Chapitre 5 – Transformée de Laplace 1 Intégrales généralisées

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Chapitre 5 – Transformée de Laplace 1 Intégrales généralisées
MVA101 Analyse et calcul matriciel – Cours n◦ 7
Jacques Vélu (CNAM)
Chapitre 5 – Transformée de Laplace
1
Intégrales généralisées
A
Z
i) Soient f , définie sur un intervalle du type ]m, +∞[. Si lim
f (t)dt existe, on dit que l’intégrale
A→+∞
+∞
Z
A
Z
f (t)dt = lim
converge, et on écrit :
A→+∞
a
a
f (t)dt
a
Il se peut que l’intégrale converge grâce au signe de f :
+1
+ 1/3
- 1/2
+1
- 1/4
+ 1/5
+1/2
+1/3
+ 1/4
+1/5
+∞
Z
ii) On dit que l’intégrale est absolument convergente si
| f (t)|dt converge.
a
Théorème : Si l’intégrale est absolument convergente, elle est convergente.
R3
R2
Remarque : Le fait que l’intégrale
soit convergente, ou absolument
convergente, n’implique pas que
lim f (t) = 0.
1 n
,2
4n
1
1
× 2n = n
n
4
2
R1
Aire de Rn :
R0
t→+∞
0
1
Dimensions de Rn :
2
3
iii) Dans le cas où f (t) > 0 quand t > a, l’intégrale
Z A
f (t)dt est une fonction croissante de A.
a
a
Z
A
+∞
Théorème : L’intégrale
f (t)dt converge si et seulement si il existe un nombre M tel que
a
Z A
Z +∞
f (t)dt 6 M quel que soit A, et alors
f (t)dt 6 M.
a
a
Théorème de comparaison : Soient f et g sont deux fonctions telles que f (t) 6 g(t) quand t > a.
Z +∞
Z +∞
• Si
f (t)dt = +∞ alors
g(t)dt = +∞.
a
a
+∞
Z
Z
g(t)dt converge, alors
• Si
a
+∞
+∞
Z
f (t)dt converge et :
a
f (t)dt 6
a
1
+∞
Z
g(t)dt .
a
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2
Jacques Vélu (CNAM)
Transformation de Laplace
i) Si f est une fonction à valeurs réelles, ou complexes, d’une variable réelle, sa transformée de
Laplace est la fonction φ donnée par l’intégrale de Laplace (p est une variable complexe) :
∞
Z
φ(p) =
f (t) e−p t dt
0
On écrit φ = L( f ), ou f A φ, ou φ @ f . On dit que f est l’original de φ et que φ est l’image de f .
La transformation de Laplace consiste à passer de f à φ.
Z ∞
ii) On remarque que
f (t) e−p t dt ne prend en compte que les valeurs de f (t) pour t > 0. La
0
transformée de Laplace est donc concernée par les phénomènes transitoires : avant une certaine date,
il n’y a rien, et après, il y a quelque chose . . . En prenant cet instant comme origine du temps, on
peut supposer que f est une fonction définie de −∞ à +∞ telle que f (t) = 0 quand t < 0. On dit
alors que f est une fonction causale.
Exemple : La fonction de Heaviside (fonction échelon-unité).



 0
H(t) = 

 1
1
quand t < 0
quand t > 0
0
Si F est définie sur R, la fonction f = FH est causale et f (t) = F(t) quand t > 0.
iii) On se pose immédiatement les questions suivantes :
Q1 : Quelles fonctions ont une transformée de Laplace ?
Q2 : À quoi reconnaı̂tre une transformée de Laplace ?
Q3 : Comment retrouver f à partir de φ ? Unicité ?
Q4 : Comment se correspondent les propriétés de f et de φ ?
On ne répondra pas de façon générale à Q1, Q2, Q3 . . .
Pour Q1 et Q3, on décrira un ensemble de fonction f dont on connaı̂t les transformées φ et pour
lesquelles on sait faire le passage de φ à f , pour Q2, on donnera des propriétés satisfaites par les
transformées de Laplace ; par contre, on sera plus long pour Q4.
Convention : Dans tout ce qui suit, f est une fonction de classe C0 par morceaux sur R (nombre fini
de discontinuité sur tout intervalle de longueur finie et limite à gauche et à droite aux discontinuités).
iv) On dit que f est à croissance exponentielle quand il existe des nombres réels C, M, a tels que :
| f (t)| 6 CeM t quel que soit x > a
Le prochain théorème montre que les fonctions de classe C0 par morceaux, à croissance exponentielle, ont une transformée de Laplace.
Théorème : Si f vérifie les conditions ci-dessus, l’intégrale de Laplace est absolument convergente
quand Re(p) > M. En particulier, si lim f (t) existe, l’intégrale φ(p) existe pour tout p > 0.
t→+∞
Z A
Démonstration : On doit montrer que
| f (t) e−p t |dt a une limite quand A tend vers +∞.
