Rapport du Diagnostic des territoires d` Abomey

Transcription

Rapport du Diagnostic des territoires d` Abomey
www.ecocite.org
Cebedes
Centre béninois pour
l’environnement et
le développement
économique et social
Faculté des sciences agronomiques- Université
d’abomey-Calavi
Département d’économie , de
socio-antrhopologie et de
communication
Série « documents de travail »
Rapport du Diagnostic
des territoires d’
Abomey-Bohicon
Bénin
Document de travail n°6
Laboratoire d’Analyse Régionale et d’Expertise Sociale
FLOQUET et MONGBO (eds.)
CEBEDES – DESAC – LARES
Mars 2003
Coordination
Avec le concours de l’Union européenne
ICA4°CT-2002-100064
Résumé
Pour appréhender les interactions entre expansion de la conurbation Abomey-Bohicon et
l’agriculture, un diagnostic des territoires a été conduit en Février 2003 par les chercheurs du
programme ECOCITE. Il trace un premier état des lieux des systèmes de production et filières
agroalimentaires significatives de la localité, identifie des enjeux fonciers liés à l’expansion de
la ville ainsi que des problèmes environnementaux que le maintien de l’agriculture pourrait
contribuer à résoudre. Sur la base de ce diagnostic, les chercheurs ont identifié des filières et
questions environnementales à investiguer plus avant pour faciliter les concertations entre les
acteurs locaux directement touchés par l’expansion urbaine.
Mots clefs
Agriculture urbaine et périurbaine. Filières agricoles périurbaines. Le foncier en zone urbaine
et périurbaine. Problèmes environnementaux.
Coordonnées des auteurs
Floquet A., Mongbo R., Nansi J., CEBEDES, 02 BP 778 Cotonou, [email protected]
Tossou R., Fanou J., Vodouhè S., Babadankpodji P., Kouévi A., DESAC, FSA, UAC, Abomey-Calavi, [email protected]
Edja H., Soulé G., Aboudou R., LARES, Parakou, [email protected]
Référence du document
Floquet A. et R. Mongbo (eds.), 2003, rapport du diagnostic des territoires, CEBEDESDESAC-LARES, série document de travail Ecocité, www.ecocite.org, 91 p.
L’objectif général du programme de recherche Ecocité est de réaliser une analyse fine et
partagée des processus en cours à l’interface milieu urbain/milieu rural dans deux sites au
Sénégal (Thiès-Fandene et Mboro) et au Bénin (Abomey-Bohicon, Parakou).
Plus spécifiquement le projet vise 1) à identifier et analyser les processus de mutation de
l’espace rural dans les franges d’expansion urbaine, 2) les dynamiques de changement
des activités agricoles et de leurs performances économiques, face aux nouvelles opportunités et contraintes liées à l’expansion urbaine, 3) les enjeux écologiques des espaces
naturels et/ou agricoles à l’interface rural/urbain, et les pratiques innovantes en matière
de préservation de la biodiversité et de diminution des nuisances dans un contexte de rareté des ressources en eau et en terres. Le programme étudie également si, en quoi et
comment, une meilleure connaissance des dynamiques et des enjeux par les acteurs locaux peut contribuer à favoriser une gestion plus concertée et plus durable de l’espace rural à proximité des villes, par une meilleure articulation entre processus d’extension de la
ville et préservation/valorisation des espaces agricoles et naturels ayant un enjeu économique ou environnemental important.
i
Ont contribué à ce document :
Ramanou ABOUDOU, assistant de recherche LARES
Dossa AGUEMON, chercheur CEBEDES
AKOBI Innocent, chercheur LARES
Pascaline BABADANKPODJI, chercheur DESAC
Honorat EDJA, chercheur LARES
Joseph FANOU, chercheur DESAC
Anne FLOQUET, chercheur CEBEDES
Victor GBESSEMEHLAN, chercheur Université de Mainz
Christophe JOEKER, étudiant Université de Mainz
Augustin KOUEVI, assistant de recherche LARES
Roch MONGBO, chercheur CEBEDES
Juste NANSI, assistant de recherche
Ursula NICA, étudiant Université de Mainz
Bio Goura SOULE, chercheur LARES
Peggy TOHINLO, chercheur CEBEDES
Sénan TOSSOU, étudiant CEBEDES
Rigobert TOSSOU, enseignant chercheur DESAC
Simplice VODOUHE, chercheur DESAC
Avec l’assistance de
Armand DOSSOU-KAGO, enquêteur CEBEDES
Geoffroy AGNAME , assistant adjoint CEBEDES
Références
Floquet A. et J. Nansi, 2003. Expansion urbaine, processus passés et en cours. Analyse bibliographique et exploration, pp. 2-12
Floquet A. et J. Nansi, 2003. Les activités socio-économiques à Abomey et Bohicon. Analyse
bibliographique et exploration, pp. 13-26
Tossou R. et R. Aboudou, 2003. Production végétale périurbaine et urbaine autour d’Abomey
et de Bohicon, pp. 27-35
Tohinlo P., 2003. Petit élevage urbain et périurbain à Abomey et Bohicon, pp. 36-46
Floquet A., et A. Kouévi, 2003. Elevage bovin dans la zone urbaine et périurbaine d’Abomey,
pp. 47-55
Assogba P. et I. Akobi. Transformations agroalimentaires A Abomey et Bohicon , pp. 56-58
Gbessèmèhlan V. et D. Aguèmon , 2003. Approvisionnement des villes de Bohicon et
d’Abomey , pp. 59-74
Edja H., J. Fanou et R. Mongbo, 2003. Aménagement des espaces urbains et périphériques,
pp. 75-88
Vodouhè S.,Floquet A., Kouévi A. et J. Nansi, 2003. Gestion des ordures, des déchets industriels et des eaux de ruissellement, pp. 89-10.
ii
Sommaire
Liste des tableaux ............................................................................................................. vi
I.
INTRODUCTION ....................................................................................................................1
1.
2.
3.
II.
Cadre de l’étude, objectifs et participants ...................................................................1
Méthodes de travail et calendrier ................................................................................1
Structuration des présentations ...................................................................................1
EXPANSION URBAINE, PROCESSUS PASSÉS ET EN COURS .......................................................2
1.
2.
3.
4.
Dynamique de l'occupation du sol du plateau d'Abomey ...........................................2
La ville d’Abomey et son expansion...........................................................................6
La ville de Bohicon et son expansion..........................................................................9
Questions pour le diagnostic des territoires ..............................................................12
III. LES ACTIVITÉS SOCIO-ECONOMIQUES A ABOMEY ET BOHICON ..........................................13
1.
2.
Présentation des secteurs d’activités économiques ...................................................13
Importance de l’agriculture, de l’élevage et des transformations agroalimentaires ...............................................................................................................15
3. Les cultures en zones urbaine et périurbaine ............................................................18
3.1 Les champs de case...........................................................................................18
3.2 Les cultures annuelles sur parcelles vides en zones périurbaines.....................18
3.3 Le cas du maraîchage........................................................................................18
3.4 Les vergers domestiques ...................................................................................19
4. L’élevage de la volaille et du petit bétail......................................................................20
4.1 Elevages domestiques .......................................................................................20
4.2 Elevage semi intensif de petit bétail .................................................................21
4.3 L’élevage de bovins ..........................................................................................23
5. Les transformations agro-alimentaires et les spécialités de pays ..............................25
6. Questions pour le diagnostic des territoires et méthodes ..........................................25
IV. PRODUCTION VEGETALE PÉRIURBAINE ET URBAINE AUTOUR D’ABOMEY ET DE BOHICON ..27
1.
2.
Principales caractéristiques des systèmes de production de plein champ .................28
Opportunités et contraintes, et plus particulièrement celles liées à la péri
urbanité......................................................................................................................32
2.1 Problèmes fonciers............................................................................................32
2.2 Aptitudes et disponibilité des terres..................................................................33
2.3 Problèmes environnementaux...........................................................................33
2.4 Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins en concertation........34
2.5 Thèmes de recherche pour Ecocité et autres acteurs ........................................34
3. Maraîchage ...................................................................................................................35
3.1 Principales caractéristiques...............................................................................35
3.2 Opportunités et contraintes, et plus particulièrement celles liées à la périurbanité .............................................................................................................35
V.
PETIT ÉLEVAGE URBAIN ET PÉRIURBAIN A ABOMEY ET BOHICON ......................................36
iii
1.
2.
3.
4.
5.
Principales caractéristiques .......................................................................................36
Les systèmes de production de l’élevage urbain « conventionnel » .........................37
Les systèmes de production de l’élevage urbain « non conventionnel » ................41
Les systèmes de production animale en milieu rural ................................................42
Les contraintes, opportunités et perspectives de l’élevage, particulièrement
celles liées à la péri urbanité .....................................................................................44
VI. ELEVAGE BOVIN DANS LA ZONE URBAINE ET PÉRIURBAINE D’ABOMEY ..............................47
1.
2.
3.
Caractéristiques de l’élevage urbain .........................................................................47
1.1 Origine et développement de l’élevage.............................................................47
1.2 Typologie des élevages en milieu urbain et rural .............................................48
1.3 Les bouviers et les propriétaires d’animaux .....................................................48
1.4 Zones de pâturage et itinéraires techniques ......................................................49
Valorisation des produits d’élevage ..........................................................................50
2.1 Le marché de bovins de Bohicon......................................................................51
2.2 Organisation des Fulani ....................................................................................52
Opportunités et contraintes liées à la péri urbanité ...................................................52
3.1 Maintien de l’accès aux ressources fourragères et problèmes fonciers ............52
3.2 Problèmes liés au pâturage des animaux en ville..............................................53
3.3 Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins en concertation........54
3.4 Thèmes de recherche et de concertation inter-acteurs ......................................54
VI. TRANSFORMATIONS AGROALIMENTAIRES A ABOMEY ET BOHICON ...................................56
1. Principales transformations ..........................................................................................56
1.1 L’afitin ..............................................................................................................56
1.2 Le lio .................................................................................................................57
2. Opportunités et contraintes des transformations .......................................................57
3. Enjeux et groupes stratégiques..................................................................................57
4. Thèmes de recherche.................................................................................................58
VII. APPROVISIONNEMENT DES VILLES DE BOHICON ET D’ABOMEY ...........................................59
1.
2.
Le marché de Bohicon ..............................................................................................59
1.1 Description sommaire du marché .....................................................................59
1.2 Les flux au niveau du marché de Bohicon........................................................61
1.3 Modes et stratégies d’approvisionnement et d’écoulement .............................65
1.4 Gestion du stock avarié.....................................................................................66
1.5 Conditions d’accès au marché ..........................................................................67
1.6 Gestion du marché de Bohicon .........................................................................67
1.7 Opportunités et contraintes des filières et plus particulièrement celles liées
à la péri urbanité ...............................................................................................68
1.8 Problèmes environnementaux...........................................................................69
1.9 Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins de concertation........69
Le marché d’Abomey................................................................................................70
2.1 Description sommaire du marché Houndjro .....................................................70
2.2 Les flux au niveau du marché de Houndjro ......................................................71
iv
2.3
2.4
2.5
2.6
3.
Modes et stratégies d’approvisionnement et d’écoulement .............................72
Conditions d’accès au marché ..........................................................................72
Gestion du marché Houndjro ............................................................................73
Opportunités et contraintes, et plus particulièrement celles liées à la périurbanité .............................................................................................................73
2.7 Problèmes fonciers et environnementaux .........................................................73
2.8 Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins de concertation........74
Thèmes de recherche pour Ecocité............................................................................74
VIII. AMÉNAGEMENT DES ESPACES URBAINS ET PÉRIPHÉRIQUES ...............................................75
1.
2.
3.
4.
Principaux instruments d’aménagement ...................................................................75
1.1 Le Plan Directeur d’Urbanisme ........................................................................75
1.2 Le lotissement ...................................................................................................76
1.3 Contraintes et opportunités sur les instruments d’urbanisme ...........................80
Problèmes fonciers en périphérie des villes de Bohicon et Abomey ........................81
2.1 Les modes d’accès à la terre .............................................................................81
2.2 Le marché de la terre ........................................................................................81
2.3 Les dynamiques foncières liées aux lotissements des zones périphériques......82
2.4 Les enjeux d’accès aux terres à fort potentiel agricole .....................................82
Problèmes environnementaux ...................................................................................83
Enjeux, groupes stratégiques et expériences et besoins en concertation...................84
4.1 Une diversité des acteurs de la planification urbaine et du lotissement ...........84
4.2 Une diversité des enjeux ...................................................................................85
4.3 Besoins en concertation ....................................................................................87
4.4 Thèmes de recherche...........................................................................................87
IX. GESTION DES ORDURES, DES DÉCHETS INDUSTRIELS ET DES EAUX DE RUISSELLEMENT .........89
1.
2.
3.
Gestion des ordures ménagères à Abomey et Bohicon .............................................89
1.1 Caractéristiques de la gestion des ordures à Abomey.......................................89
1.2 Caractéristiques de la gestion des ordures à Bohicon .......................................91
1.3 Enjeux, groupes stratégiques et besoins en concertation ....................................93
1.4 Questions de recherche et thèmes de concertation inter acteurs.......................94
Gestion des déchets industriels .................................................................................95
2.1 Principales caractéristiques des déchets industriels ..........................................95
2.2 Les opportunités et contraintes liées à la péri urbanité .....................................96
2.3 Les initiatives de protection de l’environnement : atouts et contraintes...........98
2.4 Enjeux, groupes stratégiques et besoins en concertation ..................................99
Eaux de ruissellement .............................................................................................100
X. CONCLUSIONS, CHOIX DE THÈMES DE RECHERCHE ET PLANIFICATION ..................................101
1.
2.
Choix de filières et systèmes de production............................................................101
Enjeux environnementaux traités par Ecocité .........................................................102
2.1 Gestion des ordures ménagères.......................................................................102
2.2 Gestion des eaux de ruissellement ..................................................................103
v
2.3 Gestion de déchets agroindustriels ayant des valorisations agricoles
potentielles ......................................................................................................103
3. Enjeux fonciers traités par Ecocité..........................................................................103
4. Besoins en concertation et animation facilitées par Ecocité ...................................104
5. Conclusions ................................................................................................................104
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................105
ANNEXES ..................................................................................................................................107
1. Guides d’entretien.......................................................................................................107
2. Répartition des tâches de recherche des étudiants et chargés de recherche
programmés pour 2003 ...........................................................................................109
3. Liste des personnes rencontrées et thèmes de discussion durant le diagnostic ......110
Liste des tableaux
Tableau 2.1 : Données sur l’occupation des sols du plateau d’Abomey (1954 et 1982)...........................3
Tableau 2.2 : Les unités administratives de la commune d’Abomey........................................................6
Tableau 2.3: Les unités administratives de la commune de Bohicon......................................................10
Tableau 3.1 : Secteurs d’activités des actifs en 1992 ..............................................................................13
Tableau 3.2 : Répartition des actifs selon les secteurs d’activité (1999).................................................14
Tableau 3.3: Superficies cultivées selon les communes en 1998............................................................15
Tableau 3.4: Effectif des animaux selon les communes en 1998............................................................16
Tableau 3.5 : Données sur quelques éleveurs de bovins à Abomey........................................................24
Tableau 4.1 : Evolution de l’utilisation des terres dans le village de Sodohomè ....................................29
Tableau 4.2 : Importance de l’utilisation des produits chimiques sur les différentes cultures ................29
Tableau 4.3 : Destinations des productions entre commercialisation et consommation ........................30
Tableau 4.4 : Destination des productions agricoles de l’arrondissement de Sodohomè........................31
Tableau 4.5 : Proportions des paysans ayant des plantations (cas de Détohou)......................................31
Tableau 5.1 : Historique de l’élevage du petit bétail...............................................................................36
Tableau 5.2 : Typologie des systèmes d’élevage en milieu urbain .........................................................38
Tableau 5.3 : Données sur quelques éleveurs de petits bétails à Abomey et Bohicon ............................39
Tableau 5.4: Matières premières des élevages semi-intensifs.................................................................41
Tableau 5.4 : Marchés d’écoulement des produits d’élevage..................................................................41
Tableau 5.5 : Typologie des systèmes d’élevage en milieu rural............................................................42
Tableau 5.6: Destination des produits d’élevage de l’arrondissement de Sodohomè .............................43
Tableau 7.1 : Destination du stock de produits avariés ...........................................................................66
Tableau 8.1: Les lotissements à Abomey - Bohicon ..............................................................................78
Tableau 9.1 : Matrice de choix de filières à étudier ..............................................................................102
vi
Cartes
Carte 2.1 : Carte d’état major Abomey 1982 ..............................................................................2
Carte 2.2: Occupation des sols sur le plateau d’Abomey en 1982 ..............................................4
Carte 2.3 : Occupation des sols sur le plateau d’Abomey en 1954 .............................................5
Carte 2.4 : Carte administrative de la commune d’Abomey .......................................................6
Carte 2.5 : Plan de la ville d’Abomey en 1986............................................................................7
Carte 2.6 : Carte administrative de la commune de Bohicon ......................................................9
Carte 2.7 : Plan de la ville de Bohicon en 1986 ........................................................................11
Carte 3.1 : Flux des produits vers les marchés de Bohicon et Abomey ....................................17
Carte 3.2: Les parcs de bovins d’Abomey................................................................................23
Carte 4.1 : Localisation des villages et fermes étudiés..............................................................27
Graphique
Figure 7.1 : Schéma du marché de Bohicon avec positionnement des stands de produits
agricoles.............................................................................................................................60
Schéma 7.2 : Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en légumineuses...............61
Schéma 7.3: Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en gari ...............................62
Schéma 7.4 : Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en huile rouge ..................62
Figure 7.5 : Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en huile d’arachide.............63
Schéma 7.6 : Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en tomate et piment..........63
Schéma 7.7: Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en orange...........................64
Photos
Photo 2.1 : Maraîchage intra urbain à Bohicon .........................................................................19
Photo 2.2 : Elevage à la maison en ville de cochons métissés ..................................................22
Photo 6.2 : Chargement d’animaux sur le parc à bétail de Bohicon en direction de Cotonou ..52
Encadrés
Encadré 3.1: Les zones périurbaines .........................................................................................16
Encadre 6.1 Rencontre avec un retraité, petit propriétaire de bovins du quartier Adandokpodji,
Abomey urbain ..................................................................................................................48
Encadré 8.1 : Perceptions du lotissement en zone rurale ..........................................................86
vii
Ecocité- Document de travail n°6
I.
1.
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
INTRODUCTION
Cadre de l’étude, objectifs et participants
Alors que les villes s’étendent et empiètent sur des espaces jusqu’alors agricoles, le programme de
recherche ECOCITE vise à analyser les modalités de la gestion des espaces urbains et périurbains
et à proposer des appuis pour une meilleure concertation entre les acteurs concernés par ces espaces.
Pour identifier les thèmes de recherche précis à traiter dans les différentes équipes, des thèmes
transversaux à travers les sites et les thèmes pour lesquels il y a des besoins en concertation auxquels ECOCITE va chercher à répondre, un diagnostic a été conduit regroupant l’ensemble des
équipes de recherche du DESAC, du LARES, du CEBEDES et de l’Université de Mainz impliquées dans le programme ECOCITE.
2.
Méthodes de travail et calendrier
La diagnostic a été précédé par une étude monographique réalisée par le CEBEDES qui précisait
les processus passés de l’expansion urbaine, les principales activités économiques de la région.
Le diagnostic a eu lieu du lundi 24 février au samedi 1er mars 2003. La démarche retenue est exploratoire et consiste en une série d’entretiens avec des personnes ressources autour de quelques
thèmes permettant de mieux en décrire les processus et les acteurs impliqués et leurs perceptions
respectives de ces processus. Les entretiens sont conduits à chaque fois par deux chercheurs. Le
soir une restitution permet de vérifier le niveau d’avancement et d’identifier le cas échéant de
nouveaux thèmes. Le lundi, les résultats de l’étude monographique élaborée par le CEBEDES ont
été présentés et des grands thèmes de travail dégagés. Un calendrier des entretiens avec les lieux,
thèmes et interlocuteurs a été élaboré (cf. annexe ). Les résultats ont fait l’objet d’une présentation
synthétique générale le vendredi. Les systèmes de production et filières à analyser dans le cadre
de ce programme ont été alors identifiés, de même qu’une série d’enjeux environnementaux et
fonciers majeurs sur lesquels des recherches permettraient d’améliorer le niveau de connaissances
des acteurs. Les domaines dans lesquels il est nécessaire d’apporter des informations aux acteurs
ont été identifiés. Les différents thèmes ont été répartis entre les équipes de recherche. L’étude des
cadres de concertation entre ces acteurs va se poursuivre après le diagnostic.
3.
Structuration des présentations
Les informations obtenues ont été restituées selon le plan suivant, qui donc charpente le rapport à
partir du chapitre IV:
a) Principales caractéristiques
b) Opportunités et contraintes, et plus particulièrement celles liées à la péri urbanité
c) Problèmes fonciers
d) Problèmes environnementaux
e) Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins en concertation
f) Thèmes de recherche pour ECOCITE et autres acteurs
1
Ecocité- Document de travail n°6
II.
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
EXPANSION URBAINE, PROCESSUS PASSÉS ET EN COURS
Floquet A. et J. Nansi
1.
Dynamique de l'occupation du sol du plateau d'Abomey
Le plateau d’Abomey est une zone anciennement et très densément peuplée. Aujourd’hui, zones
urbaines et agglomérations en zones rurales constituent un continuum (Carte 2.1). Compte tenu de
la densité importante du plateau d’Abomey (589 habitants au Km²), il est difficile de délimiter
zones urbaines et rurales autrement que d’un point de vue administratif. La densité de population
ne cesse de s’accroître. En se basant sur les données démographiques de 1979 à 1992,
l’accroissement moyen annuel de la population est estimé à 5 habitants/Km² soit une augmentation de près de 150 habitant/Km² sur le plateau de 1954 à 1982.
Carte 2.1 : Carte d’état major Abomey 1982
2
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Tableau 2.1 : Données sur l’occupation des sols du plateau d’Abomey (1954 et 1982)
Unités cartographiques
1954
1982
1954-1982
Ha
Ha
changements
Agglomérations
1448
6740
+5292
Champs et jachères
90616
92570
+1953
Forêts claires
5705
1449
-4256
Forêts galeries
2278
3487
+1208
Plantations
2637
3801
+1163
Savanes arborées
10922
1139
-9530
Savanes arbustives
7385
11564
+4179
Les résultats (tableau 2.1) d’une étude1 comparant 1954 et 1982 indiquent que les principales causes de destruction du couvert végétal du plateau d’Abomey sont liées aux transformations suivantes (cartes 2.2 et 2.3):
o Le taux d’occupation du sol par les agglomérations est passé de 1% en 1954 à 6% en 1982,
soit une augmentation de près de 5300 hectares. La principale cause de cet accroissement est
la poussée démographique sur le plateau durant ces 3 décennies. Cette augmentation de la superficie des agglomérations s’est faite surtout au détriment des superficies des champs et jachères (3800 ha), de la savane arbustive (850 ha) et de la savane arborée (600 ha). Ces données confirment l’implantation des nouvelles agglomérations à proximité des champs
qu’illustre la carte d’occupation de 1982.
o Du point de vue quantitatif, la variation de l’occupation du sol par les champs et jachères de
1954 à 1982 est insignifiante, tandis que la transformation des autres unités cartographiques
au profit des champs et jachères a été observée. Ainsi près de 1300 ha de forêts claires, 1080
ha de plantations et 6900 ha de savane arborée ont été transformées en champs et jachères. Ce
dynamisme est la conséquence de la pratique de l’intensification de l’agriculture. Les systèmes de culture basés sur la jachère arbustive ou arborée se sont transformés en agriculture
quasi permanente.
1
Vodougnon Marie-Rufine et Karsten Vennemann, 2000. in : Stahr et Vennemann, 2000. Atlas des Ressources Naturelles du Bénin et du Niger. Universität Hohenheim, Stuttgart.
3
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Carte 2.2: Occupation des sols sur le plateau d’Abomey en 1982
4
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Carte 2.3 : Occupation des sols sur le plateau d’Abomey en 1954
5
Ecocité- Document de travail n°6
2.
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
La ville d’Abomey et son expansion
La commune d’Abomey comprend 7 arrondissements (Djègbé, Gbècon-Hounli, Vidolé, Agbokpa,
Dètohou, Sèhoun, Zounzonmè), 11 quartiers, 18 villages (carte 2.4).
Carte 2.4 : Carte administrative de la commune d’Abomey
Source : Plan d’Abomey en 1992
Tableau 2.2 : Les unités administratives de la commune d’Abomey
Type
Urbain
Rural
arrondissements Population Population
1992
2002
Quartiers de ville et villages
Djègbé
16 374
19 695 Djegbé, Djimè, Gbécon-Houégbo
Gbécon-Hounli
14 218
16 590 Agblomè, Hounli, Zassa, Agnagna
Vidolé
20 734
23 387 Agbodjanangan, Ahouaga, Hountondji, Adandokpodji
Agbokpa
4 012
5 042 Dokou, Sonou-Fiyè, Gnassata, Sonou-Akouta
Détohoun
2 931
4 112 Allomakamè, Détohou, Guéguézogon, Kodji
Sèhoun
2 655
2 816 Séhoun, Houélé, Lèlè, Houawo
Zounzonmè
5 671
6 689 Gbéyizankon, Lègbaholi, Lokokanmè, Zounzonmè
Total
Commune
66 687
78 341
Source : Annuaire monographique des communes
6
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
La population d’Abomey croit à un taux annuel moyen de 2,2%. Abomey est à la fois le siège
d’immigrations des zones environnantes vers le centre urbain et d’émigration de jeunes vers les
grandes villes plus prospères. On observe donc une forte migration des jeunes qui viennent gonfler les effectifs des artisans et autres prestataires de services des pôles urbains.
La population urbaine au recensement de 1992 était de 48.032 habitants soit 72,1% de la population totale de la commune. Au recensement de 1999, elle est passée à 64.091 habitants soit 85%,
ce qui dénote une plus forte pression démographique dans la zone urbaine. Pendant ce temps la
population rurale diminuait et passait de 18.563 à 10.889 habitants (MISD, 2001).
La pression démographique induit une extension des limites géographiques de la ville malgré le
régime foncier (en particulier les paramètres d’occupation du sol) particulier de la ville
d’Abomey. En effet, la répartition spatiale de la population d’Abomey est marquée par l’histoire
de la ville. La capitale du royaume de Danhomè a vu l’émergence d’un tissu urbain particulier lié
étroitement à l’épanouissement de la dynastie des ALLADAHONOU pendant un siècle et demi.
Les quartiers de la ville forment une spirale dont le centre est le palais royal. Chaque quartier a été
crée autour de la construction du palais d’un prince héritier, de temples et de lieux de culte.
Carte 2.5 : Plan de la ville d’Abomey en 1986
Anignikin (1981, p.362) écrit, suite à son enquête ethno foncière, que les Alladahonou ont
« conçu un urbanisme pour magnifier leur règne, honorer leurs morts, adorer leurs dieux et péren2
Anignikin, S., 19 . Perception du phénomène urbain en Afrique Noire précoloniale : l’exemple d’Abomey, capitale
du Danxome. In : Coquery-Vidrovitch (ed.). Processus d’urbanisation en Afrique. Paris, L’Harmattan.
7
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
niser leur dynastie ». A leur majorité les princes héritiers étaient sortis du palais et se voyaient
attribuer une zone où établir leur propre palais autour duquel se créait un quartier dont le nom
reflète l’histoire originelle. A cette expansion dans l’espace s’ajoute une volonté de peupler la
ville. Or de nombreux Aboméens étaient envoyés dans les provinces conquises pour en assurer
l’administration, aussi Abomey fut elle largement peuplée d’esclaves, mais aussi d’artisans appelés par les rois, et enfin d’adeptes de culte également invités. Les Aboméens se voyaient attribuer
par le roi une concession de terre (kpatin tun tun). En 1890, la ville comptait entre 45.000 et
50.000 habitants (dont 10.000 princes et dignitaires), un effectif qui va tomber à 10.000 en période coloniale (de 1910 à 1930). Aux palais venaient s’adjoindre de nombreux temples et leurs
places, et chaque concession avait des étendues de culture adjacente, ce qui explique l’expansion
spatiale de la ville d’Abomey. En période précoloniale, la ville et la campagne s’interpénétraient,
bien que pour les habitants la distinction entre la ville, à l’intérieur des fossés, et la campagne, à
l’extérieur de ces fossés, ait été nette. Après la colonisation, la ville se vida vers les campagnes.
Aujourd’hui encore, la densité de la population est assez faible dans la ville. En 1985, la densité
moyenne de la ville était de 18 habitants à l'hectare suivant les limites administratives des 3 communes urbaines alors que le quartier HOUNTONDJI a une densité de 80 et les zones périphériques comme DJIME Nord des densités de 4 à 10 habitants à l'hectare. La ville n’a retrouvé que
récemment ses effectifs de la période précoloniale.
L’époque coloniale a brisé la dynastie mais les dynamiques sociale et spatiale d’Abomey ont survécu et ont beaucoup limité les tentatives d’opérations d’urbanisme de l’époque coloniale (lotissement du marché Houndjro à la préfecture) et de l’époque révolutionnaire (lotissement de Goho).
Le projet Plan d’urbanisme en République Populaire du Bénin a donc en 1987 planifié la densification de la ville en respectant le mode d’occupation traditionnelle du sol, la densification et la
mise en valeur du lotissement de Goho, le lotissement de Djimè et la stabilisation de la population
rurale périphérique par la création de pôles d’équipements à Zouzonmè, Agbokpa et Adingnigon.
C’est ainsi que de 1985 à 2001, Abomey devait s’étendre vers le nord au delà des limites des
quartiers Ahouaga et Agbodjannankan aux quartiers d’Agbokpa et Détohou ; vers le sud au delà
des limites des quartiers Agnagna et Gbèkon-Houégbo aux anciennes communes de Adingnigon
et de Zounzonmè3.
Durant la royauté, la ville étendit son contrôle selon deux axes : Houawé-Adingnigon et Oungbega-Dokon. Ces axes sont demeurés les axes de l’expansion urbaine avec une densité de population
forte qui contraste avec l’absence d’expansion vers l’ouest (Detohou). Remarquons que les zones
de forte expansion correspondent aux terres de barre, et donc aux palmeraies, tandis que les zones
sur socle cristallin (zones d’igname) n’ont été mises en valeur que plus tardivement.
3
Les limites administratives actuelles ne correspondent pas aux délimitations royales des quartiers à l'exception de
HOUNTONDJI et AHOUAGA.
8
Ecocité- Document de travail n°6
3.
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
La ville de Bohicon et son expansion
Bohicon comprend 17 quartiers et 34 villages organisés en 10 arrondissements : Bohicon 1, Bohicon 2, Agongointo, Avogbana, Gnidjazoun, Lissèzoun, Ouassaho, Passagon, Saclo et Sodohomè.
L’extension de la ville vers ces communes rurales est liée à son influence aussi bien sur le plan
des infrastructures socioculturelles que sur le plan des services publics.
Carte 2.6 : Carte administrative de la commune de Bohicon
9
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Tableau 2.3: Les unités administratives de la commune de Bohicon
Type
arrondissements
Population1992
Population
2002
Quartiers de ville et villages
Urbain
Bohicon 1
18 605
28 428 Ahouamè, Hèzonho, Sèhouèho
Urbain
Bohicon 2
24 848
37 546 Agonvezoun, Zakpo, Kpokon, Honmèho, Ahito, Gbangnikon, Sogba
Urbain
Agongointo
2 616
4 014
Rural
Avogbana
4 312
5 173
Urbain
Gnidjazoun
2 206
2 377
Rural
Lissézoun
2 892
3 821
Rural
Ouassaho
6 338
8 350
Rural
Passagon
6 361
7 916
Urbain
Saclo
3 407
4 028
Rural
Sodohomè
10 305
11 429
Total
Commune
81 989
113 091
Source : RGPH, 1992 et 2002
La ville de Bohicon est une ville née au 20ème siècle par l’installation de la gare ferroviaire et du
marché central. C’est donc autour de ces deux éléments que s’est organisé le peuplement de la
ville. La ville n’a commencé à croître que tardivement (6.000 habitants en 1961). La population
urbaine est passée de 19.274 habitants en 1979 à 54.113 habitants en 1992 puis à 68.357 habitants
en 1999 soit un taux d’accroissement annuel moyen de 3,74%. Les projections démographiques
indiquent que le seuil des 100.000 habitants sera dépassé en 2006 pour le noyau urbain de la
commune.
La ville est située sur un site qui pour les urbanistes présente des « contraintes urbanistiques mineures ». Le régime foncier y serait moins complexe et moins contraignant que celui d’Abomey.
En d’autres termes, les habitants sont prêts à lotir et s’aligner sur les propositions des urbanistes.
Bohicon dispose d’un potentiel industriel important, ce qui lui permet d’occuper le troisième rang
sur le plan national après Cotonou et Parakou.
Enfin, Bohicon fait partie du petit nombre de villes du Bénin qui constituent de grands carrefours
car elle est reliée par deux axes bitumés en bon état, Cotonou-Malanville (Sud-Nord) et d’Est en
Ouest Azovè-Bohicon que prolonge une voie de terre en cours de bitumage, Bohicon-KétouIllara4, et une voie ferrée Cotonou-Bohicon-Parakou. Cette position dans le réseau routier national
en fait un pôle de convergence de grands flux économiques vers un marché régional et international.
La population de Bohicon a un taux d’accroissement annuel moyen de 3,74% fortement influencée par le grand flux migratoire dont les principales sources sont le Mono, le Couffo et les Collines. Il faut remarquer que cette migration est beaucoup plus alimentée par les femmes que par les
hommes, contrairement aux observations courantes dans les autres villes. Ce sont en général des
commerçantes qui s’installent et s’insèrent sans grande difficulté.
4
Voie d’accès reliant le Togo au Nigéria
10
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Abomey accueille une partie importante de populations rurales attirées par la ville (13,9 %) mais
connaît un exode urbain important vers toutes les autres villes du Bénin, spécialement Cotonou,
Parakou et Natitingou, ce qui explique un taux d'accroissement faible. La ville de Bohicon, par
contre, attire beaucoup de ruraux des communes avoisinantes et de plus connaît un exode urbain
faible même vers Cotonou qui explique son fort taux d'accroissement (en 1984, une grande partie
de la population de Bohicon était d'origine rurale (28,2 %) et particulièrement du Zou (districts de
Covè, Zagnanado, Zakpota, etc...).
La ville a « bénéficié » d’un plan d’urbanisme en 1936, ce qui explique sa structure en damiers.
Une partie du lotissement de la ville a été effectivement réalisé dans la partie Nord de l'ancienne
voie ferrée. On y trouvait en 1985 des densités allant jusqu'à 100 habitants à l'hectare autour du
marché. Une zone d'équipement (CARDER, SONICOG...) prolonge ce lotissement vers l'Ouest
sur la route d'ABOMEY. Le reste de la ville n'était pas loti, l'habitat y était semi rural et dispersé
avec des densités de 7 à 20 habitants à l'hectare. Seule la partie Nord plus peuplée était en cours
de lotissement.
Carte 2.7 : Plan de la ville de Bohicon en 1986
La pression démographique induit une extension des limites géographiques de la ville. En effet, la
ville s’étend suivant les grands axes routiers qui s’y croisent, notamment à l’ouest de la voie Bohicon-Dassa où un lotissement a été récemment exécuté, le long de la voie Bohicon-Zakpota, de la
voie Bohicon-Abomey dans le sens d’une conurbation et vers le sud le long de la voie CotonouBohicon. Depuis plusieurs décennies, il est prévu de créer un grand marché régional entre les
deux agglomérations (Djimè) sur une superficie de 12 ha. Ceci accentuerait le processus de conurbation.
