PROPOSITIONS CONTRIBUTIVES DE LA FEDERATION DES

Transcription

PROPOSITIONS CONTRIBUTIVES DE LA FEDERATION DES
PROPOSITIONS CONTRIBUTIVES
DE LA FEDERATION DES PARTICULIERS
EMPLOYEURS DE FRANCE
LA REFORME DE LA DEPENDANCE
UNE OPPORTUNITE
SOCIETALE ET ECONOMIQUE
JUIN 2011
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SOMMAIRE
Edito Marie Béatrice Levaux - Présidente de la Fepem ..................................... 3
NOS PROPOSITIONS ................................................................................... 6
I – LA RENOVATION DU MODELE MANDATAIRE............................... 10
II - POUR UNE VALORISATION DU STATUT DES AIDANTS
FAMILIAUX ................................................................................................... 14
III - LA MOBILISATION D’INSTRUMENTS JURIDIQUES, D’OUTILS
DU PATRIMOINE ET DE FINANCEMENT POUR ANTICIPER ET
SECURISER LE RISQUE LIE A LA PERTE D’AUTONOMIE ................... 17
IV - POUR UNE POLITIQUE DE RESSOURCES HUMAINES ET DE
PROFESSIONNALISATION AMBITIEUSE .............................................. 25
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Edito Marie Béatrice Levaux
Présidente de la Fepem & Conseillère au Conseil économique, social et environnemental
En France, 3,6 millions de particuliers emploient à domicile près de 1,7 million de salariés. Plus de 10
milliards d’euros de salaires et 6 milliards de cotisations sociales sont ainsi versés chaque année par
ces particuliers employeurs, dont la moitié est âgée de plus de 60 ans et en perte d’autonomie avérée
ou potentielle.
Bien que trop peu visible, aujourd’hui encore, dans le champ économique traditionnel, le secteur des
emplois de la famille a doublé en dix ans et représente près de 520 millions d’heures déclarées
annuellement. Cette situation spécifique, consistant à assumer un rôle d’employeur à son domicile pour
répondre à des besoins d’accompagnement dus à une perte d’autonomie, concerne des centaines de
milliers de personnes et interroge notre Fédération. C’est dans ce contexte que nous avons signé une
convention partenariale avec la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA) pour
accompagner, sécuriser et professionnaliser le modèle d’emploi entre particuliers.
Particulier employeur en perte d’autonomie ? C’est évidemment possible, et plus que cela, c’est
une réalité pour de nombreux concitoyens qui doivent être accompagnés de manière adaptée.
Les études sur le sujet convergent : un nombre élevé de nos concitoyens manifeste le désir de rester à
domicile lorsqu’ils abordent les rivages de la vieillesse. Ainsi, 64% des personnes de plus de 50 ans,
interrogées dans un sondage réalisé par la Fepem, désirent conserver le choix de la personne qui les
accompagne à domicile. Ce mode de prise en charge des besoins liés à des situations de dépendance
doit positivement être intégré dans les futures politiques publiques Nationales et Européennes.
Liberté de choix pour le citoyen
Notre conviction est forgée depuis fort longtemps : nos concitoyens sont en mesure d’assumer une
partie de la réponse à leur besoin, en tenant compte de leur mode de vie et de l’entrée dans le
processus de la perte d’autonomie. Ils n’attendent pas de l’Etat et des pouvoirs publics, l’ensemble des
réponses aux besoins sociétaux qui se posent à eux.
Au regard du contexte sociétal et économique de notre pays, ils savent qu’un juste équilibre entre
l’accompagnement des pouvoirs publics et la responsabilité, pour chacun, de préparer les conditions de
prise en charge d’une potentielle perte d’autonomie est nécessaire.
C’est dans cet esprit que nous avons réalisé notre contribution au débat sur la prise en charge de la
dépendance des personnes âgées en France.
Selon les statistiques concernant l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA), une personne
bénéficiaire sur quatre de cette allocation est un particulier qui emploie son salarié. Cela n’est pas rien.
3
Les chiffres montrent, par ailleurs, qu’il existe davantage de particuliers employeurs concernés par les
GIR1 et GIR2 que par le GIR4. Nous pouvons donc constater que le degré de dépendance ne
détermine pas nécessairement le modèle d’accompagnement à domicile.
La responsabilité citoyenne se situe bien au cœur de nos enjeux : comment demander à nos
concitoyens d’assumer un reste à charge plus important alors même qu’un mode d’accompagnement
leur serait imposé ? Ce message est difficile à entendre.
C’est la raison pour laquelle nous nous sommes engagés à dépasser les idéologies et à proposer des
réponses innovantes pour les prochaines années en s’appuyant, avant tout, sur le besoin exprimé
et la réalité vécue des personnes.
Reconnaître et promouvoir les valeurs de responsabilité citoyenne
Nous avons le souci d’assurer une juste prise en compte des acteurs qui incarnent ce modèle d’emploi
entre particuliers, et notamment les particuliers en perte d’autonomie. Nous souhaitons que cette large
partie de la population soit clairement identifiée dans les politiques publiques qui organiseront les
prochaines décennies, en particulier les plans de coordination hôpitaux/domicile et les actions de
prévention sur les territoires.
Il est impérieux de rappeler que l’on ne « tombe » pas en dépendance mais que la perte d’autonomie
est souvent un processus qui peut être lent et donc préparé.
Au cœur de la question du financement, le modèle d’emploi entre particuliers présente de réels
bénéfices financiers ; le coût d’un système d’intermédiation, exclusif de tout autre, n’étant pas en
mesure de répondre à la globalité des besoins.
Notre société a besoin de s’appuyer sur tous ceux qui peuvent contribuer à alléger la charge publique.
C’est pourquoi, assumer son rôle d’employeur est une contribution qui mérite d’être soulignée et
accompagnée, y compris sur le plan fiscal et social.
La Fepem a engagé de nombreux programmes pour sécuriser la relation d’emploi entre particuliers.
Les témoignages de nos employeurs en attestent : les enfants, les proches, les personnes en perte
d’autonomie apprécient de pouvoir recruter et choisir un assistant de vie qui les accompagnera, au
quotidien. Le salarié est donc un « acteur » majeur qui participe au bien-être et à la sécurité de la