0
2
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A
Z
| f (t) e
•
a
Z
−p t
|dt =
0
A
Z
| f (t)| |e
−p t
Jacques Vélu (CNAM)
|dt +
| f (t)| |e−p t |dt
a
0
• p = u + iv ⇒
=
Z A
Z
−p t
Alors :
| f (t) e |dt =
= |e−u t | |e−i v t | = e−u t
" (M−u) #A
Z A
A
e
−u t
(M−u) t
| f (t)| e dt 6
Ce
dt = C
M
−u a
a
a
!
!
C
e(M−u)A − e(M−u)a
C e(M−u)a
=C
=
e(M−u)A −
M−u
M−u
M−u
|e−p t |
a
|e−u t e−i v t |
A
Z
• M−u < 0 ⇒
lim e
(M−u)A
A→+∞
= 0 et le théorème de comparaison montre alors que
| f (t)| e−u t dt
a
converge quand u > M.
v) Soit f une fonction continue par morceaux sur [0, +∞[.
Théorème : Si l’intégrale de Laplace converge quand p = p1 , alors elle converge quel que soit p
avec Re(p) >Re(p1 ).
Conséquence : 3 possibilités :
• Il existe un nombre réel θ tel que l’intégrale de Laplace converge quand Re(p) > θ et diverge
quand Re(p) < θ. Le nombre θ s’appelle l’abscisse de convergence de f .
• L’intégrale de Laplace converge quel que soit p. L’abscisse de convergence θ = −∞.
• L’intégrale de Laplace diverge quel que soit p. L’abscisse de convergence θ = +∞.
L’ensemble des p tels que Re(p) > θ s’appelle le demi-plan de convergence.
vi) Les transformées de Laplace possèdent deux propriétés remarquables.
lim f (t) = lim p φ(p)
Théorème de la valeur initiale
t→0+
⇒
Théorème de la valeur finale : Si lim f (t) existe :
t→+∞
lim φ(p) = 0
p→+∞
p→+∞
lim f (t) = lim+ p φ(p)
t→+∞
p→0
vii) Si l’on connaı̂t φ(p) pour p parcourant une droite verticale ∆ du demi-plan complexe, on peut
« presque » retrouver f en calculant l’intégrale suivante qui donne la valeur de f (t) là où f est
continue :
Z
f (t+ ) + f (t− )
1
pt
φ(p) e dp =
2π i ∆
2
Conséquence : Deux fonctions de classe C0 par morceaux qui ont la même transformée de Laplace
ne peuvent différer que sur leurs discontinuités ; si elles sont continues, elles sont égales.
3
Les exemples fondamentaux
Exemple 1 : Calcul de L(ts ) avec s réel positif quelconque.
Z
∞
s −p t
t e
0
t→ up
∞
Z
dt =
0
!s
!
Z ∞
u −u du
1
cs
s −u
e
= s+1
u e du = s+1
p
p
p
p
0
| {z }
cs
3
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∞
Z
c0 =
∞
e du = −e−u 0 = 1
−u
0
c0 = 1
Donc
Z
et
Jacques Vélu (CNAM)
∞
cs =
∞
u e du = −us e−u 0 −
∞
Z
−s us−1 e−u du = s cs−1
s −u
0
cs = s cs−1 . En particulier
0
cn = n ! quand n ∈ N .
∞
Z
Euler a eu l’idée de poser s ! =
us e−u du pour s quelconque, réel ou complexe, avec Re(s) > 0
0
s!
et d’utiliser (s − 1) ! =
pour obtenir la factorielle des autres valeurs.
s
ts A
Finalement
s!
ps+1
HA
et
1
.
p
∞
Z
Γ(s) =
Euler aussi a compris que la « bonne » fonction n’est pas s ! mais plutôt :
us−1 e−u du .
0
at
e
Exemple 2 :
Exemple 3 : cos ω t A
∞
Z
cos ω t e
dt =
0
sin ω t A
∞
sin ω t e
0
4
p2
dt =
0
∞
Z
a t −p t
e e
dt =
0
e−(p−a) t dt
0
+ e−i ω t −p t
1
e dt =
2
2
∞
Z
e
+i ω t −p t
e
0
1
dt+
2
∞
Z
e
−i ω t −p t
e
0
1
1
1
dt =
+
2 p − iω p + iω
− e−i ω t −p t
1
e dt =
2i
2i
∞
Z
e
+i ω t −p t
e
0
1
dt−
2
∞
Z
e
−i ω t −p t
e
0
1
1
1
dt =
−
2i p − iω p + iω
Opérations sur les transformées de Laplace
i) Linéarité
L(a1 f1 + · · · + ap fp ) = a1 L( f1 ) + · · · + ap L( fp )
2
3
10
+ 2− 3
p p
p
∞
 ∞
∞
 ∞
X
 ? X
X
 ? X an n !
ii) Et pour une infinité de fonctions ? L 
an fn  =
L an fn ou L 
an tn  =
pn+1
L(2 + 3t − 5t2 ) = 2L(H) + 3L(t) − 5L(t2 ) =
n=0
n=0
Non en général, mais oui dans certains cas !
n=0
n=0
∞
X
an n !
