre
1993) qui distingue à grands traits entre la
construction de bâtiments neufs et la réhabilitation ou la réutilisation de bâtiments existants.
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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A NOTER
S’agissant des infrastructures, il n’existe aucun
impératif de type « mission de base ». La mission
de maîtrise d’œuvre peut parfaitement donner lieu
à différents marchés publics.
V
DE 7 À 19 LES RELATIONS ENTRE LA MOA ET SES DIFFÉRENTS PARTENAIRES
11
Comment évalue-t-on un
marché de MOE ?
En application de l’article 9 de la MOP et de l’article 29 du décret du 29 novembre 1993,
la rémunération du maître d’œuvre prend impérativement en compte trois paramètres : l’étendue
de la mission confiée, la complexité de l’opération
et le montant des travaux à réaliser. La rémunération est le plus souvent forfaitaire. Il n’existe pas
de barème permettant de déterminer à l’avance
combien « coûtera » une mission de maîtrise
d’œuvre pour une opération donnée. Il existe
néanmoins des orientations auprès des ordres
d’architectes et de la Mission interministérielle
pour la qualité des constructions publiques
(MIQCP).
L’évaluation s’opère sur la base de l’enveloppe
financière prévisionnelle des travaux déterminée
par le MOA lui-même. Le marché de MOE est
conclu initialement à prix provisoire. Un avenant
fixe le montant définitif de la rémunération du
maître d’œuvre lorsqu’est arrêté le montant prévisionnel des travaux, tel qu’il résulte des études
du maître d’œuvre qui s’engage sur ce montant.
13
VI
12
Quelle est la différence
entre conduite d’opération
et mandat de maîtrise
d’ouvrage ?
La personne publique peut recourir à un contrat dit
« de conduite d’opération » (article 6 de la loi MOP).
Le conducteur d’opération choisi fournira au maître
de l’ouvrage une assistance générale à caractère
­administratif, financier et technique. Contrairement
au mandataire, le titulaire d’une mission de conduite
d’opérations ne se substitue pas à la personne
publique maître de l’ouvrage ; il ne dispose donc
d’aucun pouvoir de représentation.
Le contrat de conduite d’opération est soumis
au Code des marchés publics (article 29).
La MIQCP indique que « si la collectivité souhaite
conserver l’ensemble de son pouvoir de décision (…)
tout en se faisant aider et conseiller, elle devra
­s’entourer d’un conducteur d’opération. En revanche,
si elle souhaite confier une partie de ses attributions,
notamment dans la gestion de son opération,
elle devra opter pour un mandat (…). » (Guide préc.,
www.archi.fr/MIQCP).
14
Quelle place pour l’OPC ?
Quel est le rôle des AMO ?
Dans le cas d’un marché de travaux passé à une entreprise générale, cette dernière assure la coordination
et le pilotage des travaux.
Dans le cas de marchés de travaux par corps d’état
séparés, il peut être nécessaire de confier à un organisme spécialisé les missions d’ordonnancement,
de pilotage et de coordination (OPC) des tâches
de l’ensemble des intervenants à l’acte de construire.
Concrètement, l’OPC est chargé d’examiner le déroulement et l’harmonie entre les différentes étapes
de réalisation des travaux, avec un bon enchaînement
dans le temps et dans l’espace. Il s’agit de coordonner
les multiples intervenants dans l’exécution du projet,
et d’arrêter les mesures d’organisation qui s’imposent.
La mission « OPC » ne faisant pas partie de la « mission de base » qui doit obligatoirement être confiée
au MOE, le MOA a le choix : soit il confie cette mission optionnelle au MOE, soit il la confie à un tiers,
qui devient un assistant du MOA (AMO).
L’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO) a pour
mission d’aider le maître d’ouvrage :
– à suivre le projet réalisé par un maître d’œuvre ;
– à prendre de multiples décisions qui lui incombent durant son déroulement .
– à réceptionner l’ouvrage.
En principe, il n’intervient que pour suppléer
l’absence de compétences techniques du maître
d’ouvrage. L’AMO a un rôle de conseil
et de proposition vis-à-vis du maître d’ouvrage,
à l’exclusion de toute fonction de représentation.
Il ne prend pas de décision à la place du maître
d’ouvrage. Vis-à-vis du maître d’œuvre,
il se contente d’exprimer ce que veut le maître
d’ouvrage, il lui permet de remplir pleinement
ses obligations.
A NOTER
Les prestations demandées par le maître de l’ouvrage
à son cocontractant dans une convention d’assistance
à la maîtrise d’ouvrage peuvent être proches en pratique de celles prévues dans un contrat de conduite
d’opération. Mais, selon la doctrine, alors que
le conducteur d’opération aurait une mission générale
d’assistance à la maîtrise d’ouvrage, le contrat d’AMO
porterait sur des missions plus spécifiques.
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DE 7 À 19 LES RELATIONS ENTRE LA MOA ET SES DIFFÉRENTS PARTENAIRES
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16
Peut-on confier librement
à un opérateur la concep­
tion et la construction d’un
ouvrage ?
Comment conclure le marché
de maîtrise d’œuvre ?
Assurément non. Cependant, le maître de l’ouvrage peut confier par contrat à un groupement
de personnes de droit privé ou, pour les seuls
ouvrages d’infrastructure, à une personne de droit
privé, une mission portant à la fois sur l’établissement des études et l’exécution des travaux,
« lorsque des motifs d’ordre technique ou
­d’engagement contractuel sur un niveau d’amélioration de l’efficacité énergétique rendent
nécessaire ­l’association de l’entrepreneur aux
études de l’ouvrage ».
L’article 37 du CMP apporte notamment un éclairage quant aux motifs techniques susceptibles
de conduire à confier à un même opérateur une
mission de conception réalisation.
L’article 69 fixe les règles de passation des marchés de conception-réalisation. L’article 73, issu
de la réforme intervenue le 25 août 2011, insère
dans la réglementation les marchés globaux
de performance.
17
Quel est le rôle d’un jury ?
Le jury de concours de maîtrise d’œuvre est un organe
collégial qui a un rôle purement consultatif.
Il a vocation à intervenir dans le cadre des concours
et toutes les procédures ayant pour objectif de sélectionner un maître d’œuvre (article 74 du CMP).
Ses règles de composition résultent de l’application
des dispositions des articles 24 (règles propres au
jury) et 22 (règles propres à la CAO) du Code des marchés publics.
Pour chaque procédure organisée par une collectivité,
dans laquelle il doit intervenir, un jury de concours
doit faire l’objet d’une désignation spécifique.