Il y a de nombreux mouvements journaliers, hebdomadaires (marchés, formation) entre villes et
campagnes environnantes de populations allant en ville pour des raisons commerciales, pour ac-
11
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
céder à diverses infrastructures sanitaires et administratives, aux lieux de scolarisation, aux banques, postes, aux divers services publics et privés.
Pour les achats courants de vivriers, beaucoup de petites commerçantes fréquentant également les
marchés périphériques profitent des recettes de leurs ventes pour faire les emplettes pour la famille (à Agbangnizoun, Oungbega sur Abomey ; Zogbodomey, Za Kpota ).
4.
Questions pour le diagnostic des territoires
Changements fonciers
Quels sont les changements induits sur les modes d’accès à la terre, la propriété foncière, la sécurité foncière :
aire d’influence de la ville vue au travers des changements fonciers (zonage 1). Enjeux fonciers et groupes stratégiques ?
Zonage par les flux d’approvisionnement des villes et des campagnes : flux de personnes, de biens et services,
leur origine.
Quelles sont les aires d’influence de la ville en relation avec les mouvements des hommes ?
Qui achètent sur les marchés et les boutiques et d’où viennent-ils ?
Probablement aire d’influence couvrant tout le département (sauf Ouinhi qui sera dans l’aire de Porto-Novo)
pour des achats particuliers.
Quelles sont les zones périurbaines et rurales liées à la ville par les collèges d’Enseignement secondaire
deuxième cycle, Centre Hospitalier Départemental?
Quels sont les flux liés aux activités génératrices de revenu urbaines et rurales pouvant déterminer les zones
d’influence de la ville sur la campagne et vice versa ?
12
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
III.
LES ACTIVITÉS SOCIO-ECONOMIQUES A ABOMEY ET BOHICON
1.
Présentation des secteurs d’activités économiques
Dans toute la commune d’Abomey, le commerce et les services constituent les sources de revenu
de respectivement 40,6 et 15,4% des actifs. A Abomey ville, la prépondérance du secteur tertiaire
s’accentue : 87,13% des entreprises recensées par le BIT5 font du commerce, en général dans les
secteurs du commerce de détail et de la restauration, ou fournissent des services tandis que
10,99% sont dans la production (tableau 3.1).
Tableau 3.1 : Secteurs d’activités des actifs en 1992
LOCALITE
agriculture manufacture commerce
Transport
bâtiment,
TP
services
autres
ZOU
66,5
7,1
15,3
1,9
2,0
5,4
1,9
Abomey
14,3
16,2
40,6
4,7
6,6
15,4
2,3
Agbangnizoun 61,3
8,4
22,5
0,8
1,4
4,2
1,3
Bohicon
24,8
15,8
26,8
7,0
6,0
15,9
3,8
Covè
57,6
9,5
15,1
2,9
4,7
7,2
3,0
Djidja
80,8
3,8
10,2
0,6
0,5
1,6
2,5
Ouinhi
58,1
7,1
30,2
0,2
0,3
2,1
1,9
Zagnanado
68,7
4,8
18,7
1,5
1,7
3,2
1,3
Za-Kpota
85,4
3,0
7,6
0,7
0,5
1,8
0,9
Zogbodomè
74,9
4,9
13,6
1,3
0,8
3,4
1,1
Source : RGPH, 1992
Le secteur tertiaire est également fortement prépondérant à Bohicon. Le commerce et le transport
à eux seuls occupent environ 41,3% de la population active. Le marché de Bohicon est animé tous
les 5 jours par 12.000 vendeurs constitués de producteurs mais surtout de collecteurs intermédiaires. Le secteur du transport dans la ville est animé par 15 gros-porteurs essentiellement destinés au
transport du coton et des billes de tecks vers les usines, 80 automobiles et camionnettes destinées
au transport en commun et au transport des marchandises des localités environnantes vers le marché de Bohicon (il faut ajouter à ce parc automobile les véhicules provenant des autres grandes
villes). La moyenne des voyageurs est estimée à 900. Le transport urbain est assuré par environ
600 taxi motos. Il faut noter que le secteur informel prend une part importante de l’activité économique de la ville.
5
7726 entreprises du secteur informel ont été recensées à Abomey en 1992 (Maldonado et al., 1996) dont près de la
moitié sont du type semi-sédentaire.
13
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Tableau 3.2 : Répartition des actifs selon les secteurs d’activité (1999)
Agriculture, pêche, chasse
Urbain :
Rural :
Urbain :
Rural :
Bohicon
Ouassaho
Abomey
Zounzonmè
5,7
18,4
5,9
29,2
20,3
17,1
19,6
11,8
8,1
7,1
7,8
4,6
Commerce, restaurants,
hôtels
32,2
41,5
41,9
41,9
Transports, Communications
9 ,0
2,9
5,8
2,3
Autres services
24,0
13,0
18,6
9,9
Industrie manufacturière
Entreprises BTP
Source : Atlas monographique des communes du Bénin
Le secteur secondaire à Bohicon compte 5 unités de transformation industrielle : 2 unités
d’égrenage du coton de la Société Cotonnière du Bénin et de la Société Nationale de la Promotion
Agricole, une huilerie de la Société des Huileries du Bénin, un grand moulin industriel et une unité de transformation du bois de l’Office National du Bois. Toutes ces unités de transformation
emploient un effectif assez important de travailleurs. A côtés de ces grandes unités industrielles, il
y a l’artisanat de production orienté vers la transformation agricole (arachide, palmiste).
L’agriculture emploie 6% des actifs à Abomey et Bohicon contre respectivement 18 et 29% dans
des arrondissements ruraux périurbains. La superficie cultivée serait de 6500 ha sur l’ensemble de
la commune de Bohicon (51, 3% de la superficie de la commune) et de 4430 ha à Abomey (22,1%
de la superficie communale) en 99.
L’enquête sur les activités économiques des villes d’Abomey et Bohicon réalisée en 1992 par le
BIT donnait des chiffres encore plus faibles d’implication dans l’agriculture. A Bohicon-ville, sur
les 7.726 unités économiques recensées, seules 0,4% avaient déclaré l’agriculture6 comme activité
principale contre 60% pour le commerce (de détail essentiellement, et au deux tiers de produits
alimentaires), 18,6% pour la restauration. 73% des unités étaient conduites par des femmes. Les
producteurs primaires font essentiellement la couture, la forge et la maçonnerie, après quoi viennent la menuiserie, la meunerie, le tissage. Fabrication d’huiles, distillation et élevage viennent
loin derrière et ne concernent que des petites dizaines d’individus. Pour ce qui est du commerce,
un nombre assez élevé de personnes ont déclaré comme activité la boucherie et la poissonnerie.
Ces entreprises ont une durée de vie souvent éphémère. 70% des chefs d’établissement auraient eu
plus de 50 ans.
A Abomey-ville sur les 3424 unités économiques recensées, 0,1% avaient déclaré l’agriculture
comme activité principale contre 65% pour le commerce (de détail essentiellement, et au deux
tiers de produits alimentaires) et 19,4 % pour la restauration. 74% des unités étaient conduites par
des femmes.
Le dernier secteur significatif dans les deux communes en terme d’emploi est celui du transport.
Si on en croit ces chiffres, l’agriculture aurait disparu des agglomérations et n’existerait plus qu’à
la périphérie des villes. Mais ceci est contredit par l’observation à l’œil nu.
6
La méthode d’identification des entreprises y a peut-être été pour quelque chose.
14
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Contribution des activités génératrices aux revenus des ménages
En 1984, l’enquête « revenu des ménages urbains » montrait que les revenus étaient assez élevés à
Bohicon et faibles à Abomey.
2.
Importance de l’agriculture, de l’élevage et des transformations agroalimentaires
Tableau 3.3: Superficies cultivées selon les communes en 1998
Commune
Superficie
Forêts Marécages
(ha)
Abomey
14200
Bohicon
13900
Agbangnizoun
24400
Za-Kpota
cultivée en
85
Superficie
Intensité
cultivée en 97
d’utilisation
1805
6361,5
44,9
3694
6819,5
49,1
6450
10521
43,2
40900
7760
30991
75,8
Cove
41800
7801
17539
42,0
Ouinhi
34200
8584
10893
34,1
Zangnanado
54000
8568
15056
27,9
Djidja
218400
1900
30855
31486
14,5
82500 11730
21365
11685
16,5
96882
141352
27,8
Zogbodomey
30
Superficie
20
2220
524300 13630
2270
Source : CARDER
Si les statistiques sont exactes, la superficie cultivée a augmenté fortement depuis 1985, et ce
phénomène a aussi touché les communes d’Abomey et de Bohicon, malgré l’urbanisation et la
réduction des superficies cultivables. L’intensité d’utilisation des terres se rapproche probablement de 100 %.
Les marchés de Bohicon et dans une moindre mesure d’Abomey jouent des rôles de transit et de
redistribution important dans le commerce national et sous-régional. C’est pourquoi pour les produits vivriers, les flux de longues distances dominent sur les flux de zones limitrophes (carte 3.1).
15
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Tableau 3.4: Effectif des animaux selon les communes en 19987
Animaux
Bovins
Ovins
Caprins
Porcins
Volailles
Lapins
Ville
Abomey
884
333
10937
4500
49000
200
Agbangnizoun
294
68
8098
3000
27000
120
Bohicon
783
408
9140
3000
37000
200
Covè
94
162
1771
500
6000
70
Djidja
5526
4930
15787
3000
48000
20
Ouinhi
127
2096
3474
500
10000
Zagnanado
2343
1361
4764
1000
15000
40
Za-kpota
1010
316
13983
7000
39000
20
Zogbodomey
760
3130
12908
2500
44000
30
Total
11821
12804
80862
25000
275000
700
Source : CARDER-Zou, 1999
Encadré 3.1: Les zones périurbaines
La zone périurbaine de Djidja est composée des arrondissements de Mougnon, de Dowimè,
d'Agondji et de la partie sud des arrondissements de Oumbèga et de Dan. Cette zone est située sur
une terre de barre dégradée, résultat de la très ancienne et longue exploitation qu'elle a subie. On y
rencontre principalement l'artisanat traditionnel dominé par les activités de poterie et les transformations agro-alimentaires surtout les huiles de palme, d'arachide et de palmiste. On y pratique secondairement une petite agriculture constituée essentiellement des cultures d'arachide, de niébé, de
maïs et de sorgho. Quant à la production animale, elle est réduite aux petits ruminants, aux porcins
et à la volaille.
La zone périurbaine de Za-Kpota est périphérique à Bohicon et constituée des arrondissements de
Zeko, Kpozoun et d'Assanlin, elle est spécialisée dans les activités de transformations agroalimentaires (Klui-klui, huile d'arachide, huile rouge, sodabi) et le petit commerce qui s'appuie sur les
marchés de Bohicon et de Covè. Cette zone a hérité d'une terre de barre dégradée résultant d'une
utilisation très prolongée. La disponibilité en terres de cette partie périurbaine est très réduite. En effet, elle constitue également une zone de palmeraies traditionnelles dans lesquelles sont cultivées des
légumineuses telles que l'arachide et le niébé. Aussi, on y rencontre des terres vendues aux non- ruraux. Remarquons tout de même qu'il existe une agriculture de case permettant la culture du maïs
qui constitue la base alimentaire pour la commune de Za-kpota en particulier et pour le département
en général.
Sources : Mongbo et al. 2000
7
Probablement sous-estimés à Abomey
16
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Carte 3.1 : Flux des produits vers les marchés de Bohicon et Abomey
17
Ecocité- Document de travail n°6
3.
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Les cultures en zones urbaine et périurbaine
Des transects d’utilisation des terres ont permis de recenser différents systèmes de culture dans la
ville et à la périphérie d’Abomey.
3.1
Les champs de case
Certains ménages cultivent les terres libres environnant leur maison, jusqu’au bord des voies. Les
cultures annuelles les plus remarquables sont par ordre d’importance le pois d’angole, le maïs, le
sorgho, le niébé, la patate douce et le manioc. Ces exploitations agricoles couvrent généralement
quelques dizaines de m². La superficie emblavée est de plus en plus importante à mesure qu’on
s’éloigne de la ville. Les parcelles bénéficient des ordures des maisons avoisinantes et des déjections des animaux qu’on y aurait attaché au piquet. Les fonctions de ces formes d’exploitation de
la terre sont multiples et varient d’un acteur à l’autre : participation au revenu, sécurité alimentaire, occupation de parcelle non clôturée ou en attente de vente. Ce système de production est
prédominant dans les quartiers périphériques de Gbècon-Houégbo, Zounzonmè et Ahouaga
compte tenu de la disponibilité de terrains vides et de la fertilité relativement acceptable des terres.
Les domaines des palais sont également exploités en pleine ville. Par exemple, sur le domaine
royal des palais à Hountondji, derrière le musée, une douzaine de cultivateurs empruntent
l’étendue de terres entourant les palais moyennant paiement d’un fermage saisonnier. Outre le
maïs et le pois d’angole, il y serait cultivé du gombo qui alimenterait le marché de Houndjro en
saison des pluies. Bien que les superficies soient réduites, ces micro-exploitations constituent des
sources de revenu et les terres sont convoitées.
Remarquons que la culture de champs de case se poursuit dans les villages de zones rurales dont
les terres sont particulièrement surexploitées et épuisées. Ce sont même les seules parcelles qui
peuvent abriter du maïs dans des villages comme Adingnigon.
3.2
Les cultures annuelles sur parcelles vides en zones périurbaines
On observe dans les zones périurbaines des champs de 0,25 à 1 ha isolés de toute habitation, ce
qui les distingue des champs de case. Les cultures les plus courantes visibles en saison sèche
sont : pois d’angole, maïs, sorgho et manioc. A cela s’ajoutent le niébé et l’arachide. Une partie de
ces cultures est sous palmier. Ce système de production s’observe surtout à l’ouest d’Agblomè et
à Détohou compte tenu de la fertilité encore satisfaisante des terres.
« Pull or push » ? Que deviennent les agriculteurs de ces zones. La ville les attire, semble-t-il,
avant même de les repousser. Beaucoup de jeunes partiraient faire des jobs en ville, comme taximoto à tel point qu’il serait difficile de trouver de la main d’œuvre salariée pour cultiver les
champs en périphérie de la ville.
3.3
Le cas du maraîchage
En saison sèche, il semble n’y avoir qu’un seul maraîcher dans la ville de Bohicon. Même dans
les cours des maisons, pas de pieds de cultures annuelles, et quelques rares plantes pérennes végétant (Vernonia amygdalina, Ocinum sp., etc.). La grande cause en est le manque d’eau. Le seul
maraîcher est installé sur le site de la gare de Bohicon et a accès à l’eau via une pompe Nagueze.
18
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Il produit en pleine saison sèche des salades, des choux et les carottes qu’il commercialise devant
son site, sur la route principale, et à proximité du grand carrefour. Des commerçantes des zones
agricoles apportent d’autres maraîchers qu’il commercialise à son étalage, assez bien fourni.
Ce maraîcher a longtemps été délégué de son quartier et a bénéficié des conseils d’agents du
CARDER. Il utilise les fientes des élevages, les graines de coton, les ordures et résidus pour fertiliser ses cultures.
Les autres maraîchers n’exercent qu’en saison des pluies puis doivent s’arrêter faute d’eau. Pendant ce temps des eaux de ruissellement stagnent dans des « réservoirs » et constituent des nuisances et des lieux de prolifération des moustiques insupportables pour les riverains !
Photo 2.1 : Maraîchage intra urbain à Bohicon
Source : Floquet, 2003
3.4
Les vergers domestiques
On observe dans 90% des cas des fruitiers au centre de la cour, à la devanture ou autour des maisons. Le manguier est le plus répandu et on y distingue des pieds de tous âges aussi bien de variétés locales que de variétés sélectionnées. Les bananiers, cultivés dans une moindre mesure à
Abomey mais beaucoup plus à Bohicon, sont généralement plantés dans les arrière-cours à proximité des douches ou à l’extérieur de la maison sur les décharges d’ordures ménagères. On observe également dans ces vergers des agrumes, des goyaviers et quelques palmiers. Ces différentes cultures contribuent relativement au revenu des ménages et participent à leur sécurité alimentaire tout ayant une fonction ornementale. On retrouve aussi à l’intérieur et autour de ces maisons
quelques pieds de Azadirachta, Tectona, Eucalyptus et Acacia qui participent la plupart du temps
à la fonction ornementale mais sont parfois exploités pour leur tronc à des occasions de construction de bâtiment. A Abomey, il y a même beaucoup de petites plantations sur les terrains des collectivités à l’extérieur de la maison (clôturée).
19
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
La palmeraie et la plantation d’essences forestières en zones périurbaines
Les transects urbains révèlent qu’il subsiste de nombreux restes de palmeraies promues par Ghézo
auxquelles viennent s’adjoindre des plantations forestières de quelques hectares dans les zones
périurbaines. Les essences les plus courantes pour ces dernières sont Acacia auriculiformis, Tectona grandis et Eucalyptus. Les acteurs du système de production à plantation agroforestière sont
généralement des « néoruraux » et la plupart de ces plantations se retrouvent à l’ouest de
d’Adandokpodji vers Détohou. Les propriétaires de palmiers sont au contraire des autochtones,
assez âgés pour avoir hérité de terres ou des « daa » chefs de collectivité ayant reçu la gestion de
parcelles en propriété familiale indivise (« hweceju ») dont les palmiers permettent de financer les
cérémonies.
L’investissement dans ces plantations est relativement faible, si on les compare aux vergers fruitiers, et leur durée de vie plus limitée. Ce type de plantation ne constitue donc pas une « barrière »
à l’extension de la ville. Quand il devient pertinent de vendre la terre, les palmiers sont abattus et
les arbres forestiers aussi.
Par contre on trouvera une « couronne » un peu plus loin avec de nombreuses plantations. Les
plantations fruitières d’agrumes et les palmeraies denses, améliorées ou non, se retrouvent sur ZaKpota sur les piémonts, à Zogbodomè vers le fleuve, tandis que la palmeraie associée domine à
Za-Kpota et au sud de Djidja sur les plateaux de terre de barre.
Trois éléments pourraient à l’avenir influencer la situation. Le premier est lié à l’épuisement rapide des ressources forestières des zones de savane située au nord de la conurbation (Djidja et
Zagnanado). Ces zones fournissent pour l’instant un charbon et du bois qui n’intègrent pas le coût
de la reconstitution du couvert ligneux. Que ces réserves soient épuisées (terme assez proche mais
encore non évalué) ou qu’une politique soit instaurée qui oblige ceux qui coupent à reboiser, et les
plantations à bois de feu périurbaines, déjà rentables, deviendront des investissements très intéressants. Pour l’instant, seuls les producteurs ayant de grandes superficies en consacrent une partie
aux plantations, car il faut atteindre 4 à 5 ans avant de pouvoir mettre une partie des terres sous
plantations et se permettre d’attendre que le bois soit récolté tout en cultivant le reste, et sans
doute parce que la rentabilité ne justifie pas encore une substitution avec l’arachide. Le deuxième
est lié à une amélioration de l’accès à l’eau qui profiterait aussi à l’agriculture en permettant
même d’irriguer les plantations fruitières en période critique. Un dernier point est lié à la politique
nationale en matière de production d’alcool. Jusqu’à présent elle est inexistante et l’importation
d’alcools consomme une partie importante des devises du pays. La sortie de l’informalité de ce
secteur pourrait permettre une promotion des alcools à base de vin de palme et de fruits et une
amélioration de leur qualité.
4. L’élevage de la volaille et du petit bétail
4.1
Elevages domestiques
Certains ménages élèvent des volailles et des caprins soit sur la cour de la maison soit en divagation dans leur quartier. Mais le phénomène de divagation des animaux n’est pas particulièrement
perceptible dans la ville d’Abomey. L’élevage dans les cours de maison ne peut être assimilé à un
système semi intensif car les acteurs n’aménagent pas d’habitat particulier pour les animaux. Ils
sont maintenus à la maison pour réduire les risques de vol, de perte ou d’accidents sur les routes.
Ces animaux sont généralement destinés aux occasions culturelles de fêtes ou de cérémonies rituelles. Il faut remarquer que l’élevage domestique permet de rentabiliser les restes d’aliments et
les rejets de cuisines (céréales infestés par les parasites, épluchures, son de maïs…). Longtemps,
l’élevage a été limité par le très faible nombre de points d’eau sur Abomey et Bohicon. Il n’y avait
déjà pas assez d’eau pour les hommes !
20
Ecocité- Document de travail n°6
4.2
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Elevage semi intensif de petit bétail
Les transects d’utilisation des terres nous ont permis d’identifier quelques sites d’élevage semi
intensif de volailles et de lapins. L’élevage de porcs a constitué une source importante de revenu à
Abomey mais aussi à Agbangnizoun avant la peste porcine. Les charcutiers de Porto-Novo et Adjarra venaient s’approvisionner à Abomey (le font-ils encore ?). Depuis la crise de la peste en
1995, la filière porcine a presque disparu de l’échiquier de la production animale à Abomey.
Néanmoins, de petites porcheries abritent les porcins qui sont élevés en claustration. Les acteurs
de cette filière se sont pour la plupart reconvertis dans la cuniculture. La taille, la fonction et
l’importance économique de ce système de production seront étudiées lors des étapes suivantes de
la présente recherche.
Un entretien avec un grand éleveur de porcs à Abomey ville nous a révélé qu’il engraisse les
porcs à Abomey ville mais garde les truies (Large White et Land race) et leurs suites dans sa
ferme à Detohou, ce qui limite les risques d’infection par la peste porcine. Les éleveurs viennent
de loin pour lui acheter des reproducteurs. Il combine l’élevage avec la gargoterie (tenue par sa
femme qui propose du civet de porc « han kpete »).
Une petite enquête a été réalisée au niveau d’une dizaine d’éleveurs dans chaque ville et permet
de classer par ordre d’importance la volaille avant les lapins et porcins. L’élevage semi-intensif
d’ovins et de caprins est presque inexistant. Les producteurs sont très souvent confrontés aux problèmes d’approvisionnement en produits vétérinaires pour lesquels ils sont doivent souvent se
déplacer vers Cotonou. La cuniculture exige aussi la provende produite par le CECURI dont le
seul point de vente semble être à Abomey-Calavi. Autrement, les éleveurs enquêtés
s’approvisionnent en matières premières disponibles sur place (tourteaux d’huilerie, farines de
maïs) pour alimenter leurs animaux. Les problèmes de voisinage ne semblent pas inquiéter ces
producteurs qui se débarrassent des excréments et restes d’aliments sur les tas d’ordures, sur les
parcelles vides ou pour ceux qui sont en zones périurbaines, sur les champs des agriculteurs. Les
plaintes des voisins relatives aux mauvaises odeurs et aux cris des animaux n’ont pas d’influence
particulière sur le mode de production.
21
Ecocité- Document de travail n°6
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Photo 2.2 : Elevage à la maison en ville de cochons métissés
22
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
4.3
ECOCITE
L’élevage de bovins
Traditionnellement, les gens du sud ne savent pas élever des bovins et les confient toujours à des
peuhls. L’élevage bovin se caractérise par quelques grands troupeaux, notamment à Djimè et
Djègbé appartenant à des familles nanties et des éleveurs plus petits qui possèdent quelques têtes.
A ces élevages d’autochtones (souvent des chefs de collectivités) s’ajoutent des élevages appartenant à des Fulani sédentarisés et quelques élevages de bouchers. Le repérage des parcs où les
animaux séjournent la nuit dans Abomey a permis d’identifier 26 parcs, dont certains en plein
centre ville, certains en proches périphéries et les autres en zones rurales vers Detohou. Cinq appartiennent à des éleveurs peuhls sedentarisés, un à des bouchers et le reste à des autochtones
souvent chefs de collectivités familiales (tableau 3.5).
Les bovins sont conduits au « pâturage » par des bouviers, et pâturent sur les bords de chemins ou
les zones incultes. Il se fait aussi sur les terres incultes des zones périurbaines (Adandokpodji).
Les races utilisées sont souvent des croisements de race lagunaire et borgou afin d’assurer une
certaine trypanotolérance.
Carte 3.2: Les parcs de bovins d’Abomey
Source : ECOCITE
23
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Tableau 3.5 : Données sur quelques éleveurs de bovins à Abomey
N°
Remarque
Taille
Position parc
Zone actuelle de pâturage
(saison sèche)
T1
Autochtone
120
Hountondji
Cana
T2
Autochtone
40
T3
Autochtone
40
T4
Autochtone
20
T5
Autochtone
70
T6
Autochtone
40
T7
Autochtone
100
T8
Autochtone
15
T9
Autochtone
100
T10
Autochtone
30
T11
Autochtone
80
T12
Autochtone
50
T13
Autochtone
60
T14
Autochtone
40
T25
Autochtone
20
Agblomè
T26
Autochtone
30
Sèhoun
T15
Eleveur Peulh
30
Détohou
T16
Eleveur Peulh
60
T17
Boucher
50
T18
Autochtone
40
T19
Autochtone
80
T20
Autochtone
120
T21
Autochtone
120
T22
Eleveurs Peulh
>400
T23
>400
T24
>400
Agnagna
Abomey et périphéries : alentours du palais royal, Zassa,
Agblomè-Lévi,
interstices
entre Adandokpodji et Sota,
vers Sèhoun, Sonou, Gnassata, Tognizali, guéguézougou.
Eau : puits, citernes ou SBEE.
Zounzonmè
Djègbé
Gbèkon-Hounli
Kinta
Passagon
Agbangnizoun
24
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
5.
ECOCITE
Les transformations agro-alimentaires et les spécialités de pays
Le fort développement des transformations agro-alimentaires s’explique par trois facteurs :
o la maîtrise par beaucoup de femmes Fon d’une gamme de transformations,
o la réduction des sources de revenu agricoles, l’absence de capital pour faire du commerce,
et donc la reconversion vers les transformations et
o la demande soutenue en certains produits (huiles rouges, alcool), demande qui ne se limite
pas à la zone.
Les transformations les plus courantes sont :
o Celles à base du maïs, aliment de base, mais qui n’est presque plus produit localement.
Ces transformations sont nombreuses, essentiellement destinées à la consommation dans
la zone de production. Combien de vendeuses de lio et gowé sur le marché de Bohicon ou
d’Abomey ?
o Celles à base de noix de palme et palmistes, produites encore localement, en zones périurbaines et rurales, et la fabrication de savon,
o Celles à base de vin de palme, en zones périurbaines et rurales,
o Celles à base d’arachide, produites localement et complétées par des apports de la zone
des collines8
o Celles à base de néré et soja, qui ne sont pratiquement pas produits localement. La moutarde est une spécialité qui demande une assez grande technicité, et le partage du savoirfaire et des « places » pour sa commercialisation s’acquièrent difficilement.
De toutes ces transformations, seules celles du moutarde et lio sont spécifiques à AbomeyBohicon et le produit offert est bien différent du produit fabriqué au nord du Bénin.
En plus de ces activités traditionnelles, il y en a d’autres plus récentes comme le séchage des fruits
et leur conditionnement, l’apiculture et le conditionnement du miel, le conditionnement de sucreries à base d’arachide, qui concernent un petit nombre d’acteurs ciblant les marchés urbains aisés,
voire les marchés extérieurs.
Certaines activités artisanales sont basées aussi sur les ressources locales et plus ou moins spécifiques à la zone :
o Le tissage est une tradition développée par le royaume d’Abomey et qui fait vivre quelques centaines d’artisans locaux.
o La poterie se développe autour d’une terre argileuse à Oungbega au Nord d’Abomey. Les
femmes qui faisaient des jarres et des canaris diversifient un peu leur production.
6.
Questions pour le diagnostic des territoires et méthodes
Pourquoi n’observe t’on pas de développement de cultures liées aux nouveaux débouchés urbains
en périphérie ? Quelques hypothèses.
8
Mais les grandes spécialistes de cette transformation semblent être localisées en zone urbaine à Covè.
25
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Les marchés urbains drainent de nombreux produits vivriers mais qui viennent de zones plus éloignées : piments et poivrons des bas-fonds de Covè, tomates de la dépression et du plateau Adja,
légumes feuilles des bas-fonds d’Agbangnizoun, bois et charbon de Djidja-Agouna, etc. Pour ce
qui est des vivriers de base, le niveau de dégradation des terres autour de la ville empêche les producteurs de cultiver des espèces exigeantes (même le maïs est devenu une culture de champ de
case) et d’avoir un rendement intéressant qui permettrait à la zone de concurrencer des grandes
zones de production éloignées. Jusqu’à présent, il semble y avoir peu de créneaux sur lesquels les
producteurs bénéficieraient d’avantages comparatifs du fait de leur proximité du marché.
L’agriculture et le maraîchage se heurtent à des contraintes majeures de fertilité et d’eau respectivement qui limitent leur capacité de réponse à la croissance du marché urbain ; le suivi de maraîchers ayant un accès potentiel à l’eau et le suivi de producteurs ayant un accès potentiel à des
sources de fertilité bon marché serait néanmoins intéressant dans le cadre du diagnostic.
Les grands et moyens planteurs sont en nombre limité vu le morcellement des exploitations et
leurs intérêts contredisent ceux des producteurs de vivriers de subsistance. L’absence d’eau limite
l’extension de vergers. De plus, la consommation de fruits des habitants reste faible (habitudes
alimentaires). La production locale de bois de feu en zone périurbaine n’est pas négligeable et
devrait s’amplifier
Y a t-il des différences selon les directions ou au contraire une forte homogénéité ? A priori la
bordure Sud (Saclo) devrait être plus fertile que la bordure Ouest (Agbangnizoun) ou Est (Za
Kpota).
L’élevage a un bon potentiel de développement, tant les porcins, les volailles, lapins et aulacodes,
que les bovins, mais est limité par les sources d’alimentation puisque l’agriculture produit peu
d’aliments de bétail et fourrages locaux pour l’instant. L’intégration de l’agriculture et de
l’élevage est encore faible bien que la recherche agronomique mette au point des technologies en
ce sens.
Les transformatrices d’huile d’arachide et de palme ont saisi depuis longtemps les opportunités
qui s’offraient à elles. La péri urbanité constitue-t-elle un avantage pour la mise en marché de ces
produits ? Ou ces transformatrices ont-elles plus facilement accès aux nouveaux matériels et savoir-faire ?
Nous ne savons rien des changements dans les modes de consommation alimentaires qui s’opèrent
dans les deux villes et leur ceinture et qui pourraient influencer la demande en produits.
26
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
IV. PRODUCTION VEGETALE PÉRIURBAINE ET URBAINE AUTOUR
D’ABOMEY ET DE BOHICON
Rigobert TOSSOU et Ramanou ABOUDOU
Durant le diagnostic des territoire, les travaux ont été menés à Détohoun (commune d’Abomey,
arrondissement rural de Détohoun, localisé sur le bord du socle cristallin), à Sodohomè (commune
de Bohicon, arrondissement rural de Sodohomè, sur terres de barre), à Kpassagon (commune de
Bohicon, arrondissement de Kpassagon, sur terres de barre) et à Dan-Tota (commune de Djidja,
arrondissement de Dan, au Nord de Bohicon, sur le bord du socle cristallin). Les distances respectives de ces villages par rapport à l’agglomération urbaine peuvent être estimées à 7 km pour Détohoun-Abomey, Sodohomè-Bohicon centre, 8-10 km pour Bohicon-Kpassagon et une quinzaine
de kilomètres pour Bohicon à Dan-Tota.
L’hypothèse a en effet été faite que les systèmes de production autour de la ville sont influencé par la ville et par les types de sol.
Carte 4.1 : Localisation des villages et fermes étudiés
Autour d’Abomey-Bohicon, les terres de plateau qui occupent la très grande partie des superficies
cultivables sont des sols ferrallitiques fortement insaturés appelés communément terres de barre,
le plateau est posé sur le vieux socle cristallin sur lequel se développent des sols ferrugineux et
27
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
hydromorphes rajeunis par l’érosion, et l’ensemble est parcouru par deux grands fleuves Nord
Sud, le Couffo à l’Ouest et le Zou à l’Est au bord desquels se développent des sols alluviaux hydromorphes. Pour ajouter quelques brèves caractéristiques, sur les plateaux de terres de barres, la
nappe phréatique est à grande profondeur et il n’y pas de petits cours d’eau, tandis que sur le socle
dont le relief est ondulé, on trouvera des petits cours d’eau souvent temporaires et des bas-fonds.
Les sols du socle sont souvent plus riches mais sensibles au tassement et à l’érosion.
1.
Principales caractéristiques des systèmes de production de plein
champ
Les enquêtes réalisées auprès de quelques producteurs de Détohou (Ouest d’Abomey) et de Sodohomè (Est de Bohicon) qui sont considérés comme des «greniers» d’Abomey et, respectivement,
de Bohicon ainsi que ceux de Kpassagon et Dan-Tota ont révélé que les activités agricoles sont les
principales, pour ne pas dire les seules formes d'utilisation des terres dans ces localités périurbaines. Les populations, majoritairement paysannes, développent une agriculture aux multiples spéculations fondée essentiellement sur la production des biens de consommation locale.
En effet, dans les années 1990, les principales cultures étaient le maïs, le niébé, l'arachide,
le manioc et les légumineuses. Elles représentaient respectivement 60% du total des productions
pour le maïs, 20 à 40% pour les autres productions à l’exception des légumineuses dont les proportions avoisinaient 10%. L'arachide et le coton étaient les deux cultures « industrielles » des
dites localités avec respectivement 20 et 40% des productions. Or l’arachide est transformée localement.
De nos jours, l'agriculture demeure la principale source de survie et de revenus des populations. Ainsi, aujourd’hui, 70% des paysans cultivent le maïs et l'arachide ; 60% le niébé ; 30% le
manioc et le coton ; 20% le piment ; 10% le gombo et 5% les légumes.
1.1
Expansion des superficies cultivées
Les superficies emblavées ont doublé en l'espace de 10 ans à Détohou et Dan-Tota, mais
elles ont plutôt nettement régressé à Sodohomè en raison de la forte croissance de Bohicon induite
par les lotissements. Ces évolutions contredisent un peu la vision du plateau d’Abomey comme un
terroir où la production ne peut plus évoluer. Les raisons qui expliquent l’évolution de ces surfaces cultivées sont diverses. Il s’agit de :
o la pression démographique qui accroît de plus en plus les besoins alimentaires des populations ;
o l’importance que revêtent certaines cultures comme le maïs, le niébé et le manioc dans
l’alimentation et les revenus immédiats que leur procurent d’autres tels que le coton,
l’arachide, le niébé et même le maïs ;
o enfin, la qualité de l’encadrement des agents du CARDER qui leur fait maîtriser certaines
techniques culturales et percevoir les intérêts des activités agricoles.
Les paysans ont souligné la disponibilité des terres à Détohou et Kpassagon et leur rareté à Sodohomé et Dan-Tota. Les champs sont situés, en moyenne, à entre 2 et 6 km des habitations et les
terres sont différemment acquises.
28
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Du point de vue de l’évolution des cultures, on constate que les productions du maïs sont en augmentation, celles du coton sont en régression 9, alors qu’il y a stabilité au niveau des légumes et de
l’arachide. Les évolutions du manioc et du niébé diffèrent d’un site à l’autre.
Tableau 4.1 : Evolution de l’utilisation des terres dans le village de Sodohomè
Il y a 10 ans
Maïs
Aujourd’hui (2003)
6%
40%
Arachide
34%
30%
Niébé
11%
10%
3%
10%
46%
10%
Marginal
Marginal
100%
100%
Manioc
Coton
Sorgho
Total
Source : ECRIS, Février 2003-02-27
Il subsiste par ailleurs une agriculture urbaine dans Abomey avec la culture du maïs et pois
d’angole de case autour des collectivités, souvent sur les tas d’ordures de maison. Ajoutons aussi
la mise en culture des terres des palais royaux (quelques centaines d’hectare). La fonction de cette
agriculture d’autoconsommation n’a pu être bien évaluée.
