Ne pas confondre rechtskräftig et vollstreckbar Le bon sens voudrait

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Ne pas confondre rechtskräftig et vollstreckbar Le bon sens voudrait
25.04.2016 TD
Ne pas confondre rechtskräftig et vollstreckbar
Le bon sens voudrait qu’une décision administrative ou judiciaire entre en force avant de
devenir exécutoire. Eh bien… Généralement oui, mais pas nécessairement.
D’abord, quelques précisions terminologiques. La décision administrative, ou plus
simplement décision (le contexte rendant souvent inutile la précision « administrative »), qui
est rendue par une autorité administrative, se dit en allemand Verfügung, du moins en droit
fédéral (art. 5 PA, RS 172.021). On trouve aussi parfois Verwaltungsverfügung ou
administrative Verfügung, et d’autres dénominations peuvent se rencontrer au hasard des
textes et avec parfois des sens légèrement différents (Verwaltungsentscheidung,
verwaltungsrechtliche Entscheidung, Verwaltungsakt, administrative Entscheidung,
behördliche Entscheidung, behördliche Anordnung,…). Précisons encore qu’en droit, il est
rare que la décision administrative soit expressément qualifiée comme telle, et l’on préférera
dire par ex. que « l’autorité révoque l’autorisation » plutôt que « décide de révoquer
l’autorisation » ou « révoque par voie de décision l’autorisation ». Cette formulation plus
simple et plus directe présente notamment l’avantage de laisser à l’administration une
certaine marge de manœuvre quant au choix du moyen le plus adapté, qui ne sera pas
nécessairement une décision (mais par ex. un contrat ou une ordonnance administrative),
étant entendu que si ce moyen devait effectivement être la décision, celle-ci devra de toute
façon répondre aux formes prescrites par la loi.*
La décision judiciaire, qui peut être un jugement (généralement une décision rendue par un
tribunal de première instance) ou un arrêt (décision rendue par une juridiction de degré
supérieur, par ex. le Tribunal fédéral), plus rarement une sentence (généralement prononcée
par un tribunal arbitral) ou un verdict (qui à proprement parler suppose un jury), est
généralement rendue en allemand par Entscheid, éventuellement par Urteil, étant entendu
que là encore, selon le pays, le domaine du droit, la procédure ou encore l’époque, on peut
croiser d’autres termes (Gerichtsentscheid, Gerichtsurteil, gerichtlicher Entscheid,
gerichtliche Entscheidung, Gerichtsentscheidung, Beschluss, Gerichtsbeschluss, richterlicher
Beschluss, Spruch, Rechtsspruch, Gerichtsspruch, mais aussi Verfügung, richterliche
Verfügung, etc.).
Intéressons-nous ensuite aux notions d’« entré en force » et d’« exécutoire » :
- une décision entrée en force [rechtskräftiger Entscheid] est une décision qui a « acquis
force de chose jugée » ou qui est « passée en force de chose jugée », ce qui signifie
qu’elle n’est pas ou plus susceptible de recours. On pourra dire également qu’elle est
« définitive » ;
- une telle décision est en principe exécutoire [vollstreckbarer Entscheid], ce qui signifie
qu’elle a « force exécutoire » et qu’elle peut et doit donc être exécutée immédiatement, y
compris par la force si nécessaire. Dans certains contextes, on pourra dire aussi qu’elle est
« applicable » ou « contraignante ».
La subtilité est ici qu’une décision peut être exécutoire avant même d’être entrée en force
(voir notamment les art. 39 et 55 PA, RS 172.021) : il suffit pour cela qu’un recours soit
possible, mais qu’il n’ait pas d’effet suspensif [die aufschiebende Wirkung]. Ce cas est par
ex. illustré par l’art. 7, al. 3, LEtr (RS 142.20), qui indique que « le refus d’entrée est
immédiatement exécutoire » et précise expressément qu’un éventuel recours « n’a pas
d’effet suspensif ».
*
Voir à ce sujet www.admin.ch > Départements > DFJP > Office fédéral de la justice > Etat & citoyen
> Légistique > Forum de législation > Archives des newsletters > 2015 > N° 20 > point 2 (« …erlässt
eine Verfügung über… ? »).
Il peut même arriver qu’une décision ne soit pas exécutoire alors même qu’elle est entrée en
force. C’est par ex. le cas si l’exécution a été assortie d’un délai qui n’a pas été respecté, ou
encore si la décision est entachée de vices graves, par ex. si elle a été prise par une autorité
qui n’avait pas compétence pour le faire, ce qui la frappe de nullité.
Conclusion : une « décision entrée en force » et une « décision exécutoire » sont en droit
deux choses différentes, que l’on se gardera par conséquent de confondre.