Les élus doivent d’abord être désignés selon les
mêmes règles que celles gouvernant la désignation
des membres de la CAO. Puis vont s’ajouter à ces élus
(3 ou 5 si la commune compte moins ou plus
de 3 500 habitants), le président (l’exécutif local,
le maire pour une commune ou son représentant)
qui pourra convier au sein du jury des personnalités
dont la participation présente un intérêt pour
la consultation (par exemple, les utilisateurs du futur
équipement, ou des financeurs), dans la limite
de cinq et des personnalités présentant, le cas
échéant, les mêmes qualifications que celles attendues des candidats (par exemple, des architectes).
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Entre 4 000 et 193 000 euros HT, les marchés de maîtrise d’œuvre sont passés au terme d’une procédure
adaptée (article 28 du CMP). Si la procédure s’inspire
du concours de MOE, notamment en termes
de remise de prestations (une esquisse par exemple),
cette remise de prestations doit impérativement donner lieu au versement d’une prime calculée selon
les mêmes modalités que celles applicables au
concours (article 74-II). Lorsque la valeur du marché
atteint 90 000 euros HT, le pouvoir adjudicateur doit,
tout en restant soumis à la procédure adaptée, publier
un avis d’appel public à la concurrence au BOAMP
ou dans un journal habilité à recevoir des annonces
légales et sur son profil d’acheteur.
Dès lors que son montant atteint 193 000 euros HT,
le marché de maîtrise d’œuvre doit être conclu selon
une procédure formalisée : le concours anonyme et
restreint de maîtrise d’œuvre (article 74-II du CMP),
organisée dans les conditions fixées à l’article 70 du
Code, avec l’intervention à titre consultatif d’un jury
de concours (question 17) et une obligation de rémunération des candidats ayant remis des prestations.
18
Une collectivité
peut-elle recourir au BEA
ou à la VEFA ?
Dans un bail emphytéotique administratif (BEA article L.1311-2) et dans une vente en l’état futur
d’achèvement (VEFA - article 1601-3 du Code
civil), emphytéote et vendeur sont maîtres d’ouvrage des travaux qu’ils réalisent. Le premier l’est
pendant toute la durée de validité de son titre
d’occupation (de 18 à 99 ans), constitutif de droit
réel ; le second l’est jusqu’à la réception des travaux qui marque l’achèvement de la transmission
de la propriété du bien construit à l’acquéreur.
Les deux techniques contractuelles sont à la disposition des collectivités territoriales, mais
la légalité du schéma est subordonnée, à grands
traits, au fait que dans le cadre de l’un comme
de l’autre des contrats, l’objectif ne peut être
la réalisation d’un ouvrage destiné à être remis
dans son intégralité à la collectivité et construit
en fonction des besoins de cette collectivité
(CE, 14 mai 2008, Communauté de communes
de Millau-Grands Causses, req. n° 280370 ;
CE, 24 février 1994, SA Sofap Marignan, Rec. 94).
Concours
anonyme
Ce type de procé­
dure se déroule
en trois étapes :
d’abord une sélec­
tion (3 au
minimum) de can­
didats sur la base
de critères pré­
définis dans l’avis
de concours ;
ensuite, le choix
d’un projet (le plus
souvent une
esquisse) ; enfin,
une négociation
avec l’auteur ou
les auteurs du ou
des projets lauréats
afin de finaliser
le contrat de maî­
trise d’œuvre.
Person­
nalités
Les personnalités
qualifiées doivent
représenter
au moins le tiers
des membres ayant
voix délibérative.
Or, comme dans
un jury, les élus
comme les person­
nalités invitées ont
voix délibératives,
le tiers de person­
nalités qualifiées
s’apprécie tous
membres élus ou
désignés confondus
(à l’exclusion, invi­
tés potentiels, des
agents de la collec­
tivité, du comptable
public et représen­
tant du directeur
général de la
concurrence, de
la consommation
et de la répression
des fraudes).
VII
DE 20 À 37 LA MOA PUBLIQUE ET SES RELATIONS AVEC LES ETP
19
Quels sont les risques pour
la MOA d’arrêter des choix
techniques en lieu et place
du MOE ?
L’immixtion du maître d’ouvrage dans une opération de construction ne doit pas être fautive.
Dans un tel cas, la sanction est réelle, bien que
limitée : les constructeurs peuvent être exonérés,
au moins en partie, de leurs responsabilités.
Schématiquement, la faute du maître de l’ouvrage
est reconnue par le juge administratif lorsqu’il
a imposé un procédé de construction particulier
et l’utilisation de son personnel et de son matériel
(CE Sect. 21 octobre 1977, Monge et le Sénéchal,
Rec. p. 400 ; CE, 21 novembre 1980, Delair, Rec.
pp. 793, 795).
Au demeurant, en toute logique, les choix techniques imposés par un maître d’ouvrage ne
peuvent avoir d’incidences sur sa responsabilité
que si le dommage est partiellement imputable
au procédé lui-même, qu’il faut distinguer
de sa mise en œuvre (CE, 26 février 1982, Monge,
req. n° 12951).
21
CCAG anciens et nouveaux
(travaux / PI) : comment
choisir ?
Il était devenu essentiel que le CCAG Travaux issu
du décret du 21 janvier 1976, pour une bonne part
obsolète, soit réformé, tout en préservant les grands
schémas, et en respectant la jurisprudence.
Le nouveau CCAG Travaux, que l’on baptise le plus
souvent « CCAG 2010 », a été instauré par l’arrêté
ministériel du 8 septembre 2009 portant approbation
du CCAG Travaux.
De la même manière, et pour les mêmes causes,
le CCAG PI et le CCAG FCS ont également connu
un récent toilettage.
Si les marchés de travaux dont la consultation a été
engagée, ou l’avis de publicité envoyé, avant l’entrée
en vigueur de l’arrêté instaurant le nouveau CCAG
demeurent régis, s’ils se réfèrent à un CCAG, par
la version antérieure à l’arrêté du 8 septembre 2009,
les parties peuvent tout aussi librement déclarer faire
application de l’ancien CCAG, même postérieurement
au 1er janvier 2010 (voir sur ce point la confirmation
de Catherine Bergeal, DAJ du MINEFE, dans une
interview parue sur www.achatpublic.com).
VIII
20
Le CCAG Travaux est-il une
norme impérative ?
