Ganglion sentinelle dans la prise en charge du cancer du sein

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Ganglion sentinelle dans la prise en charge du cancer du sein
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CONCEPT
DU GANGLION SENTINELLE
En 1994, GIULIANO (Annal of Surgery) applique le concept du ganglion sentinelle dans la
prise en charge chirurgicale du cancer du sein.
Les bénéfices attendus sont :
-
une réduction du temps opératoire ;
-
une diminution de la durée d’hospitalisation (peut se concevoir en hôpital de jour) ;
-
une diminution prouvée vis-à-vis du curage axillaire conventionnel (Mansel 2006 J.N.
Cancer Institute) du lymphoedème de plus de 60 % et une diminution des troubles
de la sensibilité de plus de 70 % ;
-
une réadaptation fonctionnelle et donc professionnelle meilleure ;
-
une étude ciblée, plus optimale du ganglion sentinelle en Anatomopathologie.
Les critères de bonne pratique sont :
-
un taux d’identification de 90 %,
-
un taux de faux négatifs espéré ≤ 5 %.
Dans l’essai de la NSABP-B-32, l’équivalence de la technique du ganglion sentinelle versus
du curage axillaire a été validée chez les patientes T1, T2, N0 clinique avec un recul de 8 ans.
En effet, malgré un taux de faux négatifs de 10 %, le taux de récidive axillaire était < 1 % en
cas de ganglion sentinelle et la survie sans récidive ainsi que la survie globale sont
identiques dans les 2 groupes (2010, Krag – Lancet Oncology).
Cette technique est définitivement validée.
INDICATION
DU GANGLION SENTINELLE
Limitée au début de la technique aux tumeurs de petite taille < 2 cm, N0 clinique (ganglions
axillaires normaux), unifocales.
Depuis 2005, les indications se sont élargies de façon différente, en fonction des référentiels
(USA, France, Wallonnie, Flandre) :
-
les tumeurs ≤ 5 cm,
-
les tumeurs multifocales (dans un même quadrant),
-
la chirurgie mammaire antérieure,
-
les cancers canalaires in situ de haut grade > 3 cm,
-
après chimiothérapie néo-adjuvante si N0 clinique, échographique et cytologique
avant traitement,
sont actuellement acceptées par divers auteurs.
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Les contre-indications absolues restent :
-
la mastite carcinomateuse,
-
la radiothérapie antérieure,
-
la chirurgie axillaire antérieure,
-
les ganglions axillaires cytologiquement envahis,
-
la réduction mammaire récente.
APPORT
DE L’ECHOGRAPHIE AXILLAIRE DANS LE BILAN D’EXTENSION LOCAL
PREOPERATOIRE DU CANCER DU SEIN
L’intérêt d’une évaluation axillaire plus précise du status ganglionnaire permet d’éviter une
procédure du ganglion sentinelle chez les patientes présentant un envahissement
ganglionnaire non suspecté à l’examen clinique.
Pour HOUSSAMI (2011 - Annal of Surgery), cette technique permet une reconversion en
curage axillaire d’emblée suite à une cytologie ou une microbiopsie échoguidée du ganglion
axillaire infraclinique de l’ordre de 17 à 20 %.
L’échographie permet donc d’innocenter un ganglion palpé et de détecter des ganglions
pathologiques non palpables. Le taux de faux positifs est exceptionnel, le taux de faux
négatifs est essentiellement lié aux micrométastases et aux cellules tumorales isolées ; en
effet, seuls les ganglions macrométastatiques peuvent être identifiés dans 80-90 % des cas
(> 3 mm).
Aucune technique d’imagerie médicale ne bénéficie d’une valeur prédictive négative
suffisante pour se passer d’une exploration chirurgicale du creux axillaire.
La technique du ganglion sentinelle doit donc être réservée aux patientes N0 clinique et
échographique.
EXAMEN
ANATOMOPATHOLOGIQUE
Examen peropératoire (extemporané)
Pas de consensus sur la méthode d’analyse.
- L’analyse cytologique est une technique rapide (5 à 10 minutes), peu coûteuse mais avec
un taux de faux négatifs de 9 à 20 %.
- L’analyse macroscopique est une analyse encore plus rapide mais plus aléatoire.
- Les coupes congelées sont une technique plus longue (+/- 15 minutes), plus coûteuses mais
avec une meilleure détection des métastases de plus petite taille.
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- La biologie moléculaire est certainement la technique de choix puisqu’elle permet
également une étude semi-quantitative mais le temps moyen est de 36 minutes par
ganglion sentinelle. Cette technique est onéreuse qui n’est quasi pas utilisée en pratique.
- A noter que certains centres ont fait le choix de ne plus effectuer d’analyse extemporanée
au profit des analyses définitives.
Analyse postopératoire - Les ganglions sentinelles
De nombreuses questions subsistent : faut-il épuiser le ganglion sentinelle ?, quels sont les
différents niveaux de coupe ?, combien de coupes faut-il effectuer ?, quel est l’intervalle
entre les coupes ?, reste-t-il un intérêt à l’immuno-histochimie dans le ganglion sentinelle ?
MODELE
PREDICTIF D’ENVAHISSEMENT DU GANGLION NON SENTINELLE
DE GANGLION SENTINELLE POSITIF.
(GNS)
EN CAS
Beaucoup de normogrammes existent, aucun n’est validé de façon internationnale. L’utilité
est pourtant importante car elle permettrait de sélectionner les 40 à 70 % de patientes qui
n’ont aucun bénéficie à un curage axillaire complémentaire.
Les facteurs prédictifs les plus fréquemment utilisés sont :