Les moyens de production
Les moyens utilisés par les paysans restent rudimentaires. Dans 92% des cas, ils utilisent
la houe, le coupe-coupe et la daba ; 8% des paysans utilisent les bêtes de trait alors que le tracteur
est utilisé par un seul agriculteur en la personne de Monseigneur.
Tableau 4.2 : Importance de l’utilisation des produits chimiques sur les différentes cultures
Cultures
Maïs
Paysans utilisant l’engrais Paysans utilisant l’insecticide
(%)
(%)
60
-
Niébé
-
70
Arachide
-
-
Manioc
-
-
Coton
100
100
Piment
20
-
Gombo
30
40
Légumes
20
-
Source : Enquêtes de terrain
9
Les difficultés enregistrées ces dernières années dans la production cotonnière, le non paiement des revenus de coton
à temps sont selon les paysans les raisons qui les ont poussés progressivement à abandonner le coton au profit du
maïs qui est facilement vendu sur le marché.
29
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Dans le même temps, 92% des producteurs, notamment ceux du coton, bénéficient des
crédits en nature (engrais et pesticides) et 20% de crédits en espèces dans les institutions comme
le PAPME, le CARDER pour les crédits vivriers et surtout la CLCAM. Les paysans ne remplissant pas les conditions d’obtention des crédits, généralement des producteurs pauvres, se débrouillent pour entretenir leurs champs et n’utilisent pas les engrais pour toutes les cultures qui le nécessitent. Le tableau 2.2 indique la proportion des paysans utilisant les produits chimiques pour différentes cultures :
On note au sujet de l’utilisation des intrants, une faible utilisation des engrais et une forte utilisation des pesticides surtout sur le niébé et les gombos. Cela constitue de graves problèmes à la santé des populations d’autant que les pesticides adaptés à la culture légumière ne semblent pas disponibles et seraient donc remplacés par les pesticides destinés au coton.
Quelques producteurs parviennent à négocier l’accès aux coques de coton en provenance
des huileries et les incorporent dans les billons. Néanmoins, il s’agit encore d’un phénomène sporadique.
1.2
Objectifs de production, commercialisation et consommation
Détohoun, zone périurbaine d’Abomey
Contrairement à l’hypothèse d’une agriculture de subsistance combinée à des activités génératrices de revenu en milieu urbain, les producteurs interrogés à Détohou ont déclaré que les cultures
produites sont commercialisées à au moins 50% comme le montre le tableau 2.3.
Tableau 4.3 : Destinations des productions entre commercialisation et consommation (cas de Détohou)
Cultures
Commercialisation
Consommation
Maïs
50
50
Niébé
60
40
Arachide
80
20
Manioc
80
20
Coton
100
00
Piment
80
20
Gombo
96
04
légumes
96
04
Source : Enquêtes de terrain
L’analyse du tableau 4.3 confirme que l’alimentation des populations est basée sur le
maïs, le niébé et le manioc (en période de soudure). Les marchés fréquentés sont surtout ceux de
Houndjro et de Bohicon ; les hommes s’y rendent à vélo alors que les femmes y vont à pied. Il
n’est pas rare que les petits commerçants d’Abomey viennent intercepter les producteurs de Détohou en cours de route pour leur acheter leurs marchandises. Les riches commerçantes eux, descendent jusqu’au village avec des bâchées ; 10% parmi elles avancent de l’argent aux producteurs
afin qu’ils leur garantissent les marchandises surtout le maïs.
30
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Sodohomè, zone périurbaine de Bohicon
Tableau 4.4 : Destination des productions agricoles de l’arrondissement de Sodohomè
Cultures
Proportion auto- Proportion
consommée
vendue
Maïs
Arachide
Niébé
Marché d’écoulement (% des ventes)
Bohicon
Houndjro
Cotonou
Sodohomè
63%
37%
73%
9%
9%
9%
0%
100%10
50%
25%
0%
25%
50%
50%
50%
25%
0%
25%
Le total sur marché d’ecoulement fait 100% alors que proportion vendu =50% a revoir
37% de la production de maïs, 100% de la production d’arachide et 50% de celle du niébé
sont commercialisés. La proportion vendue est essentiellement écoulée sur le marché de Bohicon
qui reçoit 73% du maïs, 50% de l’arachide et 50% du niébé. Le marché urbain de Houndjro et
celui rural de Sodohomè accueillent 9% du maïs (confère tableau 4.4). Cotonou, le marché le plus
lointain vient en dernière position et n’accueille également que 9% de la quantité de maïs vendue.
Il reste que Bohicon constitue un marché de transit tant pour les flux entrant extérieurs que les
vivriers provenant des localités environnantes. Une bonne partie de la production de Sodohomè
placée sur le marché de Bohicon est sans doute revendue sur celui de Cotonou. A cet effet, tenir
uniquement compte de la proportion de produits agricoles directement écoulée sur Cotonou telle
que déclarée par les paysans conduirait à une sous-estimation.
Signalons également qu’une partie de la production vendue à Sodohomè s’effectue à la
ferme. En effet, à partir du mois de Juin, les commerçants venant de Malanville vont dans les villages et font le porte-à-porte pour acheter les produits vivriers et surtout le maïs. Selon les
paysans, les prix offerts par ces derniers sont souvent plus élevés que pratiqués sur le marché de
Bohicon. De ce fait, certains n’hésitent pas à stocker leurs produits afin de saisir cette opportunité.
Les autres activités agricoles
Elles se résument à l'installation de plantations de tecks, d'anacardiers, de palmiers, d'orangers et
de manguiers. A titre d’exemple, le tableau 4.5 donne la proportion des paysans ayant des plantations dans l'arrondissement de Détohou.
Tableau 4.5 : Proportions des paysans ayant des plantations (cas de Détohou)
Plantations
Proportions (%)
Tecks
30
Anacardiers
30
Palmiers
10
Orangers
20
Manguiers
10
Source : Enquêtes de terrain
10
25% de cette proportion est vendue sous forme d’arachide « fo » c’est de l’arachide frais ???.
31
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Par rapport à l'implantation de ces vergers, contrairement à ce que l'on peut penser, les
palmeraies diminuent au profit des plantations de tecks et d'anacardiers qui jouent le double rôle
de diversification des sources de revenus et de stabilisation des terres.
Dans la zone de Sodohomè, ce sont surtout les agrumes qui sont installés.
2.
Opportunités et contraintes, et plus particulièrement celles liées à la
péri urbanité
Les principales cultures développées dans les périphéries d’Abomey et de Bohicon jouent un rôle
très important dans la vie des populations en ce sens qu’elles participent aussi bien à
l’alimentation, à la génération de revenus qu’à la création d’emplois.
Les principales opportunités qui existent pour l’agriculture dans les environs d’Abomey et de Bohicon sont l’existence de grands marchés pour l’écoulement des productions, la disponibilité de
terres dans certaines localités rurales ainsi que de la main d’œuvre. On voit même les grands
commerçants du Nord s’approvisionner directement chez les producteurs à Sodohomè pour
contourner le marché de Bohicon.
Quant aux contraintes, elles peuvent être résumées en cinq points essentiels. Il s’agit de :
o manque de financement ou d'accès aux crédits ;
o insuffisance de moyens pour développer l'attelage ;
o raretés saisonnières ou mauvaise répartition des pluies et ;
o ravage des semis par les rongeurs ; et
o l’insécurité foncière due à l’acquisition de plus en plus de terres par les urbains.
Il faut ajouter la difficulté à trouver de la main d’œuvre agricole dans certaines localités proches
de la ville où les jeunes ont d’autres opportunités (Sodohomè). La main d’œuvre prend alors souvent l’argent à l’avance et ne vient pas faire le travail, ce qui aurait occasionné pas moins de 200
conflits à Sodohomè en une année.
2.1
Problèmes fonciers
Il existe quatre modes d'acquisition des terres dans la périphérie d’Abomey et de Bohicon. Il s'agit
des modes d'acquisition par héritage, par achat, par prêt et par location.
Il y a 20 ans, les héritages et les prêts (quasi gratuits) de terres étaient les plus importants
et représentaient respectivement 60 et 20% de la totalité des terres cultivées. Quant aux modes
d'accès par achat et location, ils étaient faibles et représentaient chacun 10% des emblavures.
Aujourd'hui, les réalités que recouvrent ces modes d'acquisition des terres sont tout autres.
En effet, à Détohou, les héritages des terres ont complètement diminué de 40% passant de 60 à
20%. Les prêts et les locations ont connu de légères hausses de 4 et 6% passant respectivement de
20 à 24% et de 10 à 16%. Le mode d'acquisition par achat est d'actualité actuellement dans la région périurbaine dans la mesure où 40% de l'ensemble des emblavures sont sur terres achetées
contre 20% il y a 10 ans. Les paysans pensent que dans un futur proche, les terres cultivées achetées ainsi que celles prêtées augmenteraient encore de 6% en moyenne alors que celles cultivées
héritées chuteraient dans les mêmes proportions.
Ces évolutions des modes d'acquisition des terres s'expliquent par le simple fait que beaucoup d'étrangers citadins en provenance surtout d'Abomey viennent acheter les terres et, dans
l'impossibilité de les mettre immédiatement en valeur, les louent ou les prêtent aux paysans. Cette
situation fait diminuer la proportion des terres cultivées héritées au profit des autres notamment
32
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
achetées. On observe par exemple des achats de fermes à Détohou mais aussi à l’Est de la route
inter état à hauteur de Dan (sur le socle cristallin).
Certains acheteurs mettent leurs terres en valeur eux-mêmes et installent des plantations et
des élevages, préparant ainsi leur retraite.
En zone proche de Bohicon (Sodohomè), le lotissement a entraîné la chute des superficies
cultivables qui sont passées de 75% des superficies disponibles il y a 20 ans à 33% aujourd’hui.
Les producteurs vont mettre en valeur des terres beaucoup plus éloignées et partent alors dans
leurs fermes pour quelques jours avant de revenir au village.
Les conflits fonciers
Il sont fréquents et sont surtout liés à :
- des problèmes de délimitation ;
- l'ingratitude des paysans ayant bénéficié des prêts vis à vis des propriétaires ;
- des problèmes de non respect des engagements de location et
- la gestion des carrières (Dan-Tota et Djidja).
Tous ces conflits sont souvent réglés auprès des institutions de l'administration moderne
en commençant par le niveau villageois jusqu'au niveau départemental.
2.2
Aptitudes et disponibilité des terres
Les paysans reconnaissent à l'unanimité l'appauvrissement continu des terres cultivées et
leur entière disponibilité à Détohou et Kpassagon. Quant à Dan-Tota et Sodohomè, la proportion
des terres cultivables a considérablement chuté en raison non seulement des lotissements mais
aussi les achats des parcelles par les citadins. Deux types de terre sont distingués à savoir les terres de barre dégradées et les terres de bas-fonds. Ces dernières représentent 10% du total des emblavures.
Du point de vue de la taille des exploitations, sur le socle (Détohoun, Dan-Tota), les producteurs estiment que 50% des agriculteurs possèdent entre 5 et 10 ha ; 30% moins de 5 ha et
20% plus de 10 ha. Malgré cette disponibilité des terres, des conflits fonciers subsistent par endroits.
L’évolution de la fertilité des terres provoque tout d’abord un mouvement d’éloignement
des champs cultivés, les terres proches du village étant déjà épuisées. C’est ce qui s’observe à Dan
Tota et à Sodohomè (où les producteurs vont jusqu’à Samionta sur le socle chercher des terres).
Mais ensuite, on peut observer le mouvement inverse, quand toutes les terres sont épuisées. Les
producteurs se rapprochent des zones cultivées pour profiter des ordures ménagères et des déchets
de coton (Kpassagon).
2.3
Problèmes environnementaux
Les mauvaises utilisations des pesticides qu’on observe actuellement dans la périphérie des villes
peuvent induire à terme des effets indésirables. Par ailleurs, la seule utilisation d’engrais minéral
sans apport de matière organique peut accélérer la perte de fertilité des sols.
Par contre, l’évolution continue des superficies allouées aux plantations de diverses espèces présente un double avantage. En effet, au-delà des revenus que cette activité procure aux producteurs,
elles peuvent contribuer à la stabilisation des sols et à l’équilibre environnemental. Néanmoins,
ces superficies ne compensent pas les réductions de superficies de jachère arbustives ou arborées
et si on en croit les problèmes de ruissellement qui affecte Bohicon et Abomey, la couverture végétale en amont n’est pas suffisante pour freiner l’eau et favoriser son infiltration.
33
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
2.4
ECOCITE
Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins en concertation
Deux enjeux principaux ont été identifiés : enjeu lié à l’accès à la terre et enjeu relatif à l’accès
aux intrants agricoles.
Enjeux liés à l'accès à la terre
Quand on aborde la problématique des modes d'accès à la terre, il s’avère que la mise en
valeur indirecte des terres limitera les investissements des paysans à cause de l'insécurité foncière
émanant des prêts ou locations des terres. Cette situation qui, incontestablement, ne réduirait ni le
nombre d'agriculteurs, ni les superficies emblavées, posera des problèmes d'intensification des
cultures. Par ailleurs, une partie non négligeable des terres est désormais achetée et mise en valeur
par des nouveaux acteurs, retraités de la fonction publique par exemple.
Enfin, le lotissement repousse l’agriculture dans des zones éloignées des agglomérations.
Les producteurs installent à nouveau des campements agricoles pour s’éviter des va et vient.
Deux groupes stratégiques se dégagent par rapport à l'accès à la terre: les utilisateurs des
terres que sont les agriculteurs et les propriétaires ; on se demande à ce niveau si on ne risque pas
d'évoluer vers un métayage.
Il ne semble pas y avoir de remise en cause globale des ventes de terre par les descendants
des anciens propriétaires ayant vendu leur patrimoine, comme cela s’observe couramment autour
de l’agglomération de Cotonou. Néanmoins le phénomène de vente de terres sera à observer pour
identifier les nouveaux propriétaires et les usages qu’ils font de ces terres d’une part, les producteurs qui vont se retrouver prochainement « sans terre » et leurs stratégies de survie d’autre part.
Enjeux liés à l'accès aux intrants
En ce qui concerne l'utilisation des engrais, on est en présence de trois groupes stratégiques : le premier est celui des paysans responsables des GV (…) ? qui bénéficient de beaucoup de
facilités d'accès aux intrants chimiques. Le second lui concerne les paysans producteurs de coton
et membres des GV qui eux, bénéficient à volonté des intrants et le troisième groupe qui prend en
compte les paysans producteurs de vivriers et non membres de GV. La subordination de l’accès
aux engrais à la culture du coton est assez défavorable, d’une part parce que le coton n’est pas très
rentable dans la zone, d’autre part parce que les engrais coton n’ont une composition adaptée ni
aux terres de barre, ni aux principales cultures vivrières.
Par rapport à la problématique d'accès aux crédits en nature, on se demande quelle est
l'effectivité d'accès à ces produits pour les deux premiers et quelles stratégies doivent mener les
derniers pour avoir le maximum d'intrants pour leurs exploitations? Un cadre de concertation doit
pouvoir réunir ces trois groupes stratégiques avec d’autres comme les membres des organisations
paysannes, les agents d’encadrement du CARDER, les ONGs intervenant dans le domaine agricole ainsi que les élus locaux afin d’asseoir une véritable politique de développement agricole qui
n’exclut aucun acteur important.
2.5 Thèmes de recherche pour Ecocité et autres acteurs
On voit donc se profiler des changements importants et contradictoires dans les systèmes de production :
- mise en valeur extensive due à l’absence de sécurité foncière dans des zones où les transactions foncières se multiplient,
- mais aussi développement d’agriculture intensive utilisant les sous-produits des usines
d’égrenage et les ordures ménagères,
34
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
-
-
ECOCITE
mise en valeur de zones éloignées des agglomérations par les producteurs « chassés » par
le lotissement, et déplacement en quelque sorte de la zone périurbaine à quelques dizaines
de kilomètres de la ville
mais, semble-t-il, pas de modification majeure des choix de production et techniques agricoles.
3. Maraîchage
3.1
Principales caractéristiques
L’eau étant un facteur très rare dans la zone, le maraîchage est limité tant en zones urbaines que
périurbaines.
En zone urbaine, on trouve du maraîchage pluvial sur des espaces de palais royaux à Abomey. Les
cultivateurs louent des terres aux chefs de collectivités royales pour y installer du gombo. Le seul
maraîcher identifié permanent est installé sur un site de la gare de Bohicon et a accès à l’eau en
permanence avec une pompe Naguézé.
En zone périurbaine, il faut atteindre des cours d’eau pour voir des maraîchers. Les bords du
Couffo, à l’Ouest, sont intensivement mis en culture par des producteurs Adja descendus du plateau et intégrant leur savoir-faire en matière de culture de tomates. On y voit des cultures intensives de tomate à assez grande échelle avec des pompes et systèmes d’irrigation. A Dan-Tota aussi,
au Nord, les cours d’eau constituaient des lieux traditionnels de maraîchage mais à petite échelle
et surtout pratiqué par les jeunes filles. Les migrations vers la Côte d’Ivoire s’étant ralenties, on
voit apparaître en ce moment des maraîchers spécialisés (tomates, piments, gombo, légumes feuilles). Leurs produits sont évacués directement vers Cotonou car les producteurs trouvent que la
commercialisation sur Bohicon ne serait pas intéressante.
Par contre les cours et points d’eau du sud et sud–est de Bohicon ne sont pas valorisés par le maraîchage. Même les forages artésiens dont l’eau coule en permanence ne constituent pas des sites
de production. Quant aux cours d’eau, ils sont surtout des sites de palmeraies.
3.2
Opportunités et contraintes, et plus particulièrement celles liées à la périurbanité
Le marché local de Bohicon et Abomey n’est pas approvisionné en toute saison par les producteurs des environs. En saison sèche, le marché est approvisionné par des arrivées de Malanville et
Cotonou/Nigeria !
35
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
V.
ECOCITE
PETIT ÉLEVAGE URBAIN ET PÉRIURBAIN A ABOMEY ET BOHICON
par Peggy TOHINLO
1.
Principales caractéristiques
Les caractéristiques générales du petit élevage en milieu urbain
Les élevages visités présentent les caractéristiques suivantes :
o la localisation des unités de production dans les habitations qui sont au centre ville ;
o la mauvaise gestion des déchets (rejet sur les dépotoirs sauvages ou devant les maisons) ;
o les plaintes des voisins par rapport aux odeurs puantes des déchets d’élevage et la non réaction des éleveurs ;
o la perspective de déplacement des élevages dans les périphéries moins urbaines pour non
seulement agrandir les cheptels mais aussi pour résoudre les problèmes de voisinage ;
o une tendance d’adoption de l’élevage semi intensif en ville, quelque soit les espèces du
petit bétail considérées; la dominance du mode d’élevage dit « en divagation » dans les
villages
o une tendance à la diversification des espèces d’élevage chez les éleveurs ;
o une tendance à l’intégration de la production végétale à l’élevage ;
o une tendance à une organisation des éleveurs.
Les caractéristiques actuelles, le dynamisme et la relative diversité des élevages rencontrés en
milieu urbain s’expliquent par l’histoire récente (tableau 5.1)
Tableau 5.1 : Historique de l’élevage du petit bétail
Période
Evénements majeurs
Causes
Conséquences
Jusqu’aux
années 80
Prédominance de l’élevage Elevage considéré comme activité secondaire
extensif (divagation des animaux)
Non développement de l’élevage
1980-1985
Début de l’élevage en claustra- Introduction des coqs de race par le projet intégré du Début d’intensification de l’élevage
tion (semi-enclos)
Zou
1985-1990
Premières expériences d’élevage Installation des néo-ruraux (intellectuels admis à la Une spécialisation en élevage, introduction des races
semi-intensif (pondeuses, porcs retraite) avec le projet PISEA
importées pour diverses espèces animales dans les
locaux/ métisses)
élevages
1990-1995
Premières expériences d’élevage Promotion de ce type d’élevage par les Projets et Diversification des animaux d’élevage
non conventionnel (escargots, ONG (CECURI, PISEA, etc.)
l’installation de plusieurs cuniculteurs
aulacodes, lapins)
1996-1998
Peste porcine africaine (PPA)
1998-1999
Boum de la cuniculture
avec
Abattage des porcs ; création de l’ANEP et de ses
démembrements (CVE, Sous-section et Sections) ;
réduction de l’élevage des races locales au détriment
de celles métissées et importées avec un développement du système semi intensif
Déception des anciens éleveurs de porcs avec les Installation d’au moins 49 cuniculteurs pour Abodégâts de la PPA
mey- Bohicon dont le nombre est passé à au 70 en
2002
Politique de vulgarisation et de subvention de la
cuniculture adoptée par la coopération CECURIADRAÏ (actuel LOUVAIN développement)
36
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
On traitera successivement des caractéristiques de l’élevage urbain conventionnel et non conventionnel.
2.
Les systèmes de production de l’élevage urbain « conventionnel »
Les espèces considérées sont la volaille (poules, pintades, canards, dindes), les petits ruminants
(caprins et ovin) et les porcins.
Les systèmes d’élevage des villes d’Abomey-Bohicon se différencient en élevage familial et élevage commercial. Pendant que l’élevage commercial (objet principal de ce rapport) est à but lucratif avec deux variantes que sont les types intensif et semi- intensif, l’élevage familial n’est pas
destiné à la vente et se résume au type traditionnel en divagation ou en semi-liberté dans la cour
de la maison. Selon les éleveurs, il existe quatre différents types de système d’élevage commercial
auxquels s’ajoute type traditionnel en divagation. Les systèmes d’élevage semi-intensif et/ou intensif adoptés varient d’un individu à un autre compte tenu de l’origine des animaux, de leur
mode d’alimentation, de la diversification/ spécialisation de l’élevage, de l’intégration/ou non de
la production végétale, du mode de gestion des déchets d’élevage, … (cf. tableau 2.7).
Les volailles constituent le point de départ de tous les systèmes de production animale. Les élevages intensifs se sont soit spécialisés dans la filière volaille soit en sont sortis pour se spécialiser
dans le porc ou le lapin pendant que la volaille reste associée à différentes espèces (porcs, caprins/
ovins, lapins,…) dans les systèmes semi- intensifs. Abomey et Bohicon comptent au total 7 élevages modernes de types intensifs dont 6 spécialisés dans la volaille (filière pondeuse) et un seul en
porcins.
2.1.
Aviculture
Ces éleveurs de pondeuses ont un cheptel qui varie de 1000 à 3000 têtes. L’élevage de 3000 pondeuses visité produit au moins 100 plateaux d’œufs par jour à raison de 1600 FCFA le plateau. La
demande est si forte qu’il ne parvient pas à la satisfaire à tout moment. Les acheteurs sont obligés
de passer des commandes des jours à l’avance. Seulement 20% de cette production alimente le
marché de consommation des deux communes (Abomey-Bohicon). Selon l’enquêté, le niveau
actuel de la production des œufs de l’ensemble des aviculteurs des deux villes est largement en
dessous de la demande sur le marché de consommation de telle sorte qu’il envisage de déménager
son cheptel du centre de la ville de Bohicon en fin 2003 pour sa ferme à Cana afin de l’élargir à
30.000 pondeuses. Il a aussi en perspective la diversification de son centre d’élevage en introduisant la cuniculture, l’aulacodiculture, l’élevage porcin et l’élevage des caprins/ ovins. N’ayant pas
d’électricité sur la ferme, l’éleveur envisage prendre contact avec le projet Songhaï pour la production de biogaz comme source d’énergie à partir des fèces d’animaux qui pour le moment forment un immense tas devant son centre. Signalons que cet éleveur n’envisage point de se lancer
dans la production végétale malgré l’ambition d’installation d’une ferme d’élevage ; il préfère
acheter les matières premières pour alimenter ces animaux au lieu de les produire car leur production, selon lui, lui reviendrait trop cher.
La principale difficulté de ces éleveurs (importateurs) de poussins est la non disponibilité à tout
moment sur les marchés nationaux des produits vétérinaires. Pour minimiser cette contrainte,
beaucoup d’éleveurs ont choisi l’option de poussins métis en croisant les coqs importés (d’Europe
ou du Sahel) avec les poules locales. Ces élevages semi intensifs se sont spécialisés dans la vente
des poules et coqs avec l’installation de couveuse artisanale.
37
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Tableau 5.2 : Typologie des systèmes d’élevage en milieu urbain
Intégration à l’agriculture
Pas de production végétale
Mode de gestion des déchets
Rejet des déchets ou parfois vente aux
producteurs agricoles
Production de manioc, de maïs, du soja pour nourrir les Utilisation des déchets pour fertilisation des
animaux et pour la consommation
terres
Non intégré à la production végétale
Aucune
Pas vraiment
Aucune
2.2
Elevage de porcs
Beaucoup d’aviculteurs ont associé à la volaille l’élevage de porcs avec des porcs métis dont ils
sont aujourd’hui les spécialistes. Par conséquent, l’élevage porcin est en plein développement
depuis l’avènement de la PPA. Les éleveurs de porcs jugent cette production plus rémunératrice
que celle de la volaille et ils ont bénéficié des incitations et appuis après la peste porcine. Il y aurait 47 éleveurs semi intensifs à Abomey, organisés en groupement coopératif. De nouveaux éleveurs apparaissent parmi les diplômés sans emploi et retraités.
Ceux qui manquent de place en ville envisagent de se déplacer en milieu périurbain et, en attendant, pratiquent le système de confiage avec partage des porcelets.
Le marché de consommation interne n’est pas négligeable car culturellement le porc est utilisé
pendant les cérémonies funéraires lors du « nu kan gnan gni honton ton ». On note aussi la création de nombreux points de vente de viande par des charcutiers dans la ville d’Abomey. La vente
des animaux s’effectue dans les maisons avec des pisteurs sur le marché. On voit également le
développement de l’intégration entre élevage et gargotes et un intérêt poindre pour la transformation en charcuterie. Néanmoins, une grande quantité de la production est écoulée vers les régions
de Porto-Novo, ce qui constitue un risque pour les producteurs qui pourraient se voir à l’avenir
concurrencer par des producteurs plus proches de Porto-Novo.
2.3
Elevage d’ovins et caprins
Au nombre des animaux d’élevage conventionnel, seuls les caprins et les ovins n’ont pas fait
l’objet d’une spécialisation ni d’une production intensive ou semi intensive malgré leur importance culturelle. Seuls les systèmes en divagation (en enclos la nuit ou pendant les saisons pluvieuses et en divagation le jour ou en saisons sèches) ont été rencontrés. Les animaux sont rentrés
en raison des vols. Les autochtones élèvent les caprins essentiellement et les Fulani ont des troupeaux d’ovins. La principale raison de cette non spécialisation des éleveurs en production de caprins/ ovins est la faible rentabilité économique de cette filière (espèce peu prolifique, durée de
croissance longue, faible prix de vente).
2.4
Matières premières et sources d’approvisionnement
Pour faciliter l’approvisionnement en intrants, les producteurs se sont organisés soit en groupement coopératif ou en association où l’adoption du système semi intensif ou intensif est le principal critère d’adhésion. Ainsi, il existe aujourd’hui dans chacune des deux villes un groupement
d’éleveurs de porcs et une section ANEP. Une association des aviculteurs d’Abomey et de Bohicon a été créée depuis bientôt 8 mois. Toutefois, ces organisations d’éleveurs n’ont aucune perspective de gestion des déchets.
38
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Tableau 5.3 : Données sur quelques éleveurs de petits bétails à Abomey et Bohicon
Localisation
Animaux élevés
(stock actuel)
Destinations de la
production
Type et Zone provenance
clients
Type
d’intrants
d’approvisionnement
lieux
Déchets et problèmes de voisinage
Stratégies adoptées ou envisagées
Vidolé
90 porcins
Vente sur pied
Particuliers, éleveurs et
charcutiers
Abomey,
Bohicon et environs
Lapins : herbe et provende produits avec
MP locales Bohicon et environs Porcins : tourteaux palmiste, farine de maïs,
son de blé de Bohicon SHB, meuniers.
Produits vétérinaires : cotonou
Excréments et restes d’aliments :
tas d’ordures
Aucune
40 lapins
et
Mauvaises odeurs
Gbèkon-Hounli
100 poulets
Vente sur pied
Particuliers et commerçants Abomey-Bohicon et
environs
Provende avec MP locales et produits
vétérinaires de Cotonou
Excréments : tas d’ordures ou
champs agriculteurs
Aucune
Gbèkon-Hounli
600 pondeuses
Vente sur pied
Particuliers et commerçants d’Abomey et environs
Provende avec tourteaux coton (SHB),
soin de soja (Fludor), son de maïs (maïserie)
Excréments :
champs
les
Aucune
100 poulets locaux
Jeter
dans
Produits vétérinaires : Cotonou
25 canards
20 pigeons
Goho
308 lapins
Vente sur pied
Eleveurs, particuliers et
commerçants d’Abomey,
Bohicon, Dassa, Cotonou
Provende CECURI (Cotonou), branches
de palmiers et produits vétérinaires
(Cotonou)
Excréments et restes d’aliments
jeter dans les champs
Aucune
Zakpo
343 lapins
Vente sur
pied,
vente après abattage, vente après
transformation
Particuliers, éleveurs et
charcutiers de Bohicon et
environ
Lapins : provende CECURI
Crottes de lapins offertes aux
agriculteurs ou jetées dans la
brousse
Aucune
Vente sur pied
Particuliers, éleveurs et
charcutiers de Bohicon et
environ
30 porcins
Adamè Ahito
31 porcins
Porcs : tourteaux de palmiste, farine de
maïs, son de blé de SHB et meuniers ;
produits vétérinaires de Cotonou
tourteaux palmiste, farine de maïs, son
de blé de meuniers Bohicon .
Produits vétérinaires : cotonou
Mauvaises odeurs
Excréments stockés et jetés sur
parcelles vides ou offerts aux
maraîchers
Aucune
Mauvaises odeurs
39
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
Hézonho
900 poulets
Vente sur pied
Particuliers et éleveurs de
Bohicon et environ
Provende fabriquée avec matières premières locales achetées à Bohicon et
environ
Produits vétérinaires : Cotonou
Ouassaho
3000 poulets
Vente sur pied
Particuliers et éleveurs
Bohicon, Cotonou, Parakou Natitingou, Djougou
Provende fabriquée avec matières premières locales achetées à Bohicon et
environ
Produits vétérinaires : Cotonou
Lissèzoun
1000 poulets
Vente sur pied
Bohicon et environ, Cotonou
Provende fabriquée avec matières premières locales achetées à Bohicon et
environ
Produits vétérinaires : Cotonou
ECOCITE
Crottes offerts aux agriculteurs
pour enfumer leurs champs
Mauvaises odeurs nuisibles à la
santé humaine
Réflexion
en
cours
pour
recyclage
ou
traitement
Crottes et restes d’aliments non
consommés vendus à 400F/sac
aux agriculteurs mais écoulement difficile
Aucune
Crottes et restes d’aliments non
consommés offerts aux agriculteurs mais écoulement difficile
Aucune
Le bruits des poulets
Source : enquête monographique
40
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Les éleveurs semi intensifs rencontrés utilisent tous les mêmes matières premières et se ravitaillent sur le même marché (tableau 5.3).
Tableau 5.4: Matières premières des élevages semi-intensifs
Matières premières
Lieu d’approvisionnement
Tourteau de palmiste
Centre ville (Abomey- Bohicon), Sèhoun, Zounzonmè, Lissèzoun
Son de blé
Cotonou
Son de maïs
Maïzerie de Bohicon, les meuniers et vendeuses d’akassa
Cossette de manioc
Glazoué
Tourteau de graine de coton
SHB, Société Coporel à Bohicon
Farine de poisson
Société Coporel à Bohicon, Cotonou
Coquille
Société Coporel à Bohicon, Cotonou
Lysine
Société Coporel à Bohicon, Cotonou
Sel de cuisine
Marchés locaux
Soja
Champs périphériques, marchés locaux, Glazoué
La SHB exportent ses tourteaux sauf 10t consommés localement. L’utilisation de déchets industriels est coûteuse et les éleveurs cherchent à l’associer avec des maniocs ou à la transformation
in situ des palmistes.
2.4
Lieux d’écoulement des produits d’élevage
Tableau 5.4 : Marchés d’écoulement des produits d’élevage
Produits d’élevage
Prix
Lieux d’écoulement
Œufs
1600 fcfa/ plateau
Abomey, Bohicon, Covè, Cotonou, Dassa, Parakou, Tanguiéta
Poule réformée
2500- 3000 fcfa
Abomey, Bohicon, Covè, Cotonou, Dassa, Parakou, Tanguiéta
Poule métisse
1500- 2000 fcfa
Abomey, Bohicon, Cotonou
Poule locale
1000- 1500 fcfa
Abomey, Bohicon
Porcins
10.000- 25.000 fcfa
Abomey, Bohicon, Porto-Novo
Lapins
2500- 4000 fcfa
Abomey, Bohicon, Cotonou, Dassa
3.
Les systèmes de production de l’élevage urbain « non
conventionnel »
La cuniculture est le type d’élevage non conventionnel qui se développe le plus dans les communes d’Abomey et de Bohicon grâce à la politique de vulgarisation, de formation et de subvention
mise en place par le CECURI. A l’instar de l’élevage conventionnel, la cuniculture est soit intensive soit semi- intensive. 95% des cuniculteurs des deux villes adoptent le système semi-intensif
contre 5% pour le système intensif. La cuniculture familiale qui est faite de quelques têtes de lapins destinées à la consommation domestique n’est pas prise en compte par ses statistiques. Les
41
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
systèmes semi-intensifs, malgré leur spécialisation en production de lapins, associent parfois
d’autres élevages conventionnels (porcs, volailles, etc.) Ainsi, nous avons plusieurs systèmes
d’élevage de lapins qui peuvent se résumé en :
o Système intensif : spécialisation en lapin avec accouplement des lapines tous les 10 jours
après mise bas,
o Système semi- intensif : spécialisation en lapin avec accouplement des lapines tous les 35
jours après mise bas,
o Système semi intensif (accouplement 35 jours) : spécialisation lapin + porcs (métis en
semi intensif),
o Système semi intensif (accouplement 35 jours) : spécialisation lapin+ volailles (métisses
ou importées)
En dehors des lapins, il y a quelques élevages semi intensifs d’escargot à Abomey (une trentaine).
Mais l’aulacodiculture qui a été essayé dans les années 90 a presque disparu des centres
d’élevage.
4.
Les systèmes de production animale en milieu rural
Une étude approfondie a pu être menée à ce propos dans Sodohomè.
Le porcin, le caprin et la volaille constituent dans cet ordre les espèces les plus importantes élevées dans Sodohomè. L’élevage porcin n’est pas possible dans tous les villages en raison
d’interdits. Néanmoins, certains paysans contournent cet interdit en pratiquant l’élevage du porc et
en s’adonnant à son commerce en dehors de ces villages. Ceci dénote l’enjeu financier associé à
cette activité. Signalons que l’élevage du porc est essentiellement aux mains des hommes qui
constitueraient 80% des éleveurs11 . Ils détiennent les cheptels les plus nombreux. Ces animaux ont
une alimentation essentiellement à base de tourteaux de palmiste achetés dans la ville de Bohicon.
Les porcins causent des dégâts sur les cultures et sont à l’origine de conflits entre éleveurs et producteurs. La volaille est constituée à 80% de poulets, 15% de pintade et 5% de canards. La divagation est le mode d’élevage le plus répandu.