Dès que les parties contractantes incorporent les stipulations du cahier des clauses administratives
générales (CCAG) dans leurs marchés, ce document
acquiert une force contraignante à leur égard. Cependant, si le CCAG Travaux existant ne convient pas
aux collectivités locales contractantes, rien ne leur
interdit d’élaborer leurs propres documents généraux
ou de déroger à ceux qui leur sont proposés
(CE, 14 décembre 1988, Assistance publique à Marseille, rec. Tables p. 900 ; art. 58 de la loi du 2 mars
1982 ; CE Sect. 6 déc. 1995, Départ. de l’Aveyron, req.
nos 148964, 149403 ; concl. M. Fratacci).
A NOTER
Aux termes du CCAG Travaux, toute dérogation aux dispositions des CCTG et du CCAG qui ne serait pas clairement
­définie et, en outre, récapitulée comme telle dans le dernier
article du CCAP est réputée non écrite. Certes la jurisprudence ne sanctionne pas systématiquement de nullité
le non-respect de cette obligation. Mais il reste de bonne
administration de les présenter comme telles et de les récapituler dans le cahier des clauses particulières (art. 3.12
du CCAG Travaux).
22
Quelles sont les contraintes
des marchés globaux ?
Les maîtres d’ouvrage peuvent conclure des marchés globaux de travaux dits à « l’entreprise
générale » (sur le contrôle opéré en la matière :
CE, 11 août 2009, Communauté urbaine Nantes
Métropole, req. n° 319949, mentionné dans les
Tables du Recueil Lebon ; CE, 21 mai 2010, Commune d’Ajaccio, req. n° 333737, mentionné dans
les Tables du Recueil Lebon).
Au-delà des exceptions déjà mentionnées figurant à l’article 10 du Code des marchés publics,
des contrats globaux de « construction-exploitation » sont possibles notamment s’ils s’inscrivent
dans le cadre spécifique précédemment décrit
introduit à l’article 73 du Code des marchés
publics (contrats globaux de performances).
ATTENTION
Ainsi qu’il est prescrit à l’article 10 du Code des marchés publics, ces contrats globaux de construction
et d’exploitation ou maintenance devront clairement
distinguer les prix afférents aux différents volets
de la prestation et la rémunération des prestations
d’exploitation ou de maintenance ne pourra en aucun
cas contribuer au paiement de la construction.
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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DE 20 À 37 LA MOA PUBLIQUE ET SES RELATIONS AVEC LES ETP
23
Le MOA doit-il notifier
les OS aux entreprises ?
En principe non. Une fois désigné, le maître
d’œuvre est l’interlocuteur obligé et l’intermédiaire financier de l’entrepreneur sur le chantier.
En d’autres termes, il détient le pouvoir de direction du marché ; à ce titre il appartient à lui seul,
et non au maître de l’ouvrage, de notifier
les ordres de service (OS), qui auront été signés
par lui seul, cosignés par le maître d’ouvrage
pour les plus importants.
Les ordres de service sont écrits, signés par
le maître d’œuvre, datés et numérotés. Ils sont
adressés en deux exemplaires à l’entrepreneur ;
celui-ci renvoie immédiatement au maître
d’œuvre l’un des deux exemplaires après l’avoir
signé et y avoir porté la date à laquelle il l’a reçu.
Par principe, l’entrepreneur est tenu de se conformer strictement aux ordres de service qui lui sont
notifiés, qu’ils aient ou non fait l’objet de réserves
de sa part. A défaut, il se placerait en situation
fautive. Pour préserver ses droits par rapport à un
ordre de service qui lui est notifié, l’entrepreneur
devra le signer « avec réserves » et expliciter
celles-ci sous 15 jours (art. 2.5 du CCAG Travaux).
25
24
Quels sont les pouvoirs
de modification du marché
de travaux par le MOA ?
Le pouvoir de modification unilatérale du contrat fait
partie des « règles générales applicables aux contrats
administratifs » (CE, 2 février 1983, Union transports
publics, Rec. CE p. 33).
Pour autant, il est largement aménagé, en particulier
par les cahiers des clauses administratives générales
inclus dans les marchés publics. Ainsi, par exemple,
L’article 15-22 du CCAG Travaux autorise-t-il l’entrepreneur à refuser l’exécution des modifications dont
le montant excéderait le dixième de la masse initiale
des travaux.
Par ailleurs, ainsi que le rappelle l’article 20 du Code
des marchés publics un avenant au marché ne peut
avoir pour effet de « bouleverser l’économie du marché, ni en changer l’objet ». S’agissant en particulier
des marchés dont la conclusion est soumise à publicité et mise en concurrence, le juge vérifiera que
les modifications apportées au contrat ne conduisent
pas une remise en cause de la mise en concurrence
d’origine. Une exception est néanmoins prévue par
le CMP, qui correspond à l’hypothèse des sujétions
techniques imprévues extérieures aux parties.
26
Le MOA peut-il refuser
de verser les acomptes ?
Peut-on payer directement
un sous-traitant ?
L’article 91 du CMP dispose que les prestations dont
l’exécution a commencé ouvrent droit à des
acomptes. Ainsi, comme l’avance forfaitaire
et à la différence de l’avance facultative, le versement
d’un acompte par l’administration au titulaire
d’un marché est une obligation pour la personne
publique dès lors que les prestations prévues
au marché ont commencé à être exécutées.
Dans cette logique, le CCAG Travaux (article 48
du CCAG T 1976 et article 49.2 du CCAG T 2010)
organise la possibilité pour le titulaire du marché
de demander la résiliation du marché pour défaut
de mandatement des acomptes. Lorsque trois
acomptes mensuels successifs n’ont pas été mandatés,
l’entrepreneur peut informer le maître d’ouvrage,
trente jours après la date limite de mandatement
du troisième acompte, de son intention d’interrompre
les travaux au terme d’un délai de deux mois.
Saisi d’une demande en paiement direct,
le maître de l’ouvrage doit mettre le titulaire
du marché en demeure de lui faire la preuve,
dans un délai de quinze jours, qu’il a opposé
un refus motivé à son sous-traitant (art. 116
du CMP).
A l’expiration du délai, au cas où le titulaire
ne serait pas en mesure d’apporter cette preuve,
la personne désignée au marché paie les sommes
dues aux sous-traitants.
Le montant de ces sommes ne peut excéder
le montant des sommes restant dues à l’entre­
preneur au titre des projets de décompte qu’il
a présentés (art. 13-5 du CCAG Travaux).
A NOTER
Ni les acomptes, ni les avances ne revêtent
le caractère de paiements définitifs, si bien qu’ils
constituent, une fois versés, des dettes
du titulaire à l’égard de la personne publique.
