Très global… et très local Très global… et très local

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Entreprise
MORY EUROPA
Très global… et très local
Géant français de la messagerie,
le groupe Mory d’Alain Bréau a
progressivement étendu sa palette
d’activités. En Belgique, c’est une
opération de croissance externe
menée en 2004 qui lui a donné
l’assise nécessaire. Depuis lors,
la croissance et la rentabilité ont
été au rendez-vous, mais qu’en estil en ce début d’année 2009 ?
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es racines de la filiale belge
de Mory remontent juste
après la guerre, avec la fondation en 1946 de la société Bijloos
Gebroeders à Hoeselt. Cette
société, reprise en 1973 par le
groupe britannique Europa, est
ensuite devenue Europa SCA
Express avant d’être rachetée par
Mory en 2004. Depuis plusieurs
années, c’est Gherardo Miss qui
dirige Mory Europa dans le port de
Bruxelles. Entre la stratégie d’un
groupe d’envergure mondiale et
des points d’ancrage encore très
locaux, mais dans la droite ligne
d’un des slogans du groupe qui se
veut ‘plus structuré et efficace que
L
les petits, plus local et proactif que
les grands.’
Un marché
(relativement) protégé
Truck & Business : Comment Mory
Europa vit-elle la crise économique
actuelle ?
Gherardo Miss : Dans le groupage,
nous souffrons moins que les sociétés qui transportent des charges
complètes. D’autre part, le transport de petits colis souffre
aussi plus que nous. Nous sommes
donc relativement protégés, mais
l’impact de la crise est néanmoins
réel. Le nombre de palettes par
enlèvement est moins important,
et un client peut réduire sa commande de cinq à trois palettes, par
exemple. D’un autre côté, il y a une
pression terrible sur les prix, qui
atteignent parfois des niveaux
débiles.
Mais vous n’êtes pas actifs qu’en
messagerie…
GM : En fait, à l’époque d’Europa,
nous ne faisions que de l’international, avec une forte activité de et
vers le Royaume-Uni. Quand Mory
nous a rachetés, cela nous a
apporté un nouveau métier et des
volumes nationaux. Aujourd’hui,
les lignes internationales irriguent
les réseaux de distribution en
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HISTORIQUE
La société ‘Transportonderneming Bijloos Gebroeders’ est née en 1946 à Hoeselt.
Rachetée en 1973 par le groupe anglais Europa, elle est à la base de l’actuelle
Mory Europa. Avec une vingtaine de véhicules, elle déménage dans le port de
Bruxelles en 1981 et emménage dans ses installations actuelles en 2000.
La société est rachetée par le groupe français Mory en 2004 et devient alors
Mory Europa. La reprise porte également sur la société GTTrans, qui possède
le parc de véhicules.
RADIOSCOPIE
ÉVOLUTION FINANCIÈRE (en Mio EUR)
11,103
12,737
15,365
CA
2,492
2,876
Chiffre
d’affaires
1,99
Valeur
ajoutée
RÉSULTAT
VA
2005
2006
2007
0,012
0,245
0,357
TRACTEURS :
7
MATÉRIEL TRACTÉ :
18
PERSONNEL :
37
EN BREF
SIÈGE SOCIAL : BRUXELLES
DIRECTION : GHERARDO MISS
SPÉCIALITÉS : MESSAGERIE, DISTRIBUTION JUSQU’À 6 PALETTES
DESTINATIONS : BENELUX, FRANCE, ROYAUME-UNI, ALLEMAGNE, ITALIE
www.mory-europa.be
Depuis la reprise par Mory,
la société a beaucoup progressé.
Belgique et en France. C’est dans
ce sens que nous avons ouvert un
bureau d’expédition à Anvers en
2006. Notre but est de faire de la
Belgique la porte d’entrée principale des marchandises destinées
au réseau de distribution de Mory
Team en France.
Pourquoi conserver deux entités
juridiques avec Mory Europa et
GTTrans ?
GM : Nous exerçons deux métiers
différents, mais étroitement mêlés.
Mory Europa est orientée vers la
distribution, et GTTrans davantage
vers les services internationaux.
Mais un jour ou l’autre, le tout sera
certainement regroupé sous la bannière de Mory Belgium ou quelque
chose comme cela, avec un siège
d’exploitation à Bruxelles et un
autre à Anvers.
Quels sont les principaux marchés
que vous desservez à partir de la
Belgique ?
GM : Vers le Royaume-Uni, nous
conservons encore notre casquette
express, et il y a deux ou trois
départs par jour en fonction de la
demande. C’est vraiment un de nos
chevaux de bataille. Nous desservons le Benelux et l’Allemagne tous
les jours et l’Italie trois à quatre fois
par semaine. Mais la plupart de nos
« En messagerie, les prix atteignent
un niveau débile ! »
Gherardo Miss
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transports internationaux vont évidemment en France.
