Lettre au Ministère PDF - UNSA

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Lettre au Ministère PDF - UNSA
Roissy, le 18 juillet 2014
Madame la Ministre de l’Ecologie, du
Développement Durable et de l’Energie
Grande Arche
Tour Pascal A et B
92055 Paris-La-Défense Cedex
Lettre Recommandée AR
Nos réf : 101/ML/14
Objet : grossesse des membres d’équipage de cabine et aptitude physique et mentale
Madame la Ministre
La Compagnie Air France, en s’appuyant sur le nouveau règlement européen (UE) n° 1178/2011, annexe IV
Part Med sous partie A et sur la Décision 2011/015/R du Directeur Exécutif de l’EASA, sous partie C, AMC9
MED.C.025 Obstetrics and gynaecology, promeut, dans une publication interne, la possibilité pour les
membres d’équipage de cabine de voler jusqu’à leur 16ème semaine de grossesse.
Air France, en revanche, « oublie » de préciser dans ce document à ses personnels que, selon la
réglementation française, seules la Médecine d’Aptitude et la Médecine du Travail se prononcent sur
l’inaptitude temporaire au vol pour les personnels navigants. La Compagnie oublie également de préciser
quelles mesures, elle compte mettre en place dans ses avions afin d’assurer, à ces salariés hyper protégées
que doivent être les femmes enceintes, des conditions optimales et sécurisées de travail qui ne mettent pas en
danger la mère et l’enfant. C’est pourtant là son obligation.
Air France en intégrant la réglementation européenne se permet d’aller à l’encontre des dispositions
protectrices françaises en vigueur jusque-là et, à ce jour, non remises en cause. Ces dispositions veulent que
« le détenteur d’une attestation d’aptitude physique et mentale doit, en cas de grossesse, en informer
immédiatement le centre ou la commission qui prononce une inaptitude temporaire » (arrêté du 4 septembre
2007, article 7, relatif aux conditions d’aptitude physique et mentale du personnel navigant commercial).
Air France, ainsi, présuppose les orientations que prendront vos services ; alors que ces derniers pourraient
choisir de conserver les règles françaises plus protectrices. En effet, les dérogations prévues dans le règlement
(CE) 216/2008 avec l’article 14 et le caractère non contraignant de la règle issue de la décision de l’EASA
(AMC9 MED.C.025 Obstetrics and gynaecololy) permettent, selon nous, d’empêcher cette régression.
À l’heure où Air France est en plein Plan de Départ Volontaire, il faudra aussi que la Compagnie explique la
logique de cette décision précipitée du maintien possible de Personnels Navigants Commerciaux dans ses
avions jusqu’au 16ème mois de grossesse.
Nous sommes, Madame la Ministre, opposés à l’intégration de cette règle européenne en l’état.
Nous vous formulons nos plus vives inquiétudes quant à cette désacralisation de l’état de grossesse dans le
milieu si spécifique de l’aéronautique. Le droit individuel de travailler ne doit pas prendre le pas sur le droit
à la santé pour tous. Les intérêts économiques, que cela soit ceux de l’employeur ou ceux de l’employée, ne
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doivent pas remettre en cause la santé des salariées et celle de l’enfant à venir. C’est aux autorités et aux
employeurs de faire en sorte que les salariées enceintes ne soient pas contraintes de choisir entre leur santé
et celle de leur enfant et leur bien-être économique.
Nous vous rappelons que nombreuses sont les causes en milieu aéronautique pouvant mener à des
complications pour une hôtesse exerçant son métier enceinte.
La grossesse elle-même peut générer phlébite, embolie pulmonaire, fausse couche, hémorragies, etc.
Le milieu est « accidentogène » et hostile. Une chute ou un choc provoqués ou non par des turbulences, la
manipulation de charges lourdes, les effets de la pressurisation, les vibrations, les décalages horaire, le
travail de nuit, le stress, la station debout prolongée, les amplitudes de travail pouvant aller jusqu’à 17H30,
les risques liés aux expositions cosmiques et ionisantes, les maladies tropicales et les épidémies représentent
un réel danger pour la grossesse.
Et même si l’on est intéressé uniquement par les intérêts économiques de l’entreprise, il est important de noter
que ces complications peuvent mener au déroutement d’un vol.
Enfin, les effets souvent invalidants de la grossesse et la volonté légitime de protéger leur enfant peuvent
empêcher les PNC enceintes de gérer une situation à risque et de mener à bien leur mission (émeute à bord,
turbulences fortes, incendie, dépressurisation, accident avec évacuation…). Et c’est là, la sécurité des
passagers est, elle-même, qui est remise en cause.
Par ailleurs, en rédigeant des textes qui répondent à des intérêts purement économiques, oubliant la santé,
tout aussi essentielle, si ce n’est plus, de leurs citoyens la Commission Européenne et l’EASA mènent l’Europe
au-devant du rejet des peuples qui la composent. Ce rejet sera d’autant plus fort que ces deux institutions
ignorent la position d’une majorité de réglementions nationales européennes qui interdisent, jusqu’à présent,
la poursuite d’une activité aérienne pour les hôtesses enceintes.
C’est en dédaignant l’avis de la Commission Transport du Parlement Européen et celui des représentants de
milliers de salariés sur un règlement tel que la limitation des temps de vol des personnels navigants
[règlement (UE) 83/2014 publié le 29 janvier 2014] que l’Europe creuse le fossé entre ses institutions et ses
citoyens.
Nous devons réagir et réorienter la politique européenne, si nous souhaitons construire une cohésion sociale
pour ce continent. Une économie construite sur le moins-disant social ne saurait être pérenne. Elle est surtout
synonyme de perte de légitimité des représentants et de la montée des périls. Or, une démocratie en échec
ne saurait être remplacée que par un système beaucoup plus autoritaire et ce, d’autant plus que l’on se situe
à un échelon supranational.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons, Madame la Ministre, d’empêcher cette régression des droits de
la femme et de la protection de la santé.
Nous souhaitons votre intervention pour que les dispositions protectrices de l’hôtesse de l’air enceinte, de
l’Arrêté du 07 septembre 2007, qui n’a pas encore été abrogé, soit maintenues.
Nous nous tenons à votre disposition pour convenir d’une entrevue.
Nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre très haute considération.
Marc LAMURE
Secrétaire Générale Adjoint UNSA SMAF
Secrétaire de section UNSA PNC
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