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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A NOTER
Le juge administratif a reconnu au maître de l’ouvrage
la possibilité de refuser de payer le sous-traitant
s’il estime que les prestations n’ont pas été exécutées
de manière satisfaisante (CE, 28 avril 2000, Sté Peinture
Normandie, req. n° 181604, publié au Recueil).
Délai de
deux mois
Pendant ces deux
mois, le maître
d’ouvrage peut
ordonner la pour­
suite des travaux.
Il s’expose alors
à une majoration
de 50 % des inté­
rêts moratoires
dus sur acomptes,
en sus de l’éven­
tuelle indemnité
compensatoire
qu’il pourra être
amené à verser à
l’entreprise. Si cet
ordre n’intervient
pas, l’entrepreneur
pourra interrompre
les travaux pendant
un an puis deman­
der la résiliation
du marché aux
torts du maître
d’ouvrage si
le mandatement
des acomptes
en retard n’est
pas intervenu au
cours de l’année
d’interruption.
IX
DE 20 À 37 LA MOA PUBLIQUE ET SES RELATIONS AVEC LES ETP
27
Désordres
apparents
S’ils n’ont pas
été détectés
à la réception,
ces désordres,
qui devront être
signalés par des
« réserves » à
la réception ne
seront pas couverts
par la garantie
décennale, qui n’est
susceptible d’être
mise en jeu que
pour les désordres
ayant pour cause
des malfaçons non
apparentes lors
de la réception
de l’ouvrage.
Procèsverbal
L’établissement
du PV des opéra­
tions préalables
à la réception
constitue une étape
importante, dès
lors qu’à défaut
d’avoir fixé la date
d’achèvement
des travaux dans
la décision de
réception expresse,
la date retenue
est celle de la
signature du pro­
cès-verbal (CE,
19 juin 1991, Cne
de CharlevilleMézières c/ Sté
« Scroth et Cie »,
req. n° 78977).
Par ailleurs, le PV
ouvre le délai dans
lequel la décision
de réception pro­
prement dite doit
être notifiée
à l’entrepreneur.
X
28
Qu’est-ce que la réception
des ouvrages ?
Comment réceptionner
les ouvrages ?
La réception des travaux est définie par l’article 1792-6 alinéa 1 du Code civil comme
« l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare
accepter l’ouvrage avec ou sans réserves », et est
organisée, s’agissant des marchés publics de travaux, par les dispositions de l’article 41 du CCAG
Travaux dans ses versions de 1976 et de 2010.
Cet acte de réception est précédé d’une phase
dite « d’opérations préalables à la réception »,
au cours de laquelle le maître de l’ouvrage s’assure de l’exécution correcte des prestations
prévues au marché, et le cas échéant, demande
à l’entrepreneur un complément de travaux
pour remédier à d’éventuels vices visibles.
Ce dernier aspect est essentiel, dès lors que
les vices réputés visibles lors de la réception
ne seront pas ­couverts par les différentes garanties post-contractuelles, s’ils n’ont pas été relevés
à ce stade.
L’entrepreneur avise par écrit le maître d’ouvrage
et le maître d’œuvre de la date prévisionnelle d’achèvement des travaux. Dans un délai de 20 jours,
le maître d’œuvre est tenu de procéder aux opérations
préalables à la réception. Une attention toute parti­
culière doit être portée à la détection de l’ensemble
des désordres apparents.
Au terme des opérations préalables à la réception,
le maître d’œuvre doit dresser un procès-verbal
« sur le champ » (article 41.2). Dans les 5 jours suivant
la signature du PV, le maître d’œuvre est tenu d’indiquer à l’entrepreneur s’il a proposé au maître de
l’ouvrage de prononcer la réception et, dans l’affirmative, la date d’achèvement des travaux qu’il a proposé
de retenir ainsi que les réserves dont il a éventuellement préconisé d’assortir la réception.
Le maître de l’ouvrage dispose d’un délai de 45 jours
à compter du PV, pour notifier à l’entrepreneur sa
décision. A défaut de décision notifiée dans ce délai,
les propositions du maître d’œuvre sont considérées
comme acceptées (article 41.3 du CCAG Travaux).
Dans l’hypothèse où le maître de l’ouvrage prononce
expressément la réception, sa décision doit fixer
la date retenue pour l’achèvement des travaux.
29
30
La réception peut-elle
intervenir à l’insu du MOA ?
Deux situations peuvent y conduire. En premier lieu,
lorsque la personne publique fait preuve à ce sujet
d’une inertie coupable, le constructeur peut, afin
d’éviter une prolongation indéfinie de sa respon­
sabilité contractuelle, saisir le juge du contrat, afin
qu’il prononce lui-même la réception des travaux
et en fixe la date (CE, 17 octobre 1986, Cne de
Mareuil-sur-Arnon, req n° 35341, Rec. tables p. 614).
En deuxième lieu, une « prise de possession » anticipée de l’ouvrage par le maître de l’ouvrage, en
principe autorisée qu’en cas d’urgence (article 4.8
du CCAG Travaux), est susceptible d’emporter réception partielle de la partie d’ouvrage concernée, et,
par suite, le déclenchement des délais de garanties
post-contractuelles.
Dans une telle situation, le juge recherchera les
indices, qui, en l’absence de décision expresse, sont
de nature à établir que les parties ont eu l’intention
de réceptionner les travaux (CE, 11 février 1991,
Département des Ardennes c/ MM Dupré et autres,
Rec. tables, p. 1050 ; CE, 8 mars 2000, Régie immobilière de la ville de Paris ; CAA Paris, 23 nov. 2004,
Société Bati Rénov, req. 00PA01338 ; CAA Paris,
23 nov. 2004, Société Bati Rénov, req. 00PA01338).
Pourquoi ne faut-il
pas « jouer » avec les dates
de réception ?
La date retenue pour la réception des ouvrages est
d’une grande importance sur la suite des relations
entre les parties au contrat. En effet, la réception
des travaux marque, d’abord, la fin des relations
contractuelles entre le maître d’ouvrage et son
cocontractant. Elle opère, ensuite, le transfert
de la garde de l’ouvrage et des risques correspondant au maître de l’ouvrage. Enfin, elle constitue
le point de départ du règlement des obligations
financières des parties et des différentes garanties
post-contractuelles, à savoir, la garantie contractuelle de parfait achèvement, la garantie de bon
fonctionnement et la garantie décennale.