personne aidée et de son entourage familial, parfois éloigné.
Reconnaître le rôle capital de l’aidant familial
Pour le particulier employeur en perte d’autonomie, le rôle de l’aidant familial est fondamental. Pour
respecter cette relation triangulaire entre l’employeur, le salarié et l’aidant familial, nous préconisons de
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développer un accompagnement adapté dans lequel les services mandataires ont un rôle à jouer. A
domicile, les aidants sont fortement mis à contribution. Les familles concourent jusqu’à 35h à 50h par
semaine à leur rôle d’aidant familial. Près de 4,3 millions de personnes accompagnent un proche dans
sa vie quotidienne. Le plus souvent c’est un choix et un acte d’amour. Néanmoins, il peut aussi être
motivé par la crainte de confier son proche à un tiers. Il est donc important d’accompagner par des
solutions de répit, y compris à domicile, les situations les plus complexes.
Nos convictions :
La Fepem s’est fixée 3 objectifs :
-
Comment et avec quels moyens aider nos concitoyens à mieux assumer leur responsabilité
lorsqu’ils doivent faire face à des situations de perte d’autonomie ?
-
Comment améliorer l’offre mandataire pour que cette dernière soit véritablement rénovée tout
en tenant compte des personnes en situation de perte d’autonomie et de leurs aidants
familiaux ?
-
Par quels moyens renforcer et déployer l’accompagnement professionnalisé des assistants de
vie à domicile ?
Les enjeux de la réforme de la dépendance sont également financiers. Il convient donc d’envisager
toutes les formes de recours financiers possibles avant d’imaginer de nouvelles taxes ou
assurances obligatoires, qui alourdiront prioritairement la charge sur les classes moyennes déjà très
fragilisées.
La Fepem innove dans l’analyse des moyens : elle privilégie une approche patrimoniale choisie qui
permette de mieux flécher une partie des patrimoines vers la perte d’autonomie, comme cela existe
déjà pour la retraite.
Fondamentalement, notre ambition est de placer le rôle de la société civile organisée au cœur
de la réflexion publique.
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NOS PROPOSITIONS
Pour la Fepem, la réforme de la dépendance est une opportunité sociétale et économique.
Nous assistons en France, bon gré mal gré, à la fin de l’Etat Providence avec, de manière
concomitante, une rationalisation croissante des dépenses publiques, une augmentation substantielle
des besoins d’accompagnement à domicile de la perte d’autonomie des personnes âgées et un
accroissement du financement de la dépendance.
Cette réforme de la dépendance est un véritable sujet de société et d’anticipation pour les générations
futures. Nous devons faire évoluer notre regard en considérant les personnes âgées ou en situation de
handicap non comme une contrainte ou un poids pour notre société, mais bien comme une richesse à
préserver.
En la matière, la sémantique prend tout son sens. Il conviendrait de substituer, sur un plan lexical, la
notion de dépendance à celle de « perte d’autonomie », le premier terme étant souvent connoté
négativement. En Europe, la notion de « vieillissement actif » couramment retenue renvoie à une réalité
infiniment plus positive. De même, les anglo-saxons utilisent le terme de « long term care » qui est
positif et actif.
Même si la perte d’autonomie couvre un spectre plus large que la seule dépendance liée à l’âge, il est
essentiel d’utiliser un vocabulaire plus « enchanté » pour « embarquer les citoyens » dans la mise en
œuvre d’outils de prévention et de couverture du risque.
D’autant que le secteur de l’aide et de l’accompagnement de la perte d’autonomie est créateur
d’innovations et d’activités nouvelles, de surcroît, non délocalisables. Encore convient-il de valoriser
davantage les métiers et de permettre une reconnaissance sociétale de ces emplois.
La puissance publique, en prenant appui sur les représentants de la société civile, doit s’emparer de
cette problématique en combinant des visions croisées à court, moyen et plus long termes. Cette
démarche proactive représente une excellente occasion de questionner ou de re-questionner nos
valeurs collectives et de réinventer un modèle d’organisation et de pilotage de la perte
d’autonomie.
La réforme de la dépendance est une réforme sociétale, philosophique, économique, mais
surtout démographique et co-substantielle à l’avancée de notre société. Elle doit s’inscrire dans
un développement durable et donc reposer sur une logique de « citoyenneté responsable ». La
réussite de cette réforme pourra, en outre, être reconnue et valorisée au niveau européen comme un
modèle d’organisation moderne et stable.
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D’ores et déjà, il est urgent d’organiser son financement mais de manière alternative. Le nouveau
système doit être mobile, agile, réactif et informatif. Il doit mettre en exergue les rôles et
responsabilités de chacun, individuellement et collectivement, sans présupposer que nos
concitoyens ne seraient pas en mesure ni d’assumer leurs responsabilités ni de s’organiser de
manière efficace, notamment face aux situations les plus délicates.
Si, à court terme, la réforme de la dépendance est incontestablement une question de solidarité, à long
terme, il s’agit d’une affaire de prévoyance, de responsabilité et d’organisation de son patrimoine.
Mettre en place une juste gouvernance des instances de pilotage de la dépendance, pour :
1- Garantir une équité de traitement sur l’ensemble du territoire, dans l’attribution des aides du
socle de financement public.
2- Rétablir l’application du libre choix posé dans la loi avec, en contrepartie, un dispositif
d’information et de conseil clairement identifié sur chaque territoire.
3- Garantir une juste représentation dans les instances de pilotage de la dépendance de tous les
acteurs du secteur.
Harmoniser les dispositifs de financement, en équité sur l’ensemble du territoire,
reposant sur un premier socle de solidarité publique :
4- Garantir un pilotage coordonné entre le régime d’assurance maladie, les Agences régionales
de santé (ARS), les conseils généraux et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie
