Homélie Dimanche 21 février 2010 1er dimanche de Carême Luc 4

Transcription

Homélie Dimanche 21 février 2010 1er dimanche de Carême Luc 4
Homélie
Dimanche 21 février 2010
1er dimanche de Carême
Luc 4, 1-13
« Tentations au désert »
Jésus remonte du Jourdain. Il vient de recevoir le baptême de Jean Baptiste. Nous
sommes au tout début de sa vie publique. Et le voilà conduit par l'Esprit Saint à travers le
désert durant quarante jours. En ce début du temps de Carême, nous sommes comme au
premier matin d’une nouvelle Création, dont Jésus est le « nouvel Adam ».
Adam, lui, a été créé dans un jardin d’Eden, un paradis. Mais de ce jardin de plénitude
de grâce et d’amour, Adam et Eve en ont fait un désert par leur désobéissance. Par leur péché,
ils se sont éloignés de Celui qui est la source de tout bien, de toute vie. Ils ont connu alors le
désert de l’ignorance, de la peine du travail, de la souffrance, de la faim…
Jésus, lui, est le nouvel Adam. Descendu du Ciel, le Fils de Dieu s’est fait homme, non
plus dans un jardin d’Eden, mais dans le désert du cœur de l’homme pécheur. Et Jésus s’est
mis de suite à la recherche de l’homme perdu. Car si le Christ est conduit au désert, c'est pour
partir à la recherche d'Adam, et de toute sa descendance, qui s’y sont égarés en désobéissant.
Mais le premier être que Jésus rencontre sur sa route qui conduit au Salut, ce n’est pas
Adam, mais le diable, le serpent du jardin d’Eden, devenu le Prince de ce monde. Jésus sait
que ce n’est qu’une fois qu’il aura vaincu Satan, qu’il pourra enfin retrouver et libérer Adam,
et toute sa descendance, et leur ouvrir à nouveau les portes du Ciel.
Au désert, le Christ remporte une victoire sans faille face à Satan. Le démon fait tout
pour le faire tomber. Il lui inflige les trois plus grandes tentations qui rongent le cœur de
l’homme : l’égoïsme, l’orgueil et la cupidité. Mais Satan perd la bataille. Le Christ sait pour
autant que sa victoire sur le Prince des ténèbres ne sera définitive que dans l’ultime combat
qu’il livrera contre lui sur la Croix. C’est ce qu’indique Saint Luc quand il dit à la fin du récit
que « le démon s’éloigna de Jésus jusqu’au temps fixé ».
Si nous en restons à une lecture purement historique ou théologique de ces évènements,
nous risquons de nous contenter de n’être que de simples spectateurs devant un combat qui
nous dépasse infiniment. Nous passerions alors complètement à côté de l’essentiel. Car si
nous relisons chaque année, à l’entrée en Carême, le récit des tentations du Christ, c’est parce
que nous sommes, nous aussi, appelés à nous engager, personnellement, aux côtés du Christ
dans le combat spirituel contre les forces du mal qui tentent de nous détourner du chemin qui
nous ramène à Dieu.
Dieu ne vient pas nous imposer de revenir à Lui. Il attend de nous une réponse libre, un
engagement en paroles et en actes. Car le désert dans lequel s’aventure Jésus aujourd’hui
même, c’est l’état de notre cœur. Et celui que Jésus vient chercher à rencontrer en ce début de
Carême, c’est moi, c’est vous, c’est chacun d’entre nous. Moi aussi, comme Adam, je suis né,
le jour de mon baptême, dans un beau jardin, dans un cœur tout pur, fécondé par la grâce
baptismale, habité par la Sainte Trinité. Alors, qu’ai-je fais en grandissant de tout ce que le
Seigneur m’a donné ? N’ai-je pas moi aussi saccagé beaucoup de choses au fil du temps ?
C’est parce que l’homme cède aux tentations du Prince de ce monde qu’il laisse son cœur se
dessécher. En fait, l’homme se comporte bien souvent comme le peuple d’Israël après sa
sortie d’Egypte durant sa traversée du désert.
A l’image du peuple juif qui avait faim, qui récriminait contre Dieu, et lui demandait des
biens purement matériels, du pain, de la viande, de l’eau, combien de fois n’avons-nous pas
nous aussi donner la priorité aux biens matériels, aux richesses bien terrestres de ce monde,
avant de penser aux trésors du Ciel ?... alors que Jésus essayait en vain de nous dire :
"L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu".
(Dt 8, 3)
Tout comme le peuple juif s’est fabriqué de faux idoles, un veau d’or, combien de fois
n’avons-nous pas nous aussi laissé se dessécher notre cœur en poursuivant des illusions de
bonheurs, des paradis éphémères…Pire, combien de nos contemporains s’enfoncent dans des
pratiques spirites, de voyance, de magie, d’ésotérisme, - et tout particulièrement ici, dans le
Pays de Gex -, alors que Jésus ne cesse de nous avertir : "Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et
Lui seul".(cf Dt 6, 13)
A l’image enfin du peuple juif, qui a mis à l’épreuve Yavhé pour qu’il lui donne de
l’eau, combien de fois n’avons-nous pas douté nous aussi de Dieu, et ne l’avons-nous pas mis
à l’épreuve, comme si nous lui disions : « si tu es vraiment Dieu, alors commence par me
donner ce que je te demande, et ensuite on verra », et que nous n’entendions pas la voix de
Jésus nous dire : "tu ne mettras pas Yahvé ton Dieu à l’épreuve". (Dt 6, 16)
Mais aussi misérable que soit notre vie, aussi desséchée que soit notre cœur, notre désert
de baptisé n’est pas un désert comme les autres. Il y a dans le désert de nos coeurs, un arbre
qui continue de pousser malgré tout, un arbre plus fort que toutes les attaques du Malin, plus
fort et plus grand que le poids de toutes nos fautes. Cet arbre de Vie, c’est la Croix glorieuse
du Christ. Cette Présence du Christ mort et Ressuscité pour nous sauver, voilà l’unique source
de Vie et d’Espérance que nous devons laisser se développer au cœur même de nos déserts, de
nos lâchetés, de nos pauvretés. Il ne tient qu’à nous, en ce début de Carême, de laisser cette
Vie venir nous irriguer, en choisissant radicalement notre camp, en renouvelant les promesse
de notre baptême, en renonçant à Satan et à toutes ses œuvres, et en nous attachant
définitivement au Christ. Amen.
Père Patrick de VARAX