Dans ce contexte, il faut bannir une pratique
« dangereuse » et trop souvent usitée par certains
maîtres d’ouvrage qui, constatant que la réception
des ouvrages intervient tardivement par rapport
au calendrier prévisionnel de travaux, lui donne
un effet rétroactif. Ce procédé prive en réalité
le maître de l’ouvrage d’un délai de garantie,
pourtant précieux dans certains cas.
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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DE 20 À 37 LA MOA PUBLIQUE ET SES RELATIONS AVEC LES ETP
31
32
Pourquoi émettre des
réserves à la réception ?
Comment établir le décompte
général du marché ?
Les désordres ayant fait l’objet de réserves
demeurent couverts par la garantie contractuelle
aussi longtemps que celles-ci n’ont pas été levées.
Et le point de départ des garanties post-contractuelles pour ces parties d’ouvrages est différé
jusqu’à la date à laquelle les travaux de reprise ou
d’achèvement sont exécutés (CE, 21 février 1986,
Sté Peinture et reconstruction, Rec. p. 44).
Les désordres qui étaient apparents ou décelables
au jour de la réception, mais qui n’ont pas fait
l’objet de réserves ne sont pas couverts par les
garanties post-contractuelles, qui couvrent seulement les désordres résultant de vices indécelables
à la réception. Passée la réception, la responsabilité du constructeur ne peut plus être mise en jeu.
Lorsqu’il prononce la réception avec réserves, le
maître d’ouvrage doit fixer le délai imparti à l’entrepreneur pour réaliser les travaux nécessaires.
Ce délai ne peut excéder 3 mois (art. 41.5, CCAG).
C’est au titulaire du marché qu’il appartient
de prendre l’initiative, après l’achèvement des travaux, d’établir un projet de décompte final établissant
les sommes auxquelles il peut prétendre (art. 13.31
CCAG-T ancien, art. 13.3.1 CCAG-T 2010).
Le maître d’œuvre intègre le « décompte final » ainsi
établi au projet de décompte général (art. 13.41).
Ce projet de décompte général est adressé à la personne responsable du marché (PRM).
La PRM vise le projet qui devient alors officiellement
le « décompte général » du marché, qui doit en principe être transmis au titulaire du marché, par ordre
de  service, avant la plus tardive des deux dates mentionnées à l’article 13.42 :
– 45 jours après la date de remise du projet de
décompte final (délai ramené à un mois pour les travaux dont l’exécution est inférieure à 3 mois) ;
– 30 jours après la publication de l’index de référence
permettant la révision du solde.
A NOTER
Si les réserves ne sont pas levées par le maître de l’ouvrage, les obligations contractuelles de l’entrepreneur
sont maintenues sur les parties d’ouvrage concernées.
33
Quel est le rôle du MOE dans
le règlement du marché ?
Le maître d’œuvre doit examiner le projet transmis,
l’accepter ou le rectifier et surtout le compléter par
diverses opérations (dont la déduction des pénalités,
et des avances, acomptes, l’actualisation, la TVA,
la retenue de garantie, etc.) pour aboutir au projet de
« décompte général » transmis au maître de l’ouvrage.
Si le décompte a été établi d’office par le maître
d’œuvre, il devra être notifié à l’entrepreneur avec
le décompte général (art. 13.32 al. 4 A-CCAG-T,
art. 13.4.1 N-CCAG-T). Sous le régime du CCAG-Travaux 1976, c’est cette notification qui met fin,
s’il y a lieu, à l’application des pénalités (art. 13.32,
al. 5 CCAG T). Sur la base du décompte final et
des autres documents financiers (art. 13.41 CCAG-T
ancien, art. 13.4.1 CCAG-T nouveau), le maître
d’œuvre ­établit ensuite le décompte général
et le notifie à la « personne responsable du marché »
ou au « représentant du pouvoir adjudicateur ».
Le rôle joué par le maître d’œuvre est à ce stade déterminant car le représentant du pouvoir adjudicateur
aura tendance à s’en remettre à la compétence de son
maître d’œuvre et donc accepter, tel qu’il lui est présenté, le projet de décompte général du marché, qui
deviendra alors le décompte général.
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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34
Comment anticiper
les contentieux
avec les entreprises ?
Que les difficultés proviennent de décisions
du maître de l’ouvrage ou du maître d’œuvre,
de l’exécution par l’entreprise, ou d’événements
extérieurs, il est vivement conseillé de conserver
une trace précise (donc bien souvent écrite)
des événements et circonstances dans lesquels
elles sont intervenues.
Dans cet esprit, les réserves, les courriers d’information ou de précaution adressés au maître
d’œuvre ou à un autre interlocuteur compétent
devront susciter une réponse : accord, refus,
demande de précisions, au fond, les circonstances dicteront le sens de la réponse.
Ce qui compte, en premier lieu, c’est de conserver
la mémoire de l’événement, afin qu’il ne soit pas
déformé quelques années plus tard.
A cet égard, les comptes rendus de chantier
constituent des éléments de preuve d’une grande
valeur.
Délai
A défaut de délai
fixé par le maître
d’ouvrage dans sa
décision, les tra­
vaux nécessaires
à la levée des
réserves doivent
être exécutés trois
mois avant l’expira­
tion du délai de
garantie de parfait
achèvement, soit,
au plus tard 9 mois
après la date d’ef­
fet de la réception.
Si les travaux ne
sont pas réalisés
dans les délais
prescrits, le maître
de l’ouvrage peut
les faire exécuter
aux frais et risques
de l’entrepreneur
(article 41.6 du
CCAG Travaux).
Levée
de réserves
Lorsque les travaux
requis sont ache­
vés, le maître de
l’ouvrage doit pro­
céder à la « levée »
des réserves,
conformément aux
propositions du
maître d’œuvre.
Celle-ci prend
la forme d’un pro­
cès-verbal de levée
de réserves, qui
emporte en prin­
cipe renonciation
du maître de l’ou­
vrage à rechercher
la responsabilité
contractuelle
de l’entrepreneur
sur les points
considérés.
XI
DE 38 À 50 LA GESTION DU CONTENTIEUX
35
Décompte
générale
et définitif
(DGD)
Le caractère défini­
tif du décompte
général, notifié
par l’autorité res­
ponsable au sein
de l’administration
maître de l’ouvrage
et non contesté
par le cocontrac­
tant dans le délai
et les formes
requises, fait
­obstacle aux récla­
mations ultérieures
de l’entreprise
mais également
du maître de l’ou­
vrage. En pratique,
le juge rejette donc
comme irrecevable
toute demande
de l’une des parties
présentée alors
que le décompte
est devenu définitif
(CAA Bordeaux,
15 novembre 2007,
Centre hospitalier
Esquirol, req.
n° 04BX00162).