(CNSA).
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Reconnaître le cadre de fonctionnement optimisé en cas de recours au modèle
mandataire :
5- Mettre en place un « Grenelle du Mandataire » qui permette de reconnaître son expertise dans
l’accompagnement et la coordination entre la personne en perte d’autonomie, l’aidant familial
ou proche, les professionnels salariés et les intervenants à domicile.
6- Reconnaître, dans les politiques publiques territoriales, la pertinence d’un modèle mandataire
rénové et clairement identifié par les bénéficiaires de l’Allocation personnalisée d’autonomie
(APA).
7- Favoriser la reconnaissance professionnelle des expertises de coordination conduites par les
structures mandataires, à ce jour non valorisées. Création de nouveaux référentiels métiers
attachés aux structures mandataires : évaluateur, coordinateur, acteur de prévention.
Rechercher l’équité de traitement entre les différents modes d’intervention :
8- Alléger le coût des emplois de la famille permettant ainsi de diminuer le reste à charge :
allègement des cotisations patronales et accès au crédit d’impôt pour les personnes retraitées ;
le coût de l’emploi étant pour ces dernières souvent supérieur au montant moyen des retraites
allouées.
9- Supprimer toute discrimination dans l’attribution des aides du socle de financement public lié à
l’exercice du libre choix d’intervention pour la personne dépendante, autre que prestataire
(emploi direct ou mandataire) ; notamment la majoration de 10% du ticket modérateur en cas
de recours à l’emploi direct par un particulier employeur en perte d’autonomie (discriminant et
non applicable – R212-12 du CASF).
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Valoriser le statut d’aidant familial :
10- Lancer un Observatoire national visant à mesurer les impacts financiers du temps passé par
les aidants familiaux auprès de leurs proches, les conséquences sur leurs carrières
professionnelles et leurs propres dépenses de santé.
11- Reconnaître les fonctions et nouveaux rôles assurés par les familles au-delà des dispositifs
fiscaux et sociaux aujourd’hui parcellaires et symboliques.
12- Pour les aidants non salariés, assurer une reconnaissance nationale de leur engagement :
inscrire dans le plan d’aide le temps passé auprès du proche en perte d’autonomie, verser une
indemnité compensatrice, adapter les dispositifs de congés en entreprise, adapter les
mécanismes de retraites et de prévoyance collective, valoriser les temps estimés de répit dans
les financements de l’APA, étendre l’éligibilité du dispositif de Validation des acquis de
l’expérience (VAE), aménager leur temps de travail.
Mobiliser des instruments juridiques, des outils du patrimoine et du financement pour
anticiper et sécuriser le risque dépendance :
13- Renforcer la capacité de nos concitoyens à exercer un libre choix digne et éclairé.
14- Mobiliser les outils du patrimoine et du financement pour compléter la couverture du risque
dépendance et responsabiliser nos concitoyens face à ce risque.
Renforcer l’accompagnement personnalisé des métiers d’assistants de vie auprès des
particuliers employeurs en perte d’autonomie :
15- Déployer les Relais d’assistants de vie dans chaque département.
16- Reconnaître les compétences et capacités professionnelles par le biais d’un passeport
professionnel spécifique aux activités des personnes en perte d’autonomie.
17- Généraliser l’implantation des Centres Ressources du Particulier Employeur et des Emplois de
la Famille.
18- Préparer l’émergence de compétences frontières entre les actes de la vie quotidienne et les
actes de soins.
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I – LA RENOVATION DU MODELE MANDATAIRE
1 - LA FEPEM S’ENGAGE ET CONTRIBUE AU DEBAT NATIONAL
Journée du 3 mars 2011 au Sénat – Le modèle mandataire, réponse pertinente à la
problématique de la dépendance ?
Intégrer la réflexion autour du modèle mandataire dans la grande consultation nationale sur la
dépendance lancée par le Président de la République, Nicolas Sarkozy ; telle était l’ambition de la
Fepem en réunissant le 3 mars dernier l’ensemble des acteurs concernés. L’objectif était de
reconnaître la pertinence du modèle mandataire dans l’accompagnement du particulier employeur, en
l’occurrence en perte d’autonomie ; ce dernier pouvant, légitimement, faire valoir son libre choix.
Venue clôturer cette Journée d’étude au Sénat, Madame Roselyne Bachelot-Narquin, Ministre des
Solidarités et de la Cohésion sociale, a confirmé le modèle mandataire comme l’une des réponses
à la dépendance et déclaré :
«Cette journée d’étude constitue une aide à la décision dans le grand débat sur la dépendance. Le
modèle mandataire doit prendre toute sa place au côté du modèle prestataire. Pourquoi vouloir
appliquer à toutes les personnes âgées dépendantes le même type de prise en charge ? C’est la
souplesse et presque le «cas par cas» qui doit toujours prévaloir. A côté de l’emploi direct et du mode
prestataire, le modèle mandataire est une solution qui mérite d’être portée à la connaissance de tous,
et ce, d’autant plus que les particuliers et les conseils généraux, peuvent y trouver un intérêt financier.
Le modèle mandataire est conforme à deux principes essentiels qui doivent guider notre
réflexion : le libre choix et la responsabilité ».
Dans l’univers de l’emploi entre particuliers, le modèle mandataire présente de nombreux avantages,
notamment celui de lier, voire de réconcilier les enjeux économiques et sociaux.
Dans ces conditions, le modèle mandataire constitue une réponse particulièrement intéressante face
aux enjeux d’accompagnement de la perte d’autonomie dans la mesure, bien entendu, où les
conditions d’exercice sont maîtrisées.
Il est nécessaire de tenir compte de chaque situation et de partir, avant tout, des besoins de la
personne, qui doit être remise au cœur du dispositif, mais aussi de son entourage, de son
logement ainsi que des liens qu’elle a pu tisser avec son environnement.
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Pour mettre en place un cadre de fonctionnement optimisé en cas de recours au modèle
mandataire, nos objectifs consistent à :