A l’instar du milieu urbain, on rencontre les modes intensifs et semi intensifs d’élevage qui cohabitent avec le système traditionnel de divagation. Les systèmes de production animale se présente
comme suit (tableau 5.5):
Tableau 5.5 : Typologie des systèmes d’élevage en milieu rural
Système
Habitat
Intensif
claustration totale Provende achetée et/ ou soins rigoureux
fabriquée
Oeufs (volailles), engrais- Race locale
sement
Race améliorée ou
Vente des petits et des métisse
adultes
Semi- intensif
Claustration semi Provende fabriquée et Moins rigoureux
ou totale
restes de cuisine
Vente des petits et des Race locale et /ou
adultes
métisse
Extensif
Inexistant,
piquet
Cérémonies,
tion, vente
11
Alimentation
Soins sanitaire
au Aucune (animaux laissés Aucun
à eux même)
Objectif de l’élevage
Origines des animaux
consomma- Race locale
Le cheptel porcin le plus important signalé dans le village de Sodohomè avoisinerait 200 têtes.
42
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
L’élevage porcin connaît un changement notable surtout après les effets dévastateurs de la peste
porcine africaine. Ce changement se traduit par une tendance à l’intensification ou à la semi- intensification de l’élevage au détriment du système en divagation. Ainsi, on dénombre parmi les
élevages de porcs respectivement 25% et 50% en systèmes intensif et semi intensif. Le système
traditionnel existe encore à hauteur de 25%.
4.1
Elevage de caprins
Cet élevage s’est développé à nouveau dans certains villages surtout après la peste porcine.
Les objectifs poursuivis par les éleveurs sont essentiellement la constitution d’une épargne sur
pied, plus rarement un revenu régulier (Kpassagon ou chez les femmes en ville), et pas seulement
un élevage pour les cérémonies (Abomey). L’écoulement se fait sur les marchés de Tindji12 ou
d’Abomey (Houndjro) où le prix est supérieur. On n’observe pas de changement dans les modes
d’élevage, pas d’intensification pour approvisionner le marché en période de cérémonie ni de
points de vente au détail de viandes cuites en ville qui permettrait d’écouler régulièrement des
quantités de viande. Le marché est contrôlé par une organisation des revendeurs de cabris qui
contrôlent la mise en marché à Houndjro.
4.2
Destination des produits d’élevage
L’élevage du porc répond essentiellement à une demande extérieure. La presque totalité de la production porcine de Sodohomè et de ses environs serait entièrement vendue à des acheteurs en provenance du département de l’Ouémé.
Les caprins sont également surtout vendus. A Sodohomè, 80% des caprins sont commercialisés
sur le marché de Tindji et le reste sur celui de Houndjro à Abomey. Les prix des caprins pratiqués
sur le marché de Houndjro serait nettement supérieur à ceux de Tindji. Découragés par la distance, les éleveurs de Sodohomè saisissent rarement cette opportunité et préfèrent écouler leur
production sur le marché le plus proche.
Même la volaille est plutôt commercialisée que consommée. Elle est entièrement écoulée sur le
marché de Bohicon qui offre des prix nettement avantageux par rapport aux autres marchés.
Les animaux élevés sont donc essentiellement commercialisés, mais pas tous dans les villes les
plus proches. Le tableau ci-après (5.6) résume les lieux d’écoulement.
Tableau 5.6: Destination des produits d’élevage de l’arrondissement de Sodohomè
Espèces
animales
Proportion
autoconsommée
Proportion
vendue
Marché d’écoulement
Bohicon
Tindji
Houndjro
Région de
Porto-Novo
Porcin
Marginale
100%
0%
0%
0%
100%
Caprin
Marginale
100%
0%
80%
20%
0%
Volaille
marginale
100%
100%
0%
0%
0%
12
Depuis la période des Rois d’Abomey, il est interdit de faire le commerce de cabris sur le marché de Bohicon.
43
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Compte tenu de ce qui précède, plusieurs critères peuvent être utilisés pour une typologie des exploitations animales en milieu rural :
o espèces élevées,
o niveau de diversification,
o niveau d’intensification,
o objectifs assignés à l’élevage,
o le niveau d’intégration entre agriculture et élevage.
5.
Les contraintes, opportunités et perspectives de l’élevage,
particulièrement celles liées à la péri urbanité
Les contraintes concernent :
o accès aux crédits ;
o accès à l’eau ;
o disponibilité des produits vétérinaires sur le marché local ;
o le vol et l’insécurité dans les villes ;
o la gestion des excréments en ville et les conflits de voisinage ;
o l’approvisionnement en provende à des coûts raisonnables en ville surtout.
5.1
Les opportunités du petit bétail
Les opportunités pour le développement de l’élevage et pour son intégration à l’agriculture sont
énormes. On peut retenir :
o l’existence du marché pour la plupart des produits d’élevage. Par exemple, les différentes
cérémonies organisées dans Abomey consomment des porcins « nu kan gnan gni honton
ton », des caprins et de la volaille ;
o l’existence d’un marché de consommation potentiel dès que le niveau de vie des populations va s’améliorer et le prix de la viande va diminuer. Pour l’instant, la viande reste un
produit de consommation exceptionnel (cérémonie, réception d’ « étrangers ») et non
usuel en raison de son coût, plus élevé que celui des produits de substitution tels que les
fretins, poissons fumés, etc. Elle pourrait entrer dans la composition des sauces, au moins
de façon hebdomadaire, si son coût diminue et si le revenu des habitants s’améliore ;
o la plupart des éleveurs intensifs disposent de vastes domaines non encore exploités ou peu
exploités qui pourraient permettre une agriculture intégrée à l’élevage ;
o disponibilité de ressources humaines pouvant s’investir dans le domaine ;
o création des syndicats d’éleveurs pour chaque espèce d’élevage.
Les revenus sont variables suivant les types d’élevage et leur ampleur. L’élevage porcin semble
être très rentable. A titre d’exemple, un éleveur de porc a encaissé 28.000.000 F pour 14.000.000
environ de dépenses.
44
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Ce type d’élevage utilise de la main d’œuvre locale (création d’emploi) et contribue à la formation
de jeunes éleveurs ou de jeunes techniciens d’élevage.
La quasi totalité des éleveurs ont démarré leurs activités sur fonds propres et font des prélèvements pour la vente. Certains éleveurs utilisent une partie des revenus soit pour améliorer les infrastructures ou pour diversifier leur élevage (cas de l’élevage intensif et des élevages de prestige/d’épargne en constitution). Cette activité semble générer des revenus dont une partie peut être
réinvestie.
En termes de perspectives on peut retenir :
o couplage production et transformation pour les grands éleveurs ;
o intégration élevage agriculture (de plus en plus d’éleveurs s’installent sur leurs propres
exploitations) ;
o spécialisation de l’élevage porcin soit en reproducteurs ou vers l’engraissement ;
o développement de l’élevage de lapin et multiplication des points de vente ;
o spécialisation (encore rare) de l’élevage bovin vers la production laitière.
Le lapin constitue un exemple de développement assisté d’une filière. En effet, les éleveurs bénéficient du soutien du CECURI pour leur approvisionnement en provende et l’écoulement de leurs
produits. Partie de rien, cette filière compte aujourd’hui plus de 70 éleveurs en ville (regroupés en
association). Les atouts de la filière sont la durée faible du cycle et le bon taux de croissance de
l’espèce.
Il reste des opportunités de commercialisation, non seulement via les gargotes locales, mais aussi
sur les marchés ou autres centres de vente en ville. Par ailleurs, pour l’instant cuirs et peaux ne
sont pas utilisés.
5.2
Problèmes environnementaux
Il faut noter qu’en dehors de quelques rares éleveurs intensifs qui valorisent les déjections
animales, la pratique n’est pas courante. Les nuisances de ces déjections animales constituent
l’essentiel des problèmes environnementaux que pose le petit élevage.
La nouvelle loi sur l’hygiène risque de provoquer quelques changements dans les élevages
urbains et périurbains et pourrait amener les éleveurs à mieux valoriser et éliminer les déchets et
effluents liquides des élevages. Rares sont les grands élevages qui ont des puisards ou des cuves
pour récupérer les lisiers et les évacuer. De grands tas de fientes et sciures constituent la devanture
d’élevages avicoles, alors que les producteurs voisins cultivent des terres dégradées et épuisées.
5.3
Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins en concertation
Parmi les enjeux, nous retiendrons, les enjeux liés
- au bon voisinage des éleveurs et des habitants en milieu habité,
- à la possibilité de s’approvisionner localement en aliments du bétail à faible coût,
- à la possibilité de conserver un contrôle des débouchés locaux et d’autres débouchés (Porto Novo pour le porc, divers centres de grande consommation pour les œufs et le lapin, Bohicon pour
les caprins d’Abomey, etc.),
45
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
- à la concurrence interne que peuvent se livrer les éleveurs ayant des systèmes d’élevage très
différents, ou au contraire à leurs complémentarités (production de géniteurs, de petits par les gros
intensifs par exemple).
Un paradoxe de l’élevage est de ne pouvoir mieux valoriser ses sous-produits, malgré la
présence de nombreux producteurs agricoles cultivant sur des terres très dégradées à une faible
distance. Une meilleure information sur la valeur des produits, des tests en milieu paysan et une
concertation entre agriculteurs et éleveurs devraient permettre de régler ce problème.
Un autre paradoxe est que les grandes industries agroalimentaires produisent de très grandes quantités de tourteaux et que ceux-ci sont essentiellement utilisés ailleurs, y compris à
l’exportation.
Un dernier paradoxe est la dépendance de l’élevage des sources d’aliments industriels ou
venant d’ailleurs, alors qu’une partie pourrait provenir de l’agriculture locale.
5.4
Questions de recherche pour Ecocité
Cette étude exploratoire a révélé que l’élevage porcin est en plein essor dans les communes d’Abomey et de Bohicon, mais elle n’a pu donner plus de détail sur la filière. Il nous semble
qu’il serait intéressant d’étudier et d’analyser cette filière porcine depuis la production jusqu’à la
consommation dans tous ses différents aspects. Ainsi nous retenons pour la recherche des thèmes
suivants :
- l’étude de la filière porcine dans Abomey et Bohicon,
- les alternatives de valorisation des déchets d’élevage en milieu urbain et périurbain,
- les forces et faiblesse du système de confiage du petit bétail en milieu urbain et péri- urbain,
- les possibilités d’intégration de la production végétale à l’élevage en milieu péri- urbain.
L’élevage du petit bétail est en pleine intensification dans les communes d’Abomey et de Bohicon
avec une très forte demande interne. Toutefois la faible valorisation des déchets d’élevage constitue un problème environnemental auquel les éleveurs n’ont pas trouvé d’issue.
46
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
VI. ELEVAGE BOVIN DANS LA ZONE URBAINE ET PÉRIURBAINE D’ABOMEY
Anne Floquet et Augustin Kouévi
Les travaux ont été menés à Abomey ville et à Lanta au bord du Couffo à la périphérie Ouest du
plateau sur la route Abomey-Azovè. La ville de Bohicon n’abrite pas d’élevage bovin.
1.
Caractéristiques de l’élevage urbain
1.1
Origine et développement de l’élevage
A Abomey traditionnellement, l’élevage bovin était constitué de bovins de race lagunaire qui
étaient attachés au pied de palmiers. L’introduction de grandes races et de pâturages en troupeau
serait assez récente et a été située à la période coloniale vers les années 30. Des commerçants fulani se seraient installés pour mieux pratiquer leurs activités commerciales et auraient crée le quartier Zongo puis auraient démarré un élevage. Des autochtones se seraient alors intéressés à cet
élevage des Fulani et auraient demandé à confier des animaux. Ce confiage n’aurait pas démarré
tout de suite pour raison de méfiance et incompréhension linguistique. C’est du temps du père de
notre interlocuteur, actuel chef des Fulani13 dans la ville, que la pratique s’est développée (années
50-60).
Puis des éleveurs ont commencé à venir du Nord en quête de travail et se sont faits recommander
par le père de l’intéressé aux autochtones en quête de bouviers. Aujourd’hui, c’est l’intéressé qui
joue ce rôle. Les bouviers arrivent du Niger, du Burkina, du Mali, du Nigeria.
En milieu rural influencé par la ville, en particulier le long du fleuve Couffo (à une trentaine de
kilomètres de la ville), ce sont également des urbains qui au départ sont à l’origine de l’élevage
Bovin. En effet, certains Fulani descendant avec des animaux en transhumance ont été sollicités
par des propriétaires fonciers intéressés par l’élevage. A Lanta, le long du Couffo sur la route
Abomey-Azovè, l’interrogé est arrivé dans les années 60 et a été sollicité par un Fon d’Abomey,
chef de collectivité, intéressé à investir dans l’élevage. Celui-ci a acheté un vaste domaine en bord
de rivière. Les terres de la zone n’étaient alors pas cultivées. Le Fulani s’est vu confier 12 têtes
puis le troupeau a crû.
Les cultivateurs Adjas qui se sont installés dans la zone s’intéressent depuis à cette activité et sollicitent le premier peuhl arrivé pour qu’il les aide à trouver des bouviers. Il est ainsi devenu
« gouverneur des peuhls ». Il y aurait aujourd’hui une vingtaine de collectivités Fulani dans
l’arrondissement de Lanta, qui pour certaines ont plusieurs bouviers.
La zone de pâturage est aujourd’hui très intensivement cultivée avec, entre autre, de la tomate de
contre-saison le long du Couffo et de ses affluents14 . L’intensification s’explique par la double
combinaison route goudronnée et eau. La tomate approvisionne les marchés d’Abomey et
d’Azovè. Ce développement rend le pâturage des animaux plus difficile, et l’accès à l’eau quasiimpossible. Même aux confins du plateau d’Abomey en bord de fleuve donc, la conurbation
13
Le grand-père du chef des Peuhls d’Abomey n’était pas venu pour le commerce mais comme interprète d’un prisonnier politique guinéen, Alpha Yaya, assigné à résidence à Abomey. Il venait lui même du Sénégal et parlait le français.
14
Le domaine foncier du propriétaire est aujourd’hui cultivé par près d’une centaine de cultivateurs qui lui en ont
demandé l’autorisation.
47
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
d’Abomey-Bohicon exerce une influence certaine en incitant les producteurs à exploiter intensivement les bas-fonds pour le maraîchage.
1.2
Typologie des élevages en milieu urbain et rural
Aujourd’hui en milieu urbain, les élevages se répartissent comme suit :
- 70% sont des troupeaux gérés par des bouviers salariés ne détenant pas d’animaux euxmêmes,
- 12% sont des troupeaux gérés par des bouviers qui se constituent un cheptel propre de quelques têtes en plus des troupeaux de leurs propriétaires
- 18% sont des troupeaux gérés par leurs propriétaires Fulani eux-mêmes.
La taille des troupeaux varie de quelques têtes à plusieurs centaines de têtes pour quelques grands
éleveurs peuhls. Le chef des Peuhls en a dénombré 24 de 15 à plus de 400 têtes, auxquels il faudra
sans doute ajouter des élevages de moins de 15 têtes.
A ces élevages, il faut ajouter les élevages des commerçants du parc à bétail qui engraissent une
partie des animaux qu’ils parviennent à acheter. Par exemple, un commerçant qui parvient à acheter 100 bêtes va en revendre 40 pour se reconstituer un capital et poursuivre ses achats, et en engraisser 60. Cette activité intéresse aussi beaucoup les Fulani de la localité mais ils sont limités
par le capital et en particulier, n’ont aucun accès au crédit des marchés financiers formels. De ce
fait seule une dizaine de commerçants parvient à pratiquer cette activité.
Les Fulani de Bohicon ne peuvent garder leurs animaux à Bohicon, qui est trop urbanisé et les
envoient à Abomey ou à Agbangnizoun.
Contrairement à ce qui est observé à Abomey, il n’y a en milieu rural que des élevages
d’autochtones confiés à des bouviers, qui eux-mêmes se constituent un troupeau en propre. Parmi
les autochtones, il faut différencier des troupeaux de 60-70 têtes appartenant à des individus et des
troupeaux appartenant à plusieurs personnes (5-10) se regroupant en association et ayant jusqu’à
90-100 têtes. Dans les associations on aurait même des propriétaires qui n’ont pas de terre, ni de
cultures.
Encadre 6.1 Rencontre avec un retraité, petit propriétaire de bovins du quartier Adandokpodji,
Abomey urbain
Il possède quelques têtes de bovins (taurins) qu’il confie à un bouvier contre prélèvement du lait.
Quand il était plus jeune il les menait lui même au pâturage et en trayait le lait. Le lait constitue selon
lui une source de revenu très appréciable car une vache va produire un à deux litres par jour pendant
plusieurs mois et ce lait se vend 200 à 250 fcfa le litre. Mais il n’a pu convaincre un de ses enfants à
prendre la relève, contrainte culturelle oblige. Quand il a des besoins d’argent, il vend des animaux.
Il élève également deux à trois truies de race améliorée et leur suite dans des enclos bétonnés et en
claustration. La petite taille de l’élevage lui évite semble-t-il de produire des nuisances.
1.3
Les bouviers et les propriétaires d’animaux
Il n’existerait qu’une forme de contrat entre bouvier et propriétaire de bovins. Le bouvier amène
les animaux au pâturage en début de journée et les ramène en fin d’après-midi. Il surveille avec
attention les différents comportements des animaux et signale les anomalies au propriétaire. Il trait
le lait chez les vaches allaitantes et contrôle l’allaitement des petits. En fonction des relations avec
le propriétaire ou des facteurs inclus dans la structure de la rémunération, il s’occupe du nettoyage
des enclos, du stockage des bouses.
48
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Les propriétaires en contrepartie du travail exécuté par les bouviers leur doivent le lait des vaches
et un salaire mensuel négocié compris entre 6.000 et 12.500FCFA en fonction de la taille du
troupeau, de la composition (la présence de vache allaitante entraîne une réduction du salaire), et
des activités supplémentaires incluses dans les obligations du bouvier. Il faut noter que certains
bouviers gagnent 15.000 à 20.000F par mois. Les propriétaires se chargent de tous les autres investissements liés à l’élevage : traitements sanitaires, approvisionnement en eau (eau courante,
puits, citernes ou retenue d’eau de ruissellement), aménagement et réfection des enclos… En milieu rural, il semble que le salaire soit de l’ordre de 10.000 FCFA par mois auquel s’ajoute le lait.
Les bouviers qui restent longtemps peuvent se constituer un troupeau. Les dégâts en divagation
s’arrangent encore à l’amiable avec dédommagements. Il n’y a pas de relations suivies entre le
responsable de la zone et les peuhls d’autres régions limitrophes.
Le lait est un droit irrévocable du bouvier. Il peut être vendu frais (200 à 300F le litre) ou transformé en woagashi, un lait caillé qui entre ensuite après friture dans la composition des sauces. Le
lait participe parfois plus au revenu du bouvier que son salaire !
Le chef des peuhls de la localité a des répondants au niveau des quartiers où il y a des peuhls
(Agnagna, Hountondji, Djegbé), qui règlent les petits différents, ou portent les autres à son niveau. Les conflits portent sur des ruptures de contrat entre propriétaires et bouviers salariés, entre
bouviers et leurs apprentis. Les commerçants menant des troupeaux vers le parc à bétail ne relèvent pas de son autorité et ces convois n’occasionneraient pas beaucoup de dégâts.
1.4
Zones de pâturage et itinéraires techniques
Les itinéraires techniques des élevages urbains semblent varier selon les modes de pâturage et les
objectifs des propriétaires des animaux.
Les objectifs des propriétaires autochtones sont, pour certains chefs de collectivité, d’avoir chaque
année un lot d’animaux à abattre lors de grandes cérémonies, pour d’autres d’avoir une caisse
d’épargne sur laquelle se rabattre lors de crises ou de grosses dépenses. Selon les objectifs et possibilités des propriétaires, le troupeau peut être déstocké de façon impromptue ou au contraire,
maintenu voire agrandi par vente des mâles contre achat de femelles. Les objectifs des bouviers
sont d’avoir beaucoup de lait et peu d’accidents et de pertes qui créent des tensions avec les propriétaires. Mais ils n’ont semble-t-il guère de marge de manœuvre.
Un autre élément de typologie est la zone de pâturage, cantonnée à la ville et ses abords immédiats d’une part, éloignée d’autre part. Beaucoup d’autochtones refusent que leurs animaux pâturent loin d’Abomey et exigent que les animaux reviennent chaque soir à la maison afin de contrôler leurs bouviers. Ils craignent en effet le vol. Les animaux pâturent alors dans les pourtours de la
ville, en centre ville dans les zones incultes des palais, et sont abreuvés en ville avec l’eau de la
SBEE. Ce mode de pâturage est courant avec les petits troupeaux de quelque têtes ou dizaines de
têtes.
Les Fulani quant à eux vont plus loin dans les zones de plus grande disponibilité fourragère. Ils
vont par exemple vers la rivière de Detohoun et dans les bas-fonds d’Agbangnizoun. Détohoun
constituait traditionnellement une zone de pâturage mais la zone a été vendue à de nouveaux propriétaires qui y installent des fermes et font des cultures au bord du cours d’eau au point d’en rendre impossible l’accès. La négociation entre ces propriétaires et les Fulanis n’a pas abouti à un
compromis (malgré la présence de l’ancien maire) et l’accès est toujours difficile. Selon
l’interlocuteur, c’est une tactique pour décourager l’arrivée de bouviers. Les bas-fonds
d’Agbangnizoun ne constitueraient pas une zone très favorable au pâturage non plus. En saison
des pluies, les bas-fonds sont trop humides et en saison sèche, ils sont mis en culture. Le problème
de délimitation de couloirs de passage a été posé aux autorités (directeur de l’élevage) mais rien
ne se produit.
49
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Le pâturage est rarement complémenté par des graines de coton. L’affouragement n’est pas non
plus pratiqué. Le chef des peuhls voit néanmoins la nécessité de cultiver des fourrages sur des
parcelles comme des agents de développement le lui ont expliqué. Mais il n’a jusqu’à présent pas
eu l’information ni pu voir de parcelles de recherche avec de telles cultures15 .
Les élevages Fulani et ceux des « bons propriétaires » sont suivis pas les vétérinaires. Mais
l’accès aux produits vétérinaires est difficile et le seul vétérinaire à Bohicon semble décourager
l’installation d’un dépôt de produits pharmaceutiques pour conserver un monopole sur la vente de
produits.
Certains animaux sont parqués la nuit dans des carrés lotis mais non construits. Une petite habitation est installée pour le bouvier et sa famille. Un bac permet d’abreuver les animaux. Les animaux n’ont pas toujours d’abri, semble-t-il.
En milieu rural, en saison des pluies, les animaux se déplacent sur 1 à 1,5 Km et en saison sèche
sur 5 km. Ils reviennent le soir dans leurs parcs. Ces parcs sont clôturés. Des abris sont construits
pour les veaux et la traite. Dans notre cas, le troupeau s’est agrandi progressivement et il est réparti aujourd’hui en trois troupeaux qui sont confiés à trois bouviers différents. Le propriétaire fait
venir un vétérinaire qui assure le suivi des animaux.
Le pâturage devient de plus en plus difficile, non seulement en bas-fonds comme énoncé plus
haut, mais aussi en plein champ, car beaucoup de parcelles sont en rotation maïs-coton-manioc
sous coton. Il est alors presque impossible de rentrer en saison sèche pour faire pâturer les résidus
à cause de la présence du manioc. Les adjas ne connaissent pas l’utilité des bouses de vaches,
même pas pour les maraîchers et donc ne cherchent ni à faire pâturer et parquer des animaux dans
leurs champs ni même à ramasser la poudrette dans les parcs (sauf une exception qui vient chercher ces bouses par sac pour ses orangers). Ce manque d’intégration rend encore plus difficile le
pâturage des résidus de récolte. Les cultivateurs arguent que le piétinement cause d’ailleurs trop
de dégâts. Pourtant les Fulani interrogés déplacent régulièrement leurs parcs et cultivent derrière.
Ils obtiennent de très bons rendements en maïs qui étonnent les riverains.
Les mises bas ont lieu en fin de saison sèche (beaucoup de veaux actuellement). Les animaux
mâles sont vendus vers l’âge de 3-4 ans, « quand ils dérangent les femelles ».
2. Valorisation des produits d’élevage
Le lait est valorisé par la famille Fulani. Chaque vache donne 1,5 à 2 litres de lait pendant 2 à 3
mois de lactation puis la production diminue. Les femmes transforment le lait en fromage. Des
commerçants viennent régulièrement d’Abomey surtout et déposent même de l’argent pour
s’assurer l’approvisionnement.
En ville, le lait se vend frais et en foura dans le quartier Zongo. Certains autochtones viendraient
eux aussi en commander. Le lait se vend à 200 FCFA le litre, ce qui ne serait pas assez attractif.
Le fromage se vend en boule de caillé provenant d’un litre et demi de lait et se vend à 350 f, rarement 400 FCFA. Ce mode de valorisation est donc aussi intéressant qu’en frais et le produit coule
bien sur le marché.
La demande pour les animaux de boucherie ne cesse de croître avec l’urbanisation. C’est pourquoi
les éleveurs Fulani ne souhaitent pas partir loin du marché au bétail de Bohicon, fréquenté par de
nombreux acheteurs du sud.
A la campagne, les animaux malades sont vendus aux boucheries de la localité (Klouekanmè).
Une bonne partie des animaux est abattue lors des grandes cérémonies annuelles organisées par
15
Pourtant nous connaissons plusieurs parcelles d’essai en milieu paysan à proximité de la ville installées sur initiative
de la recherche-développement (INRAB) et de l’IITA/ILRI.
50
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
les chefs de collectivités familiales. Les achats de femelles pour reconstituer le troupeau se font
sur le parc à bétail de Bohicon. L’objectif du propriétaire est donc essentiellement une
« autoconsommation cérémonielle ».
2.1
Le marché de bovins de Bohicon
L’ancien site utilisé comme marché de bovin a été occupé par de nouveaux propriétaires suite aux
travaux de lotissement. La Circonscription Urbaine de Bohicon a alors octroyé un nouveau site à
Saklo, mais les marchands de bovins ont refusé de s’y installer parce qu’ils le jugent éloigné et
insécurisant pour les grandes transactions qui sont faites chaque jour. Ce refus est aussi lié à la
crainte de l’imposition de taxes et aux menaces des personnes expropriées pour dégager ledit site.
Les courtiers du marché ont alors négocié avec des membres de la famille royale Béhanzin la location de l’actuel site au coût de 20000FCFA par mois. L’actuel site, une palmeraie proche du
« goudron » reliant Abomey à Bohicon, n’est pas clôturé et ne dispose d’aucun point d’eau.
Le marché est composé de plusieurs acteurs dont les plus importants sont les marchands de bovins, les acheteurs, les courtiers, les chargeurs, les transporteurs, les bouviers, les vétérinaires et
les restauratrices :
o Les courtiers (qui sont tous des Peulhs) sont les véritables gestionnaires du marché de bovins. Ils perçoivent chez les acheteurs de bêtes une taxe appelée “sossoukwè” de 1500F
par tête. Ils se sont donc organisés en Comité de Gestion pour assurer grâce à une cotisation journalière par courtier, les charges liées au fonctionnement du marché.
o Les autres acteurs du marché ne sont pas impliqués ni financièrement ni moralement dans
cette organisation.
o L’accès au marché est libre et gratuit pour tous les marchands de bovins. Ces derniers
viennent de Djidja, Sèto, Savè, Glazoué, Pahouignan, Dassa, Agouna, Tchèti, Abomey,
Burkina-faso, Togo.
o Les bouviers assurent le pâturage des animaux pendant leur séjour (1 semaine en
moyenne) au marché aussi bien pour les marchands (avant vente) que pour les acheteurs
(avant enlèvement) pour une somme de 500F par bête.
o Les chargeurs s’occupent de l’embarquement des animaux à bord de véhicules utilitaires
(bâchés et camions) à raison de 1000F par bête.
o Les vétérinaires examinent les animaux sur pieds et délivrent des laisser-passer aux véhicules devant les transporter hors de la ville de Bohicon.
o Les clients viennent de toute la région au sud de Bohicon (Cotonou, Porto-Novo, Ouidah,
Lokossa, Aplahoué, Azové) et même du Nigéria.
Une partie des animaux vendus au marché de bovins est abattue à l’abattoir de Bohicon, une partie encore probablement achetée par les bouchers de la ville qui les stockent sur pied plus ou
moins longtemps. En période de fêtes, les moutons transitent sur le marché de bovins car l’accès
leur est strictement interdit au marché central. La fonction d’embouche sur place ne semble pas
être développée (à vérifier auprès des bouchers locaux par exemple ou de peuhls résidents).
51
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Photo 6.1 : Chargement d’animaux sur le parc à bétail de Bohicon en direction de Cotonou
2.2
Organisation des Fulani
C’est une association nationale16 dont un démembrement a été installé à Abomey en 1989 sous la
présidence du Père de l’enquêté. Le fils a pris la succession du Père après son décès en 1999.
Cette association s’est fixé comme objectifs de :
o Contrôler les déviances sociales observées chez certains Peulhs comme l’abus d’alcool, la
consommation de chanvre indien, le vol, la violence et les difficultés d’intégration dans les
communautés où ils s’installent
o Défendre les professions de bouvier et éleveurs et gérer les conflits entre bouviers et paysans
L’association dont le siège national est à Parakou souffre d’un grand désordre depuis le décès du
Président National Osséni Ouga en 2000. Cette situation affecte la légitimité et l’autorité des responsables d’antennes aussi bien aux niveaux départementaux que ex sous-préfectoraux.
L’antenne “Laawolfulfuldé” d’Abomey comprend une vingtaine de bouviers au service des autochtones et une dizaine d’éleveurs tous résidents. Les transhumants s’orientent plutôt vers les
zones où sont disponibles en saison sèche l’eau et le pâturage, ce qui n’est pas le cas à Abomey.
Le responsable de l’association coordonne le recrutement des bouviers par les autochtones et participe au règlement d’éventuels conflits entre bouviers et propriétaires d’animaux.
3. Opportunités et contraintes liées à la péri urbanité
3.1
Maintien de l’accès aux ressources fourragères et problèmes fonciers
En ville, une contrainte majeure est liée à la suppression des zones de pâturage et à la disparition
des couloirs d’accès aux points d’eau en zones périurbaines en raison d’une utilisation plus inten16
Entretien avec le chef des peuhls d’Abomey sur l’Association nationale des Peulhs “Laawolfulfuldé” traduction « la voix des
Peulhs »
52
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
sive des terres de cultures, et plus particulièrement des bords de cours d’eau. L’avenir de cet élevage est conditionné par le maintien de l’affouragement qui suppose:
o La délimitation de zones de pâturage périurbaines et de couloirs de passage vers ces zones
et points d’eau, ce qui suppose une planification concertée de l’utilisation de l’espace qui
devient de plus en plus difficile quand l’espace est approprié de façon privative et cultivé
de façon intensive. Néanmoins, les intérêts des éleveurs peuvent coïncider avec ceux des
ressources naturelles si cette délimitation permet de mettre en défens des zones de forêts
galerie, des zones sensibles à l’érosion, des zones de protection en amont des villes qui les
protègent en partie des ruissellements excessifs.
o Le développement d’affourragement complémentaire (soles fourragères installées en relais dans des parcelles cultivées avant leur mise en jachère, « cut and carry » à partir de
plantations agro-forestières, « mise au propre grâce à du pois d’Angole » de carrés encore
en attente de construction, utilisation des résidus –mais là la concurrence avec les autres
élevages qui en dépendent est rude-, échanges des fanes d’arachide contre des bouses de
vaches, etc.). Il conviendrait de bien cibler les animaux qui vont bénéficier de ces compléments. L’embouche d’animaux arrivant du Nord constitue probablement une activité
économiquement intéressante qui valoriserait des compléments. Il en est de même pour le
lait.
o Le maintien en milieu urbain d’espaces publics inconstructibles et des zones de palais également inconstructibles pouvant également constituer ou demeurer des zones de pâturage
de proximité, surtout en saison sèche. Ces zones peuvent être des pâturages de graminées
à usage de pelouses, des jachères saisonnières dans des zones de culture pluviale, des
plantations forestières du type Acacia dont le recru est pâturé, ou des plantations sylvopastorales. Cette alternative nécessite un peu de réflexion car il n’est pas évident que la
coexistence entre urbains, qui utiliseraient ces espaces pour circuler d’un point à un autre
ou comme espaces récréatifs, et bovins soient jugée acceptable par les premiers.
L’embouche des animaux maigres arrivant sur les parcs à bétail en provenance du Nord pourrait
constituer une opportunité encore sous-développée. Elle dépend d’un accès aux marchés financiers qui jusqu’à présent semblent ignorer les éleveurs, même sédentaires, bien que ceux-ci soient
détenteurs d’un capital sur pied aisé à chiffrer et plus aisé à prendre en caution que la terre.
Ces nouveaux systèmes seront plus faciles à mettre en place quand le propriétaire élève lui-même
ses animaux. Quand les animaux sont confiés à des bouviers, ceux-ci sont intéressés par le lait, le
propriétaire par des animaux à abattre. Qui cultivera les parcelles fourragères sachant que les bouviers n’ont alors pas de terre, et que certains propriétaires n’en ont pas non plus, en dehors des
carrés qui abritent les animaux ?
A la campagne, les bouviers ne voient guère de possibilités de négociation pour se garantir un
droit à l’espace, surtout si c’est la même propriétaire foncier qui décide de l’installation des bouviers et des cultivateurs. L’idée d’investir dans la terre ne leur paraît pas faisable (à creuser).
3.2
Problèmes liés au pâturage des animaux en ville
La circulation des animaux en ville pose un problème de sécurité pour les usagers et les riverains
des routes. Le pâturage et l’approvisionnement en eau des animaux deviennent de véritables
casse-tête en saison sèche. En dehors des alentours du palais, des zones Zassa et Agblomè-Lévi,
les bouviers sont obligés de s’éloigner vers les zones périphériques entre Adandokpodji et Sota,
vers Sèhoun, Sonou, Gnassata, Tognizali, Guéguézougou pour faire paître les animaux sur les
parcelles non clôturées, les terres cultivées et brûlées après la dernière saison de pluie. Certains
53
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
éleveurs sont obligés de déplacer leurs troupeaux à Cana, Kinta (vers le Hlan), Sinwé (vers les
affluents du Couffo) pour avoir de l’herbe fraîche et de l’eau.
3.3
Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins en concertation
Le grand enjeu est l’avenir même de ces élevages et l’espace qui leur sera réservé à l’avenir tant
en milieu urbain que rural. Leur maintien dépend
o de l’apport de l’élevage à l’approvisionnement de la ville, qui peut ou non inciter les propriétaires d’animaux à eux aussi investir dans la terre pour en faire des espaces de pâturage ou d’affouragement,
o de la contribution future de l’élevage à la gestion de la fertilité des terres (qui encourage
les agriculteurs à les laisser occuper les même espaces qu’eux),
o de la contribution de l’élevage à la gestion d’espaces boisés reconnus d’utilité publique, à
la gestion d’espaces encore incultes (mais cela ne peut être que transitoires) et à la gestion
d’espaces de palais.
Par ailleurs, un enjeu est le lait et sa valorisation. Si le lait constitue le salaire d’un bouvier ayant
peu d’influence sur le système d’élevage, il y a peu d’intérêt tant pour le propriétaire à intensifier
le système d’élevage et peu de possibilité pour le bouvier de le faire. Et nous ne sommes pas entrés dans les sphères de négociation au sein des familles d’éleveurs, alors que le lait est transformé
en fromage par les femmes.
Enfin un enjeu est le contrôle des parcs à bétail où sont commercialisés les animaux.