XII
36
Comment gérer
les réclamations ?
Comment le décompte
général devient-il définitif ?
Aux termes de l’article 50.1.1 du CCAG Travaux
2010, l’entrepreneur est dans tous les cas tenu
de remettre au représentant du pouvoir adju­
dicateur un mémoire exposant les motifs
et indiquant les montants de ses réclamations,
une copie de ce mémoire étant adressée également au maître d’œuvre.
Il appartiendra ensuite à la maîtrise d’ouvrage,
après avis du maître d’œuvre, de notifier au titulaire sa décision motivée dans un délai de
quarante-cinq jours à compter de la date de réception du mémoire en réclamation (article 50.1.2
du CCAG-T 2010).
L’absence de proposition dans ce délai équivaut
à un rejet de la demande de l’entrepreneur
(article 50.1.3).
Lorsqu’il n’accepte pas la proposition de la personne responsable du marché ou le rejet implicite
de sa demande, le titulaire saisit le tribunal administratif compétent mais alors, et ce point est
d’importance, il ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs énoncés dans les
mémoires en réclamation.
L’entrepreneur doit, dans le délai de 45 jours suivant
la notification du décompte général (délai arrêté à
30 jours par le CCAG Travaux de 1976 lorsque le délai
d’exécution ne dépassait pas 6 mois), le renvoyer au
maître d’œuvre, revêtu de sa signature, avec ou sans
réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles
il refuse de le signer (art. 13-44 du CCAG-T 2010).
Si la signature du décompte général est donnée sans
réserve, cette acceptation lie définitivement les parties
sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires, ce décompte devient ainsi le décompte général
et définitif du marché (art. 13.44 al.2).
Le silence du titulaire vaut acceptation tacite : partant, faute pour le titulaire du marché de renvoyer
au maître d’œuvre le décompte général signé ou
de le contester dans les délais impartis, ce décompte
est réputé être accepté par lui et devient ainsi
le « décompte général et définitif » du marché
(art. 13.45 CCAG-T ancien, art. 13.4.5 CCAG-T 2010).
Par voie de conséquence, ce décompte ne peut plus
être contesté ; il lie définitivement les parties, sauf en
ce qui concerne le montant des intérêts moratoires
afférents au solde (art. 13.44, al. 2 CCAG-T ancien,
art. 13.4.4, al. 3 CCAG-T 2010).
37
38
Quels sont les effets
du décompte général
et définitif ?
Quels sont les motifs
de résiliation du marché
de travaux ?
Outre le rôle qu’il peut jouer dans la détermination
de la date à laquelle a pu intervenir une réception
tacite (CE, 29 avril 1983, Société « Établissements
Roure », req. n° 19.798, Rec. T. 784 ; CE, 16 nov. 1983,
Le Meme, req. n° 22.284, Rec. T. 784 ; CAA Bordeaux,
6 nov. 1990, OPHLM de Millau, Rec. T. 866), le DGD
fixe en principe le droit à paiement des parties et fait
courir le délai des intérêts moratoires.
Le DGD achève d’éteindre les obligations contractuelles nées d’un marché public de travaux : en effet,
si la réception met en principe fin aux rapports
contractuels entre le maître de l’ouvrage et les
constructeurs pour ce qui concerne la réalisation
de l’ouvrage, elle reste toutefois sans effet sur
les droits et obligations financiers nés de l’exécution
du marché – à raison notamment de retards ou
de travaux supplémentaires –, dont la détermination
n’intervient définitivement qu’au stade de l’établissement du solde du décompte définitif. (CAA Nancy,
31 déc. 1992, CCI de Lille-Roubaix-Tourcoing, Rec.
608 ; CE, 6 avril 2007, Centre hospitalier général
de Boulogne-sur-Mer, req. nos 264.490 et 264.491).
Le pouvoir de résiliation unilatérale d’une
convention moyennant indemnisation du cocontractant procède d’une « règle générale applicable
aux contrats administratifs » (CE, Ass., 2 fév.
1987, Société TV6, rec. p. 29). Le motif d’intérêt
général constitue un premier motif légitime de
résiliation (abandon d’un projet, considérations
liées à l’organisation ou au fonctionnement du
service public, voire d’ordre financier).
La résiliation du contrat peut ensuite être prononcée dès lors qu’une faute d’une particulière
gravité est caractérisée dans son exécution
(CE, 18 fév. 1983, Sté française du tunnel routier
du Fréjus, Rec. CE tables 1983, p. 781). Le cocontractant n’a pas droit à une indemnité en cas
de faute avérée dans l’exécution du contrat
(CE, 8 nov. 1985, Entrep. Ozilou, rec. p. 317 ; CE,
20 janv. 1988, Société d’étude et de réalisation
des applications du froid, rec. p. 29). Il revient
même au cocontractant de supporter les éventuelles conséquences onéreuses de la résiliation.
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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DE 38 À 50 LA GESTION DU CONTENTIEUX
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Quels sont les droits
à indemnisation du titulaire
en cas de résiliation pour
motif d’intérêt général ?
Quelles sont les conditions
de mise en régie du marché ?
Le cocontractant a le droit d’être indemnisé
pour la perte qu’il subit du fait des achats qu’il
a pu faire, des investissements qu’il a réalisés
et, à condition de démontrer qu’il aurait réalisé
un bénéfice, il a aussi droit à la réparation du gain
manqué.
Par ailleurs, si les conditions de la résiliation ont
été prévues entre les parties, et notamment
les conditions d’indemnisation du cocontractant,
le contrat administratif devra être régulièrement
résilié dans les conditions qu’il prévoit. Sur ce
dernier point, le Conseil d’Etat est venu préciser,
dans un récent arrêt très commenté, que le principe général selon lequel la personne publique
ne doit jamais payer ce qu’elle ne doit pas fait
toutefois obstacle au paiement d’une indemnité
contractuelle en cas de résiliation excédant manifestement le montant du préjudice subi par son
cocontractant du fait de la résiliation du contrat
(CE, 4 mai 2011, CCI de Nîmes, req. 334280).
La personne publique peut adopter à l’encontre
de son cocontractant défaillant une sanction de type
« coercitive », telle que la mise en régie provisoire
de l’exécution du contrat.
Le juge administratif contrôle les motifs et une
­indemnisation du cocontractant est due si la mesure
se révèle injustifiée (CE, 28 avril 1976, Chambre
des métiers de la Haute-Saône, Rec. Tables, p. 996).