Reconnaître l’expertise du modèle mandataire dans son rôle de conseil, d’accompagnement et
de coordination entre la personne en perte d’autonomie, l’aidant familial ou proche et les
professionnels de l’aide à domicile.

Favoriser et mettre en œuvre la rénovation du modèle mandataire, comme maillon important de
sécurisation de la relation d’emploi entre la personne en perte d’autonomie, l’aidant et les
professionnels de l’aide humaine.
Trois propositions nous semblent essentielles pour contribuer à faire émerger le modèle mandataire
comme une réponse moderne, innovante, et surtout complémentaire à la relation d’emploi direct entre
le particulier employeur et son (ou ses) salarié(s). Ces trois propositions sont :
2 - UN GRENELLE DU MANDATAIRE
5- Mettre en place un « Grenelle du Mandataire » qui permette de reconnaître son expertise
dans l’accompagnement et la coordination entre la personne en perte d’autonomie, l’aidant
familial ou proche, les professionnels salariés et les intervenants à domicile.
Le modèle mandataire, qui démontre pourtant au quotidien toute sa pertinence, n’a souvent été
considéré que comme une variable d’ajustement du prestataire, sans approche «différenciante» et
sans véritable valeur ajoutée. Les professionnels de l’aide à domicile reconnaissent volontiers que des
années de retard ont été prises pour faire émerger cet accompagnement spécifique.
Pourtant, il permet de la fluidité, de la souplesse, une liberté de choix de l’intervenant, une
régularité du service rendu, un espace de liberté et une relation privilégiée entre employeurs et
salariés.
Sa mission première est de dispenser un conseil libre et indépendant. Ce rôle de conseil, nécessaire
à un véritable libre choix, passe par une évaluation précise des besoins réels de l’employeur tant d’un
point de vue social que financier et par la présélection des salariés. Puis intervient son rôle
d’accompagnement à la fois du particulier employeur, de l’aidant familial et du (ou des) salarié(s) dans
la réalisation du projet de vie de la personne aidée.
Cet accompagnement peut être ponctuel (sas d’apprentissage de l’emploi direct par exemple) ou
s’inscrire dans la durée selon les situations tant de l’employeur, de l’aidant familial que du salarié.
Concrètement, il s’agit d’informer et de former l’ensemble des parties prenantes et de prévenir voire
désamorcer, avec un regard professionnel extérieur, les risques ; il s’agit ici d’un rôle de médiation ou
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de conciliation entre les parties. Enfin, il peut être amené à coordonner des situations de vie plus
délicates comme le remplacement d’une assistante de vie malade ou en congés, ou encore permettre à
l’aidant familial de s’accorder, en toute confiance, un temps de répit.
Finalement rénover le modèle mandataire à l’occasion d’un Grenelle ne revient-il pas à
permettre l’émergence d’un tiers de confiance dont les contours sont partagés par tous ?
3 - UN MODELE MANDATAIRE RECONNU ET VISIBLE
6- Reconnaitre, dans les politiques publiques territoriales, la pertinence d’un modèle
mandataire rénové et clairement identifié par les bénéficiaires de l’APA.
Le développement et l’orientation plus systématique, au nom du libre choix, vers ce modèle
d’intervention rénové permettrait de réduire les coûts engagés, et donc le reste à charge des familles,
de l’ordre de 30%, voire d’accorder un nombre d’heures d’accompagnement supplémentaire pour un
volume de dépenses identique.
Rappelons que sur les 35 Md€ consacrés à la dépendance en France, près de 10Md€ sont
aujourd’hui à la charge des familles (personne dépendante, aidants familiaux et proches). Favoriser
le recours et la visibilité des structures mandataires rénovées permettrait, sans augmenter le
budget public, de faire économiser aux Français plusieurs milliards d’euros.
Les pouvoirs publics se doivent de proposer une information sécurisée à nos concitoyens sur les choix
qui s’offrent à eux. C’est bien dans ce cadre qu’un partenariat pouvoir public et société civile prend
tout son sens. La société civile pouvant intervenir comme relais à l’instar des expérimentations
réalisées sur le Centre Ressources des Particuliers Employeurs et des Emplois de la Famille, ou
encore des programmes innovants menés sur l’accès aux usages numériques.
4 - LE MODELE MANDATAIRE COMME TERREAU
D’INNOVATIONS SOCIALES
7- Favoriser la reconnaissance professionnelle des expertises de coordination conduites par
les structures mandataires, à ce jour non valorisées. Création de nouveaux référentiels
métiers attachés aux structures mandataires : évaluateur, coordinateur, acteur de
prévention.
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L’un des enjeux de la sécurisation de la relation d’emploi entre le particulier employeur et son (ou ses)
salarié(s) passe également par la création et la valorisation de nouveaux référentiels métiers favorisant,
pour chacune des parties prenantes, l’identification claire et précise des missions et savoir-faire requis.
La rénovation du modèle mandataire est l’occasion de se poser la question des métiers, du rôle
assumé par ces professionnels et de leur compréhension par les usagers ou clients. Toutes les
personnes en perte d’autonomie qui ont participé aux différentes études menées par l’Observatoire de
la Fepem signalent ce besoin d’évaluation de la situation sociale voire financière lors de la survenance
de la perte d’autonomie, tant pour la personne aidée que pour son entourage.
De la même façon, pendant toute la durée de l’accompagnement, le besoin de coordination des
interventions à domicile, des visites, des sorties est prégnant tant pour les personnes elles-mêmes que
pour leur entourage.
Créer de nouveaux référentiels métiers attachés aux structures mandataires permettrait de répondre
aux besoins concrets des particuliers mais également de donner de nouvelles perspectives de carrières
aux salariés de ces structures et d’identifier plus clairement la spécificité de ce modèle dans le champ
des emplois de la famille.
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II - POUR UNE VALORISATION DU STATUT DES
AIDANTS FAMILIAUX
Nos objectifs sur ce thème consistent à :

Reconnaître au niveau national l’aide humaine et financière apportée par les aidants, qu’ils
soient familiaux ou proches de la famille.

Favoriser et faciliter leurs actions au quotidien auprès des personnes en perte d’autonomie.

Encourager le développement de la solidarité intergénérationnelle comme modèle
d’organisation moderne et innovant.
Trois propositions nous semblent essentielles pour atteindre ces objectifs qui finalement consistent à
mettre en lumière et valoriser ces acteurs essentiels mais dans l’ombre :
10. Lancer un Observatoire national visant à mesurer les impacts financiers du temps passé
par les aidants familiaux auprès de leurs proches, les conséquences sur leurs carrières
professionnelles et leurs propres dépenses de santé.
11. Reconnaître
les
fonctions
socio-économiques
assurées
par
le
modèle
social
d’organisation des familles par des dispositifs d’accompagnement social, fiscal et
économique, aujourd’hui parcellaires et symboliques.
12. Pour les aidants non salariés, assurer une reconnaissance nationale de leur
engagement.
1 - LES AIDANTS : DES ACTEURS A VALORISER
Dans le débat sur la dépendance, il ne faut pas oublier l’entourage de la personne aidée. C’est la
raison pour laquelle les enjeux sur les aidants familiaux ont été largement posés par l’ensemble des
rapports produits sur le sujet.
La famille est souvent confrontée à des arbitrages budgétaires délicats quand elle doit faire face à la
perte d’autonomie d’un ou de plusieurs de ses proches. Ces arbitrages, qui concernent tous les
membres de la famille, directement ou indirectement, sont à la fois l’expression matérielle de
l’amour qu’ils portent à leurs proches et d’une solidarité intergénérationnelle qui s’organise,
souvent dans l’ombre, et parfois sous le poids de la contrainte.
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Au niveau national, le reste à charge direct des familles a été estimé à près de 10Md€. Les coûts
indirects, comme les impacts de ces aménagements de temps sur la vie personnelle et
professionnelle des aidants (congés sans solde, réduction du temps de travail, départ anticipé à la
retraite, perte de chance dans la progression professionnelle, manque à gagner annuel, incidences sur
leur propre dépense de santé, etc.) ne sont malheureusement pas mesurés et valorisés à l’heure
actuelle en France ; contrairement à d’autres pays comme les Etats-Unis.
En conséquence, la mise en place de cet Observatoire national devrait nous permettre d’aller plus
loin dans la connaissance des aidants et des conséquences sociales, économiques, professionnelles et
familiales de cette situation.
N’oublions pas que l’on ne nait pas aidant, on le devient par la force des choses.
2 - NOTRE DEVOIR DE RECONAISSANCE
Au-delà même de ce don qui semble si naturel, c’est un véritable modèle social d’organisation des
familles qu’il convient de valoriser. En effet, la solidarité intergénérationnelle et l’esprit de
communauté prennent alors tous leur sens ; sans qu’aucun dispositif d’accompagnement social, fiscal
et économique n’existe réellement pour favoriser cet engagement.
Force est de constater que face à cette réalité quotidienne, les quelques mesures existantes
(rémunérations, dédommagements, congés) sont souvent symboliques, limitées en termes d’éligibilité
et distinctes selon les publics (personne âgée ou en situation de handicap).
Or, aujourd’hui leurs attentes sont identifiées et dépassent largement la contribution financière. Elles
peuvent être aussi regroupées dans un principe mnémotechnique, les 4R :