-
la taille tumorale,
-
la taille des métastases ganglionnaires, (semble être le facteur le plus important)
-
les emboles lymphatiques,
-
les emboles vasculaires,
-
la rupture capsulaire,
-
le nombre de ganglions sentinelles positifs,
-
le rapport entre le nombre de ganglions sentinelles positifs et le nombre de
ganglions sentinelles prélevés,
-
le type histopronostique,
-
la présence d’un cancer lobulaire infiltrant,
-
la multifocalité,
-
l’âge de la patiente,
-
les récepteurs aux oestrogènes,
-
les récepteurs Neu.
CURAGE
AXILLAIRE : INTERET THERAPEUTIQUE CONTESTE
SENTINELLE POSITIF).
(APRES
GANGLION
En 2002, FISHER (NSABP-B-04 New England Journal of Medecine) présente une étude avec
un follow up de 10 et de 25 ans chez des patientes N0 clinique.
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Il n’y a pas de différence significative chez ces patientes traitées par :
-
mammectomie seule,
-
mammectomie + curage axillaire,
-
mammectomie + radiothérapie.
en ce qui concerne :
-
la survie globale,
la survie sans récidive.
N0
Mammectomie (365 cas)
MCA (362 cas)
Mammectomie + radiothérapie (352 cas)
A 10 ANS
OS
DFS
54
42
58
47
59
48
A 25 ANS
OS
DFS
26
19
25
19
19
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D’autres études publiées en 2009 et en 2012 démontrent qu’il n’y a pas de bénéfice en
terme de survie globale, de survie sans métastase et de récidives locales même si le taux des
récidives axillaires est plus élevé dans le bras abstention lorsque l’on compare avec follow up
de 5 à 15 ans le curage axillaire avec l’abstention axillaire associé ou non à une radiothérapie
du sein (pas du creux axillaire) et 5 ans de Tamoxifene.
Pour GIULIANO (2011 - JAMA), l’indication de reprise chirurgicale du creux axillaire en cas de
ganglion sentinelle positif est remise en cause pour les micrométastases et les cellules
tumorales isolées mais aussi en cas de macrométastases.
D’autres auteurs ont conclu de façon identique.
Si la majorité des auteurs reconnaissent aujourd’hui le peu d’utilité d’un curage axillaire
complémentaire en cas de cellules tumorales isolées, de micrométastases ou de
macrométastases, la majorité des référentiels sont prudents et attendent d’autres études.
GANGLION
SENTINELLE ET CHIMIOTHERAPIE NEO-ADJUVANTE
Le ganglion sentinelle avant la chimiothérapie néo-adjuvante s’apparente aux critères
habituels.
Par contre, après chimiothérapie néo-adjuvante, le taux d’identification reste bon et le taux
de faux négatifs est dans les normes.
Pour les référentiels français, effectuer un ganglion sentinelle après chimiothérapie néoadjuvante est accepté en cas de N0 clinique, échographique et cytologique préchimiothérapie.
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GANGLION
SENTINELLE ET RADIOTHERAPIE
Certains auteurs ont comparé à 5 ans la fréquence des récidives axillaires chez des patientes
présentant des ganglions sentinelles micrométastastiques :
- en l’absence de traitement complémentaire à 5.6 %,
- après curage axillaire 1 %,
- après irradiation du creux axillaire sans chirurgie axillaire de complément 0 %.
Les chiffres de survie globale et de survie sans récidive ne sont pas connus.
Il y aurait donc un intérêt en cas d’absence du curage axillaire chirurgical d’envisager une
radiothérapie sur le creux en cas de ganglion sentinelle micro- ou macrométastatique.
Enfin, une étude dirigée par VERONESI a été présentée récemment au Congrès de Chicago
avec un follow up de 15 ans chez des patientes T1, T2 avec ganglion sentinelle positif.
Cette étude compare un curage axillaire complémentaire ou une irradiation axillaire seule.
Il n’y aurait pas de différence significative dans la survie sans récidive et la survie globale
mais on note moins de lymphoedème dans le bras avec irradiation.
Les résultats définitifs de cette étude son attendus pour cette année.
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POINTS IMPORTANTS

La technique du ganglion sentinelle est validée.

Les indications se sont élargies mais les contre-indications absolues persistent.

L’apport de l’échographie axillaire dans le bilan d’extension préopératoire du
cancer du sein est important. En effet, la technique du ganglion sentinelle doit être
réservée aux patientes N0 clinique et échographique.

L’examen extemporané des ganglions sentinelles est le plus souvent effectué par
empreinte cytologique ou coupe en congélation.

Des normogrammes existent mais non validés, permettraient de sélectionner les
40 à 70 % de patientes qui n’ont aucun bénéficie à un curage axillaire
complémentaire. L’intérêt thérapeutique du curage axillaire systématique après
ganglion sentinelle positif est contesté en cas de macrométastases ; est validé en
cas de cellules tumorales isolées et de micrométastases.

La technique du ganglion sentinelle peut être appliquée après chimiothérapie néoadjuvante en cas de N0 clinique, échographique et cytologique préchimiothérapie.
Il y aurait un intérêt, en cas d’absence du curage axillaire complémentaire et en cas de
ganglion sentinelle positif, micro- ou macrométastases, d’envisager une radiothérapie sur le
creux axillaire.
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