Dispatching
automatisé à 75 %
Comment combinez-vous ces deux
métiers ? Comment est organisé
votre dispatching ?
GM : Depuis la reprise par Mory, les
choses ont beaucoup évolué. Le
travail a été entièrement réorganisé. Aujourd’hui, je dirais que la
planification est automatisée à
75 %, mais il reste un quart de
fignolage manuel. Avant 2004, les
proportions étaient inversées, et
je dirais que 15 à 20 % de fignolage
serait un bon objectif. Chaque nuit,
les missions relatives aux marchandises entrant en Belgique
nous parviennent entre 20 et
24 heures. Elles sont réparties par
zone géographique, par véhicule
et par chauffeur. Cela représente
environ 1.200 tâches par nuit,
gérées en quatre heures. Tous les
bons de livraison sont imprimés
avant 4 heures du matin.
Les camions internationaux arrivent chez nous entre une heure et
6 heures du matin, et les premiers
COMPOSITION DE FLOTTE
I VÉHICULES MOTEURS
4 tracteurs Iveco Stralis AT 360 ch
3 tracteurs Scania
I MATÉRIEL TRACTÉ
18 semi-remorques bâchées Krone +
2 châssis porte-conteneurs
I CONCESSIONNAIRES
Menten à Hoeselt et Verstraeten
à Zemst (Iveco)
Scania à Neder-over-Heembeek
I KILOMÉTRAGE ANNUEL
120.000 km/an
I PNEUMATIQUES
Pneus Louis
I CARBURANT
Total
I EQUIPEMENT IT
GSM
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véhicules de distribution partent
vers quatre heures, sauf les véhicules qui ne livrent qu’à Bruxelles,
qui peuvent être chargés plus tard.
Et comment organisez-vous l’export ?
GM : La collecte des marchandises
est effectuée par les véhicules de
livraison qui rentrent vides vers le
début de l’après-midi. Si on n’arrive pas à combiner le tout, nous
procédons à des enlèvements spéciaux. ET les lignes partent dès
20 heures.
Y a-t-il un bon équilibre entre les
volumes à l’importation et à l’exportation ?
GM : Les exportations sont inférieures en volumes, mais c’est une
activité peu rentable pour nous.
D’une part, nous contrôlons strictement toutes les marchandises,
mais nous sommes dépendants du
partenaire qui effectue la livraison
finale.
Vous n’utilisez que des sous-traitants pour la distribution, mais
vous conservez une petite flotte
chez GTTrans. A quelles fins
employez-vous ces véhicules ?
GM : Nos propres véhicules font la
navette de nuit entre certains
bureaux du groupe Mory, vers
Orléans et Paris par exemple. Ils
s’occupent aussi de la collecte des
plus gros chargements. La distribution est sous-traitée à 80 % à de
petites sociétés indépendantes
sous contrat. Il y en a entre 35 et
40 qui roulent à nos couleurs. C’est
d’ailleurs la seule exigence que
nous ayons vis-à-vis d’eux : que
leurs véhicules soient blancs et lettrés Mory. Typiquement, ils roulent
pour nous avec des camions pour
20 palettes. En France, par contre,
les sociétés de Mory utilisent
davantage leurs propres véhicules.
Un des inconvénients de cette
méthode de travail est la difficulté
à construire une image de marque
forte…
GM : La qualité des prestations des
sous-traitants est contrôlée de
près, et nous n’avons pas vraiment
de problème d’image de marque.
Ce qui est par contre probable, c’est
que les différentes marques que
Mory utilise pour dénommer ses
différents produits, comme LDI ou
Team, vont faire place à une marque
unique.
A partir de quand avez-vous senti
la crise arriver ?
GM : En juin 2008 déjà, quelque
chose n’allait pas. Les volumes
baissaient de manière anormale.
Juin est toujours un mois bizarre,
mais là c’était autre chose. Les
clients étaient déjà nerveux.
Septembre a été bon après un très
mauvais été, mais c’est véritablement en octobre et novembre que
les choses se sont dégradées. Le
début de l’année 2009 a été faible,
avec des fluctuations bizarres. Il
nous arrive d’avoir des journées
avec 850 missions, et le lendemain
à 1.300. Mais ce n’est pas le
désastre non plus.
Aujourd’hui, beaucoup de transporteurs réduisent le volume qu’ils
placent en sous-traitance. Est-ce
le cas chez vous ?