Reconnaissance : C’est leur reconnaître des droits et un statut pour valoriser leur rôle et
leurs actions.

Ressources : C’est leur apporter des réponses en termes d’information, d’écoute et d’aides
financières et matérielles pour leur permettre de gagner du temps.

Répit : C’est leur apporter des solutions techniques et humaines leur permettant d’avoir des
temps de répit adaptés.

Réseaux : C’est leur permettre d’avoir des espaces d’échange avec d’autres aidants afin
de pouvoir partager leurs expériences pour réduire leur stress.
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3 - LES ACTIONS CONCRETES A METTRE EN OEUVRE
Pour les aidants non salariés, assurer une reconnaissance nationale de leur engagement :

Valoriser le temps passé auprès du proche dépendant, par l’inscription dans le plan d’aide
des volumes horaires consacrés à la personne en perte d’autonomie, afin de mesurer cette
contribution et de pouvoir estimer le montant d’une indemnité compensatrice.

Verser une indemnité compensatrice en contrepartie pour le temps passé auprès de la
personne en perte d’autonomie.
Le caractère indemnitaire est, par définition, exonéré d’impôt ce qui devrait favoriser l’accélération du
développement de cette solidarité intergénérationnelle nécessaire. Il s’agit de substituer cette indemnité
au dédommagement actuel plafonné dans son montant, fiscalement imposable et non intégré dans les
plans d’aide.

Adapter les dispositifs de congés en entreprise pour mieux répondre aux besoins
ponctuels, fragmentés et souvent imprévisibles des aidants.

Adapter les mécanismes de retraites et de prévoyance collective dès lors que l’aidant est
amené à réduire ou suspendre son activité professionnelle durablement.

Intégrer dans le plan d’aide les temps estimés de répit, organisés et nécessaires à l’aidant.
Ces temps, pris en charge par un professionnel à domicile, pourraient être reconnus et
valorisés dans le financement de l’APA.

Rendre éligible le dispositif de VAE à l’aidant non salarié, pour leur permettre de poursuivre
une activité professionnelle ou de faire évoluer leur carrière professionnelle.

Aménager leur temps de travail (temps partiel, travail à domicile, télétravail) à l’instar de ce
qui existe pour les aidants intervenant auprès de personnes en situation de handicap.
L’aidant familial est aujourd’hui une ressource gratuite pour les familles, l’Etat, les pouvoirs publics, les
assureurs, et tous ceux qui s’inquiètent de cette problématique. C’est pourquoi la société, toujours en
quête de sens, a le devoir de leur reconnaître clairement ce rôle et de le valoriser ; leur aide est un don,
une « pépite », dont nous devons prendre la juste mesure dans le cadre du débat sur la dépendance.
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III - LA MOBILISATION D’INSTRUMENTS
JURIDIQUES, D’OUTILS DU PATRIMOINE ET DE
FINANCEMENT POUR ANTICIPER ET SECURISER LE
RISQUE LIE A LA PERTE D’AUTONOMIE
13- Renforcer la capacité de nos concitoyens à exercer un libre choix digne et éclairé
Les objectifs poursuivis consistent à :

Repositionner dans le débat, d’un point de vue juridique, les modalités d’exercice de ce
libre choix.