Théorème : S’il existe une valeur de p pour laquelle la série
converge, alors la série entière
pn+1
n=0
∞
X
∞
X
an n !
.
an t a un rayon de convergence infini et :
an t A
pn+1
n=0
n=0
n=0
n
!
ω
+ ω2
∞ +i ω t
e
Z
−p t
∞
p
+ ω2
0
Exemple 4 :
Z
p2
∞ +i ω t
e
Z
−p t
Z
1
A
avec a complexe quelconque :
p−a
∞
X
4
n
!
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!n+1
∞
∞
X
1
1
n!
1
an n ! X 1
Exemple : an =
⇒ an n ! =
=
⇒
=
(n + 1)!
(n + 1)! n + 1
n+1 p
pn+1
n=0
n=0
∞
∞
X
X
xn+1
an n !
La série
converge quand |x| < 1, et sa somme est − ln (1 − x). Donc
converge
n+1
n+1
p
n=0
n=0
!
∞
X
1
tn
quand |p| > 1 et sa somme est − ln 1 − . Il en résulte que
converge ∀t, et, puisque
p
(n + 1)!
n=0
!
et − 1
1
et − 1
, on a
A − ln 1 −
sa somme est f (t) =
t
t
p
iii) Si l’on change la vitesse de déroulement de l’événement représenté par f , comment change la
transformée de Laplace ?
gv (t) = f (v t)
f (t)
f (t) A φ(p)
⇒
Z
1 p
f (v t) A φ
v v
t→u/p
∞
φv (p) =
−p t
f (v t) e
∞
Z
dt =
0
0
pu
du
f (u) e v
v
−
iv) Si l’on retarde l’arrivée de l’événement représenté par f , comment change L( f ) ?
R
f R (t) = f (t − R)
f (t)
L( f R ) = e
t→(u+R)
∞
Z
−p R
−p t
f (t − R) e
L( f )
Z
∞
=
dt
f (u) e−p (u+R) du = 0 + e−p R L( f )
−R
0
La formule s’écrit aussi : f (t − R) A e−R t φ(p)
∞
Z
iv) Multiplication par une exponentielle : e
at
f (t) A φ(p − a)
e
0
∞
Z
at
f (t) e
−p t
dt =
f (t) e−(p−a)t dt
0
v) Théorème : Si f est à croissance exponentielle, sa transformée de Laplace est dérivable et :
t f (t) A − φ0 (p)
∞
φ(p + h) − φ(p)
⇒
=
h
!
Z ∞
−h t − 1
e−(p+h) t − e−p t
−p t e
φ(p) =
f (t) e dt
f (t)
dt =
f (t) e
dt
h
h
0
0
0
!
Z ∞
−h t − 1
−p t e
Après quoi on montre que la limite de l’intégrale : lim
f (t) e
est égale à l’intégrale
h
h→0 0
!
Z ∞
Z ∞
e−h t − 1
−p t
dt =
f (t) (−t)e−p t .
de la limite
f (t) e
lim
h
h→0
0
0
Z
−p t
Z
5
∞
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Par récurrence, on obtient que φ est infiniment dérivable et que : t n f (t) A (−1)n φ(n) (p) .
Z ∞
sin t −p t
Application : : Calcul de φ(p) =
e dt
t
0
Z ∞ sin t −p t
0
0
• t f (t) A − φ (p) ⇒ φ (p) = −
t
e dt
t
0
Z ∞
−1
⇒ φ(p) = C − arctan p
=−
sin t e−p t dt = 2
p +1
0
lim φ(p) = 0 ⇒
•
p→+∞
∞
Z
0
C=
π
2
⇒
φ(p) = arctan
1
p
sin t −p t
π
1
e dt = − arctan p = arctan
t
2
p
Z
0
∞
sin t
π
dt =
t
2
vi) Théorème : Soit f une fonction dérivable, avec f et f 0 à croissance exponentielle :
L( f 0 ) = p L( f ) − f (0+ )
et par récurrence, on a la formule suivante (valable quand f est dérivable autant de fois qu’il faut ! )
L( f (n) ) = pn L( f ) − pn−1 f (0+ ) − pn−2 f 0 (0+ ) − · · · − p f (n−2) (0+ ) − f (n−1) (0+ )
A
Z
0
−p t
f (t) e
dt =
0
h
iA
f (t) e−p t
0
A
Z
+p
f (t) e−p t dt
0
∞
Z
Z
0
−p t
f (t) e
0
dt = lim
A→+∞
−p A
f (A) e
− f (0) + p
A
f (t) e
0
−p t
∞
!
Z
dt = − f (0) + p
f (t) e−p t dt
0
6

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