L’importance du parc de Bohicon est clairement apparue durant le diagnostic. Or ce parc est informel, provisoire et pas équipé (ni clôture, ni eau). Vu l’importance de la demande en bétail qui
afflue sur Bohicon, la modernisation et le déplacement du parcs à bétail est un enjeu qui concerne
les responsables des communautés peuhl et les élus des deux communes. Le chef des peuhls à
Abomey envisage même un financement à crédit pour la construction d’un parc attractif à Abomey et une gestion par les éleveurs (de l’avis de l’enquêté, ceci constituera une source de recettes
et d’emploi assez intéressantes pour la commune). Ce thème devra être approfondi ultérieurement.
3.4
Thèmes de recherche et de concertation inter-acteurs
Que ce soit à la périphérie des villes ou dans les zones favorables au pâturage, donc à proximité
des cours d’eau, l’élevage devient de plus en plus difficile du fait de la culture de plus en plus
intensive en particulier dans les bas-fonds. La position sociale des Fulanis, éternels étrangers de
passage ne favorise pas l’expression de leurs droits à l’espace. Pour l’instant, ils se maintiennent
grâce à des relations de patronage. De plus les cultivateurs n’exploitent pas les interactions positives potentielles que constituent la valorisation des bouses de vache et à terme l’introduction de
soles fourragères pour produire des fourrages à commercialiser ou à faire consommer par son
élevage ou en échange de parc nocturne. La valorisation de la fumure organique a fait l’objet de
nombreuses études techniques mais plus rarement d’études socio-économiques prenant en compte
les différentes options qui s’offrent aux paysans. Le désintérêt des cultivateurs pour ces apports,
alors qu’ils utilisent de l’engrais chimique, est-il justifié économiquement ?
Il apparaît que les seuls agents de développement que les éleveurs connaissent sont les vétérinaires et qu’ils n’ont pas accès aux informations techniques de la vulgarisation et de la recherche. La
production de fourrages de complément, sous toutes ses options, n’a jamais été testée avec ces
54
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
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éleveurs. Pourtant le milieu urbain et périurbain constitue à priori un terrain favorable à
l’adaptation et à l’adoption de telles mesures.
Un thème de concertation inter acteurs pourrait porter sur la constitution de zones, respectivement
de culture et de pâturage sur les terroirs ruraux et périurbains, ainsi que la délimitation de couloirs
de passage. Une telle mesure, qui suppose le « recasement » de certains agriculteurs trop amputés,
demande un travail presque aussi important que le lotissement (!) pour des enjeux un peu moins
importants, du moins à court terme. Pour s’engager dans une telle voie, une bonne base de cartes
détaillées sur les ressources naturelles et leurs potentialités et risques, le foncier et les divers ayant
droits, les modes passés, actuels et futurs des utilisations serait indispensable.
En zone périurbaine, on prendra en compte aussi les zones à fort ruissellement en amont de la
ville. Un bon reboisement et aménagement de petites retenues en amont ne permettraient ils pas
de s’épargner des kilomètres de canaux de drainage en ville et les problèmes d’évacuation de ces
eaux en sortie de la zone urbaine tout en contribuant à résoudre les problèmes de pâturage? Ceci
pourrait constituer un thème de recherche pour les aménagistes. Une bonne base de cartes permettrait également de faciliter la discussion.
55
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
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VI. TRANSFORMATIONS AGROALIMENTAIRES A ABOMEY ET BOHICON
Pascaline Assogba et Akobi Innocent
1. Principales transformations
La plupart des spéculations vivrières font l’objet de transformation agroalimentaire dans les villes
d’Abomey et de Bohicon et dans leurs périphéries. Cette activité se réalise aussi bien dans le cadre familial que dans les groupements de femmes. Le développement ci-dessous concerne essentiellement les transformations agro-alimentaires commercialisées. Il s’agit par exemple de :
o la transformation des graines de néré en afitin,
o la transformation du maïs en lio, akassa, gowé, klèklè
o la transformation des noix de palme en huile de palme et en huile palmiste,
o la transformation du manioc en gari et en tapioca,
o la transformation de l’arachide en kluiklui et en huile
o la transformation du vin de palme en alcool (sodabi)
La distillation est en expansion, à la fois pour le marché local et pour tout le Nord du pays : le
‘B↵hik↵n’ est une appellation courante pour l’alcool produit (origine plateau d’Abomey et plateau Adja, plateau d’Allada, avec ou sans sucre).
Les techniques de transformation sont essentiellement rudimentaires et artisanales sauf dans le cas
de la fabrication du gari où les râpes et les presses sont utilisées pour améliorer la productivité du
travail et pour réduire la pénibilité du travail des femmes.
Il existe des spécialités localisées : les noix de palmiste (Tendji, Kpassagon) constituent une base
du marché de Kpassagon et un « s↵ji » à Bohicon, le lio.
1.1
L’afitin
La production d’afitin est une spécificité d’Abomey-Bohicon et de sa périphérie. L’afitin est produit un peu partout dans la zone périurbaine d’Abomey et de Bohicon et plus particulièrement à
Dètohoun, Agbokpa, Zounzonmè, Sèhoun, Saclo.
Le néré, matière première de l’afitin est un produit de cueillette qui provient des forêts et des jachères des communes environnantes ainsi que des départements des Collines et du Nord. Le néré
est vendu dans les marchés de Houndjro et de Bohicon.
La production du afitin s’étend sur quatre à cinq jours et implique les femmes de tous les âges.
L’afitin produit est déposé dans un panier, transporté jusqu’au marché (Houndjro, Bohicon, Ahito) pour être vendu au cours de la journée. Le transport se fait au moyen de vélo conduit par les
transformatrices elles-mêmes.
Malgré la saisonnalité de la cueillette du néré, l’afitin est produit par les transformatrices régulièrement et en toute période de l’année. Les transformatrices ont indiqué qu’elles font un chiffre
56
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
d’affaire journalier de 10.000 à 12.000F CFA pour la transformation de 25 mesures de graines de
néré. Le prix de la mesure (tohoungodo) de graine de néré varie entre 250F et 300F CFA.
Selon les femmes, il n’y a pas de mévente malgré le nombre de femmes transformatrices de graines de néré dans la région périurbaine d’Abomey-Bohicon. La demande semble augmenter ces
dernières années (à vérifier).
Du fait des difficultés d’approvisionnement en néré, on parle de plus en plus de l’introduction du
soja dans la fabrication de l’afitin.
1.2
Le lio
Le lio est le produit de transformation du maïs le plus couramment rencontré à Abomey-Bohicon
et environs. Il est consommé quotidiennement par la plupart de la population. Le lio est surtout
produit par les femmes des villages Lèlè, Houawé, Zounzonmè, Gboli, Tanvi. Le lio produit dans
cette région du pays a une renommée régionale.
Le maïs, principale matière première de la fabrication de lio provient de la propre production et
aussi de l’achat. Le maïs est acheté au marché lorsque le prix est bas et est stocké pour la production du lio. Selon les transformatrices, 20 mesures (Tohoungodo) de maïs sont nécessaires pour la
préparation d’environ 200 boules de lio. Le lio est emballé dans les feuilles de manioc ou de
« za » (Daniella oliveri). Le zaman se cherche encore dans la brousse mais les feuilles de manioc
se vendent. Il faut entre 300 et 400F CFA de feuille de manioc pour emballer les 200 boules de
lio.
Le processus de transformation s’étend sur deux jours. Après la double cuisson, le lio est vendu
soit dans le village par certaines femmes productrices, soit au marché Houndjro ou Bohicon ou
Ahito ou au bord des voies bitumées en direction de Cotonou ou de Parakou.
Certaines femmes se lancent en achetant à crédit du maïs en période d’abondance qu’elles transforment. Cela leur permet de se constituer progressivement un capital.
2.
Opportunités et contraintes des transformations
La demande croissante est une opportunité pour ces deux types de transformation.
Le facteur limitant à la production d’afitin est la disponibilité de graine de néré. Ce produit semble
maintenir voire accroître sa clientèle locale et dans les grandes villes et ne serait pas concurrencé
par le « cube » avec quelques efforts17.
Le lio est un produit qui n’a pas conquis les marchés urbains de la côte comme d’autres. Il est
moins populaire que l’akassa et aussi que les gowé, akpan, etc. Mais vu la faible production locale de maïs, sera-t-il possible de lui garantir une place plus importance dans le panier de la ménagère hors des zones de production ?
3.
Enjeux et groupes stratégiques
Afitin : Un enjeu tourne autour de la qualité du produit puisque certaines femmes commencent à
produire le afitin-soja en mélangeant les graines de soja et de néré. Cela règle en partie les difficultés d’approvisionnement en néré et serait plus facile à produire mais cela risque de ternir la
17
Une étude au Sénégal a montré qu’il n’y a pas de concurrence entre le « cube » et le nététou, condiment à base de
néré
57
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
réputation de cette spécialité. Le contrôle de qualité et le maintien de la réputation du produit
constitue un enjeu aussi au sein des productrices d’afitin-fon (néré pur) car parfois, une femme
« rate » le processus de fermentation et tente de le camoufler, vendant ainsi un produit frelaté. Un
autre enjeu tourne autour des places de vente sur le marché (cf. marché).
Lio : Un enjeu tourne autour de la capacité à produire localement du maïs qui puisse être transformé.
4.
Thèmes de recherche
Ces filières de transformation spécifiques à la région Abomey-Bohicon et environs seront décrites
de la transformation à la consommation; offre et demande seront comparés. Les relations entre
consommations respectives d’afitin, cube et afitin soja seront étudiées. La contribution de ces
filières au maintien d’espaces cultivés et de ligneux (emballage, graines de néré, bois de feu) sera
évaluée.
58
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
VII. APPROVISIONNEMENT DES VILLES DE BOHICON ET D’ABOMEY
Victor Gbessèmèhlan & Dossa Aguèmon 18
1.
Le marché de Bohicon
1.1
Description sommaire du marché
Administrativement, le marché de Bohicon relève du quartier d’Ahouamè-Ahito, arrondissement
de Bohicon II. Premier marché du Zou et quatrième au plan national, Bohicon a deux composantes : Sèhi et Ganhi. Il est constitué d’un noyau central continu de divers stands et se prolonge sous
forme de tentacules le long des rues adjacentes. De cette façon, certains stands se sont dédoublés
aujourd’hui. En 20 ans, la taille de ce marché a quintuplé. On y rencontre des hangars de fortune
essentiellement concentrés en son centre mais aussi des bâtiments en dur abritant les marchandises19 .
Plusieurs stands de produits y sont rencontrés y compris les produits manufacturés. Il s’agit :
o des produits agricoles (céréales, légumineuses, oléagineux, l’igname, le taro, les produits
maraîchers),
o les produits de transformation (gari, lio, cossette d’igname, farine d’igname, afitin, huiles20 , savons21 ),
o les produits d’élevage (animaux sur pieds : volaille, chat, chien ; viandes de bœuf et de
caprin),
o les animaux morts séchés ou autres ingrédients magico religieux ;
o les produits de pêche : poisson fumé ou frais congelé ;
o les produits de la vannerie et de la poterie ;
o les produits manufacturés (tissus, produits utilisés dans la coiffure et la tresse, produits
cosmétiques, etc.) ;
o les produits alimentaires industriels (tomate en boite, lait condensé, sucre, pâtes alimentaires, etc.).
Outre la vente de produits, un certain nombre de services y sont offerts : c’est notamment le cas
de la coiffure, de la tresse, de la couture,
Nous nous sommes surtout intéressés aux produits agricoles dans le cadre de cette étude exploratoire du programme Ecocité.
18
Ce rapport est la synthèse des rapports des binômes Tossou & Ramanou ; Tohinlo & S. Tossou ; Babadankpodji
& Akobi; Gbessèmèhlan et Aguèmon.
19
Il existe en outre des latrines publiques dont l’accès est payant.
20
Il s’agit de l’huile de palme, l’huile d’arachide et de palmiste.
21
Outre le savon artisanal appelé ‘Kooungui’, à base d’huile de palmiste et de cendre, on y rencontre les savons de
fabrication industrielle comme le palmida, les savons cosmétiques, etc.
59
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Figure 7.1 : Schéma du marché de Bohicon avec positionnement des stands de produits agricoles
60
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
1.2
ECOCITE
Les flux au niveau du marché de Bohicon
Les céréales, les légumineuses, l’igname, les huiles, le gari, le lio 22, le afitin 23, la tomate et le piment, l’oignon, l’orange, les cossettes d’igname et de manioc sont les produits auxquels nous nous
sommes intéressés pour en analyser les flux.
Les céréales
Les terres de barre entourant le marché étant fortement dégradées, la zone périurbaine contribue
très peu à l’approvisionnement en céréales des villes. De plus, Bohicon est un grand marché de
transit et de redistribution entre les zones de production du nord et les zones de consommation du
sud et la plus grande partie des céréales commercialisées sur ce marché sont une partie des flux
Nord – Sud ou, plus rarement, en provenance du plateau Adja (cf. étude exploratoire).
Les légumineuses
Plus de 70% des légumineuses présentes sur le marché de Bohicon provient de la commune de
Savalou (schéma 7.2). Le reste est fourni par la région Adja, les marchés de Malanville et de
Ouèssè. La clientèle est constituée de consommateurs sur place ou de commerçants en provenance
des marchés de Covè, Glo, Zê, Sékou, Ouègbo, Allada, Toffo, et Cotonou. Il est très probable que
Cotonou soit la première destination des légumineuses vendues sur le marché de Bohicon.
Schéma 7.2 : Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en légumineuses
Savalou
Adja
Malanville
Ouèssè
Source : ecocité, 2003
Le gari
Le marché de Bohicon dépend à 80% du plateau Adja (Klouékanmè et Azovè) et à 20% de
Houègbo pour son approvisionnement en gari ordinaire (schéma 7.3). Le gari ‘’de luxe’’ dit Sohoui en provenance de Savalou constitue une quantité marginale. Le gari est acheté par les
consommateurs et détaillantes sur place ou réexporté vers Malanville qui semble en constituer la
première destination.
22
Pâte de maïs fermentée et conditionnée sous forme de boule emballée dans des feuilles de palme. Ressemble à
l’akassa. Constitue une spécialité régionale.
23
Condiment préparé à bas de graines de néré fermentées et cuites, pouvant être utilisé cru ou cuit. Cette « moutarde »
diffère de celle du nord Bénin et constitue une spécialité locale appréciée
61
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Schéma 7.3: Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en gari
Adja
Houègbo
Source : Op. cit
L’huile de palme
L’huile de palme vendue sur le marché de Bohicon provient à hauteur de 50% d’Allada suivie de
Toffo (20%). Zogbodomè, Zakpota et Bohicon même se partagent la part restante à proportion
égale (schéma 7.4). C’est ici une des rares exceptions où Bohicon contribue à son approvisionnement. L’achat peut se faire directement dans ces zones de production ou sur le marché où les
commerçantes locales en provenance de ces zones viennent vendre les jours du marché. La période d’abondance va de Décembre à Avril. L’huile de palme est vendue aux femmes détaillantes
ou directement aux consommateurs. Une majeure partie est réexportée vers les départements du
Nord et celui des Collines.
Schéma 7.4 : Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en huile rouge
Allada
Toffo
Zogbodomè
Zakpota
Bohicon
Source : op. cit
Huile d’arachide
Le nombre de commerçants toutes catégories confondues au niveau de cette filière est estimé à
200. C’est l’un des rares produits pour lesquels la commune de Bohicon approvisionne son propre
marché à hauteur de plus de 50% (schéma 7.5). Apparemment, les transformatrices de cette ville
s’approvisionnent en arachide dans les zones de production. Soulignons que dans certaines localités de Bohicon comme l’arrondissement de Sodohomè, l’arachide constitue derrière le maïs la
deuxième culture. Deux autres localités assez proches (Zakpota et Covè) fournissent le reste à
proportion égale, soit 22% chacune.
62
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Figure 7.5 : Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en huile d’arachide
Bohicon
Zakpota
Covè
Source : op. cit.
L’huile d’arachide est vendue sur place aux consommateurs ou à des commerçants venus en majorité de Cotonou.
L’huile de palmiste
Toute l’huile de palmiste vendue sur le marché de Bohicon proviendrait de la commune de Zakpota. Particulièrement abondant durant la période de Janvier à Août, ce produit devient rare le
reste de l’année où sa production est négativement influencée par celle du coton dans Zakpota. Ce
produit est essentiellement écoulé en direction des Collines ou transformé en savon artisanal destiné à l’usage local ou exporté.
La tomate et le piment
50% de la tomate et du piment vendus sur marché de Bohicon proviennent de Malanville 24
comme en témoigne le schéma 7.6. Le reste est fourni par les localités du plateau Adja, par Sèhouè, Djidja et Houègbo.
Schéma 7.6 : Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en tomate et piment
Malanville
Adja
Sèhouè
Djidja
Houègbo
Source : op. cit
24
En saison sèche, 100% de la quantité de tomate rencontré sur le marché de Bohicon provient de cette localité.
63
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Ces produits sont essentiellement écoulés sur place où viennent s’approvisionner les femmes détaillantes et les consommateurs individuels. Remarquons que les flux sont fortement saisonniers et
se succèdent dans le temps, les tomates de plein champ alternant avec celles de décrue et de zones
irriguées.
L’orange
80% des oranges rencontrées sur le marché de Bohicon proviennent de Zakpota qui de surcroît
constitue la seule source d’approvisionnement en saison sèche. Le reste provient du plateau Adja
(Klouékanmè, Azovè, Dogbo et Toviklin) et de Covè comme en témoigne la figure ci-dessous. Ce
produit est essentiellement écoulé sur place où viennent s’approvisionner les consommateurs locaux et les femmes détaillantes de la localité.
Schéma 7.7: Source d’approvisionnement du marché de Bohicon en orange
Zakpota
Adja
Covè
Source : ECRIS (Février 2003)
L’igname
Le Togo, le Nord Bénin, le département des Collines et la commune de Djidja constitueraient
dans cet ordre les sources d’approvisionnement les plus importantes du marché de Bohicon en
igname. Faisons remarquer que Djidja, la plus proche de ces sources d’approvisionnement de Bohicon, et qui en a été le grand pourvoyeur durant des décennies, n’intervient plus qu’en dernière
position. Ceci s’explique à la fois par la réduction de la production dans les savanes de Djidja,
déjà passablement déforestées et par le rôle de transit que joue Bohicon dans l’approvisionnement
des villes du sud. Une grande partie des productions d’igname arrivant sur le marché sont en fait
réexportées. Environ 20 grossistes permanents commerçants d’igname dont 5 hommes et 15 femmes sont présents sur le marché. Ce chiffre avoisinerait 40 en saison d’abondance du produit entre
Décembre et Mars. Outre la mévente, la faiblesse des moyens financiers des commerçants explique cette tendance enregistrée durant la période de soudure. Le produit est écoulé sur place où il
est vendu directement à des consommateurs ou à des détaillantes venues des localités environnantes. Cotonou semble en constituer la plus grande destination.
64
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Le lio et le afitin
Le lio, un produit de transformation à base de maïs constitue une spécialité des régions d’Abomey
et de Bohicon. Il existe même un label de ce produit dans Bohicon : le lio de Houawé25 réputé de
qualité exceptionnelle. Disponible en toute période de l’année, ce produit dispose d’un stand sur le
marché mais est aussi vendu au bord des artères de la ville. Il est essentiellement écoulé sur place
et en direction de Cotonou. L’intégration dans cette filière semble se faire par un mode de succession, les filles étant initiées par leurs mères et cela de génération en génération.
A l’instar du lio, le afitin est un produit de grande consommation tant sur place que dans le reste
du pays et il constitue une spécialité régionale dont on acquiert le savoir-faire en vivant quotidiennement auprès de celles qui pratiquent l’activité (filles et belle-filles). Le marché de Bohicon
est approvisionné par les localités de Dan, Kpokissa, Tindji, Domè, et Agbangnizoun. Ce produit
dispose d’un stand et se vend aussi à travers les artères de la ville. Beaucoup de consommateurs
de passage vers Cotonou s’approvisionnent au niveau des stations services.
En résumé, c’est seulement pour l’huile d’arachide, le lio, et le afitin que la contribution de la
commune de Bohicon à l’approvisionnement de son propre marché est significative. Les localités
qu’on pourrait considérer proches d’elles à savoir Djidja et Zakpota contribuent à son approvisionnement pour respectivement igname/maïs d’une part, et pour l’huile de palmiste et agrumes
d’autre part. Bohicon semble dépendre surtout de l’axe Malanville, des régions de Savalou, de la
région Adja pour son approvisionnement en vivriers, mais c’est aussi parce que la fonction de
redistribution du marché de Bohicon est au moins aussi importante que celle d’approvisionnement
local.
1.3
Modes et stratégies d’approvisionnement et d’écoulement
On distingue plusieurs circuits d’approvisionnement/achat :
o le circuit direct (producteur - commerçant) : ceci se rencontre dans toutes les filières explorées ;
o le circuit court (commerçant - commerçant détaillant) : il s’observe généralement entre commerçants d’une même filière. Celui qui ne dispose pas du produit pour cause de pénurie ou
d’incapacité financière négocie auprès de celui qui en dispose moyennant une majoration par
rapport au prix de revient mais qui permet également à l’acheteur de réaliser un bénéfice en
fonction du prix courant sur le marché. La confiance joue beaucoup dans ce type de transactions ;
o le circuit moyen (producteur– intermédiaire -commerçant) : il se rencontre également au niveau de toutes les filières mais semble plus caractéristiques des secteurs comme l’igname (où
les racoleurs et les relations semblent jouer un grand rôle), le gari, l’huile de palme, et en général pour tous les produits provenant de longue distance.
Le produit peut être acquis au comptant, à moitié comptant, ou à crédit26 moyennant parfois des
majorations de prix ;
25
26
Houawé est un quartier de Bohicon.
Ce faible niveau d’organisation de ce secteur de commerce de vivriers limite l’accès des commerçantes aux crédits.
La grande difficulté des commerçantes dans ce cadre est la garantie exigée par les structures de finances et de micro
finances. En effet, les femmes ne disposent pas de garantie suffisante pour prouver leur solvabilité auprès de ces
structures
65
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
« Tôt le matin les jours de marché, je me pointe sur l’une des places de stationnement des véhicules de commerçants d’huile rouge en provenance d’Allada ou de Houègbo. A leur arrivée, je négocie un certain nombre de bidons d’huile de palme à crédit. Je retourne à mon créancier la part
correspondant au volume que j’ai pu vendre dans la journée. S’il me fait confiance, il me permet
de garder la part du stock non vendu jusqu’au prochain jour de marché. Dans le cas contraire, ce
stock lui est retourné » ; a déclaré une détaillante d’huile de palme. La vente à crédit intervient
surtout en période d’abondance. Malgré ses inconvénients, elle permet à une bonne frange des
commerçants de se maintenir dans la filière27.
Mais toutes les quantités de produits déversées sur le marché de Bohicon ne sont pas consommées
localement. En effet, une partie de certains produits comme les cossettes, l’oignon et l’igname
sont ré-exportés vers les zones Adja et Malanville. Bohicon est donc à un carrefour pour le commerce des produits vivriers.
Plus ou moins les mêmes types de circuit observés dans l’approvisionnement se répètent en matière de vente. La vente à crédit devient surtout importante en périodes de mévente (grande abondance ou renchérissement des prix) avec les risques associés déjà énumérés plus haut.
1.4
Gestion du stock avarié
Des cas d’avaries sont observés28. Nous ne sommes pas en mesure d’avancer des chiffres à propos
de ce phénomène. Mais l’ampleur de ce phénomène varie d’un produit à un autre et touche beaucoup plus les produits périssables comme la tomate. Le gari échappe à ce phénomène. Les réactions des commerçants en cas d’avarie varie selon les produits comme en témoigne le tableau ciaprès.
Tableau 7.1 : Destination du stock de produits avariés
Produits
Orange
Destination du stock avarié
Déversement sur les tas d’ordures
Igname
Légumineuses
Vente à prix réduit et à perte
Alimentation des animaux
Tomate et piment
Vente à prix réduit et à perte29
En cas d’abondance, déversement sur tas d’ordures
Huiles
Directement recyclées dans la fabrication du savon ou revendu dans ce but
Vannerie
Raccommodé et revendu au prix de revient
Poterie
Recyclé dans le remblai des lieux de vente
Source : op. cit.
27
Du côté de l’écoulement, elle permet de fidéliser une frange des clients en même temps qu’elle augmente les risques
d’impayés, occasionnant parfois des conflits entre vendeurs et acheteurs.
28
C’est essentiellement le maïs et dans une moindre mesure les légumineuses qui font l’objet de mesures de conservation particulières.
29
Les gargotières semblent friandes de cette qualité de tomate pour la friture.
66
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
De l’analyse de ce tableau, il ressort que les produits avariés sont soit
o jetés sur les tas d’ordures, ce qui entretient l’insalubrité ;
o donnés aux animaux, ce qui constitue un excellent exemple de recyclage tout comme le
traitement réservé aux produits de poterie avariés, et
o revendus moins cher, ce qui pourrait comporter de menaces pour le consommateur. Il reste
que ce dernier est conscient de ce qu’il achète, mais il n’a peut-être pas beaucoup de
choix.
Contrairement aux céréales et légumineuses, les huiles avariées sont recyclées dans la fabrication
du savon artisanal dit ‘’Coungui’’.
1.5
Conditions d’accès au marché
Les modes d’accès à une place dans le marché sont soit de type « moderne », soit de type
« traditionnel » :
o location de maison par les propriétaires des maisons voisines du marché,
o location de magasins30 auprès de propriétaires, ce qui donne droit à la devanture pour
vente en détails,
o dons de place par un proche parent,
o « héritage ou succession » : c’est notamment le cas dans le secteur de la poterie et de la
filière lio, où les places sur les stands de marché sont transmises de mère en fille ou bellefille.
Sur une même place, on peut assister à un système rotatif de vente planifié par les commerçantes
elles mêmes : c’est notamment le cas avec les vendeuses d’afitin.
Aujourd’hui, les possibilités d’expansion du marché de Bohicon sont limitées. Sa croissance reste
conditionnée par la capacité des riverains à louer leur construction pour servir de point de vente
ou de magasin. Et cette possibilité se réduit chaque jour un peu plus. Or les transactions sur ce
marché continueront d’augmenter probablement, si l’on s’en tient uniquement à son caractère de
marché de transit. Seule une croissance verticale ou une restructuration profonde pourrait permettre à ce marché de se développer sur quelques années encore. A cet effet, les constructions en hauteur entreprises par un opérateur économique privé au cœur de ce marché pourraient desserrer un
peu la pression. Mais elle provoque une certaine privatisation du marché.
1.6
Gestion du marché de Bohicon
Le marché de Bohicon s’anime avec une périodicité de 4 jours. Il est géré par un comité de gestion composé de 17 membres et présidé par le chef de la circonscription urbaine ; cette présidence
est transférée aujourd’hui au maire de la commune. Ce comité veille au fonctionnement du marché31. Les recettes communes du marché sont constituées de taxes prélevées sur les commerçants
par des agents collecteurs au service du comité de gestion. Mais le taux de recouvrement des taxes
a connu une baisse inquiétante ces dernières années pendant que le marché s’agrandit de jour en
jour. A l’origine de cette situation, le refus de certains commerçants de s’acquitter de ces taxes par
30
Les frais de location varie entre 8.000 et 22.000 francs CFA selon les cas. Il est aussi possible d’avoir une place à la
devanture d’un magasin pour ses ventes le jour du marché moyennant 50 F CFA.
31
Notamment assurer les dépenses de fonctionnement et d’investissement, collecter les ordures.
67
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
incivisme, résistance à un système politique, etc. Des percepteurs sont même passés à tabac de
temps en temps et souvent sans recours efficace pour, entre autres causes, l’absence de synergie et
de vision différente entre services techniques. L’encadré ci-après présentant le compte rendu
d’une séance de travail à la veille de la décentralisation entre une équipe du PADeCom-Zou et le
chef de la circonscription urbaine entouré de ses collaborateurs illustre suffisamment cette situation.
Encadré : Entretien sur le marché avec le Chef de la circonscription urbaine de Bohicon
entouré de ces collaborateurs
Chef cir : Notre marché ne fonctionne pas bien car les recettes ont chuté de façon inquiétante ces dernières années. A quoi
cela pourrait être dû ?
Mr. Guédégbé, adjoint au CBAE : Entre temps, vous nous envoyiez sur le terrain pour prêter mains fortes aux collecteurs
du marché. Avant cela, nous croyions que ces derniers détournaient une partie des recettes. Mais nous avons constaté que
ce sont plutôt les usagers du marché en particulier les femmes qui résistaient à payer les taxes. Même le balayage du marché ne les intéresse pas.
Mr Langanfin ; C/BAE : En plus de ces causes avancées par mon collaborateur, j’ajoute que le nombre de collecteurs est
insuffisant, ce qui occasionne un faible taux de couverture.
Mr le C/BAF : Selon moi, il y a 2 causes principales à l’origine de cet incivisme fiscal :
Les usagers sont astreints à beaucoup d’autres taxes informelles par lesdits propriétaires terriens du marché, c’est urgent
de lutter contre cette situation ;
Il y a une tendance à intoxiquer la population. La politique s’en est mêlée. Même tout récemment, des gens ont publiquement promis de supprimer les taxes sur les marchés dès qu’ils seront aux affaires de la commune.
Chef cir : Avez vous poursuivi les analyses pour savoir pourquoi cette résistance à payer les taxes ?
Mr. Guédégbé : Ils soutiennent qu’ils ne vendent plus comme auparavant. Et quand nous leur demandons les raisons de
cette chute des ventes, ils nous répondent « N’est-ce pas vous qui, pour avoir mangé du riz, avez confié la direction de ce
pays au pouvoir en place32 ? »
Chef cir : Quelles dispositions aviez-vous prises face à cette situation ?
Mr Guédégbé : J’ai suggéré à mon supérieur hiérarchique direct (C/BAE) qu’on vienne vous voir. Force doit rester à la loi.
Mais nous n’avons pas les moyens de les contraindre. Il est impérieux que les collecteurs soient couverts par la gendarmerie et la police. Les bonnes dames vont jusqu’à les tabasser. Et quand nous portons plainte devant la gendarmerie, les gendarmes nous disent de ne pas les embêter, qu’ils n’ont pas notre temps, que nous embêtons inutilement les bonnes dames, et
tout ceci devant ces dernières. Il y a à peine un mois, Soglo et Toussaint ont été passés à tabac. Mêmes les Ghanéens passent nos collecteurs à tabac !
Chef cir : C’est préoccupant, cette situation. Car sans les recettes, on ne peut investir comme il le faut dans le marché.
Même les dépenses de fonctionnement ne sont pas actuellement couvertes par les niveaux de recettes.
En outre, il existe sur le marché des associations de commerçants qui essaient de coordonner les
actions au niveau des stands.
1.7
Opportunités et contraintes des filières et plus particulièrement celles liées à la
péri urbanité
La situation géographique de la ville fait d’elle une ville carrefour favorable à
l’approvisionnement provenant d’autres zones et l’écoulement allant vers d’autres régions.
Bohicon constitue la commune la plus peuplée du Zou avec une population avoisinant 110.000
habitants, ce qui entretient une demande croissante en vivriers. C’est un atout potentiel pour
32
Allusion aux distributions de riz des partis politiques durant les campagnes électorales
68
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
l’agriculture périurbaine. Mais d’un autre côté, cela peut constituer une contrainte pour cette
même agriculture consommatrice d’espaces en réduisant les superficies cultivables.
Le marché actuel est petit, insalubre et les capacités de stockage semblent limitées. Le projet de
construction d’un nouveau marché pourrait permettre à Bohicon de garder sa place de marché
carrefour.
Certains produits agricoles périurbains et urbains ne sont pas commercialisés sur le marché,
comme par exemple les lapins, agoutis, poulets de chair. Les consommateurs doivent s’adresser
aux producteurs, les commerçants achètent chez ces producteurs et écoulent vers Cotonou, souvent hors marché. La poissonnerie semble également absente du marché. Le marché ne semble
pas s’adapter aux changements des modes de consommation et ces segments de marchés sont au
mieux pris en main par des boutiques.
1.8
Problèmes environnementaux
Des problèmes environnementaux se posent sur le marché de Bohicon :
o Le marché est encombré de déchets ménagers et de sachets plastiques, même certains riverains y déverseraient leurs déchets à la faveur de la nuit. Les produits avariés sont déversés sur les tas d’ordures. Le ramassage est assuré par la circonscription (périodicité).
Les produits avariés ne paraissent pas être recyclés correctement.
o Le marché fait l’objet d’inondations régulièrement à la faveur des pluies.
o La progression tentaculaire du marché à travers les artères adjacentes pose des problèmes
de sécurité aussi bien pour les usagers que pour les riverains.
o Les conditions de stockage des produits vivriers font craindre pour leur qualité (souillures,
aflatoxine).
o Le stand d’animaux séchés constitue une source d’odeurs à l’origine de désagrément pour
les riverains tout comme pour les passants.
Un besoin d’assainissement de ce marché se fait sentir chaque jour un peu plus.
1.9
Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins de concertation
L’accès à une place dans le marché
Le marché semble une plaque tournante incontournable pour de nombreuses personnes. En témoignent les diverses stratégies développées pour y avoir une place ou pour y être présent ne serait-ce
que le jour du marché, comme par exemple ‘’payer 50 F CFA pour vendre ses marchandises durant la journée sur la place d’un autre vendeur’’.
L’intégration dans les filières
Il existe des barrières à l’entrée dans certaines filières au niveau du marché de Bohicon. Ne vend
pas du afitin qui veut. Il en est de même de la poterie. Dans ces deux filières, on observe un mode
d’intégration essentiellement basée sur les liens de parenté, de mère en fille et sur des générations.
Des situations similaires sont observées dans d’autres filières.
69
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Perception des taxes sur le marché de Bohicon
La bataille autour des taxes entre commerçants et agents collecteurs et tous les développements
afférents illustrent suffisamment cet enjeu. Outre ces deux catégories, les forces de l’ordre et
l’administration locale constituent les groupes stratégiques engagés sur ce front. On peut aussi
ajouter les propriétaires terriens. C’est le contrôle des ressources et l’exercice du pouvoir des uns
et des autres qui est en jeu. Un besoin de concertation entre ces acteurs semble nécessaire pour
une meilleure performance du marché.
2.
Le marché d’Abomey
2.1
Description sommaire du marché Houndjro
Bien que plus ancien, le marché principal d’Abomey, Houndjro, est aujourd’hui beaucoup plus
petit que celui de Bohicon. Les jours de marché des deux localités sont différents.
Administrativement, le marché d’Abomey se situe à cheval sur Hountondji et Hounli, deux quartiers qui relèvent respectivement de l’arrondissement de Vidolé et de celui de Hounli même. A
l’instar de la plupart des marchés du pays, celui de Houndjro est clôturé. En saison sèche, le marché s’anime à l’intérieur de l’enceinte où des emplacements sont définis. L’emplacement des animaux déborde sur la voie bitumée. Les vendeuses de lio et de pain s’installent au bord des voies,
tout autour du marché. En face du marché de Houndjro, on observe des boutiques bien achalandées. Ces boutiques utilisent une partie de l’espace des maisons qui entourent le marché. Mais
contrairement au marché de Bohicon, celui de Houndjro n’a encore englouti des maisons. Les rues
qui mènent au marché ne sont pas complètement bondées en saison sèche. La situation peut être
inversée en saison pluvieuse. Un peu plus loin sur les chemins qui desservent les villages environnants, certaines femmes s’installent pour acheter égussi, maïs et autres produits agricoles provenant des environs: c’est une sorte de marché périphérique.