Proposer des solutions juridiques pour parfaire, si nécessaire, la sécurité de la relation
entre le particulier employeur et le salarié.
1 - EXPRIMER SON INTUITU PERSONAE
Les services rendus à la personne en perte d’autonomie relèvent d’une sphère qui touche à l’intimité,
tout comme le lieu d’exécution du travail (le domicile) et l’objet du contrat de travail (qui touche à la vie
privée dans son acception la plus essentielle).
A tous ces égards, la personne bénéficiaire de ces services doit pouvoir participer activement au choix
du salarié appelé à réaliser les prestations.
Ainsi, permettre à l’individu en situation de dépendance d’exprimer son « intuitu personae », d’exercer
sa liberté de choix, de donner son consentement, de jouir des prérogatives de direction à l’égard d’un
salarié sont autant de moyens permettant de parvenir à l’objectif de respect de la vie privée de la
personne (article 9 Code civil) et de sa dignité (article 16 Code civil).
La problématique relève moins de la capacité des personnes à consentir, c'est-à-dire à exercer leur
libre arbitre, que des moyens de gestion d’une personne en perte d’autonomie devenant employeur.
Néanmoins, il n’y a guère de différences entre la situation d’un particulier employeur et celle
d’un client. L’un comme l’autre doivent pouvoir se lier par contrat et, si la personne se révélait au sens
juridique du terme « incapable », cette incapacité affecterait tous les contrats et toutes les situations
juridiques placées alors sous le contrôle d’un tuteur ou d’un curateur.
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En revanche, la personne âgée dépendante « capable » au sens du droit des obligations doit pouvoir
exercer cette capacité, en l’occurrence celle d’exercer les prérogatives du particulier employeur, quand
bien même n’en aurait-elle pas toutes les compétences. Elle a aussi le droit de s’entourer des
personnes susceptibles de lui apporter ces compétences.
2 - RENFORCER LE TRAIT D’UNION ENTRE CAPACITE ET
COMPETENCE
Le modèle mandataire s’est précisément inscrit dans cette dynamique. Permettre à un individu capable
au sens du droit, d’exercer des prérogatives essentielles au maintien de son autonomie (le libre choix,
le pouvoir de direction) tout en déléguant à un tiers la gestion administrative de la relation de travail.
A cet égard, parmi les modèles d’organisation existants, le mandat apparaît comme un trait d’union
entre capacité et compétence pour les particuliers employeurs qui ressentent ce besoin
d’accompagnement.
A contrario, dans la relation du particulier-client, la personne n’exerce pas son intuitu personae. Elle
demeure étrangère à la relation contractuelle. C’est en effet la structure prestataire qui assure
l'encadrement du salarié qui réalise la prestation et qui assume à son égard l'intégralité des fonctions
d'employeur. Dans cette configuration, le particulier est dépossédé de tout pouvoir de direction et de
toute autorité sur le salarié. Il est considéré comme un tiers étranger à la prestation qui se déroule
pourtant à son domicile.
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Situé à mi-chemin entre le modèle prestataire et la relation d’emploi direct, le modèle mandataire peine
pourtant à trouver une place stable. Ce n’est pas sur le terrain du droit civil que le bât blesse car le
contrat de mandat demeure un instrument librement déterminé entre deux parties, le mandataire et le
mandant, qui s’obligent mutuellement et dont la convention tient lieu de loi en vertu de l’article 1134 du
code civil.
Les difficultés proviennent davantage (et à vrai dire essentiellement) du droit du travail qui limite
leur domaine d’intervention au placement de travailleurs d’une part, et à l’accomplissement de
formalités administratives, sociales et fiscales d’autre part.
Si certaines structures mandataires s'accommodent fort bien des fonctions réduites imposées par la
législation, la majorité d’entre elles sont soucieuses de répondre à la demande des particuliers, de leur
entourage et des professionnels salariés. Elles jouent, alors, un réel rôle d'interface entre les parties,
notamment pour garantir les droits de chacune.
Le placement de salariés, conçu comme l'activité exclusive des structures mandataires, ne rend
pas compte du travail devant être effectué en amont et en aval : diagnostic, conseil,
accompagnement et suivi des personnes aidées.
3 - REFORMER PAR VOIE LEGISLATIVE OU PAR VOIE CONTRACTUELLE
La voie législative pourrait prendre la forme d’une modification des dispositions de l’article L. 7232-6 du
code du travail.
Une telle modification permettrait d’élargir les missions du mandataire, tout en les précisant, et de fixer
le cadre précis du mandat dans le domaine des activités de services à la personne.
La deuxième voie est celle d’un montage contractuel permettant de limiter les risques de requalification
tout en garantissant les acquis du modèle mandataire.
La difficulté majeure à laquelle se heurte le modèle mandataire est que la relation, pourtant essentielle,
entre le mandataire et le salarié n’apparaît guère. Il n’y a donc aucun point de contact juridique entre le
salarié et le mandataire.
Or, la force du modèle mandataire est de substituer à une logique binaire, une relation triangulaire qui
conforte la voie de la responsabilisation présente dans l’emploi direct et sécurise puis renforce, pour
ceux qui en ressentent le besoin, les compétences des personnes âgées dépendantes.
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Cette relation triangulaire ne peut être masquée. Elle doit au contraire garantir les fonctions de
chacun et être valorisée à sa juste mesure pour apporter à nos concitoyens tous les outils leur
permettant d’exprimer leur intuitu personae.
14- Mobiliser les outils du patrimoine et du financement pour compléter la couverture du
risque dépendance et responsabiliser nos concitoyens face à ce risque.
Les objectifs poursuivis consistent à :

Eviter, au-delà du socle public de financement actuel, de nouveaux prélèvements de
toutes natures venant une nouvelle fois grever le budget des ménages.

Favoriser la responsabilisation de nos concitoyens dans la couverture du risque de
perte d’autonomie et son anticipation, en mettant à leur disposition des véhicules
d’épargne et de financement spécifiques (en complément du socle public de
financement).

Favoriser la mise en œuvre de solutions simples, qui rendent liquides et donc
disponibles les outils du patrimoine des Français.

Encourager et faciliter l’organisation de solidarités intergénérationnelles.
Nos propositions sont à plusieurs niveaux et ont vocation : à intervenir sur des véhicules d’épargne
existants, à créer de nouveaux produits ou encore à contribuer au financement et à la labellisation des
acteurs intervenant dans le champ de la perte d’autonomie.
4 - INTERVENIR SUR LES VEHICULES D’EPARGNE EXISTANTS
A. Créer un nouveau cas de « déblocage » anticipé (PEE, PERCO et art 83 du CGI) pour le
financement de la dépendance (salarié, conjoint ou ascendant)
Actuellement les produits d’épargne salariale (PEE, PERCO) et d’épargne retraite (Articles 83, PERE,
PERP) autorisent quelques cas de sortie anticipée en capital avant l’échéance du plan. Ces cas de
sorties sont déterminés par la loi et représentatifs « d’évènements de la vie » tels que le mariage,
l’achat de la résidence principale, le décès, etc.
Ces cas de déblocages ne remettent pas en cause les avantages fiscaux et sociaux accordés à ces
dispositifs.
Un cas de déblocage supplémentaire pourrait être instauré en cas de perte d’autonomie de
l’épargnant, de son conjoint ou d’un ascendant. Ces sommes débloquées devraient permettre de
financer des prestations liées à ces nouveaux besoins d’accompagnement (aménagement du
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logement, financement des aides humaines, etc.) et seraient accordées sur justificatifs contrôlés par les
opérateurs en charge de la gestion de ces produits d’épargne.
Ce mécanisme, simple à mettre en œuvre, n’engendrerait pas de coût supplémentaire et permettrait
d’éviter des situations difficiles au moment de la survenance de la perte d’autonomie.
B. Favoriser les avances, sur les contrats d’assurance-vie suite à la survenue d’une situation
de perte d’autonomie (de l’assuré lui-même ou d’un proche), sans remise en cause des
avantages fiscaux et en organisant une prise en charge de son coût pour l’assuré.
Les souscripteurs de contrats d’assurance-vie ont, en général, la possibilité d’obtenir un prêt de la part
de l’assureur, gagé par les sommes qu’ils lui ont confiées.
Ces prêts, qualifiés d’ «avances», ne remettent pas en cause les avantages fiscaux accordés aux
souscripteurs mais doivent respecter certaines règles :

Le montant avancé doit être significativement inférieur aux sommes confiées.

