SEQUENCE I, TEXTE 1 – LUCRECE De natura rerum

Transcription

SEQUENCE I, TEXTE 1 – LUCRECE De natura rerum
SEQUENCE II, TEXTE 3 – SENEQUE Questions naturelles
Commentaire
Pour l’introduction :
Commencer par replacer Sénèque dans le contexte historique et philosophique de l’époque (voir texte I,2
Consolation à Marcia). Il est important de rappeler que Sénèque a porté la doctrine stoïcienne. Dans les
Questions naturelles, Sénèque part de l’étude de la nature pour mieux justifier la place de l’homme au
sein de cette nature et donc le stoïcisme. Des phénomènes extrêmes sont décrits comme le déluge dans le
livre III. Il sera donc intéressant d’analyser la vision que Sénèque propose de l’homme face à un tel
déchaînement de la nature.
Pour le commentaire :
I- LA NARRATION DU DELUGE
1- Une double version
Sénèque met en parallèle sa version du déluge et celle d’Ovide qu’il présente comme étant « ille
poetarum ingeniosissimus ». Cette mise en parallèle donne tout son sens entre les citations du poète et
l’explication du philosophe.
2- Un champ lexical varié
Dès la première phrase la thématique est posée : « omnia aquis obsidentur ». L’expression « omnia
pontus erat » résume bien le propos. Le vocabulaire de l’eau est donc très présent : diluuio, aquis, vadum,
unda (x2), pontus, litora, flumen, gurgites, natare (x3), mersum est. Il faut insister sur la variété de ce
champ lexical.
3- Une vision forte
Insister sur l’opposition entre la profondeur de l’eau et les montagnes qui s’élèvent. On relève de
nombreuses expressions très fortes, hyperboliques (présence de superlatifs notamment). Le phénomène
physique est simple et visuel : l’eau engloutissant le monde entier ne laisse émerger que les points les plus
hauts comme le sommet des montagnes « in summis montium iugis ».
VERS LE HAUT
tumulus
in summis montium iugis
editissimis
emineo
mons
insula (île, immeuble = ce qui émerge de)
VERS LE BAS
in profundo
altitudo (à prendre au sens de profondeur)
submissius
A cela s’ajoute un vocabulaire du mouvement et de la violence très présent : « deuorato, confusionis,
labant, rapina, raptum, impetu. »
II- L’HOMME FACE AU DELUGE
1- Le monde entier est touché
Les hommes, le genre humain sont touchés comme le signale Sénèque : « generis humani » mais les
animaux sont touchés « gregibus », « lupus », « oves », « leones » et les lieux de présence des hommes
« apertos campos », « turres ». C’est le point de désaccord majeur entre le philosophe et le poète,
Sénèque reprochant à Ovide de ne pas envisager le déluge dans sa totalité. Cela est exprimé par la
dernière phrase injonctive « perfer », marquée par la conditionnelle insistant sur le fait que le monde
entier nage « orbem terrarum natare. »
2- La place de l’homme
Cela est le lien avec le naturalisme stoïcien replaçant l’homme au centre d’un monde qu’il ne maîtrise
pas : l’homme subit donc les conséquences malheureuses du déluge et doit les endurer. L’homme apparaît
alors comme un objet fragile soumis aux éléments : il est fait mentions des restes du genre humain
« reliquiae generis humani » mais aussi des femmes et des enfants « cum liberis coniugibusque »,
l’homme est décrit comme « miseros ». L’homme est touché dans toute ses activités : l’agriculture
« gregibus », le commerce « commercium » et les transports « transitus ».
3- L’homme est soumis au malheur
Sénèque développe tout une argumentation sur les réactions de l’homme dans le cadre de cette situation
extrême « in extrema ». On retrouve donc un champ lexical marqué des sentiments humains « sensum » :
« solacio, stuporem, metus, timere, mirantibus, dolor, mali, miser. » C’est la mise en relation de
« stuporem » et de « metus » qui résume bien le propos : le malheur est tel qu’il est dépassé « ultra » et
donc inconcevable. L’effet est parfaitement pathétique mais révèle, en filigrane, la pensée stoïcienne de
Sénèque. L’homme n’est rien, un « vas fragile » comme on peut le voir dans la Consolation à Marcia.
Seule une prise de conscience des faiblesses de l’homme et une attitude vertueuse et sobre (donc
stoïcienne) peut permettre à l’homme de dépasser sa triste condition. Cela justifie donc l’opposition entre
le philosophe et le poète.
III- UNE QUESTION DE STYLE
1- Un commentaire de texte
Les références d’Ovide sont tirées des Métamorphoses. Sénèque utilise ces exemples comme contrepoint
pour illustrer son propos et mieux mettre en valeur ses arguments. On relèvera le questionnement
permanent sur le texte d’Ovide. Tout en validant la qualité du texte d’Ovide, Sénèque commente ses
partis-pris : le poète écrit pour rire « lasciure ». Il va même jusqu’à dire que les informations sont des
« pueriles ineptias ». Sénèque ménage donc des effets comiques en reprenant l’exemple des loups et des
brebis : « nat lupus inter oues » pour mieux montrer le ridicule de ce détail : « qui oues et lupi faciant ». Il
se permet aussi de détourner les citations du poète : la référence aux Cyclades est utilisée de manière
inverse au phénomène décrit par Ovide car l’eau se retire et laisse apparaître alors des mondes engloutis.
Il y a donc un véritable jeu littéraire qui s’instaure et qui vise à mettre en valeur une pensée voire une
esthétique stoïcienne.
2- Pour une écriture stoïcienne
Sénèque souhaite imposer une vision précise des choses et s’oppose donc à la poésie quand elle peut se
vouloir didactique. Il oppose clairement le poète et la poésie en nommant de manière élogieuse Ovide
« ille poetarum ingeniosissimus ». On notera un nombre important d’éléments mélioratifs concernant
Ovide et ses vers : « egregie, pro magnitudine, ingentia. » Cette valorisation peut sembler très ironique.
Le discours poétique est valorisé en tant que forme et non pour ce qu’il apporte : le poète écrit « pro
magnitudine rei ». L’imagination du poète est mise en avant « imaginem cepit » pour être mieux
critiquée. La conditionnelle « si non curauerit » qui s’oppose au « magnifice haec » est en ce sens
caractéristique. Sénèque prône donc une écriture sobre (vertueuse ?), une « res satis sobria » qui doit être
convenable « deceat ». Il s’adresse tout autant au poète qu’au lecteur. L’impératif final « perfer » et la
deuxième personne du singulier « scies » peuvent tout autant viser Ovide que tout un chacun.
Pour la conclusion :
Partant du déluge et des réactions des hommes, Sénèque arrive donc, à travers une vision stoïcienne de la
nature, à faire passer la doctrine stoïcienne comme il peut le faire dans la Consolation à Marcia où il
utilise la forme littéraire de la consolation.