La mise en régie provisoire est une sanction provisoire et maintient les relations contractuelles
initiales liant la collectivité à son cocontractant
(CE, 23 janvier 1981, Commune d’Aunay sur Odon
et autres, Rec. p. 25).
En pratique, le service est alors assuré aux frais
et charges du titulaire.
Pendant toute la durée de la régie, l’exploitant
n’a plus droit à aucune rémunération. Il doit supporter le montant des dépenses engagées par la personne
publique. En revanche, la personne publique ne peut
commander des prestations différentes de celles qui
étaient prévues au contrat.
La mise en régie cesse dès que le titulaire du contrat
est à nouveau en mesure de remplir ses obligations.
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Le MOA est-il limité dans
l’application des pénalités
de retard ?
La personne publique peut, avant d’aboutir à une
sanction plus radicale telle que la résiliation ou
la mise en régie du marché, adopter une sanction
pécuniaire : la personne publique met alors à
la charge de son cocontractant des pénalités dont
les conditions et modalités d’application sont en principe prévues par le contrat lui-même.
Les pénalités de retard ont ainsi une portée incitative
mais également réparatrice en ce qu’elles remplacent
forfaitairement les dommages et intérêts dont
la personne publique aurait pu solliciter le versement
en réparation du préjudice causé par le retard dans
l’exécution du marché.
Depuis quelques années le juge administratif, saisi
de conclusions en ce sens, accepte de modérer ou
d’augmenter les pénalités de retard résultant du
contrat, par application des principes dont s’inspire
l’article 1152 du Code civil, si ces pénalités atteignent
un montant manifestement excessif ou dérisoire
eu égard au montant du marché (CE, 29 déc. 2008,
Office public d’habitations à loyer modéré Puteaux,
req. n° 296930).
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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Mise
en régie
Ce pouvoir
de l’administration
existe même dans
le silence du
contrat (notam­
ment : L.Richer,
Droit des contrats
administratifs,
Ed. LGDJ, 5e éd.,
p. 263 ; CE, 6 mai
1985, OPHLM
d’Avignon c/
M. Guichard, RDP
1985, p. 1706).
En pratique, il est
cependant fréquent
que le contrat
­précise les moda­
lités d’exercice
de ce pouvoir et
ses consé­
quences, notam­
ment financières.
Peut-on appeler le MOE
en garantie
en cas de réclamation
de l’entreprise ?
En cas de difficultés relatives à l’exécution
ou au règlement d’un marché de travaux,
les entreprises titulaires rechercheront le plus
souvent la responsabilité du maître de l’ouvrage,
avec lequel elles sont, ou ont été, contractuellement liées.
Dans le cadre d’une telle instance, le juge administratif considère toutefois que le maître
d’ouvrage est recevable à appeler en garantie
le maître d’œuvre (CE, 17 mars 2010, Commune
de Saint-Rémy-sur-Durolle, req. n° 319563 ; CE,
5 juillet 2010, Commune de Dijon, req.
n° 314089). Dans ce cas, la répartition finale
de la charge de la condamnation entre le maître
de l’ouvrage et le maître d’œuvre s’opérera
en proportion des fautes commises par chacun
d’entre eux ou, en l’absence de toute faute,
en fonction de leur degré de participation dans
la survenance du dommage à réparer.
XIII
DE 38 À 50 LA GESTION DU CONTENTIEUX
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Désordres
de peu
d’importance
S’ils ne compro­
mettent pas
la solidité de l’ou­
vrage ou ne
le rendent pas
impropre à sa des­
tination, ils ne sont
pas susceptibles
d’être couverts par
la garantie décen­
nale : désordres
partiels, de simples
traces d’humidité,
des microfissures,
le décollement
de la peinture…
Qu’est-ce que la garantie
décennale ?
Qu’est-ce que la garantie
biennale ?
La garantie décennale a pour objet de « garantir »,
en principe pendant dix ans après la réception
des ouvrages achevés, le maître de l’ouvrage propriétaire contre les conséquences des désordres
qui pourraient résulter des vices de construction,
non apparents au moment de la réception,
en mettant la réparation de ces désordres à
la charge des constructeurs, cocontractants
du maître de l’ouvrage. Elle s’applique, d’une
part, à tous les ouvrages – de bâtiment et de génie
civil – lorsque les dommages compromettent sa
« solidité ». D’autre part, aux éléments constitutifs
ou aux éléments d’équipement de ces ouvrages
lorsque les dommages qui les affectent les rendent « impropres à leur destination ». Elle ne
s’applique pas aux désordres de peu d’importance.
La garantie décennale ne peut jouer qu’après
la réception des ouvrages. Les désordres connus
et apparents lors de la réception des travaux ne
peuvent engager la responsabilité décennale des
constructeurs après cette réception si celle-ci n’a
été assortie par le maître de l’ouvrage d’aucune
réserve (art. 45 du CCAG-T ; art. 2270 Code civil).
La loi n° 78-12 du 4 janvier 1978 a institué une
­garantie post-contractuelle de deux ans de bon fonctionnement au bénéfice de certains éléments d’équipement de bâtiment, codifiée aux articles 1792-3 et
2270 du Code civil. Le point de départ de la garantie
court à compter de la réception de l’ouvrage achevé.
Tous les constructeurs ainsi que le fabricant sont
tenus à la garantie biennale.
Le maître de l’ouvrage doit établir que le désordre est
« imputable » au constructeur ou au fabricant responsable (CE, 14 mai 1990, Sté CGEE Alstom, rec. p. 124).
Il a droit, non seulement à la réparation du préjudice
résultant des désordres apparus avant l’expiration
du délai de garantie, mais encore à celle du préjudice
résultant des désordres qui se sont manifestés ultérieurement, à la seule condition qu’ils aient la même
origine.
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Qu’est-ce que la garantie
de parfait achèvement ?
Bien qu’intervenant après la réception de l’ouvrage,
l’obligation de « parfait achèvement » est de nature
contractuelle ; elle ne pèse que sur l’entrepreneur
(CAA Bordeaux, 10 juin 1996, Sté Esmery-Caron, req.
n° 94BX01527).
Celui-ci doit remédier aux malfaçons ayant fait l’objet
de réserves lors de la réception.
Les dépenses correspondant aux travaux complé­
mentaires prescrits par le maître de l’ouvrage
ou le maître d’œuvre ne sont à la charge de l’entre­
preneur que si la cause de ces déficiences lui est
imputable.