Le taux de l’avance doit être supérieur au rendement accordé par l’assureur sur les
sommes confiées.

Les avances doivent être remboursées rapidement.
Les contraintes liées aux avances sont en général définies dans le « règlement général des avances »
de chaque entreprise d’assurance.
Dans le cadre d’avances demandées par le souscripteur pour financer des dépenses liées à la
dépendance (la sienne ou celle d’un ascendant par exemple), il pourrait être envisagé une prise en
charge de tout ou partie des intérêts dus à l’assureur au titre de l’avance.
Le niveau, la durée et les conditions de prise en charge devront respecter des règles à fixer. Elles
devront s’adapter au cas particulier de la perte d’autonomie, notamment en ce qui concerne la
durée de remboursement.
Pour mémoire, les sommes placées en assurance-vie représentent environ 1300 milliards
d’euros, ce qui offre des perspectives de financement de la perte d’autonomie intéressantes au
niveau familial, d’autant que ce produit est très largement démocratisé (plus de 42 millions de
Français détiennent un contrat d’assurance-vie).
21
C. Flécher les sommes en déshérence de l’épargne salariale et de l’épargne retraite vers le
financement de la perte d’autonomie
Les comptes individuels d’épargne (épargne salariale, assurance retraite, assurance-vie, etc.), ou les
clauses bénéficiaires de certains contrats d’assurance prévoyant le versement de capital en cas de
décès (ou clauses particulières de type « double effet », garanties intégrées dans les cartes bancaires
en cas de décès accidentel etc.) peuvent parfois constituer des sommes qui ne sont jamais réclamées
par leurs bénéficiaires en cas de décès. Il peut s’agir d’un oubli des bénéficiaires ou de bénéficiaires
introuvables.
Ces sommes représentent des montants très importants qui sont aujourd’hui estimées à
plusieurs centaines de millions d’euros dans les comptes des gestionnaires de l’épargne.
Elles sont en général reversées, après un délai de prescription, à la Caisse des Dépôts et
Consignations. Ces sommes pourraient être orientées vers le financement de la perte
d’autonomie, sans coût supplémentaire, dans des conditions de délais à définir.
Pour promouvoir les actions de solidarité nationale, ces sommes pourraient être affectées de manière
régulière et obligatoire à un organisme collecteur, chargé de réinjecter ces sommes dans le
financement de la perte d’autonomie et la professionnalisation du secteur.
5 - CREATION DE NOUVEAUX PRODUITS
D. Le Plan d’Epargne Autonomie
Par analogie avec le plan d’épargne logement (PEL), ce produit d’épargne, populaire par nature,
permettrait à nos concitoyens de se constituer une épargne de précaution fléchée vers la perte
d’autonomie et de bénéficier d’un prêt automatique en cas de réalisation du risque.
Ce produit d’épargne reprendrait les caractéristiques de fonctionnement du plan d’épargne logement en
ce qui concerne la bonification par l’Etat du taux d’épargne et du taux de crédit, son exonération
d’impôts sur les intérêts, le calcul des droits à prêts en cas de réalisation du risque dépendance et sa
transmissibilité entre les générations. Sa durée initiale serait plus longue (10 ans), renouvelable une
fois (20 ans) maximum, mais l’épargnant garderait à tout moment la possibilité d’y mettre un terme. Dès
lors, la rémunération de l’épargne ne tiendrait pas compte de la bonification de l’Etat. Ce produit
rentrerait dans la catégorie des comptes d’épargne à régime spécial dont le taux est fixé par la Banque
de France.
A travers ce produit d’épargne, l’objectif est comme pour le PEL de démocratiser en France la
nécessité, au-delà de tout financement public, de financer la couverture du risque de perte
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d’autonomie. La mise en place de cette épargne et du crédit associé doit ainsi contribuer à aider
les familles à disposer d’outils de patrimoine mobilisables en cas de survenance d’une perte
d’autonomie, que ce soit celle du détenteur du produit ou celle d’un proche.
Par ailleurs, la constitution d’encours sur ce produit pourrait être facilitée en permettant, voire en
incitant, le transfert d’un plan d’épargne logement vers les plans d’épargne à l’autonomie.
Enfin, la mise en œuvre opérationnelle de ce nouveau produit pourrait être très rapide puisque la quasiintégralité de son mécanisme s’inspire de celui du PEL.
E. Le crédit viager hypothécaire
Il a pour objectif de faciliter l’accès des personnes âgées au crédit. Ces personnes ne disposent pas
toujours de liquidités et n’ont pas accès à l’emprunt – ou seulement dans des conditions excessives ou
incompatibles avec leurs moyens financiers – alors qu’elles sont souvent propriétaires de leur logement
et ne souhaitent pas le vendre.
En cas de survenance de la perte d’autonomie, ce besoin de liquidités est particulièrement prégnant
dans la mesure où la famille doit financer des besoins de services et d’amélioration de l’habitat non
prévus. Si ce type de financement existe, il ne s’est absolument pas démocratisé en France. La
réforme de la dépendance est à ce titre l’occasion de mesurer tout l’intérêt de ce mécanisme.
Environ 6 millions de ménages français de plus de 65 ans sont propriétaires de leur logement, selon le
Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie.
Le mécanisme est le suivant : la banque propose un prêt garanti par une hypothèque sur un bien
immobilier de l’emprunteur à usage exclusif d’habitation. L’emprunteur ou les co-emprunteurs reçoivent
le prêt sous forme d’un capital ou d’une rente. Le remboursement de la dette (capital et intérêts) est
repoussé jusqu’au décès de l’emprunteur, ou du dernier des co-emprunteurs s’ils sont plusieurs, sauf
en cas de vente ou de démembrement du bien hypothéqué.
Au jour du décès, les héritiers pourront choisir entre régler eux-mêmes la dette pour garder le bien ou
laisser la banque le revendre pour se rembourser.
Appliqué à la survenance d’un risque de perte d’autonomie, ce type de crédit permet aux
familles de mobiliser des liquidités dont elles peuvent avoir besoin pour financer le besoin de
services et limiter ainsi les arbitrages budgétaires sur les revenus du travail ou de la retraite.
Alors que ce type de crédit est fortement développé dans les pays anglo-saxons mais aussi en Italie et
en Espagne, le crédit viager hypothécaire reste en France symbolique et méconnu.
Cet outil financier pourrait être intégré à la réforme sur la dépendance et les conditions de sa
démocratisation et de sa labellisation feraient l’objet d’une analyse partagée entre les professionnels du