Plusieurs stands de produits sont rencontrés sur le marché de Houndjro. Il s’agit
o des produits agricoles (céréales, légumineuses, oléagineux, l’igname, le taro, les produits maraîchers),
o les produits de transformation (gari, lio, cossette d’igname, farine d’igname, afitin, huiles33 ,
savons34 ),
o les produits d’élevage (animaux sur pieds : caprins, volaille, chat, chien ; la viande de bœuf et
de caprin),
o les produits de pêche : poisson fumé ou frais congelé,
o les produits de la vannerie et de la poterie,
o les produits manufacturés (tissus, produits utilisés dans la coiffure et la tresse, produits cosmétiques, etc.),
o les produits alimentaires industriels (conserves, pâtes alimentaires, sucre etc.).
A l’instar de Bohicon, les services de coiffure, de tresse, et de couture y sont offerts.
33
34
Il s’agit de l’huile de palme, l’huile d’arachide et de palmiste.
Outre le savon artisanal appelé ‘Kooungui’, on y rencontre les savons de mode de fabrication industriels comme le
palmida, les savons cosmétiques, etc.
70
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
2.2
ECOCITE
Les flux au niveau du marché de Houndjro
Les animaux, en l’occurrence les caprins et ovins, les produits maraîchers, et dans une moindre
mesure le afitin et le lio sont les produits auxquels nous nous sommes intéressés.
Les animaux
Le marché des animaux à Houndjro reste dominé par les caprins. On y observe quelques ovins, de
la volaille, des porcins et accessoirement des chiens. A 8h 40’, 152 cabris y étaient déjà dénombrés et 135 personnes35 avec autant d’hommes que de femmes. Seulement cinq vendeurs ont un
hangar, chacun d’eux disposant d’une moyenne de 10 têtes de cabris. Apparemment, ce sont les
plus grands du secteur. Les autres vendeurs restent debout en tenant en mains les cordes attachées
au cou de leurs animaux. Les moyens utilisés dans le transport des animaux pour le marché sont le
vélo et la moto.
La majeure partie des cabris vendus sur le marché de Houndjro provient des maisons situées dans
les villes d’Abomey et de Bohicon 36, et des villages environnants. Les animaux arrivent aussi de
la périphérie plus lointainte (jusqu’à 40 km) : Djidja, Agouna, Mougnon, Agonli, Tindji, Zakpota,
Zakpo, Agbangnizoun, Da-Handjigon, Kinta, Zounzonmè, Zoungbo, Sinwé, Avokanzoun, Sonou,
Gnizinta, Zogbodomey, Doumè, Otola, Lagbado, Avogbana, Zangonou, etc.
Les vendeurs de petits ruminants sont bien organisés en association. Toute intégration à cette filière est subordonnée à un accord et au versement d’une « dot ».
Les animaux volés sont également vendus dans le marché Houndjro. Selon les dires des vendeurs,
les anciens reconnaissent les animaux volés et ne les achètent pas. Les nouveaux qui intègrent le
segment sont initiés à cette technique, ce qui permet de préserver une certaine intégrité aux niveaux des vendeurs. Comment se fait cette initiation ? Comment reconnaît-on les animaux volés ?
Secret professionnel. La vente sur le marché est très réglementée. Un acheteur occasionnel a peu
de chance d’acheter sa bête auprès des cyclistes ou motocyclistes qui viennent des villages environnants du marché comme on l’observe dans le cas des vivriers.
Les porcins sont vendus dans les maisons ou après abattage, en quartiers de viande dans une multitude d’étalages situés partout dans la ville.
Les cultures maraîchères
Le gombo, les légumes feuilles tels que le gboman (Solanum sp.), le soman (Celosia sp.), la tomate et le piment sont les produits maraîchers les plus répandus sur le marché de Houndjro. Les
sources d’approvisionnement varient selon les saisons. La vallée du Couffo (Tandji, Togba) constitue l’unique source d’approvisionnement de Houndjro en saison sèche où les vendeurs sur le
marché sont essentiellement constitués des femmes d’Agbangnizoun. Mais les hommes sont également présents sur ce segment. Cinq ont été dénombrés. En saison pluvieuse, c’est Détohou et les
35
36
Il s’agit des vendeurs, des acheteurs, et des intermédiaires.
Bohicon ne dispose pas de marché de cabris. Cela semble interdit.
71
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
autres arrondissements d’Abomey qui constituent la source d’approvisionnement de Houndjro en
maraîchers. Il y a même une production maraîchère entre les palais royaux. La majeure partie des
produits maraîchers est écoulée sur place où viennent s’approvisionner des consommateurs et des
revendeuses des environs de Bohicon et d’Abomey. Une faible quantité est écoulée sur Cotonou.
En résumé, la contribution de la commune d’Abomey à l’approvisionnement de son propre marché semble significative pour les petits ruminants, la volaille, le lio, le afitin et en partie pour le
maraîchage.
2.3
Modes et stratégies d’approvisionnement et d’écoulement
On distingue plusieurs circuits d’approvisionnement/achat :
o le circuit court (producteur-commerçant) : ceci se rencontre dans toutes les filières explorées.
o le circuit moyen (producteur-intermédiaire -commerçant) : ceci se rencontre également au
niveau de toutes les filières mais semble plus caractéristique des secteurs comme l’igname
(où les racoleurs et les relations semblent jouer un grand rôle), le gari, l’huile de palme, et
en général pour tous les produits provenant de longue distance.
Le produit peut être acquis au comptant, à moitié comptant, ou à crédit moyennant parfois des
majorations de prix comme cela a été observé à Bohicon. La vente à crédit intervient surtout en
période d’abondance. Ici aussi, elle permet à une frange de commerçantes de se maintenir dans la
filière.
Très peu de produits ont été étudiés sur le marché de Houndjro. Mais les produits qui y sont vendus sont ceux identifiés sur celui de Bohicon. Il est très probable que les stratégies d’écoulement
soient identiques sur les deux marchés. D’ailleurs, il y a des commerçants qui sont présents sur les
deux marchés à la fois.
Des cas d’avaries sont observés. Nous ne sommes pas en mesure d’avancer des chiffres à propos
de ce phénomène. Mais l’ampleur de ce phénomène varie d’un produits à un autre et touche beaucoup plus les produits périssables comme la tomate. Le gari échappe à ce phénomène. Les réactions des commerçants en cas d’avarie varie selon les produits et sont identiques à celles observées à Bohicon.
2.4
Conditions d’accès au marché
Le marché de Houndjro semble compartimenté selon les lieux de provenance. Ainsi, certains villages ont des emplacements sur le marché. Les cas de Détohou et de Zounzonmè sont rapportés.
Ceci ne concourt pas au développement de stands homogènes selon les produits (soji) comme
c’est le cas à Bohicon. Nombreux sont cependant les marchés qui fonctionnent suivant ce mode
d’accès à l’espace de vente. C’est donc d’abord à l’intérieur de sa propre communauté géographique que les négociations d’accès à une place dans le marché sont engagées. Il est très probable
que ceci offre plus de facilités d’accès au marché à un nouveau commerçant contrairement à ce
qui prévaut en général à Bohicon. Il reste que les mêmes modes d’accès rencontrés à Bohicon
vont se répéter ici. Mais certainement avec des ampleurs différentes.
A l’instar du marché de Bohicon, les possibilités d’expansion de celui d’Abomey sont limitées
même si le problème semble se poser avec moins d’acuité. Sa croissance reste conditionnée à la
72
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
capacité des riverains à louer leur construction pour servir de point de vente ou de magasin. Et
cette possibilité se réduit chaque jour un peu plus. Seule une croissance verticale pourrait permettre à ce marché de se développer harmonieusement sur quelques années encore.
2.5
Gestion du marché Houndjro
Le marché d’Abomey s’anime avec une périodicité de 4 jours. Il est géré par un comité de gestion
présidé par le chef de la circonscription urbaine ; aujourd’hui le maire de la commune. Ce comité
veille au fonctionnement du marché37. Les recettes communes du marché sont constituées de taxes
prélevées sur les commerçants par des agents collecteurs au service du comité de gestion. Sur ces
dernières années, les recettes générées par Houndjro sont supérieures à celles du marché de Bohicon qui est pourtant beaucoup plus grand. Une analyse comparée des modes de gestion de ces
deux marchés serait intéressante.
En outre, il existe sur le marché des associations de commerçants qui essaient de coordonner les
actions au niveau des stands. Un magasin de stockage loue des places aux commerçantes qui veulent mettre leurs produits en lieu sûr.
2.6
Opportunités et contraintes, et plus particulièrement celles liées à la périurbanité
L’essor du marché de Houndjro reste handicapé par celui de Bohicon. Il joue un rôle de second
plan par rapport à Bohicon. Mais ce marché a une spécialité que n’a pas celui de Bohicon : la
vente de petits ruminants.
Abomey constitue avec Zakpota les communes les plus peuplées du Zou derrière Bohicon. Ce qui
entretient une demande croissante en vivriers. C’est un atout potentiel pour l’agriculture périurbaine. Mais d’un autre côté, cela peut constituer une contrainte pour cette même agriculture
consommatrice d’espaces en réduisant les superficies cultivables.
Abomey est relié directement au plateau Adja ainsi qu’à Djidja qui demeure de grandes zones de
production agricoles. Il peut servir de relais dans la commercialisation de ces régions.
2.7
Problèmes fonciers et environnementaux
Quoique que apparemment mineurs, des problèmes environnementaux se posent sur le marché
d’Abomey :
o Le marché est encombré de déchets ménagers (feuilles d’emballage, légumes non vendues) et de sachets plastiques38 .
o Houndjro est traversé de part et d’autres par de principales artères. Ce qui, à l’instar de
Bohicon pose des problèmes de sécurité aussi bien pour les usagers que pour les riverains.
o Le marché fait l’objet d’inondation régulièrement à la faveur des pluies.
o Les stands d’animaux séchés constituent une source d’odeurs à l’origine de désagrément
pour les riverains tout comme pour les passants.
37
38
Notamment assurer les dépenses de fonctionnement et d’investissement, collecter les ordures.
Ainsi, les gens viennent de chez eux, polluent l’emplacement et repartent dans leurs maisons et ceci tous les 4 jours,
ont illustré Babadankpodji et Akobi
73
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
A l’instar de celui de Bohicon, un besoin d’assainissement de ce marché se fait sentir chaque jour
un peu plus.
2.8
Enjeux, groupes stratégiques, expériences et les besoins de concertation
Marché et survie des acteurs
Le marché semble une plaque tournante incontournable pour de nombreuses personnes. Ceci témoigne de son importance dans l’existence des acteurs. Les stratégies restrictives à l’intégration
dans certaines filières vont dans le même sens.
Enjeu financier
Le marché de Houndjro constitue une source de revenu pour de nombreux acteurs à savoir :
o la commune : le marché de Houndjro a drainé sur ces dernières années plus de recettes que
celui de Bohicon qui pourtant fait l’objet de trafic plus intense. C’est une source de revenu
importante pour la commune qui pourrait venir en appoint au secteur du tourisme.
o De nombreux commerçant(e)s et intermédiaires sont présents sur ce marché les jours
d’animation. Tous ceux-là tirent une part de leur revenu du fait de cette infrastructure.
o Les propriétaires de locaux tirent un revenu substantiel de la location de ceux-ci.
3.
Thèmes de recherche pour Ecocité
Quelle est la contribution réelle de Bohicon à son propre approvisionnement en vivriers ? Les
consommateurs trouvent-ils réellement tout ce dont ils ont besoin localement ?
Quels filières, acteurs et structurations encourager pour que l’agriculture périurbaine et urbaine
trouve facilement des débouchés. Pourquoi certains produits frais ne sont ils pas produits en zones
de proximité et écoulés sur ces marchés de Bohicon et d’Abomey ?
Dans quelles conditions le marché de Bohicon peut il croître durablement tout en restant à son site
actuel ? Quel sera l’impact du projet de construction d’un nouveau marché sur l’actuel si ce projet
était concrétisé ? A qui appartient le marché, qui en gère les taxes formelles et informelles et à
quelles fins ?
Les enjeux fonciers dans le marché de Bohicon : un marché public dans des espaces et avec des
constructions privés ; modalités actuelles d’expansion du marché; et liés à ces enjeux, ceux de
contrôle des taxes et droits de place sur le marché.
Stockage, salubrité et sécurité dans le marché pour les différents types d’acteurs.
Quelles sont les spécialités du marché d’Abomey et ses avantages comparatifs par rapport aux
autres marchés, en particulier Bohicon, avantages qui pourraient être renforcés par une bonne
concertation entre acteurs. Quels sont alors ces acteurs. On peut par exemple penser à faire
d’Abomey non seulement un marché de petits ruminants à vocation régionale mais aussi un marché de gros bovins (avec fonction de transit est-ouest et nord-sud), sans oublier le reste des autres
produits animaux qui pour l’instant ne transitent pas par les marchés.
Dans quelles conditions le marché d’Abomey peut-il croître durablement tout en restant à son site
actuel ?
74
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
VIII. AMÉNAGEMENT DES ESPACES URBAINS ET PÉRIPHÉRIQUES
H. Edja, J. Fanou et R. Mongbo
1.
Principaux instruments d’aménagement
1.1
Le Plan Directeur d’Urbanisme
Le dernier Plan Directeur d’Urbanisme (PDU) des villes d’Abomey et de Bohicon a été élaboré en
1990 pour un horizon de 5 ans (1990-95). Les études préparatoires ont été menées entre 1987 et
1990 dans le cadre du Projet Urbanisme Bénin (PUB). Une de ses composantes importantes est le
plan d’occupation des sols, qui dénote de la conception et de la vision des promoteurs dans leur
stratégie d’aménagement de l’espace urbain et sa périphérie.
Le plan d’occupation des sols distingue quatre catégories principales :
Les zones d’habitation,
les zones loties,
les zones en cours de lotissement et
les équipements.
L’habitat, le lotissement et les mesures d’assainissement post – lotissements en sont donc les éléments principaux. Ces derniers font de ce plan un instrument essentiellement urbanistique qui
laisse peu de place aux mesures d’aménagement et de protection de certains espaces sensibles
comme les terres agricoles périphériques et les écosystèmes fragiles.
Entre 1995 et aujourd’hui, les villes d’Abomey et de Bohicon n’ont pas disposé d’un plan directeur officiellement validé. Le processus de validation n’a pu être bouclé jusqu’en 1995, date limite
officielle de l’expiration du plan élaboré en 1990. En 2001, des travaux d’actualisation ont démarré et on attend aujourd’hui que ces derniers aboutissent à l’adoption d’un nouveau plan directeur
pour les années à venir.
Pour comprendre les caractéristiques du PDU et les mutations ultérieures qu’il a subies, il est important d’analyser le processus de son élaboration et de sa mise application. L’élaboration du
PDU de 1990 et le processus actuel de son actualisation sont en effet des moments importants de
planification urbaine qui soulèvent ces divers problèmes.
Emergence du PDU (1987 - 90)
Au départ de l’élaboration de ce plan, il y aurait des besoins exprimés par les chefs de circonscription urbaine (CU) d’Abomey et de Bohicon. Puis, les services déconcentrés de l’Etat comme la
DDEHU, et l’IGN en collaboration avec les services techniques départementaux comme les services d’urbanisme et des affaires domaniales sont chargés de la traduction technique de ces idées.
L’idée de projet PDU rédigée et signée de ces deux chefs de circonscription urbaines est envoyée
au ministère de l’habitat et de l’urbanisme qui, à travers ces requêtes, est officiellement invité à
mettre ses compétences techniques (SERHAU-SA, Service d’urbanisme) au service des deux municipalités.
75
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Phase d’élaboration et de mise en application
Dans une étape suivante, la commission départementale d’urbanisme examine le projet SERHAU
– SA. Elle consulte les autres acteurs locaux et procède à des enquêtes de vérification de
l’applicabilité de la proposition de plan directeur, eu égard à un certain nombre de réalités locales
(par ex. la pertinence ou non de lotir certaines zones).
Le plan corrigé est adopté par le comité départemental d’urbanisme après une procédure
d’enquête et d’ouverture de registres dans les quartiers de villes des deux circonscriptions urbaines.
La validation qui intervient par la suite oblige le projet de plan adopté à l’échelon local à passer
devant la commission nationale d’approbation des plans, structure chargée de les introduire en
conseil des ministres. Pour des raisons qui restent encore à élucider, cette phase de validation n’a
pu être bouclée jusqu’en 1995, année d’expiration du PDU des villes d’Abomey et de Bohicon.
Le PDU de 1990 n’ayant pas pu franchir l’étape de son adoption en conseil des ministres, il n’a
jamais connu une validation officielle. Toutefois, il est resté (et reste encore) le document de base
auquel les décideurs locaux se réfèrent pour des actions d’urbanisation (cf. ci-dessous les opportunités du PDU).
Observations sur l’implication des acteurs dans la formulation du PDU 1990
La SERHAU – SA et l’IGN sont les deux structures techniques (du MEHU) les plus actives dans
les phases initiales de l’élaboration du PDU de 1990. Leur intervention est remarquable dans les
enquêtes préliminaires (SERHAU-SA), l’établissement des fonds de cartes (IGN) et l’élaboration
d’un premier draft de plan directeur soumis à la commission départementale d’urbanisme.
La place du MEHU est centrale dans la rédaction des besoins de la municipalité, y compris dans la
recherche du financement et dans la mise en application du plan directeur. Le caractère central de
sa position explique aussi le fait qu’il joue les premiers rôles dans les décisions d’actualisation des
plans.
Interrogé sur les logiques qui, dans le cadre de l’élaboration du dernier plan d’urbanisme des villes d’Abomey et de Bohicon, ont conféré une place centrale à la SERHAU - SA, un de nos interlocuteurs soulignait l’importance de la question du financement, notamment en rapport avec la
possibilité d’obtention de fonds nécessaires à la réalisation du PDU. Pour notre informateur en
effet, « … l’élaboration du plan d’urbanisme est un processus coûteux (tant en moyens humains
que matériels) qui va au delà des moyens limités d’une CU (aujourd’hui commune). Pour lui, il
n’est pas étonnant de voir les services du ministère (MEHU) jouer les rôles essentiels dans la formulation et la planification des besoins de la municipalité. De l’avis de cet agent de
l’administration, tout se passe comme si la faible capacité de participation des mairies aux opérations de financement semble œuvrer à une situation tacite de "délégation" de certains pouvoirs de
décisions aux services compétents du MEHU.
1.2
Le lotissement
Les principaux éléments du plan de lotissement et de viabilisation des villes d’Abomey et de Bohicon sont les terrains (bâtis ou non), le plan de voirie, les réseaux d’eaux, les réseaux
d’électricité, le plan d’assainissement, les équipements, les espaces verts et les réserves administratives. Pour ce qui concerne plus particulièrement le plan de lotissement, on pourrait ranger ces
divers éléments en trois rubriques comprenant :
-
les éléments centraux du plan de lotissement : terrains bâtis ou non bâtis ;
76
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
-
ECOCITE
les éléments vulnérables ou instables : les espaces verts et les réserves administratives ;
les éléments absents : les espaces agricoles (vergers, champs de cultures vivrières) et les
écosystèmes fragiles.
Les notions de « terrains bâtis », « terrains non bâtis » fondent l’essentiel du langage du lotissement. Les techniciens (géomètres) qui opèrent sur le terrain travaillent sur la base de cette distinction qui les amène bien évidemment à ignorer tout ce qui ne pourrait pas être rangé dans ces catégories (ex. des vergers et autres espaces agricoles).
Les espaces verts et les réserves administratives sont ici considérés comme éléments vulnérables
en ce sens que la probabilité de leur affectation à des fins auxquelles ils sont originellement destinés est inférieure à l’unité. Ils disparaissent dans la phase d’application, ou bien, dans le meilleur
des cas subissent des réductions de superficies.
L’espace agricole, les plantations, etc. sont ignorés et rangés dans la rubrique des terrains non
bâtis. Ils constituent les grands absents du plan de lotissement.
Le lotissement à Abomey: des opérations rarement bouclées
Sur 9 arrondissements que compte la ville, trois ont un caractère urbain et les six autres, situées à
la périphérie de la ville, ont un caractère rural.
Diverses initiatives de lotissement (tableau 8.1) de certains quartiers de ville d’Abomey ont
échoué, y compris les « lotissements forcés » ou « lotissements sous pression » menées pendant la
révolution (1972-90). Le lotissement de Goho1, entamé en 1974, n’a pu franchir l’étape de
l’« Etat des lieux ». A Goho 2, l’aventure du lotissement s’est arrêtée à l’étape de recasement,
entre-temps devenu un casse – tête pour les initiateurs de ce projet.
L’organisation socio - politique de l’espace dans le centre de la ville historique et royale n’est pas
toujours compatible avec la logique du lotissement et de la parcellisation. Dans la périphérie
d’Abomey par contre (cas du contournement), les opérations de lotissement se déroulent avec
moins de difficultés. Toutefois, les présumés propriétaires ne manifestent pas une grande disposition à verser les contributions financières attendues d’eux.
Le cas d’Abomey montre que la logique de lotissement tous azimuts n’est pas appropriée pour
toutes les villes. Il révèle en particulier que certains noyaux de la ville pourraient être épargnés du
lotissement au profit d’autres types d’actions d’urbanisation et d’assainissement : tracé des voies
par exemple.
77
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Tableau 8.1: Les lotissements à Abomey - Bohicon
Ville
Quartier / Zone
Année de Superficie
démarrage
Nbre
de Cabinet en charge
parcelles
1974
Service des TP
Clôture administrative
non faite
SOCOGIM
Moins de 78%
recasement
IGN
Etat des lieux
Goho1
1985
Goho2 (Djebé)
Abomey
Objectif (national) de 50 ha
autour des villes
Zone de contournement (tranche 1994
1 – 2 – 3)
Djimè,
Tohizanli,
Sèhoun, 2002
Agnagnan (dans le cadre du
lotissement du contournement de
Bohicon)
1936
Etat d’avancement
de
Etat des lieux
Objectif de tracé des voies Administration
desservant le marché, le com- coloniale
missariat de police
Tracé de quelques
voies qui convergent
vers le centre - ville
Centre – Ville
IGN
1984
146 ha 77a 30ca
2ème phase contestée
– non bouclée
Honmèho A
1985
197 ha 8 a 59ca
IGN &
CTTC
Honmèho B
1985
370 ha environ
IGN
Zakpo
Bohicon
Zones de contournement / zones 2002
périphériques (Avogbana, Saclo,
Lissezoun, Sodohomé)
1ère phase bouclée
cabinet Recasement en cours
Phase d’application
Etat des lieux
Source : Enquête diagnostique des territoires
Le lotissement à Bohicon: des opérations gérées avec succès
La ville de Bohicon compte 10 arrondissements dont 2 de nature urbaine et 8 plutôt ruraux. Les 2
arrondissements urbains ont fait l’objet de lotissements aujourd’hui presque bouclés.
La première expérience de lotissement a été vécue pendant la période coloniale. L’objectif de
l’administration était de procéder à un tracé des voies convergeant tous vers le centre ville et permettant un accès facile au commissariat de police et au marché.
Le lotissement de Zakpo, entamé en 1984, a connu des résultats mitigés. La première phase a été
relativement bien conduite tandis que pour la deuxième phase, on signale de nombreuses irrégularités, avec une étape d’état des lieux bâclée (caractérisées par de nombreuses omissions de noms
de personnes, des superficies mal enregistrées, des permutations de noms, des titres fonciers morcelés, etc.). Ce lotissement a généré des poursuites judiciaires à l’encontre de la circonscription
urbaine.
Les lotissements de Honmèho A et Honmèho B ont par contre connu des succès relatifs. Ils apparaissent comme des étapes importantes vers la mise en chantier de futurs projets de lotissement
dans la commune au cours des prochaines années, dans la double perspective de donner à la ville
de Bohicon un caractère urbain et, si possible, l’ériger au rang de « ville à statut particulier ».
78
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Les étapes du lotissement
Selon les acteurs impliqués dans les lotissements, il s’agit d’une opération qui se déroule en plusieurs étapes. Les étapes successives et leurs contenus respectifs font l’objet d’une présentation
quelque peu différente selon l’administration et des responsables de comité de lotissement.
Le lotissement d’après l’administration
Les agents de l’administration évoquent les étapes de l’initiation, de l’état des lieux, de l’étude, de
l’application puis du recasement.
1) Initiation
L’initiation commence avec l’expression du besoin de lotissement par le chef de quartier de ville
ou autres acteurs de quartiers de ville. Elle se poursuit par la formulation de la demande à adresser
au comité de lotissement, puis l’acceptation de la demande, le recrutement d’un cabinet géomètre
et la mise en place du comité (local) de lotissement.
2) Etat des lieux
Il correspond aux opérations de recensement des terres et de leurs détenteurs actuels sur la base de
la distinction entre foncier bâti et foncier non bâti. Cette phase du lotissement est gérée par un
cabinet géomètre et le comité de lotissement du quartier de ville ; l’administration ne se rend pas
sur le terrain lors de la réalisation de ces opérations.
3) Etude
C’est la phase d’élaboration du plan parcellaire provisoire à soumettre à l’enquête commodo incommodo. Durant cette phase, le comité départemental d’urbanisme et les services techniques
déconcentrés travaillent sur les divers projets de viabilisation : plan de voirie, réseaux d’eau,
d’électricité, d’assainissement, carte d’équipement et espaces verts.
4) Application
Pendant cette phase, des opérations de tracé des voies et autres actions de viabilisation sont entreprises.
5) Recasement
Le recasement concerne l’attribution des parcelles.
Le lotissement d’après un membre du comité de lotissement de quartier de ville
Sur la base de ses observations dans le cadre des lotissements de Goho 1 et Djimè – Tohizanli –
Sèhoun), un des responsables de comité de lotissement évoque quant à lui les phases de la sensibilisation des propriétaires terriens, de l’état des lieux, du versement des frais de lotissement, du
lotissement proprement dit puis du recase ment.
1) Sensibilisation des propriétaires terriens sur la nécessité du lotissement
Un des points importants de cette étape serait l’invitation faite à chacun des propriétaires de marquer les limites de sa parcelle en prélude à l’étape suivante d’état des lieux.
2) Etat des lieux
Recensement des propriétaires terriens et détenteurs de terres achetées.
3) Versement des frais de lotissement
79
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Invitation de chaque propriétaire à payer des frais de lotissement qui s’élèvent à 48.000 FCFA par
parcelle lotie (pour le cas d’Abomey).
4) Lotissement
C’est la phase où les voies sont tracées et les parcelles sont rendues visibles.
5) Recasement
Installation des déplacés et autres acquéreurs de terres sur les terres loties.
Comme on peut s’en apercevoir, la parcellisation et l’ouverture des voies sont les phases essentielles du lotissement dans la conception de notre interlocuteur. Le terme de lotissement est en
particulier compris en rapport avec ces deux opérations.
Le lotissement en zones périphériques
A Bohicon, le lotissement des zones périphériques est une initiative assez récente qui fait suite
aux lotissements de la frange urbaine. Dans la plupart de ces opérations, on en est encore à l’état
des lieux. On observe ainsi des lotissements en cours à Kpassagon, Sodohomè (le long du
contournement et au début de la grande voie Est-Ouest), etc.
1.3
Contraintes et opportunités sur les instruments d’urbanisme
Contraintes et opportunités du plan directeur d’urbanisme
Outil de référence : Quoiqu’il n’ait pas connu une validation officielle, le plan d’aménagement
élaboré en 1990 est le document auquel les comités d’urbanisme et de lotissement des villes
d’Abomey et de Bohicon se réfèrent pour prendre des décisions d’aménagement: construction de
marché, délimitation de la zone de contournement des deux villes. C’est un important outil de
support aux initiatives de raccordement de ces deux villes avec leurs périphéries ;
Support important des actions de concertations: En l’absence d’un nouveau plan, le PDU de 1990
est un outil de support pour des concertations entre acteurs.
L’ignorance du contenu du plan directeur d’urbanisme: Cette ignorance ne frappe pas que les populations à la base. Elle concerne divers acteurs, y compris ceux qui sont impliqués dans sa mise
en application (certains responsables de l’administration par exemple).
Détournement des réserves administratives à d’autres fins: Il se traduit par l’usage d’une partie
des réserves administratives prévues par le plan d’aménagement à d’autres fins, par ex. le recasement des populations lors du lotissement, en particulier les personnes sinistrées.
Contraintes et opportunités du lotissement
Elles sont multiples :
Attitude de méfiance et de crainte du lotissement: Chacun veut conserver ses terres, craignant
qu’à la faveur des lotissements, ces dernières soient arrachées.
Mauvaise compréhension de la logique du recasement: Les propriétaires ne comprennent pas que
des acquéreurs de terres auprès de l’administration (ou même des propriétaires terriens) soient
recasés sur des parcelles qui leur sont retirées par suite de l’application du coefficient de réduction;
80
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Problèmes liés aux irrégularités et erreurs techniques. La responsabilité de ces problèmes est généralement imputée aux cabinets géomètres;
Assignation en justice : Par suite de la multiplication des erreurs (comme par exemple de morcellement de terres immatriculées), on a assisté à Bohicon à des poursuites judiciaires lors du lotissement de Zakpo.
Difficultés de recouvrer les frais de lotissement: Peu de gens versent les frais de lotissement, rallongeant ainsi indéfiniment la durée du lotissement qui peut aller (dans le meilleur des cas) à 5, 10
ans ou même ne jamais connaître une clôture officielle.
Le recasement dans des zones sacrées : Il procède des erreurs de la phase d’étude.
Une mauvaise gestion de l’information: Certains déclarent ne pas être informés quand les géomètres arrivent sur le terrain. Pour les membres du comité de lotissement cependant, il s’agirait d’une
mauvaise foi, car les populations seraient informées longtemps à l’avance de l’arrivée de ces
géomètres ; soit les gens ne viennent pas aux réunions, soit ils envoient des enfants qui en profitent pour enregistrer des portions pour leur propre projet de construction.
Non compréhension des intérêts d’un lotissement sans viabilisation: Certains ne comprennent pas
les intérêts du lotissement sans viabilisation : pas d’ouverture de voies, pas des poteaux électriques (Djègbé).
Outil de négociation des certains enjeux de la décentralisation, par exemple l’accès au titre de
« ville à statut particulier ». La possibilité de raccorder la ville à sa périphérie et de pouvoir justifier une continuité de l’espace urbain sur 10 km est un des objectifs du lotissement à Bohicon.
Espoir d’une viabilisation dans un proche avenir : Les populations espèrent l’arrivée prochaine de
l’électricité, de l’eau courante, du téléphone, etc. L’intérêt des populations en général, de celles
des zones périphériques en particulier, procède de cette attente et de cet espoir qu’offre le lotissement.
2.
Problèmes fonciers en périphérie des villes de Bohicon et Abomey
2.1
Les modes d’accès à la terre
L’achat et la location: Ils sont en pleine expansion à la périphérie d’Abomey. A Détohoun par
exemple, l’achat aurait augmenté de 20 à 40% en 10 ans. Les urbains d’Abomey achètent des
terres et les prêtent ou les louent aux paysans. A Kpassagon, en zone périphérique de Bohicon, la
location est peu pratiquée.
Le prêt: Cet arrangement est répandu. Là où le marché de la terre est peu développé en zone périphérique, le prêt occupe une place importante. A Kpassagon, le prêt est développé, les femmes
obtiennent la terre à titre de prêt sans contrepartie de la part du mari, d’un frère ou du père.
L’héritage: Il a diminué de 60% à 20% en 10 ans à Détohoun au profit de l’achat et de la location.
Les arrangements fonciers peu fréquents : Ils concernent le métayage et le gage. A Kpassagon, les
contrats de type location (et le métayage) ne semblent pas fréquents, mais les gages existent probablement. Dans tous les cas, l’exploitant entretient la palmeraie et ne peut exploiter les fruits
sans autorisation du détenteur de terre.
2.2
Le marché de la terre
Les ventes de terre ont commencé à Kpassagon depuis 1975 environ. Un champ d’un hectare était
alors vendu à un autochtone à 20.000 FCFA environ. A partir des années 80, la terre est de plus en
81
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
plus vendues pour la résolution de divers problèmes : maladie, etc. Parmi les cédants, les héritiers
non agriculteurs constituent une catégorie importante. Une bonne partie de ces terres est vendue à
des autochtones qui en achètent pour agrandir leurs champs ou propriétés.
Actuellement, un carré de 25m sur 25 proche du goudron coûte 100.000 FCFA. Plus loin en plein
champ, 2 à 3 ha sont vendus avec palmeraie à 200.000 FCFA. De plus en plus, les étrangers
commencent à s’y intéresser (fonctionnaires, commerçants etc.), pour l’instant sous la forme de
champ plutôt que comme carré d’habitation.
2.3
Les dynamiques foncières liées aux lotissements des zones périphériques
A Kpassagon, les populations cultivent dans la partie nord de la « zone industrielle viabilisée » où
elles disposent des anacardiers, des palmiers et des champs de maïs. Ici elles pratiquent
l’agriculture dans l’attente du recasement et du dédommagement qui accompagneront leur évacuation de la zone. D’autres paysans du même village anticipent et vont à la recherche de terres
vers Za-Kpakpamè (commune de Za-Kpota) où subsistent encore des possibilités d’acquérir de la
terre sous forme de prêt auprès de proches parents.
2.4
Les enjeux d’accès aux terres à fort potentiel agricole
L’accès aux bas-fonds
Le village de Dan-Tota est traversé par un faisceau de ruisseaux qui forment un petit bassin propice à l’activité de maraîchage de contre – saison. L’accès à ces terres - déjà appropriées par certains lignages du village – génère des arrangements entre détenteurs de terres et maraîchers. Il
convient d’étudier en détail ces arrangements dans la phase d’enquête approfondie.
Les conflits frontaliers
Les villages de Dan et Dan-Tota nous en offrent un exemple, lié au fait que les ruisseaux ci-dessus
cités traversent les deux villages protagonistes en répartissant les terres de maraîchage (d’étendue
toutefois limitée) de part et d’autre des deux terroirs villageois. Les velléités à repousser les limites du terroir de l’autre côté de la frontière villageoise (par inclusion de nouvelles superficies dans
le terroir d’appartenance) sont fréquentes.
Les terres de maraîchage ne constituent pas la seule pomme de discorde entre les deux villages, il
y a également les problèmes d’accès et de distribution des ressources des carrières de graviers.
Les conflits d’accès et de contrôle de ressources naturelles non renouvelables
Le contrôle des ressources de la carrière de graviers de Dan constitue un bon exemple de ce type
de conflits.
Il se rapporte à la distribution de la rente de prélèvement de graviers de la carrière de Dan. La
rente est versée à ce village par des compagnies étrangères de construction de routes qui opèrent
actuellement sur l’axe routier Cotonou – Dassa-Zoumé. La carrière se situe à cheval sur les terroirs de Dan (commune de Djidja) et Dan-Tota (Za-Kpota). Jusqu’ici, les sommes versées par les
compagnies auraient seulement profité au seul village de Dan. Les enjeux de la décentralisation,
notamment en rapport avec la recherche de recettes pour chacune de ces deux communes voisines
(Djidja et Za-Kpota) expliquent en partie l’extériorisation de ce conflit.
82
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Les conflits d’usage de l’espace agricole et des zones de pâturage
Ces conflits entre éleveurs de bovins et cultivateurs à la périphérie des villes sont abordés dans le
chapitre VI.
3.