Le délai de garantie est, sauf stipulations différentes
du marché et sauf prolongation décidée, d’un an
à compter de la date d’effet de la réception, ou de six
mois à compter de cette date si le marché ne concerne
que des travaux d’entretien ou de terrassement.
En cas de réception partielle de tranches de travaux,
ouvrages ou parties d’ouvrages, le délai court, sauf
­stipulations contraires, à compter de la date d’effet
de cette réception.
A l’expiration du délai de garantie, l’entrepreneur est
« dégagé de ses obligations contractuelles » (art. 44.1
al. 5 du CCAG Travaux).
XIV
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A NOTER
Si le mauvais fonctionnement d’un élément d’équipement
rend l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination,
le maître de l’ouvrage dispose d’un droit d’option entre
la garantie biennale de bon fonctionnement et la garantie
décennale (CE, 12 janvier 1983, Auffret et autres, rec. p. 160).
Comment faire
constater des malfaçons
sur l’ouvrage ?
Lorsque des malfaçons affectent l’ouvrage
exécuté ou en cours de construction, il importe
de faire établir, contradictoirement entre
les parties, la preuve de leur existence, de leur
étendue, de leur nature et, le cas échéant,
de leur origine.
A cet effet, il arrive fréquemment que la compagnie d’assurance du maître d’ouvrage fasse appel
à son expert.
Dans la mesure néanmoins où l’impartialité
de cet homme de l’art risque d’être débattue
par la suite, une mesure « d’expertise »
ou de « constat » judiciaire peut être préférée
par les parties.
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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DE 38 À 50 LA GESTION DU CONTENTIEUX
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Comment une expertise
judiciaire se déroule-t-elle ?
Quel est l’intérêt du référé
constat par rapport au référé
expertise ?
La partie demanderesse, qui sera fréquemment
le maître de l’ouvrage, saisira, selon la nature
du litige auquel le désordre constaté est susceptible d’aboutir, les juridictions administrative
ou judiciaire compétentes d’une requête aux fins
de désignation d’un expert.
Si cette requête est acceptée, le tribunal compétent désignera l’expert de son choix aux fins
de réaliser la mission d’expertise ordonnée, dans
un délai déterminé.
Des réunions d’expertise seront alors organisées
par l’expert auxquelles l’ensemble des parties
à l’expertise est tenu d’assister.
L’expert désigné remettra au cours de l’expertise
des « notes aux parties ». Les parties pourront
quant à elles formuler des observations sur
le déroulement de la mission d’expertise par
la production de « dires » communiqués à l’expert
et à l’ensemble des autres parties.
Au terme de sa mission, l’expert rendra au tribunal un rapport synthétisant ses conclusions, qui
sera communiqué aux différentes parties.
49
Quels sont les intérêts
du référé provision ?
La procédure de référé provision est régie par l’article
R.541-1 du Code de justice administrative. Il est
nécessaire – et par ailleurs suffisant, l’urgence n’étant
notamment pas requise – que l’obligation poursuivie
ne soit pas sérieusement contestable pour que le juge
des référés accorde une provision au demandeur.
Le montant des provisions allouables en référé
n’est, en revanche, pas déterminé par les textes ;
il n’a, en pratique, pas d’autre limite que « le montant
non sérieusement contesté de la dette alléguée »
(Cass. com., 20 janvier 1981).
Toutefois, le juge du principal peut ne pas partager
l’opinion du juge des référés qui a cru justifiée
la demande de provision : il importe donc que cette
dernière puisse, le cas échéant, être remboursée
à la partie qui l’a versée.
En pratique, le maître de l’ouvrage peut, sans attendre
la décision du tribunal saisi sur le fond, faire réaliser
les travaux nécessaires par une tierce entreprise
et, parallèlement, tenter d’obtenir en référé une provision qui lui permettrait de ne pas avancer la totalité
des sommes nécessaires au financement desdits
­travaux et dont elle escompte le remboursement.
Le Courrier des maires N° 251 Novembre 2011
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Alors que l’expertise aura très souvent pour objet
de déterminer les causes des désordres et l’ampleur
du préjudice en résultant, le constat ne constitue
qu’une « photographie » des malfaçons affectant
l’ouvrage.
Si le référé constat ne conduit qu’à une analyse
superficielle de la situation à un instant donné,
il présente néanmoins plusieurs avantages pratiques
par rapport au référé expertise. En premier lieu,
la mission de constat ne nécessite bien souvent qu’un
seul déplacement sur les lieux, ce qui réduit le coût
et les délais de la mission.
En outre, dès lors que le constat n’a pas vocation,
contrairement à la mission d’expertise, à déterminer
l’origine et donc l’imputabilité à tel ou tel intervenant
des désordres constatés, il permet à la maîtrise
d’ouvrage, alors même que les travaux sont toujours
en cours de réalisation, de pouvoir préserver
la preuve de son préjudice tout en évitant de tendre
les relations entre les parties, ce qui serait préjudiciable à la poursuite du chantier.
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Faut-il souscrire
une assurance dommage
ouvrage ?
En principe, tout maître d’ouvrage est tenu
de la souscrire (article L.242.1 al. 1er du Code
des assurances). Les maîtres d’ouvrage publics
échappent pourtant largement à cette obligation.
Au demeurant, un réel intérêt existe à souscrire
dans certains cas une telle garantie eu égard
à l’importance des travaux de bâtiment à réaliser.
Ce choix sera dicté par trois paramètres :
– la capacité financière du maître de l’ouvrage
à réparer intégralement et rapidement le sinistre
susceptible de survenir ;
– les risques techniques présentés par les travaux
envisagés ;
– le coût de l’assurance, qui pose actuellement
d’importantes difficultés aux opérateurs.
A NOTER
L’assurance de dommages « prend effet après expiration
du délai de garantie de parfait achèvement visé à l’article 1792.6 du Code civil ». Avant l’expiration de ce délai, le maître de l’ouvrage doit, dans un premier temps,
demander directement à l’entrepreneur la réparation
des dommages (art. L.242.1 du Code des assurances).
Obligation
Seuls les désordres
de nature décen­
nale sont soumis
à l’obligation
d’assurance.
Sont donc visés
les ­dommages
qui compromettent
la solidité des
ouvrages, affectent
les ouvrages dans
l’un de leurs élé­
ments constitutifs
ou l’un de leurs
éléments d’équi­
pement, les rendant
impropres à leur
destination, affec­
tent la solidité
de l’un des équipe­
ments indisso­
ciables des
ouvrages de viabi­
lité, de fondation,
d’ossature, de clos
ou de couvert
(art. 1792.2
du Code civil).
XV