crédit et les professionnels de l’aide à domicile.
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6 - FINANCEMENT ET LABELLISATION DES ACTEURS DE LA
DEPENDANCE
F. Le « FCP Solidaire / Dépendance »
A l’instar des Fonds Communs de Placement solidaires d’épargne salariale, il pourrait être créé un
« FCP solidaire dépendance» intégré dans tous les PEE et PERCO des entreprises.
Une part de l’actif de ces fonds serait destinée à financer des structures intervenant sur la dépendance
qu’il s’agisse d’aides humaines, d’aides techniques, de formation des salariés du secteur ou de projets
portant sur les nouvelles technologies.
Ces entreprises pour être éligibles devraient faire l’objet d’une labellisation garantissant ainsi le respect
de critères qualité et de solvabilité.
G. Inciter les institutions financières à investir une part de leurs actifs dans la prise en charge
de la perte d’autonomie
Les organismes d’assurance pourraient être incités à investir une partie de leurs actifs dans les « FCP
solidaire dépendance », comme cela existe pour les fonds pour l’Innovation ou l’investissement dans
des sociétés non cotées.
Comme pour le point précédent, ces capitaux injectés dans le secteur des emplois de la famille
contribueraient à accompagner et renforcer les initiatives favorisant des engagements concrets sur la
qualité des réponses d’accompagnement aux besoins à domicile, en soutenant des programmes
d’actions de professionnalisation à l’égard des professionnels dans la durée.
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IV - POUR UNE POLITIQUE DE RESSOURCES
HUMAINES ET DE PROFESSIONNALISATION
AMBITIEUSE
1 - RENFORCER L’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL DES METIERS
D’ASSISTANTS DE VIE AUPRES DES PARTICULIERS EMPLOYEURS EN
PERTE D’AUTONOMIE
Contrairement à certaines idées reçues, les métiers qui accompagnent les personnes en situation de
perte d’autonomie à domicile ne sont pas uniquement des métiers techniques, ils sont également des
métiers de communication et d’interaction.
L’exercice de ces métiers requière donc des savoir-faire spécifiques : comprendre et anticiper les
attentes des personnes et de leur famille, aider sans faire ou décider à la place de, soutenir sans
dévaloriser, trouver la juste distance qui rend un service professionnel dans un environnement
spécifique, le domicile privé, qui croise l’intimité de la personne. La sécurité de la relation entre un
particulier en perte d’autonomie et son salarié (ou ses) salarié(s) est renforcée si un climat de confiance
s’instaure, facilité par le respect des droits et devoirs de chacun. De ce point de vue, la situation
« entre particuliers » dans laquelle les personnes se choisissent est gage de réussite durable.
Au delà de l’écosystème structurant qui encadre ce modèle d’emploi entre particuliers (conventions
collectives nationales, accords de protection sociale, accords de formation professionnelle, création de
certifications adaptées), il reste à faire émerger de nouveaux métiers qui complètent les compétences
existantes et permettent l’émergence d’une filière professionnelle des emplois de la famille.
Les besoins en matière de coordination des intervenants au domicile, d’accompagnement à la
gouvernance familiale, de meilleure prise en compte des situations de soins par des
professionnels aux frontières de la santé et du domicile sont des pistes à investiguer
rapidement car les besoins sont déjà là.
Il est incontestable que les enjeux d’inclusion numérique croisent la professionnalisation du binôme
particulier employeur en perte d’autonomie et salarié à domicile :
-
Les outils de capitalisation et de mise en valeur des compétences reconnues pour
accompagner la dépendance à domicile sont prioritairement à valoriser dans le cadre de la
diffusion, la plus large possible, des e-portfolio ou des passeports professionnels.
25
-
Le déploiement de « serious games », accessibles sur internet et sur mobiles, dans lesquels
les assistants de vie retrouvent tous les éléments d’adaptation et de professionnalisation au
cœur de leur univers habituel, est à promouvoir.
-
La prévention, à la fois des risques professionnels des salariés et des risques d’accidents de la
vie courante (telles les chutes des personnes âgées au domicile) est à privilégier, notamment
dans le cadre du programme e-sécurisation.
L’ambition des projets numériques, au cœur des programmes de professionnalisation, est d’anticiper
les changements sociétaux, d’imaginer de nouveaux outils de travail en réseau, par la mise en synergie
de bases de connaissances et la recherche de « continuum » entre apprentissage et travail.
Les volumes de personnes concernées par cet enjeu sont tels, que les dispositifs classiques
d’apprentissage ne suffiront pas à répondre aux objectifs qualitatifs.
2 - DES LIEUX DE PROXIMITE A DEPLOYER :
LES RELAIS ASSISTANTS DE VIE
Les Relais assistants de vie complètent les initiatives numériques. Les salariés ont à la fois besoin de
se reconnaître dans une identité professionnelle, portée au niveau national mais de trouver également
dans leur environnement proche des lieux pour échanger, se rencontrer et lutter contre l’isolement
professionnel.
Les programmes expérimentaux engagés par la CNSA et la Fepem sont à ce titre très prometteurs.
Lieux d’auto-formation et de co-formation, où naissent de la solidarité, de l’échange de savoirs et de la
mutualisation de compétences, les Relais assistants de vie créent un réseau local de professionnels
qui s’organisent pour proposer des remplacements à leurs employeurs réciproques.
3 - LA GENERALISATION DES CENTRES RESSOURCES DES PARTICULIERS
EMPLOYEURS ET DES EMPLOIS DE LA FAMILLE
(programme expérimenté dans le cadre de la convention Fepem/ANSP)
Leur déclinaison numérique, par des applications web et bornes numériques dédiées, déployées sur
les territoires, dans les mairies, auprès des acteurs de coordination de la dépendance, couplées à
l’implantation de lieux physiques permettent d’informer et d’accompagner dans leur relation quotidienne
le particulier employeur en perte d’autonomie, les aidants familiaux et l’entourage, ainsi que les
salariés.
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C’est également un vecteur d’emploi et de professionnalisation, un observatoire des tendances et de
l’évolution du secteur, un outil complet qui accompagne l’emploi entre particuliers et répond aux
besoins des particuliers employeurs en perte d’autonomie.
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