Problèmes environnementaux
Les problèmes environnementaux liés aux options de planification et d’aménagement de l’espace
urbains tournent surtout autour de la question des ordures ménagères. Ils peuvent être regroupés
en trois catégories :
o Inexistence de zones de décharges (intermédiaires et finales) dans le plan d’aménagement
Le plan directeur de 1990 ne prévoit pas de sites de décharges ni intermédiaires, ni finales. Les
divers arbitrages qui ont récemment été menées pour affecter des portions de terres à des projets
(ex. des zones viabilisées au nord et au sud de Bohicon) montrent qu’il existe des passerelles pour
trouver des sites de décharge aux ordures ménagères et autres déchets industriels. La question ne
semble pas d’actualité dans l’arène locale, si bien que les monticules d’ordures inondent toujours
les villes (notamment Abomey).
o
Des dépotoirs sauvages qui créent des difficultés d’assainissement et d’aménagement
Pour certaines personnes interrogées « les gens se résignent et vivent avec des ordures ... C’est
quand on parle d’ordures qu’ils semblent conscients du problème ». « … la solution est d’avoir
une décharge finale, transformer les ordures en autres choses utilisables par la population ».
L’une des tâches urgentes est donc l’enlèvement des ordures existantes et leur convoyage vers les
décharges finales qui restent à identifier.
o Une inadaptation du concept de recouvrement des coûts de collecte au niveau de chaque
ménage
Les problèmes d’enlèvement d’ordures sont en partie liés à la difficulté de mettre en place des
stratégies de recouvrement des frais de ramassage dans les zones non loties (cf. chapitre sur Ordures et Ruissellement). Dans le cas d’Abomey, cette difficulté se double du mode d’organisation
sociale en collectivités familiales que les ONG de collecte n’arrivent pas à intérioriser dans leurs
stratégies. Les collectivités comportent plusieurs noyaux qu’il convient d’identifier pour déterminer les modalités et le montant de la facture à régler par entité ou sous-entité familiale.
83
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
4.
Enjeux, groupes stratégiques et expériences et besoins en
concertation
4.1
Une diversité des acteurs de la planification urbaine et du lotissement
A l’aube de la décentralisation, la planification urbaine implique une série d’acteurs ci dessous
énumérés mais qui devrait subir des modifications après transfert de compétences aux communes.
Les chefs de circonscription urbaine
Les chefs de circonscription urbaine (et aujourd’hui les maires) jouent des rôles importants dans la
gestion du foncier. Déjà dans la phase de pré – décentralisation, le pouvoir de gestion foncière de
ces autorités administratives est devenu plus évidente avec la mise en oeuvre des démarches participatives de planification urbaine exigeant, par exemple, une implication des populations dans
l’élaboration des plans d’aménagement (obligation que les besoins de lotissement soient exprimés
par la base, implication des populations dans la gestion du lotissement, etc.). Le maire est membre
permanent du comité de lotissement qu’il préside.
Le préfet
Les préfets ont été activement impliqués dans la plupart des opérations d’aménagement de
l’espace et de gestion du lotissement à travers les comités d’urbanisme et le service des affaires
domaniales de la préfecture (cf. ci-dessous). Depuis la révolution à aujourd’hui, ils sont apparus
tantôt comme des gestionnaires du processus ou bien des contre – poids aux chefs de circonscription urbaine.
Depuis 2002, une nouvelle répartition des tâches est intervenue dans la gestion des opérations de
lotissement dans la conurbation Abomey – Bohicon, parallèlement au démarrage du contournement de la ville de Bohicon et le lotissement de Djimé. Le chef de la circonscription urbaine devient le président du comité de lotissement et le préfet assure la coordination des travaux. Il
s’agissait sans doute là d’une anticipation à la décentralisation qui attribue désormais l’essentiel
des pouvoirs de gestion du foncier au maire.
Les services techniques de l’administration locale
Le service des affaires domaniales de la préfecture est l’un des plus actifs. Il est impliqué dans les
opérations d’élaboration de plan d’urbanisme, de lotissement et de délivrance des permis
d’habiter. Il dispose d’une représentation au niveau des deux circonscriptions urbaines : le service
des affaires domaniales de la circonscription urbaine, organe d’exécution des tâches à l’échelon de
la municipalité.
Les services des affaires domaniales de la circonscription urbaine sont sous double tutelle : préfectorale et municipale (placé sous l’autorité du maire). Dans le cadre de la décentralisation, il
conviendra d’observer et d’analyser les changements organisationnels nouveaux, de même que les
attributions nouvelles de cette structure.
Les services déconcentrés du MEHU et du MFE (finances)
On distingue le DDEHU, l’IGN et le service des impôts. Les rôles et tâches de la SERHAU – SA
et de l’IGN ont été analysés plus haut dans le cadre de l’élaboration du plan directeur d’urbanisme
de 1990 pour les villes d’Abomey – Bohicon.
84
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
La commission départementale de l’urbanisme
Elle comprend les services de l’OPT, de la SBEE et la circonscription urbaine. Tous ces acteurs
sont impliqués, entre autres, dans les décisions relatives à la viabilisation des zones loties.
Les cabinets privés d’experts géomètres
Ils sont recrutés par le maire qui, dans son choix, donne la priorité aux cabinets locaux ou, au
moins, ceux qui disposent d’une représentation sur place. Assez souvent accusé par les populations d’être en complicité avec l’administration (ex. de la détermination du coefficient de réduction) ou alors par l’administration (qui peut lui reprocher des erreurs techniques relevées par la
phase de publicité commodo incommodo), le cabinet est au centre de la plupart des enjeux du lotissement.
Les chefs d’arrondissement / chefs de quartiers
Le chef d’arrondissement et les chefs de quartiers d’une zone à lotir sont d’office membres du
comité de lotissement et participent à des actions de mobilisation et de sensibilisation.
L’association de développement
Son rôle est perceptible dans la phase de sensibilisation, de mobilisation et d’explication des étapes et exigences du lotissement.
Les propriétaires terriens
Ils disposent de 3 à 4 représentants dans le comité de lotissement (en fonction du nombre de propriétaires présumés recensés dans le quartier de ville à lotir). Cette catégorie s’implique dans la
plupart des processus de négociation : coefficient de réduction, contre – proposition de plan de
voirie (notamment la largeur des voies à retenir, etc.).
Les représentants de propriétaires fonciers sont parfois le fer de lance de la contestation dirigée
contre certains membres du comité de lotissement (ex. des chefs d’arrondissement ou bien des
chefs de quartiers de villes) souvent parfois accusés d’être en connivence avec l’administration ou
bien les cabinets privés de géomètres contre les intérêts des populations.
Le comité de lotissement
Il regroupe toutes les structures et autorités ci-dessus citées : chef de la circonscription urbaine
(président du comité), préfet (coordonnateur), chef d’arrondissement, chef(s) de quartiers de villes, représentants de propriétaires terriens, services techniques de l’administration locale et services déconcentrés, association de développement et notables. Certains en sont membres permanents (chef de la circonscription urbaine, préfet, services techniques de l’administration locale et
services déconcentrés), les autres y siègent seulement durant la période de lotissement dans le
quartier de ville concerné par les opérations.
4.2
Une diversité des enjeux
Les enjeux autour de l’aménagement urbain sont variés. Nous nous contenterons ici d’en donner
quelques grandes catégories en évitant les détails, par ailleurs trop nombreux pour ce qui concerne
le lotissement.
Enjeux de l’élaboration et de l’adoption du plan directeur d’urbanisme
La constitution de réserves administratives en est une des phases sensibles de la planification urbaine. Dans cette phase, les enjeux tournaient autour du contrôle du processus par la souspréfecture et la circonscription urbaine. La redistribution des cartes qui accompagne le processus
85
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
actuel de décentralisation imprimera sans doute un tout autre caractère à ces enjeux de pouvoirs et
de contrôle des processus locaux de décisions relatifs à la planification urbaine.
Enjeux du lotissement
Chacune des phases du lotissement apparaît comme un moment crucial d’émergence des enjeux
(état des lieux, réalisation du plan parcellaire provisoire, détermination du coefficient de réduction, réalisation du plan de voirie notamment les dimensions des voies, l’attribution des parcelles,
le recasement, etc.). Les responsables de l’administration, les services déconcentrés, les cabinets
privés, les populations, les membres villageois de comité de lotissement et de recasement, etc.
sont autant d’acteurs qui jouent des intérêts particuliers.
Sur un autre plan, le lotissement des zones périphériques a induit dans les villages périphériques
des espoirs et attentes se traduisant par le fait que divers acteurs de l’échelon villageois (élus, propriétaires terriens, jeunes du village) se mettent d’accord pour accueillir l’urbanisation qui frappe
à leurs portes. Le consensus se fait, même au prix de l’expropriation des terres (cas de Kpassagon
en zone industrielle viabilisée où les populations n’ont pas opposé de résistances particulières à la
cession de leurs terres contre un dédommagement qu’ils attendent).
Perception des enjeux du lotissement chez les villageois (extrait des entretiens)
Tout le monde veut le lotissement à Kpassagon, car cela est perçu comme synonyme de l’arrivée
de l’eau et l’électricité et, peut-être, enfin un soutien pour la construction du marché du village.
Encadré 8.1 : Perceptions du lotissement en zone rurale
« Si mon domaine est loti, je transformerai le tout en carré en même temps. Tout ce que je peux construire, je le fais en
même temps. Pour le reste, je cultive jusqu’au moment où j’aurai les moyens de construire »
Quel serait alors le sort de ceux qui cultivent et vivent actuellement de ces terres?
« Sè do nu non gon do ton mè wa kpon » (Dieu n’abandonne jamais les siens. Il leur ouvrira de nouvelles voies)
Une femme :
« Je transformerai toute la palmeraie en carrés que je construirai pour la location. Cela me permettra d’espérer quelque
chose à chaque fin du mois »
« En fait, nos champs se situent pour la plupart derrière les rails (Est et Nord-Est). Nous ne pensons pas que le lotissement
irait jusque là »
Et les champs situés au Sud et à l’Ouest comme celui qui vous a été prêté ?
« Ce n’est pas bien grave. Au besoin, je pourrais partir en pays Maxi pendant la saison des cultures. Il y a de vastes terres
cultivables. Je reviendrais au village collecter le loyer » .
« De toutes les façons, quelles que soient les souffrances qui en découleraient pour nous, nous finirons par nous habituer. Il
n’y a pas si longtemps que ceux de Zakpo (Bohicon) gémissaient ici du fait des dégâts que leur causait le lotissement. Maintenant, ils sont heureux. Ils ont tout. Si c’était à refaire, ils en demanderaient. C’est pour ça que cela ne nous fait pas peur,
bien au contraire ».
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Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Enjeux du développement du marché de la terre
Le développement du marché des terres constructibles et l’avancée du lotissement ont des répercussions sur les terres périphériques. A Kpassagon, les urbains sont de plus en plus nombreux à
acheter la terre. Ils déclarent être intéressés par la pratique de l’agriculture. A Dan, leurs plantations sont discrètes, généralement pas au bord du goudron, dans des zones où ils peuvent acquérir
des superficies plus importantes (quelques hectares).
4.3
Besoins en concertation
PDU : Conciliation des intérêts spécifiques des mairies d’Abomey et Bohicon dans la réalisation
des tâches prévues par le plan directeur commun aux deux villes.
Parce que les villes d’Abomey et de Bohicon disposent d’un schéma directeur d’urbanisme commun, la préfecture jouait de façon implicite des fonctions de concertation à l’échelon supra – municipal. L’existence d’un tel cadre était nécessaire pour arbitrer les intérêts spécifiques de chacune
des deux mairies et explique d’ailleurs en partie le rôle important des ex-préfets du Zou dans les
procédures d’élaboration des plans d’urbanisme antérieurs.
Dans le cadre de la décentralisation, la préfecture n’est plus juridiquement outillée pour jouer ce
rôle et sera probablement obligée de libérer des espaces de concertation à des instances nouvelles
comme les ONG et autres institutions de la société civile.
Ordures : Concertation entre populations et administration locale pour la détermination d’une
zone de décharge et de traitement des ordures ménagères en l’absence d’un point de chute prévu
par le plan directeur d’urbanisme. Le plan de voirie nécessitera aussi des concertations entre usagers et services techniques. Les grands axes de collecte des ordures sont des éléments actuellement absents ou peu précis dans le plan d’aménagement. Aussi, la largeur des voies est un important point de discorde entre les techniciens et l’administration d’un côté, les populations de l’autre.
Ces divers problèmes exigent la mise en place d’un cadre de concertation entre ces divers acteurs.
Concertation entre industriels et populations locales
En zone périphérique, la valorisation des rejets industriels (graines de coton à la SOCOBE à
Avogbana) rentre dans les habitudes des populations qui les utilisent dans la fumure des champs.
Des négociations doivent être menées sur le coût de cession de ces sous-produits en rapport avec
les nuisances que causent les déchets non utilisées.
En zone urbaine, des concertations sont nécessaires pour une démarcation de la zone industrielle
des zones d’habitation.
4.4 Thèmes de recherche
Les thèmes suivants nécessitent des investigations futures :
o Analyse du processus d’actualisation du plan directeur d’urbanisme des villes d’Abomey
et Bohicon : L’actualisation du Plan Directeur d’Urbanisme des villes de Bohicon et
d’Abomey est une occasion pour observer et analyser le processus de négociation des
éléments d’un plan en rapport avec la priorité que se fixent les divers acteurs. Dans le cadre d’Ecocité, il convient d’examiner les dynamiques nouvelles qui s’opéreront dans la
gestion des processus d’élaboration des PDU, en particulier la capacité de ces élus et au-
87
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
tres acteurs locaux à négocier une marge de liberté plus importante qui les lierait moins à
l’approche essentiellement urbaniste des services techniques d’Etat.
o Le lotissement comme source de ressources communales : En raison des prélèvements en
nature, le lotissement permet à la commune de se constituer des réserves foncières qui
sont en partie au moins potentiellement des sources de revenus monétaires. Comment le
lotissement est-il intégré dans la recherche de ressources financières pour la commune et
dans les stratégies de spéculation individuelle des décideurs ?
o Réflexions sur les alternatives du lotissement dans la ville d’Abomey et sa périphérie : La
ville d’Abomey, nous l’avons vu ci-dessus, a connu très peu d’expériences de lotissement
bouclé. Quelques facteurs liés à la structure de l’habitat et à l’organisation socio - politique de cette cité royale ont été évoqués pour expliquer les échecs de lotissement au plein
cœur de la ville. Il serait illusoire de croire que, dans les zones périphériques immédiates
(actuellement visées par les plans d’extension de lotissement), la plupart de ces difficultés
ne subsisteraient pas. Comme le disait un des nos interviewés : « … les palais royaux ont
des tentacules assez puissantes sur les zones périphéries, symboles de l’extension des formes d’organisation politique et sociale vers l’arrière pays …». Il convient d’identifier les
facteurs et paramètres qui pourraient entrer en concurrence avec la logique de la parcellisation afin de dégager des alternatives au lotissement et amorcer des concertations entre
élus et populations locales.
o Dynamiques foncières liées aux lotissements de la frange rurale de la commune de Bohicon : A Bohicon, le lotissement des zones périphériques est une initiative assez récente qui
fait suite aux lotissements de la frange urbaine. Dans la plupart de ces opérations, on en
est encore à l’état des lieux. Les phases à venir : enquête commodo incommodo, tracé des
voies, recasement seront des moments privilégiés d’analyse et d’observation des dynamiques de lotissement dans ces zones périphériques.
o Accès et le contrôle des terres à fort potentiel de production de maraîchers à la périphérie
des villes (ex. des abords du fleuve Couffo) et les dynamiques nouvelles de l’achat des
terres à la périphérie des villes d’Abomey et de Bohicon.
o Achat de terres par les urbains : il faudra répondre ici aux questions de savoir si le mouvement des vergers et autres plantations suit celui du lotissement (stratégie spéculative) ou
bien si ces espaces agricoles ont souvent poursuivi des fonctions importantes de production agricole pour la ville.
o Mutations de l’espace agricole à la périphérie des villes de Bohicon et d’Abomey. Dans le
cadre du présent diagnostic, nos entretiens nous ont révélé que les populations n’attendent
pas passivement les phases d’évacuation pour trouver des solutions aux mutations nécessaires à la réorganisation de l’activité agricole. Déjà par rapport aux lotissements dans la
périphérie nord de Bohicon, des déplacements s’opèrent du côté de Za-Kpota (à partir de
Kpassagon) pour apporter des réponses à l’avancée de l’urbanisation et la substitution de
l’espace urbain aux terres agricoles. Dans les prochaines années, ces phénomènes pourraient se cristalliser davantage et il conviendrait de les suivre et les documenter.
88
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
IX. GESTION DES ORDURES, DES DÉCHETS INDUSTRIELS ET DES EAUX DE
RUISSELLEMENT
Anne Floquet et Augustin Kouévi, Juste Nansi et Simplice Vodouhè
1.
Gestion des ordures ménagères à Abomey et Bohicon
Les deux villes ayant des modalités de gestion des ordures ménagères très différentes, leurs cas
seront traités successivement.
1.1
Caractéristiques de la gestion des ordures à Abomey
Origine et ampleur des ordures
Les ordures à Abomey sont essentiellement d’origine ménagère. Ceux qui les produisent sont les
ménages /concessions et accessoirement les quelques services administratifs et infrastructures
sociocommunautaires implantés (centres de santé). A cela s’ajoutent les ordures du marché (invendus, avariés).
Compte tenu de la quasi-absence de gestion des ordures à Abomey, nous n’avons pu disposer de
chiffres pour étayer l’envergure des déchets solides ménagers produits dans cette ville. Pour
l’instant chaque ménage évacue ses ordures à la devanture de sa maison sur un tas plus ou moins
volumineux. Une partie est de fait valorisée par les cultures pratiquées aux abords des maisons
mais aucun tri préalable n’est effectué. Les abords même des palais royaux, patrimoine mondial
de l’humanité, sont utilisés comme dépotoirs (cf. photos).
Acteurs engagés dans la gestion des ordures
Les acteurs actifs dans l’activité de gestion des déchets solides ménagers à Abomey sont la Commune Urbaine, l’Association Municipale d’Actions Environnementales d’Abomey (AMAE) et
l’ONG ASPAB. Les interventions de la circonscription ont été quasi-inexistantes jusqu’à ce jour,
sauf opérations sporadiques d’évacuation de grands tas d’ordures.
La commune urbaine
La commune urbaine s’est constituée un domaine destiné à devenir une décharge finale pour les
ordures ménagères et situé à Détohou. Un entrepreneur a été sollicité pour la viabilisation de ce
terrain mais il a consommé la majeure partie des fonds obtenus par un PIP sans remplir ses engagements. La commune ne dispose d’aucun moyen pour se charger de l’évacuation finale des déchets des décharges intermédiaires vers cette décharge finale. Il ne semble pas y avoir de concept
pour le traitement des ordures ainsi accumulées. L’intervention de la commune urbaine s’est semble-t-il limitée à une opération « ville propre » où le tracteur du MEHU a été sollicité pour faire
évacuer les tas les plus visibles.
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Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Association Municipale d’Actions Environnementales
L’AMAE d’Abomey a été crée durant le processus d’élaboration du Plan Municipal d’Actions
Environnementales. Le PMAE est élaboré sur incitation et avec la facilitation du Ministère de
l’Environnement, de l’Habitat et de l’Urbanisme. C’est une association de citoyens élus pour mettre en œuvre ce plan et gérer les financements alloués à cet effet par l’Agence Béninoise pour
l’Environnement.
A Abomey, plusieurs microprojets ont été élaborés qui concernent la gestion des ordures ménagères mais tous n’ont pu être réalisés. L’AMAE a ainsi fait construire des bacs à ordures métalliques
pour les infrastructures collectives comme les centres de santé et les marchés. Le projet d’achat
d’un camion pour évacuer les ordures vers la décharge de Détohou n’a pu être financé (n’est du
reste pas inscrit dans le PMAE). Par contre les séances d’IEC, le renforcement de la pré collecte
par équipement de(s) ONG en charrettes et tracteur, la destruction des dépotoirs sauvages, la création de points de regroupement, activités qui étaient inscrites dans le PMAE n’ont pas été amorcées. Pourtant, le budget potentiel de 50 millions n’a été consommé qu’à moitié. Le contrat de
l’ONG APEPAH, qui assurait une collecte des ordures et avait été équipée en tracteur par le
MEHU a été dénoncé et l’ONG ASPAB qui travaille actuellement sur le terrain n’a pas de relations formalisées, ni avec l’AMAE ni avec la circonscription urbaine.
Par contre l’AMAE a pu équiper plusieurs écoles en latrines et citernes hors sol, construire des
ponceaux pour faciliter l’évacuation des eaux de ruissellement et la circulation (Mairie de Vidolé
et Sohoué).
Enfin, un petit square a été installé avec deux latrines encore non ouvertes aux usagers en face du
Motel d’Abomey. L’usage de cet espace « vert » n’est pas encore très bien défini.
Association de Solidarité et de Promotion des Artisans à la Base (ASPAB)
C’est un collectif d’artisans (12 membres actifs et une centaine d’adhérents) qui s’impliquent dans
la micro-finance, les mutuelles de santé, mais aussi la collecte d’ordures. Le collectif s’est constitué en ONG à cet effet. Les artisans se sont cotisés pour construire 4 charrettes et emploient des
charretiers. Les charretiers sont payés au prorata de leur collecte (50% des recettes). Le nombre
d’abonnés régulier est faible (50). Il faut y ajouter des abonnés sporadiques. N’ayant pas les
moyens d’évacuer les ordures vers la décharge finale, celles ci sont accumulées en pleine ville.
L’évacuation d’un dépotoir sauvage coûte 22.000 fcfca par jour de main d’œuvre, sans compter
les coûts liés au tracteur, ici prêté par le MEHU. La décharge n’étant pas aménagée, finalement,
les ordures ont été brûlées !
Une autre difficulté rencontrée par l’ONG est liée à la structure de l’habitat et à la pauvreté des
habitants. Les ménages vivent dans de grandes collectivités. Un seul abonné produit de ce fait une
grande quantité d’ordures. L’abonnement par maison est de 1000 fcfa/mois et 2000 fcfa/mois pour
les institutions. De plus, la « volonté à payer » pour évacuer des ordures ailleurs que sur un tas
proche de la maison ne semble pas très forte. « Pourquoi dépenser de l’argent alors qu’il y a des
trous et tas gratuits ? » Les impayés sont nombreux.
Les ONG travaillant sur les questions environnementales à Abomey cherchent à se regrouper.
Pour l’instant, elles envisagent surtout des activités de formation (IEC).
Gestion des ordures
L’activité de l’ONG ASPAB consiste à passer de concession en concession pour collecter les ordures contre une somme mensuelle de 1000 fcfa par concession et 2000 fcfa par institution. Le
nombre d’abonnés réguliers n’excède pas 50 ! Cette collecte se fait à l’aide de charrettes. Les
90
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
charretiers prennent 50% des recettes comme rémunération. Une fois collectées, ces ordures sont
versées non loin de la mosquée de Houndjroto.
L’évacuation des ordures du marché est assurée par des jeunes détenteurs de pousse-pousse ou
charrettes qui se font payer par les femmes du marché. Ces ordures sont déversées dans des trous.
La décharge finale n’est pas accessible par l’ONG faute de moyens roulants. La CU n’intervenait
pas dans le transport de décharge intermédiaire vers la décharge finale. Cette décharge, située à
Détohou, a fait l’objet d’un PIP pour son aménagement mais l’entrepreneur s’il a consommé le
fonds en grande partie, n’a jamais fini les travaux.
L’AMAE quant à elle n’a pu jusqu’ici que doter de poubelles le marché Houndjro et certains centres de santé. Pour ce qui est de l’évacuation des ordures, elle ne parvient à faire quoi que ce soit
actuellement. Elle attend d’acheter un camion afin de mieux participer à l’assainissement de la
ville d’Abomey. Une ONG avait été précédemment dotée d’un tracteur par le MEHU mais l’engin
n’est pas en service dans ce secteur actuellement.
1.2
Caractéristiques de la gestion des ordures à Bohicon
Origine et ampleur des ordures
A Bohicon également, les ordures sont générées essentiellement par les ménages, le marché et les
services administratifs et infrastructures socio–communautaires. Celles générées par les industries
de cette ville sont en grande partie gérées par des organisations propres à ces dernières.
La gestion des ordures de la ville de Bohicon est assurée par plusieurs ONG locales d’envergures
différentes. De plus, les déchets solides du marché ont été évacués régulièrement par la circonscription urbaine de Bohicon (mairie actuelle de Bohicon). Trois des quatre ONG enquêtées réunissent à elles seules 772 concessions abonnées, avec en moyenne 5 ménages par concession
(soit environ 772 x 5 = 1.870 ménages sur les 15.000 environ que compte la ville). Ne connaissant
pas avec précision la qualité ni le nombre de voyages (de tracteurs ou de charrettes) par ONG,
nous ne saurions donner de chiffre sur les quantités évacuées. En ce qui concerne les ordures du
marché, le camion de la circonscription fait en moyenne 8 voyages de camion de 8 m3 par mois
(soit 64 m3 d’ordures). Malgré ces efforts et organisations, il est toutefois remarqué que les tas
d’ordure sont encore nombreux à travers la ville, qu’il s’agisse de dépotoirs « sauvages » ou des
points de regroupement de l’AMAE remplis mais non vidés. Les ONG ne peuvent du reste que
collecter les ordures pour les rassembler dans des dépotoirs intermédiaires, faut d’évacuation jusqu’à une décharge finale.
Rappelons que la poubelle journalière moyenne au Bénin serait de l’ordre de 0,45kg par personne
et par jour (chiffres obtenus à Cotonou en 1997) ce qui correspond à environ 35 tonnes par jour
pour les quartiers urbains à Bohicon.
Acteurs engagés dans la gestion des ordures
Ici on note l’intervention de plusieurs ONG dont AGEPEUA, AGOMSE, GPCSH, AJPEC,
ASCOM, RroECOSARDI , COVEC (femmes du marché), CBDIBA… En dehors des ONGs, il y
a l’Association Municipale d’Actions Environnementales (AMAE) et la circonscription urbaine.
AMAE
L’AMAE a été mise en place en Juin 2001 dans le cours du processus d’élaboration du Plan Municipal d’ Actions Environnementales. L’élection du bureau a été difficile et finalement obtenue
91
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
sous la menace du MEHU de suspendre le financement du plan. Les dissensions n’étaient pas de
nature programmatique mais politique. Le chef de circonscription poussait des candidats et
l’opposition d’autres. Finalement les ONG engagées dans la gestion quotidienne des questions
environnementales ont été exclues en grande partie des instances dirigeantes. Jusqu’à aujourd’hui,
la communication ne semble pas être optimale.
Le PMAE prévoyaient des actions pour un montant de 695 millions sur 3 ans ! Les actions engagées réellement n’ont pas dépassé 12 millions.
Certains acteurs déplorent un manque de contrôle des services techniques de l’Etat pour faire
pression et garantir le fonctionnement démocratique des instances (bureau, CA).
ONG ASJEP (Association des Jeunes pour la Protection de l’Environnement et de la Culture)
Il s’agit d’une ONG crée en 1994 par des jeunes cadres. Ils souhaitaient contribuer à la formation
de la jeunesse et ont travaillé à l’appui à de nombreux groupements dans le Zou, à la création de
pépinières subventionnées par le MEHU. A partir de 1996, ils ont tenté d’éliminer de grands dépotoirs en sollicitant l’aide de la circonscription urbaine puis en 1997 ont demandé des charrettes
au DDEHU qui se sont révélées trop lourdes. Ils ont sollicité 2 charrettes de l’AMAE. Aujourd’hui, ils assurent la collecte de 50 abonnés pour une cotisation de 1000 f/maison et chargent
ces ordures vers un lieu de collecte intermédiaire d’où elles ne sont plus que rarement évacuées
par la Circonscription Urbaine.
Selon eux beaucoup de groupements de producteurs seraient prêts à travailler dans des sites aménagés pour le maraîchage mais pour l’instant personne ne fait pression pour que les eaux de ruissellement et les composts urbains soient acheminés vers de tels sites.
ONG AGePEUA (Association pour la Gestion et la Protection de Environnement Urbain et Agricole)
A été crée en 1994 sous le nom de Coopefsa, coopérative de jeunes pour la gestion des déchets
urbains qui bénéficia alors d’un appui au PISEA pour acheter un tracteur et d’un appui institutionnel de l’Ambassade des Pays-Bas (« seed money » pour aider les jeunes ONG au démarrage).
Les premiers abonnés bénéficièrent également de 600 poubelles financées par la coopération canadienne. Aujourd’hui, l’ONG dessert 572 maisons (à raison de 5 ménages par maison en
moyenne). Récemment, le CBDD a acheté un terrain à Cana à 10 km de Bohicon pour y installer
une décharge finale où les ordures seront triées et traitées. Le projet bénéficie de l’appui technique
des volontaires italiens (CISV). Les ONG participant à ce projet se sont regroupées en consortium
(Tonamin).
ONG AGOMS
A été crée en 2000 pour collecter les ordures des quartiers Ahouamé, Zakpo, Ahito qui n’étaient
pas encore bien desservis. L’ONG compte aujourd’hui 150 abonnés desservis par trois charretiers.
Gestion des ordures
Les ONG passent de concession en concession pour ramasser les ordures contre en général 1000 F
CFA par concession. Dans certains quartiers, une concession regroupe cinq ménages mais dans
les quartiers de vieilles collectivités familiales, le nombre de ménages par abonnement est encore
supérieur. Malgré cela ces ménages à faible revenu ont des difficultés à payer régulièrement les
percepteurs qui doivent passer plusieurs fois dans les maisons.
92
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Cette collecte se fait à l’aide de charrettes pour certaines, de charrettes et de tracteurs pour
d’autres, jusqu’à des points de collecte intermédiaires. Une évacuation sporadique vers la décharge finale de la commune, qui avait été localisée à Sodohomè, est assurée par la circonscription urbaine. Le camion de la circonscription s’emploie surtout à dégager les ordures du marché.
Ces ordures seraient vendues à des cultivateurs à raison de 2000 FCFA le voyage. Nous n’avons
pu vérifier si la demande est suffisante pour absorber l’offre.
Il est noté l’acquisition d’un site de décharge finale privé par une des ONG (AGEPEUA) à Cana,
de même que la mise en œuvre très prochaine d’un projet en cours d’initiation par les volontaires
italiens du CISV en collaboration avec un consortium de trois ONG (AGOMSE, AGEPEUA et
GPCSH). Ce projet vise la gestion des déchets solides ménagers de la collecte à la valorisation de
ces derniers. Les ordures de Bohicon seraient acheminées vers ce point central de collecte et
triées, une partie compostée, d’autres proposées à diverses institutions de recyclage (des métaux,
des tessons, des plastiques).
L’AMAE qui a été mise sur pied depuis 2001 a, quant à elle, réalisé des points de regroupement
d’ordure (12 au total). Mais il s’avère que ceux-ci sont à peine utilisés à certains endroits et à
peine vidés à d’autres où ils sont déjà remplis. Il n’y aurait pas de contrats avec les ONG pour
assurer cette tâche. Elle a également fait construire des charrettes en vue de les distribuer aux
ONGs de collecte de la ville.
1.3 Enjeux, groupes stratégiques et besoins en concertation
Concepts de gestion des ordures
Plusieurs concepts s’affrontent actuellement sur la gestion des ordures à Bohicon tandis que le
débat manque à Abomey.
A Bohicon, nous avons identifié deux concepts assez antagonistes au niveau de la collecte :
- Un premier concept est d’aller chercher les ordures chez des abonnés pour les acheminer vers
des lieux de collecte intermédiaires puis de les évacuer vers un lieu central de décharge, de les
trier et de se débarrasser de ce dont on peut se débarrasser. C’est le concept développé par les
ONG de collecte, appuyées par une succession de partenaires au développement (SBEE-IGIP,
puis CISV-CBDD). L’inconvénient est que tous les ménages n’ont pas une grande « propension à
payer » pour ce type de services.
- Un deuxième concept est d’installer des points de regroupement des ordures vers lesquels chaque ménage se déplace et qui sont vidés par des opérateurs (ONG) qui les acheminent vers de
points de collecte intermédiaire. C’est le concept développé par l’AMAE, semble-t-il sur incitation du MEHU. L’inconvénient est que plus aucun usager n’est prêt à payer pour un service où il
peut y avoir beaucoup de « free-riders ». Du reste, beaucoup d’usagers estiment que l’évacuation
des points de regroupement vers une décharge finale est du ressort des pouvoirs publics. Ces
points de regroupement, s’ils ne sont pas vidés régulièrement, vont vite devenir des sources de
nuisance pour les riverains. Enfin, la « propension à marcher jusqu’à un point de regroupement »
reste à évaluer pour les établir à des distances appropriées.
Pour ce qui est de l’évacuation des ordures vers la décharge finale, dans un premier temps, la décharge finale et l’acheminement des ordures vers celle-ci étaient du ressort des pouvoirs publics
(commune) mais dans un deuxième temps, on tend vers une privatisation de toute la chaîne de
collecte et de traitement des déchets. Mais les coûts de l’évacuation vers une décharge éloignée de
plus 5 kilomètres ne peuvent être semble-t-il intégrés dans la taxe d’abonnement.
Pour ce qui est de la valorisation des déchets accumulés, remarquons l’absence de politique officielle. Les déchets qui devaient être amoncelés sur la décharge de Sodohomè semblaient ne devoir
93
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
y faire l’objet d’aucun traitement. Officieusement, le camion de la commune urbaine vendrait des
ordures à des agriculteurs, probablement lorsqu’il s’agit de tas dont les ordures sont déjà partiellement décomposées, mais de toute façon sans tri. Un deuxième concept est de trier en aval sur la
décharge finale, de composter en bonne et due forme et de vendre les composts. C’est le concept
qui va être testé par le consortium d’ONG avec l’appui du CBDD. Les opérateurs eux-mêmes
reconnaissent que cela risque de demander beaucoup de manutentions. Un troisième concept réside sur le tri en amont, au niveau des ménages. Des tentatives de tri à la maison avaient été initiées par AGePEUA qui avait installé plusieurs poubelles dans les ménages. Sans incitation ni
sensibilisation, les ménages n’ont pas adhéré. Dans la mesure où un tel tri suppose un grand changement dans la façon dont les ordures sont gérées dans une maison (jetées par terre et balayées
avec beaucoup de sable), une grande campagne d’information et de formation des parents et surtout des enfants qui sont en général chargés de ce travail serait nécessaire avant d’envisager un
quelconque changement de comportement.
Une étude serait nécessaire pour réduire au minimum le coût bord champ des matières organiques
recyclées en agriculture. Cette réduction suppose probablement une décentralisation des points de
collecte finale et de traitement des ordures de la ville. Un traitement rapide des ordures devrait
permettre une réduction des nuisances (fermentation aérobie rapide avec une bonne montée en
température) et cette délocalisation permettrait une évacuation rapide des produits ainsi précompostés, tout ceci dans le but d’éviter au maximum les nuisances pour les riverains. L’ajout de
déchets d’origine industrielle pourrait être envisagés pour optimiser le rapport carbone sur azote.
De l’avis du consortium d’ONG, la privatisation du financement de toute la filière n’est pas économiquement rentable. Il faudrait selon eux que les maisons payent 1500 f et qu’une subvention
de 1000 f vienne s’y ajouter pour que la collecte et l’acheminement soient rémunérés (fonctionnement et amortissement du matériel). Il est à craindre que le concept proposé de tri en aval et
compostage, qui demande beaucoup de manutentions, ne soit pas rentable non plus. Les ONG du
reste ne l’envisagent que en combinaison avec d’autres activités génératrices de revenu sur les
sites de décharge finale (maraîchage, élevage).
Pour ce qui est du financement des diverses opérations le long de la chaîne, là aussi potentiellement plusieurs concepts sont possibles : subventions en espèces et en nature des ONG en complément au paiement du service par les abonnés, prise en charge par les services de la voirie des
segments non rentables de la filière, taxation des ménages et gratuité du service associé avec une
passation de marchés avec des opérateurs privés et ONG, etc.
La tendance à Abomey est de responsabiliser la commune qui finance l’ensemble des opérations
et qui passe contrat à des prestataires de service pour la collecte.
