Le sens du Carême 1 Le sens général du Carême, hier et aujourd

Transcription

Le sens du Carême 1 Le sens général du Carême, hier et aujourd
Le sens du Carême
1
1 Le sens général du Carême, hier et aujourd'hui
Le Carême a toujours gardé le même sens à travers l'histoire de l'Eglise : une période de
préparation à Pâques.
Il est important de signaler qu'en pratique, depuis le Moyen-âge, les chrétiens ont perdu le
véritable sens du Carême à cause de la théologie sacrificielle et la notion de privation et de
mortification. Ainsi, durant des générations, on a mis l'accent sur l'aspect pénitentiel et
sacrificiel du Carême alors que l'Eglise ne dit pas cela. Le Carême était devenu une période de
privation : se priver pour se priver.
Depuis Vatican II, le Carême redevient lentement mais avant tout une invitation à nous
concentrer sur l'essentiel : nous sommes en route, durant 40 jours (chiffre symbolique qui
signifie toute une vie) à la rencontre avec le Christ ressuscité de Pâques.
Nous sommes donc invités à suivre le Christ et pour cela nous devons choisir entre une vie
d'amour que propose le Christ et nos petits égoïsmes. Et dans cette optique, faire pénitence
reste un élément important dans la mesure où faire pénitence n'est pas secondaire mais second.
Ainsi, le temps du Carême nous permettra de regarder notre vie avec un peu de recul : Qu’estce qui nous fait courir ?
2 Notre route vers Pâques à la lumière de notre baptême
Le baptême nous fait renaître à une vie nouvelle, une vie de ressuscité.
Dans le passé le baptême était considéré comme la « première résurrection » (Apoc. 2, 5 ; Rm
6, 1-11 ; Jn 5, 25-28). C'est ainsi que le Carême a été vécu, dès les origines, comme un temps
de préparation au baptême qu'on célébrait solennellement à la Veillée pascale. Ainsi tout le
Carême était conçu et vécu comme un chemin qui conduisait ceux qui voulaient devenir
chrétiens (catéchumènes) vers cette grande rencontre avec le Christ ressuscité, vers le
renouveau de la vie.
Mais nous, aujourd'hui, nous sommes déjà baptisés et le baptême est souvent peu efficace dans
notre vie quotidienne. C'est pourquoi le Carême est pour nous, laïcs ou religieux, « un
catéchuménat renouvelé » à travers lequel nous allons à nouveau à la rencontre de notre
baptême, nous allons le « revisiter », le redécouvrir. Le Carême est donc une occasion de
redevenir « chrétiens » à travers un changement intérieur : « Convertissez-vous, et croyez à la
Bonne nouvelle ».
Mais que signifie cette conversion intérieure ? Cette conversion n'est pas un effort
d'autoréalisation. Ce n'est pas nous qui avons créé nos personnes. La conversion consiste dans
le fait que nous ne nous considérons pas comme les « créateurs » de nous-mêmes.
Se convertir, c'est accepter librement que nous dépendions en tout de Dieu, notre véritable
Créateur. Et cette dépendance devient une réponse libre à l'amour de Dieu qui se révèle surtout
Le sens du Carême
2
sur la croix. Nous acceptons librement de prolonger l'amour de Dieu en aimant nous -mêmes
comme Jésus a aimé et en rendant notre monde plus agréable. Alors, se convertir signifie : ne
pas chercher son propre succès. Se convertir, c'est se mettre à l'école de l'amour de Dieu sur la
croix pour apprendre à redonner à notre tour son amour aux autres. Se convertir, c'est accepter
le mystère de la croix.
3 Les moyens qui nous aident dans notre marche vers Pâques
Pour nous aider sur cette route du Carême vers Pâques, l'Eglise nous propose trois moyens qui
nous aideront à nous détourner de ce qui nous conduit à la mort, et à nous tourner vers Celui
qui est source de vie, d'amour et de lumière : le Christ ressuscité.
Cela fait 1700 ans que chaque année le mercredi des cendres, l’Eglise propose aux chrétiens
(laïcs, religieux et ministres ordonnés) l'évangile de Matthieu où Jésus trace le chemin vers le
bonheur dans le Sermon sur la montagne.
Nous sommes tous à la recherche du bonheur. C'est notre besoin fondamental. Mais pour
trouver ce chemin, il ne faut pas que nous marchions en étant exclusivement préoccupés par
nous-mêmes. Nous devons aussi nous laisser relier à Dieu et aux autres.
Pour ce faire, Jésus nous propose de nous refaire une santé dans trois domaines relationnels.
Ce sont les trois « P » :
− par la Prière : pour rétablir notre communication avec Dieu
− par le Partage (aumône) : par rapport aux autres
− par la Privation (jeûne) : par rapport à nous-mêmes.
4 La tentation
Il est beau de voir comment les évangiles des cinq dimanches du Carême nous font « revisiter »
notre baptême. Je n'ai pas le temps aujourd'hui d'expliciter comment tous ces thèmes des
évangiles des cinq dimanches du Carême se tiennent mais je voudrais quand même m'arrêter
un instant à l'évangile du premier dimanche du Carême, celui des tentations au désert, qui
correspond au rite de la renonciation qui
précède le baptême proprement dit.
Jésus vient d'être baptisé par son cousin, Jean le Baptiste, et lors de son baptême, l'Esprit Saint
est descendu sur lui, comme nous avons reçu l'Esprit Saint à notre baptême. Puis, poussé par
ce même Esprit, Jésus se retire au désert. Avant d'entreprendre sa mission, Jésus fait une
retraite pour réfléchir et prier. Il se pose la question, lui qui est pleinement homme : « Qu'est ce
que Dieu attend de moi dans ma vie ? »
Le Carême est pour tout chrétien un genre de retraite, un temps où nous faisons davantage
attention à la Parole de Dieu, à ce que Dieu a à nous dire. Lorsqu'un homme prie vraiment
Dieu, lorsqu'il réfléchit un peu sur le sens de sa vie, l'Adversaire n'est jamais loin. Et alors
nous remarquerons que là où Jésus a été tenté, nous le sommes aussi.
3
Le sens du Carême
A son baptême, Jésus prend conscience qu'il est le Fils de Dieu. Nous, à notre baptême, nous
devenons enfants de Dieu et nous sommes invités à faire la volonté de Dieu. Et comme Jésus a
connu toutes les formes de tentations, nous aussi, nous en faisons l'expérience : le désir de
posséder, la volonté de puissance et la prétention de nous passer de Dieu. La seule différence
avec Jésus, c'est que lui a refusé ces trois tentations. Tous les hommes, de partout et de
toujours, collectivement et individuellement, l'Eglise aussi, se trouvent sans cesse devant ces
tentations de l'avoir, du pouvoir et du rejet de Dieu.
Mais être chrétien implique aussi et en même temps que notre espérance est orientée vers le
Christ ressuscité et notre propre résurrection. Ce qui pourrait nous guetter, ce qui serait la
tentation la plus grave pour nous, c'est la troisième tentation, la plus sérieuse peut-être, celle
de douter de Dieu, celle de manquer de confiance en lui, en son absolue créativité dans la
résurrection du Christ. En un mot, la foi. A pareille tentation, il n'y a que la prière qui peut
résister ainsi qu'une vraie communauté de vie qui est un lieu où l'on a appris comment venir au
monde à travers la mort et la résurrection de chaque jour.
Chastre le 28-02-11
Hauben M.
La tentation du Christ sur la montagne,
Duccio di Buoninsegna, 1308