GM : Ce qui est certain, c’est que
nous sommes régulièrement
contactés par des transporteurs
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qui cherchent du travail. Mais nous
préférons continuer avec nos soustraitants actuels. C’est une question de confiance mutuelle, de qualité des contacts humains. Mais il
est clair que nous nous adaptons
aussi à la demande.
Quelle infrastructure d’informatique embarquée utilisez-vous
pour mener vos missions à bien ?
GM : Toutes les marchandises à
l’exportation sont scannées, mais
nous n’avons pas le temps de faire
de même avec les marchandises à
l’importation. Nous n’utilisons pas
encore d’ordinateurs de bord, mais
un projet est en cours en France.
Chez nous, la personne la plus
importante, c’est le chauffeur, puis
c’est le magasinier et enfin le dispatcheur. C’est le chauffeur qui voit
la marchandise qu’il va chercher. Il
y a relativement peu de mauvaises
surprises avec les colis. Par contra,
avec les palettes, c’est plus courant. En groupage, il y a un nouveau
défi à relever chaque jour, notamment pour savoir à tout moment
combien de places disponibles il
reste dans les camions. C’est dans
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ce domaine-là que nous cherchons
une solution informatisée, avec le
même niveau d’information sur nos
propres véhicules et sur ceux des
sous-traitants.
pas les plus grands acteurs du marché, et nous n’entendons pas
nécessairement le devenir. Il est
plus important d’être bien imbriqué dans le réseau de Mory Group.
Des investissements…
pour plus tard
Ou en êtes-vous de votre projet
d’extension au port de Bruxelles ?
GM : L’année dernière, à l’occasion
du bicentenaire de Mory, la direction de Mory Group a décidé de
diversifier ses activités à Bruxelles
en utilisant davantage la complémentarité entre la navigation intérieure et la route. Aujourd’hui, nous
sommes installés dans un bâtiment
construit en 2000 sur un terrain
d’un hectare que nous avons pris
en concession pour 50 ans auprès
du Port de Bruxelles. Le projet
porte sur un centre multimodal de
Depuis la reprise par Mory, votre
rentabilité est supérieure à la
moyenne du secteur. En va-t-il de
même aujourd’hui ?
GM : Nous avons la réputation
d’être assez chers sur le marché.
Mory n’a jamais bradé ses prix. En
2008, notre rentabilité a été bonne,
et jusqu’en février, nous avons
continué à gagner de l’argent.
Etes-vous candidat à une opération de croissance externe ? Il y a
aujourd’hui plus de sociétés à
racheter que jamais, et Mory a les
moyens…
GM : Pourquoi pas, si je tombe sur
quelque chose de vraiment intéressant ? Mais je cherche plus des
hommes que des sociétés. La moitié de moi-même me dit que c’est le
moment d’aller faire son marché.
D’un autre côté, nous ne sommes
15.000 m2 qui permettra de recevoir en direct des trafics conteneurisés en provenance du port
d’Anvers et d’effectuer des prestations à valeur ajoutée. Il y aura
un magasin en douane, mais aussi
un service de représentation fiscale et des prestations logistiques
comme l’étiquetage, l’emballage
ou le pick & pack. Nous avons la
concession pour le terrain, mais
pour l’instant, le projet est gelé.
Nous attendons de voir comment
va évoluer l’économie et le trafic
du port d’Anvers pour lancer la
construction du centre. Mais ce
n’est pas abandonné : le fret maritime est un pôle de croissance fort
au sein du groupe Mory.
Une interview de Claude Yvens
Les sous-traitants
doivent rouler avec des véhicules
blancs lettrés aux couleurs de Mory.
GESTION DE PARC
CARACTÉRISTIQUES DES TRACTEURS
“Nous transportions plus de volumes que du poids. 360 chevaux sont donc
suffisants.“
FINANCEMENT
“Nous ne sommes pas un véritable transporteur. Pour nous, le poids lourd est un
poste de coût. Nous effectuons nos achats de manière entièrement indépendante du
groupe, et le financement est basé sur un leasing sur quatre ans avec option d’achat.
Les Scania, par contre, avaient été achetés sur fonds propres. Nous avons tendance
à conserver notre matériel assez longtemps, puisque les charges sont peu lourdes.“
ENTRETIEN
“On fait l’entretien normal des semi-remorques chez nous, et on fait appel
à un petit atelier local pour les plus grosses réparations.“
En matière de gestion de parc, Mory Europa travaille
surtout avec des fournisseurs locaux.
SOUS-TRAITANTS
“La plupart ne travaillent pas que pour nous, et utilisent des porteurs pour
20 palettes. La seule exigence que nous avons, c’est qu’ils soient blancs et lettrés
à nos couleurs.“
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