1.4
Questions de recherche et thèmes de concertation inter acteurs
En matière de gestion des ordures, nous voyons qu’il existe à chaque étape de la collecte, de
l’acheminement et de la valorisation des ordures plusieurs concepts potentiels. Tri en amont ou en
aval, collecte dans les maisons ou dans des points de regroupement, décharge unique pour toute la
ville ou décharges multiples réparties dans tous les points autour de la ville dans les zones
d’utilisation. Beaucoup de questions se posent à chaque étape. La responsabilité des pouvoirs publics aussi n’est pas clairement définie.
Les enjeux sont d’une part liés à la tentative de se décharger sur des opérateurs privés de responsabilités publiques, d’autre part au contrôle de ressources de programmes et bailleurs et des ressources politiques. C’est ainsi qu’on voit à Bohicon des décisions prises par l’AMAE sans concertation avec les ONG de collecte des ordures, et peut-être même en marge des anciennes autorités,
pour raison de tendances politiques opposées. Quant aux ménages, ils n’ont, semble-t-il, jamais
94
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
été consultés sur leurs préférences et propensions. Autres grands absents du débat, les utilisateurs
potentiels des produits, leurs intérêts, préférences et propensions à payer, qui influenceront fortement la nature du produit à leur offrir (gadoues non triées quasi gratuites dont ils assurent le tri –
ce qui n’est pas sans poser des problèmes sanitaires, et sinon gadoues pré triées et partiellement
fermentées, composts en bonne et due forme). Les pouvoirs publics (mairies, MEHU) et intervenants ont également des positions dans ce débat, dont les arguments ne sont pas encore connus. La
concertation inter acteurs, pour réussir, requiert des études préalables permettant de bien poser les
termes du débat.
2.
Gestion des déchets industriels
2.1
Principales caractéristiques des déchets industriels
Les sources de production de déchets industriels
Pour la plupart, les unités industrielles du site Abomey-Bohicon sont situées dans la ville de Bohicon. De ce fait, les enjeux environnementaux, les processus d’adaptation de l’agriculture et le
mode d’expansion urbaine intègrent beaucoup plus le facteur de l’activité industrielle dans cette
ville. Les principales unités identifiées sont :
- La Société des Huileries du Bénin (SHB)
- La Société Fludor
- Les usines d’égrenage de coton de la Société Nationale de Promotion Agricole
(SONAPRA)
- La scierie l’Office National du Bois (ONAB)
Description des activités et identification des sous-produits
La SHB
La SHB qui est l’une des industries issues de la privatisation de l’ex SONICOG en 1997 est spécialisée dans la production d’huile végétale à partir des graines de coton. Elle transforme 46.900
tonnes de graines de coton par an (moyenne de 1998 à 2001) pour produire 3.263 tonnes d’huile.
Les sous produits issus de cette transformation sont :
o Les tourteaux de coton qui représentent 40 à 45% de la matière première ce qui équivaut à
environ 19.900 tonnes par an. Ce sous-produit est d’une bonne valeur nutritionnelle pour le
bétail et fait l’objet d’une grande valorisation au niveau de l’usine.
o Les coques de coton (120 à 200 tonnes par jour.) Ils n’ont aucune valeur marchande et sont
stockés sur une décharge à Lissèzoun (environ 500m à gauche de l’axe Abomey-Bohicon)
dont le site de 1,5 à 2 ha a été négocié par l’usine auprès d’un paysan du village.
o Les déchets liquides d’usinage et les cendres et imbrûlés des chaudières pour lesquels des
statistiques ne sont pas disponibles, mais dont les quantités ne sont pas négligeables. Ils n’ont
aucune valeur marchande et ne font l’objet d’aucune valorisation. Les eaux usées sont déversées par une canalisation derrière la propriété de l’usine et les cendres sont stockées en monticules dans les palmeraies adjacentes à l’usine et sur la décharge des coques.
L’usine Fludor
C’est une huilerie menant les mêmes activités que la SHB. Située beaucoup plus à la périphérie de
la ville de Bohicon (Zogbodomey), cette usine a aussi des eaux usées mais celles–ci sont traitées
puis déversées dans des caniveaux conduisant à des ruisseaux qui à leur tour débouchent sur la
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Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
rivière Hlan. Aussi faut-il signaler que des pneus seraient utilisés comme combustible dans les
chaudières de l’huilerie.
Les usines d’égrenage de coton de la SONAPRA
L’usine a été construite depuis 1925 en dehors de la ville de Bohicon. Aujourd’hui, elle a été rattrapée par cette ville et y est complètement intégrée. Elle comprend deux chaînes d’égrenage
d’une capacité totale de traitement de 300 tonnes de coton graine par jour. Elle est fonctionnelle
quand il y a du coton graine (de décembre à avril.).
L’usine est alimentée en matière première par les productions des sous préfectures environnantes.
La circonscription urbaine de Bohicon produit elle -même peu de coton. Les sous produits de cette
usine sont les graines et la poussière des fibres.
L’ONAB
Les activités de l’Office National du Bois visent à protéger les forêts naturelles et à assurer la production et la fourniture de bois d’œuvre. Il exploite 13.000 ha de plantations (constituées essentiellement de tecks) répartis en 4 zones : Agrimè (à la périphérie de Bohicon), Toffo, Djigbé et
Lama. Ces plantations produisent 40.000 m3 de grumes par an, transformées au niveau de la scierie de l’ONAB (IBB Sa) située à Saklo, à la périphérie sud de Bohicon.
Cette scierie produit des perches, des poteaux et des planches consommés à 75% par le marché
national à travers 18 postes de vente sur tout le territoire national (le reste étant exporté vers le
Togo). Elle produit également mais dans une moindre mesure des parquets et des composantes de
meubles essentiellement destinés à l’exportation vers la France, L’Allemagne et les USA.
Les sous-produits issus de cette unité de transformation sont les copeaux de grumes, les écorces et
sciures de grumes, les copeaux et sciures de planches, parquets et composantes de meubles. La
sciure représente en moyenne 15% de la production soit 5.500 m3 par an (à considérer en masse
de bois et non en volume de sciure). Les copeaux conditionnés constituent 60.000 à 100.000 fagots de bois par mois.
2.2
Les opportunités et contraintes liées à la péri urbanité
Les Huileries
De tous les sous-produits issus des transformations de la SHB, seuls les tourteaux de coton sont
valorisés dans l’élevage de gros bétail. La plus grande partie de ce déchet est donc conditionnée
pour l’exportation vers les pays européens d’élevage bovins (l’Irlande en particulier), le reste étant
destiné à satisfaire la demande locale (environ 10 tonnes par mois dont l’essentiel à la ferme agricole de Kpinnou.) Selon les responsables de l’usine, ce sous-produit est encore très peu connu des
éleveurs locaux, ce qui explique leur faible niveau de consommation.
Les coques de coton, les eaux usées et les cendres sont les plus importantes sources de pollution
liées aux activités de la SHB.
Les coques de coton sont transportées sans grande précaution sur le site négocié par la SHB, ce
qui en explique l’ « épandage » sur tout le parcours. Le site est une palmeraie qu’un paysan de
Lissèzoun a laissé à l’usine comme décharge depuis 1997. Au moment de la visite du site, la palmeraie avait disparu sur 0,5 à 0,75 ha suite à l’incinération des monticules de déchets de plus en
96
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
plus encombrants. Après les pluies, les eaux de ruissellement dispersent une partie des déchets
dans un rayon de 500m, polluant les rues et les habitations sur leurs passages. Pendant la décomposition, ces coques de coton qui sont parfois mélangées aux ordures produites dans l’usine et aux
cendres et imbrûlés des chaudières provoquent la prolifération d’insectes chez les riverains. Il faut
noter que l’occupation de cette zone de Lissèzoun est récente. L’installation de la décharge et
celle des habitations se sont faites parallèlement.
Les eaux usées de la SHB sont stockées dans un grand trou situé au beau milieu des habitations
derrière la clôture de l’usine. Selon les riverains, ces déchets liquides étaient déversés jusqu’en
2000 dans de petits trous aménagés par l’ex SONICOG et inondaient régulièrement des habitations du quartier Sogba. Mais la composition des eaux jusqu’à lors favorisait la fabrication artisanale de savon, ce qui limitait les réactions des populations. L’usine a révisé ses installations, ce
qui a considérablement modifié la composition des effluents et ainsi a mis fin à l’exploitation qui
en était faite.
Aujourd’hui, tout le quartier baigne constamment dans une odeur nauséabonde et reste toujours
exposé aux vidanges périodiques du grand trou (quand il est plein) vers les petits qui inondent les
maisons. Les réactions des riverains se trouvent handicapées par le fait que certains sont employés
dans l’usine et par conséquent servent de briseurs de mouvement. On observe que les autorités du
quartier sont assez éloignées du site et ne réagissent que quand les vidanges sont faites. Néanmoins, une organisation des populations a été mise en place et a abouti à une plainte adressée au
Ministère de l’Environnement en 2001. Mais cette initiative de plainte n’a pas connu un réel suivi
et il règne actuellement un certain climat d’inaction et d’attente. Le Ministre a visité le site au
cours de l’année 2002, mais aucun résultat notable n’est encore observé.
Les effets des eaux usées déversées après traitement par Fludor dans la rivière Hlan ne sont pas
immédiatement perceptibles dans le proche voisinage de l’usine. Toutefois, il faudrait noter que
les conséquences pourraient se ressentir dans la qualité de l’eau du Hlan qui traverse plusieurs
localités. La qualité de la faune et de la flore aquatiques pourrait s’altérer mais nous ne disposons
pas à l’heure actuelle d’analyses prouvant la nocivité de ces effluents.
Quant aux coques, nous avons constaté qu’elles sont stockées au niveau de l’usine et sont périodiquement incinérées. L’utilisation de pneus comme combustible dans les chaudières de l’usine
pourrait être source de rejet dans l’atmosphère contribuant ainsi à la destruction de la couche
d’ozone.
Les usines d’égrenage de coton
Outre les opportunités offertes par l’existence d’une usine à son environnement immédiat (habitation en location, emplois, restaurations et diverses activités économiques), l’usine offre comme
sous produits les graines de coton qui approvisionnent les huileries de la place.
L’existence de l’usine crée des nuisances aux populations riveraines. Il s’agit notamment des
poussières de fibres, de l’exposition aux bruits des machines, aux risques d’explosions des chaudières et turbines et à la circulation des camions. Les poussières de fibre produites représentent
0,19 à 0,83% de la quantité de coton graine traitée. Elles polluent les cours, les arbres, les puits et
les citernes des concessions environnantes ainsi que les voies publiques et caniveaux situés à
proximité de l’usine. Les populations sont très peu organisées et leurs réactions n’ont aucun impact sur les activités de l’usine. La seule tentative a été une proposition de délocalisation d’un
riverain plaignant mais cette initiative n’a connu aucune suite.
Le fonctionnement des chaînes d’égrenage entraîne une grande pollution sonore et expose les
riverains à des accidents comme l’explosion de turbine ou de chaudière. L’usine draine enfin un
grand nombre de camions dont la fréquentation incommode les riverains aussi bien pour le bruit
que pour la sécurité.
97
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
La SONAPRA, malgré ces différentes contraintes n’a aucun projet de déplacement de l’usine ou
d’amélioration des techniques de traitement (pour réduire la production de poussière).
La scierie
Les copeaux de grumes sont morcelés et conditionnés en fagots de bois de chauffe. Ce sousproduit est livré à une entreprise privée qui le commercialise à Cotonou et Porto-novo. Les autres
sous-produits (écorces, copeaux et sciures) sont répartis entre les populations de l’arrondissement
de Saclo et les employés de l’usine (qui n’en garde qu’une faible proportion).
Pour profiter des activités de l’ONAB, les populations de Saclo ont offert à la scierie un site de
décharge de 1,5 à 2 ha où 10 à 15 camions viennent chaque jour déverser des sous-produits triés à
la source. Ces différents sous-produits sont utilisés comme combustible pour la cuisine dans les
ménages, les gargotes et les unités de transformations agroalimentaires (en particulier le afitin à
Saclo).
Au départ, l’accès à ces déchets était libre et gratuit à tous les intéressés mais la compétition a très
tôt changé le site en champ de bataille, obligeant les autochtones à mettre en place un comité
d’exploitation avec un mandat de 6 mois sous la supervision d’un comité de suivi. Les sousproduits sont alors stockés en deux lots : un lot pour les autochtones de Saklo qui gardent le droit
d’accès libre et gratuit et un lot pour les allochtones dont l’accès est payant avec des unités de
mesures précises. Ici, les sous-produits ont une autre classification : la sciure fine, la sciure grossière (mélangée avec des débris d’écorces), les écorces et les copeaux de planches.
Aux allochtones, les sous-produits sont vendus suivant la grille suivante :
Sciure fine : 150F par sac « de 100Kg »
Sciure grossière : 65 à 75F par sac « de 100 Kg »
Ecorce : 50F par sac « de 100 Kg »
Copeaux de planche : 200F par bassine
Les copeaux de planches sont les plus recherchés mais ne sont disponibles qu’en quantité limitée.
Les revenus varient de 2000F à 12000F par jour. Le comité de gestion en garde 40% et verse les
60% restant sur un compte ouvert à cet effet à la CLCAM. Les fonds de ce compte permettent de
financer la réalisation d’infrastructures communautaires pour le village de Saclo.
Selon les populations de Saclo, l’opportunité d’emploi que constitue la présence de l’usine est très
peu valorisée au profit des autochtones. Cette situation se justifierait par les problèmes
d’organisation en leur propre sein qui viennent de trouver des solutions.
2.3
Les initiatives de protection de l’environnement : atouts et contraintes
Valorisation des sous produits industriels
L’exploitation de tourteaux de coton dans l’élevage constitue une stratégie d’adaptation de
l’agriculture à l’expansion urbaine. En effet, l’élevage bovin en saison sèche est sujet aux grands
déplacements des animaux pour le pâturage. L’utilisation des tourteaux de coton pourrait participer à l’intensification de la production qui correspond aux contraintes de disponibilité d’espace
dans les centres urbains et limite les dégâts causés aux agriculteurs par les bêtes en déplacement.
Pour le moment très peu d’éleveurs utilisent les tourteaux pour leur bétail mais à la longue cela
pourrait être une opportunité qu’ils vont saisir. C’est aussi dans ce sens que la SHB projetterait
une action de sensibilisation et de promotion de l’utilisation de cet intrant dans l’élevage du gros
bétail pour accroître la consommation locale.
98
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Exploitation des sous-produits des plantations forestières
Dans sa stratégie de protection des forêts par des plantations de tecks l’ONAB assure une ceinture
verte à la périphérie sud de Bohicon (plantation d’Agrimè). Cette ceinture est entretenue et maintenue malgré l’exploitation du bois faite par la scierie grâce aux plans d’aménagement intégrant
une planification rigoureuse des activités sylvicoles. Ces activités sylvicoles conduites par des
professionnels comprennent globalement l’installation des plants, le suivi des peuplements, la
planification des coupes et le reboisement par régénération naturelle ou par installation de nouveaux plants. Mais cette activité de protection et de valorisation de l’environnement pose dans son
exécution de nombreux problèmes sociaux aux populations riveraines des plantations.
Dans le cadre de notre enquête, l’accent a surtout été mis sur la plantation d’Agrimè à la périphérie de Bohicon. Cette plantation de 2500 ha a été installée depuis l’époque coloniale sur des terres
dont les autochtones ont été expropriées et avec un plan d’aménagement n’intégrant aucune zone
de culture. Les riverains sont restés insensibles à cette nouvelle ressource jusqu’à la reconnaissance du teck comme bois de bonne qualité et de grande valeur marchande (bois d’œuvre, de service, de chauffe et parfois carbonisé). Ces populations en pleine croissance démographique et très
pauvres (les niveaux de productions agricoles seraient les plus faibles de la région) n’ont donc pu
résister à une exploitation parallèle des ressources malgré les sanctions sévères appliquées aux
contrevenants des prescriptions en vigueur. En effet, les riverains étaient strictement interdits
d’accès à toutes les ressources disponibles dans les plantations (bois de chauffe, plantes médicinales, bois d’œuvre et de service) ce qui ne faisait qu’accentuer les frustrations déjà vives. Les droits
d’usages étaient très restrictifs et parfois bafoués par les forestiers, ce qui alimentait de vives tensions avec des populations qui nourrissent toujours l’espoir de récupérer leurs terres.
Les plantations sont donc sujettes à d’intenses pressions anthropiques longtemps réprimées par la
violence.
Des réformes ont été introduites dans la gestion des plantations depuis la fin des années 90 dans le
sens d’une gestion participative des ressources forestières de l’ONAB pour une cohabitation durable entre les riverains et leur environnement. Avec un concept encore flou et difficilement intériorisé de la participation, l’ONAB à travers une cellule d’encadrement participatif travaille aujourd’hui avec des structures de cogestion mises en place par les populations (les COGEPAF :
comités de gestion participative de la forêt). L’ONAB concède aux COGEPAF l’exploitation des
rémanents (déchets de coupe constitués de souches, houppiers et branchages qui constituent 40 à
50% de l’arbre sur pied en terme de volume) contre nettoyage et protection des plantations.
Néanmoins, la pression anthropique reste toujours forte, l’exploitation des rémanents ne couvrant
que la période de décembre en mars.
2.4
Enjeux, groupes stratégiques et besoins en concertation
Enjeux autour des ressources forestières
La plantation de tecks constitue le théâtre de grands enjeux concernant l’appropriation licite ou
non des produits forestiers qui ne nous concernent pas ici mais un enjeu est aussi l’accès au moins
aux (sous-)produits de la plantation.
Groupes stratégiques : diverses tendances parmi les forestiers, les membres de COGEPAF, les
usagers sauvages, …
Un autre enjeu est lié aux recettes communales : étant issues de la scierie et non de la plantation,
cela profite à Bohicon et non à Zogbodomè.
Enjeux autour des sous produits industriels
99
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Autour des déchets industriels et leur évacuation au moindre coût pour les usines, les groupes
stratégiques sont les industriels, les riverains qui profitent et ceux qui ne profitent en rien de
l’usine, le Ministère de l’Environnement, les autorités communales, les utilisateurs de coques qui
parviennent parfois à s’en faire livrer un camion au bord de leur champ, les riverains de la décharge de coques, etc.
Une partie des problèmes de sous valorisation des sous-produits pourraient être résolus si les utilisateurs potentiels des coques étaient organisés pour négocier avec les usiniers.
Comment faciliter la concertation entre acteurs pour que des solutions accessibles et acceptables
puissent être identifiées concernant les coques ?
3.
Eaux de ruissellement
La monographie avait permis de mettre en évidence l’importance du ruissellement et la gravité
des dégâts qu’elle entraîne :
- voies érodées
- maisons déchaussées
- inondation des voies et de certains quartiers à la moindre pluie, parfois même tombant à Djidja
et non à Abomey ou Bohicon
- zones de collecte et d’accumulation des eaux infestées de moustiques en pleine ville.
Jusqu’à ce jour, la solution envisagée a toujours été de collecter les eaux dans des canaux de drainage le long des voies pour les envoyer en aval. Mais où en aval ? Les dégâts sont déplacés or
l’urbanisation progresse plus vite que la construction des canaux. Par ailleurs, il ne nous a pas été
possible de trouver un plan général des canaux pour une ville et encore moins pour les deux. Ceux
qui construisent la nouvelle voie dite ABOK qui relie la frontière du Togo à la frontière du Nigéria via Abomey-Bohicon construisent des ouvrages importants de drainage mais ceux-ci ne
s’intègrent pas, semble-t-il, dans un plan d’ensemble. De même l’association municipale d’actions
environnementales d’Abomey a à son actif la construction d’un canal le long du voie dans le quartier de Djegbé, très souvent inondé.
Le problème prend sa source sur les pentes Nord du plateau, en zone rurale déforestée, mais l’idée
de prévention à amont n’a jusqu’à présent semble-t-il jamais été envisagée. Or ne pourrait-on pas
obliger une bonne partie des eaux à s’infiltrer en amont, ou encore les collecter en amont pour des
usages agricoles et pastoraux, ce qui limiterait de coût de la construction des collecteurs, qui deviennent toujours plus grands et profonds.
De même, la valorisation en aval des eaux collectées devrait faire l’objet d’une meilleure concertation avec des potentiels usagers de ces eaux. Ainsi pour l’instant, ceux qui construisent des routes creusent parfois de grands réservoirs, mais sans se soucier de l’utilisation potentielle de leurs
eaux. Nous avons pu observer des réservoirs situés le long du contournement qui sont difficilement accessibles aux personnes et aux bœufs. Les riverains n’y trouvant pas d’utilité se plaignent
bien sûr des moustiques et du paludisme que de telles retenues provoquent. Plus au sud, vers Cana
dans la commune de Zogbodomè, là où les eaux ont tendance à se rassembler, des idées sont
avancées pour créer des retenues. Un tel projet paraît intéressant et permettrait par exemple le
développement du maraîchage de contre-saison, d’autant qu’une décharge finale pourrait être
localisée dans les environs. Un tel projet nécessiterait une concertation entre les élus communaux
des trois communes concernées.
Les recherches à conduire porteront
100
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
- sur l’historique des actions conduites dans le domaine de la gestion des eaux de ruissellement
par les différents services techniques et les politiques des pouvoirs publics, sur l’implication des
populations concernées : processus de décisions et de mise en œuvre.
- sur les nuisances et dégâts des eaux de ruissellement, mais aussi sur les chemins de ces eaux
(compléter la carte)
- Quelle qualité de l’eau (pesticides) pour l’arrosage et pour quelles utilisations selon sa qualité ?
- Quels sont les divers acteurs des valorisations potentielles des eaux de ruissellement ? Qui peut
en profiter ? Qu’est ce qui empêche cette valorisation ? Pourquoi pas de valorisation agricole,
pastorale ou autre ? Quelles mesures de prévention mettre en place ?
X. CONCLUSIONS, CHOIX DE THÈMES DE RECHERCHE ET PLANIFICATION
1.
Choix de filières et systèmes de production
Quelques filières et les systèmes de production agricole inter reliés sont à choisir pour des études
approfondies dans le cadre du volet 2. Les choix des filières se sont faits selon un certain nombre
de critères (tableau 9.1):
o Filière assurant le raccordement de la ville et sa périphérie ;
o Filière influencée par l’expansion urbaine et en mutation ;
o Contribution croissante à l’approvisionnement de la ville
o Contribution de la filière à l’emploi ;
o Contribution à la sécurité alimentaire ;
o Impact sur l’environnement ;
o Lieu de conflits liés à l’expansion urbaine, justifiant les concertations
La notation a été réalisée par les chercheurs jusqu’à obtention d’un consensus.
Du point de vue de la gestion des espaces naturels et agricoles, les filières les plus importantes
retenues ont été :
o Elevage bovin
o Maïs et dérivés
o Maraîchage
Du point de vue économique, s’ajoutent :
o Elevage de porcs
o Afitin
o Manioc
101
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
Tableau 9.1 : Matrice de choix de filières à étudier
Critères
Elevage de
porcs
Elevage
bovin
Elevage
de
lapins
Volaille
Maïs
Maraîchage
Afitin
Huile
palmiste
Manioc
Contribution croissante à
l’approvisionnement de
la ville
5
1
2
3
1
4
4
3
4
Contribution croissante à
l’emploi
3
2
1
1
5
3
4
3
2
Contribution à la sécurité
alimentaire
1
2
0
2
5
2
2
1
5
Impacts sensibles sur
l’environnement
3
5
2
2
3
1
2
2
3
Influence de l’expansion
spatiale de la ville sur
l’activité
2
5
0
2
5
2
3
3
5
Influence de l’activité sur
le maintien d’espaces
agricoles et naturels à la
périphérie
1
5
1
1
4
3
0
0
2
Mutation de cette activité
5
1
1
4
1
3
2
1
0
Conflits
3
5
1
2
1
3
1
0
1
Total
23
26
8
17
25
21
18
13
22
Légende de 0 = faible à 5 = très élevé
2.
Enjeux environnementaux traités par Ecocité
2.1
Gestion des ordures ménagères
La gestion des ordures ménagères suscite plusieurs questions de recherche :
1. Quelles perceptions les différents acteurs ont-ils des ordures et de la pertinence de leur
évacuation ?
2. Plusieurs concepts de la collecte et du traitement des ordures s’affrontent actuellement et
il en est de même du financement de cette filière, comment faciliter les concertations qui
permettent de choisir le plus approprié pour chaque commune ?
3. Quelle est la composition des ordures, comment permettre une bonne valorisation des ordures triées et traitées en agriculture, faut-il ou non composter, et quelles sont les conséquences sur les localisations des décharges finales ?
102
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
2.2
ECOCITE
Gestion des eaux de ruissellement
o Production de la carte des eaux de ruissellement et des ouvrages déjà en place à une échelle
intercommunale
o Identification des zones de reboisement pour l’infiltration et de collecte en amont et des zones
de collecte en aval des agglomérations techniquement pertinentes et socialement acceptables
o Concertation entre acteurs intéressés par la valorisation de ces eaux et acteurs perdant leurs
possibilités d’usages de ces terres, ainsi qu’entre communes ayant des intérêts différents.
2.3
Gestion de déchets agroindustriels ayant des valorisations agricoles
potentielles
o Quantification des déchets agro-industriels (tonnage et qualité, utilisations potentielles)
o Identification des utilisateurs potentiels et des conditions d’accès à ces déchets
o Concertation entre les différents groupes d’acteurs
3.
Enjeux fonciers traités par Ecocité
Les nouveaux lotissements en frange périurbaine et zone rurale provoquent une perte d’espaces
agricoles et naturels, et les agriculteurs développent des stratégies de « recasement ». Quels sont
les impacts du lotissement sur les investissements agricoles dans leurs périphéries et sur leurs
périmètres.
Plus généralement quelles évolutions du marché de la terre observe-t-on dans la frange périurbaine, (les modes de faire valoir indirects se développent-ils par exemple). Cela ne réduit-il pas
l’investissement dans la fertilité et provoque-t-il pas le changement de statut et la reconversion de
certains producteurs ? Quelle est l’importance du mouvement d’achats de terres par les urbains et
investissent-ils dans ces terres ?
Comment l’aménagement du territoire est-il planifié ? et quelles concertations entre acteurs ontelles lieu ? Le processus d’actualisation du plan directeur d’urbanisme des villes d’Abomey et
Bohicon pourrait fournir une étude de cas intéressante. Des concertations entre communes et acteurs pourront aussi être organisées et observées autour de la délimitation de zones de décharge
finale, zones de collecte et de valorisation des eaux de ruissellement. La concertation pourrait
aussi porter sur le maintien de zones à usages agricoles et de pâturage.
Abomey, ville royale, a beaucoup d’espaces appartenant à des collectivités ou faisant partie du
domaine royal. Comment sont gérés au quotidien ces espaces communs en zone urbaine. Comment les tentatives d’appropriation individuelles sont-elles perçues. Quelles perceptions se font les
habitants de la bonne utilisation de ces espaces qui contribuent à « aérer » la ville, mais aussi servent de parcelles de culture et de pâturages.
La ville d’Abomey, nous l’avons vu ci-dessus, a connu très peu d’expériences de lotissement
bouclé. Certaines raisons sont liées au manque de transparence et à des malversations dont auraient été victimes les propriétaires terriens. Mais il y a aussi des facteurs qui pourraient entrer en
concurrence avec la logique de la parcellisation, ou tout au moins avec le lotissement « en damier ». Leur connaissance permettrait d’amorcer des concertations entre élus et populations locales.
D’autres thèmes de recherche pourraient concerner :
L’accès et le contrôle des terres à fort potentiel de production de maraîchers à la périphérie des
villes (ex. des abords du fleuve Couffo)
103
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
L’installation de vergers et fermes : est-ce une anticipation du lotissement (logique spéculative)
ou une logique productive
Le lotissement comme source de ressources communales et devenant une fin en soi
Le marché de Bohicon, bien public, espace et bâtiments privés
4.
Besoins en concertation et animation facilitées par Ecocité
Tous les aspects traités ci dessus :
o gestion des ordures,
o gestion des eaux de ruissellement, retenues et leurs périmètres de mise en valeur,
o cohabitation éleveurs et agriculteurs dans les zones traditionnelles de pâturage,
o valorisation des déchets des fournisseurs agro-industriels et les agriculteurs,
o concertations autour des filières,
o aménagement du territoire,
o lotissements en zones rurales,
font l’objet actuellement de concertations imparfaites.
Certains besoins en méthodes et outils de visualisation et d’information pour ces concertations ont
pu être identifiés :
Un système de SIG devrait prendre en compte :
des cartes des eaux de ruissellement à l’échelle du bassin versant et zones de concentration
des eaux/aménagements,
des cartes de demande en ordures ménagères et déchets industriels ; d’offre en ordures ;
aide au positionnement des décharges intermédiaires et finales,
des cartes des espaces de pâturage et de cultures, des troupeaux, des ayants droits
(échelle : des rivières à la ville)
des cartes de systèmes de production avec les zones de production tenant compte des itinéraires techniques ;
des cartes des filières dont des cartes de flux vers les marchés selon les saisons;
des cartes des modes de gestion de la fertilité ;
(deux échelles, le plateau d’Abomey et sa périphérie telle que délimitée par les agriculteurs qui en partent pour cultiver au delà ; une échelle réduite des deux communes urbaines ; deux ou trois périodes (-30, -5 ou -10 et 0).
5. Conclusions
La démarche de diagnostic collectif a permis à toutes les équipes de recherche du programme
ECOCITE de développer un fonds commun de connaissances et de questions de recherche. En un
temps assez réduit, l’alternance d’enquêtes en sous groupes et de mise en commun se révèle efficace pour construire un objet collectif de recherche et de se partager le travail de façon efficace.
104
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
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Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
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pub 43/44.06 : note de présentation plan directeur juin 1986
Bohicon
Pub 44.01 : adduction d'eau mai 1985
Pub 44.02 : programme urgence assainissement oct.1984
Pub 44.03 : schéma de voirie oct.1985
pub 44.04 : analyses urbaines avr.1985
Pub 43/44.06 : note de présentation plan directeur, juin 1986 Lokossa
Pub 46.01 : analyses urbaines juin 1986
pub 46.02 : programme urgence assainissement mai 1986
Pub 46.03 : schéma de voirie juin 1986
Pub 46.04 : note de présentation plan directeur février 1987
106
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
ANNEXES
1. Guides d’entretien
Guide d’entretien avec les commerçants des marchés de Bohicon et d’Abomey
Produit commercialisé :……………………………………………………….
1. Repérage de l’origine des produits commercialisés
Janvier Février Mars Avril
Mai
Juin Juillet Août
Sept
Oct
Nov
Déc
Provenance
Quantité
importée
Distance
Acteurs
impliqués
dans transport
2. Analyse des modes d’approvisionnement
Modes
Inconvénients
Avantages
3. Stockage
3.1 Modes de stockage
1.
2.
107
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
3.
4.
3.2 Dispositions prises en cas d’avaries
1.
2.
3.
4. Modes d’écoulement
Modes
Inconvénients
Avantages
5. Stratégies/dispositions d’écoulement
6. Conditions d’accès à une place dans le marché
7. Analyse des contraintes/difficultés
Contraintes/difficultés
Stratégies développées
108
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
ECOCITE
2. Répartition des tâches de recherche des étudiants et chargés de
recherche programmés pour 2003
Chargé de recherche
Assistant
DESAC
de
Activité et thème
recherche Système production 1 (maïs)
Etudiant agro V
Entité responsable
DESAC
Filière 1
Système production 2 (maraîchage)
DESAC
Filière 2
Assistant CEBEDES
Système production 3 (bovins)
CEBEDES
Puis étudiant CNEARC en Filière 3
2004
Victor (Mainz)
Le marché de Bohicon
CEBEDES
XXX (Mainz)
Foncier
Mainz
DESS ?
Gestion des pâturages
Bo
Sénan (CPU)
Gestion des ordures (appui à la concertation)
CEBEDES
DESS ?
Gestion des eaux de ruissellement
?
DEA gestion environnement ?
Gestion des déchets industriels
DESAC
Assistant CEBEDES
Concertations inter-acteurs
CEBEDES
109
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
3.
ECOCITE
Liste des personnes rencontrées et thèmes de discussion durant le diagnostic
Date
Lieu
Personne rencontrée
Thème de discussion
Equipe
Thème : Foncier et aménagement du territoire
25/02/03
25/02/03
DDEHU Abomey
Sinzalo Janvier,
Abomey
Assogba Désiré, Chef BAGD
Préfecture Abomey
Aissi Nicaise, chef SAD
Plan
d’Urbanisme
Directeur Mongbo/ Fanou/ Edja
Problèmes de lotissement
Idem
Mongbo/ Fanou/ Edja
Djimadja Albert
26/02/03
Kpassagon
Tangbé Houédanou, Chef Quartier
Ayéwé Théodore, cultivateur
Foncier urbain et périur- Mongbo/ Fanou/ Edja
bain
Guidiga Christine, commerçante
Une groupe de 7 cultivateurs et transformateurs
26/02/03
Dan Tota
Transformation
Agassain Symphorien, instituteur
Maraîchage
Lahoué Sylvain, agriculteur
Foncier
Fanou/ Edja
Thème : Systèmes de production et filières agricoles urbaines et périurbaine
25/02/03
Détohou
Chef village Détohou
Systèmes de production
Tossou,
Commerçants du marché Bohicon
Marché Abomey
Tossou,
Akoha Edmond
Elevage porcin
Secrétaire GV
2 cultivateurs
26/02/03
Abomey
Hountohetegbe Théodore
110
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
25/02/03
Abomey-Bohicon
RDR Abomey-Agbangnizoun
ECOCITE
Filières
Babadankpodji
RDR Bohicon-Zogbodomè
Président et secrétaire USPP Abomey
Forestiers
26/03/02
Marché
Abomey
Houndjro Commerçants de petits ruminants
Filières
Vendeurs de maraîchers
Vendeurs ressortissants de Detohoun et de Zounzonmè
Collectrices le long des rues menant aux villages
27/03/02
Détohoun
Chef village Détohou
Secrétaire GV
Filières et transformations
afitin et lio
2 femmes
27/02/03
27/02/03
Lanta
Abomey
Papa Amadou, éleveur fulani
Elevage bovin
Visite des champs dans les bas-fonds
Maraîchage
El Hadj
Elevage bovin
, chef des Fulani, éleveur
Conflits sur l’espace et les
ressources
A. Floquet, A. Koévi,
S. Tossou
A. Floquet, A. Koévi,
S. Tossou
Perspectives
Thème : Gestion des déchets ménagers, industriels et des eaux de ruissellement
25/02/03
Bohicon
S. Gnimadi, président de l’ONG AJPEC
Collecte des ordures et A. Floquet, A. Koévi,
protection
de S. Tossou
l’environnement
25/02/03
Abomey
E. Ahouignan, responsable de l’ONG ASPAB
Collecte des ordures
A. Floquet, A. Koévi,
S. Tossou
111
Diagnostic des territoires Abomey-Bohicon
26/02/03
Bohicon
N. Gbogbo DE de l’ONG AGEPeUA
ECOCITE
Collecte des ordures
A. Floquet, A. Koévi,
S. Tossou
A. Floquet, A. Koévi,
S. Tossou
F. Djivoeha DE de l’ONG AGOMS – consortium
Tonamin
26/02/03
Abomey
Mr Tchitou, membre de la commission PADeCom Collecte des ordures
Hygiène et Assainissement Abomey
26/02/03
Abomey
Visite d’ouvrages de canalisation et collecte des Collecte des eaux de ruis- A. Floquet, A. Koévi,
eaux de ruissellement (quartier Djregbé jusqu’au sellement
S. Tossou
marché)
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