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Les actes administratifs unilatéraux des personnes privées
gérant un service public
(fiche thématique)
A jour au 24/04/2016
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Table des matières
Table des matières ..............................................................................................................................2
Introduction........................................................................................................................................3
I – Les critères d’administrativité des actes unilatéraux des personnes privées gérant un service public
...........................................................................................................................................................5
A – L’hypothèse des SPA .................................................................................................................5
1 – Un acte qui se rattache à la mission de SPA ...........................................................................5
2 – Un acte qui traduit la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique ........................6
3 – Un acte règlementaire ou individuel ......................................................................................6
B – L’hypothèse des SPIC .................................................................................................................7
1 – Un acte relatif à l’organisation du service public ....................................................................7
2 – Un acte qui traduit la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique ........................7
3 – Un acte règlementaire ...........................................................................................................8
II – La raison d’être des critères posés par les jurisprudences Magnier et Epx. Barbier ........................9
A – Des critères qui justifient l’entorse à certains principes .............................................................9
B – Des critères modulés selon la nature du service public ............................................................ 10
Commentaires d'arrêts liés ............................................................................................................... 11
Hypothèse SPA : ........................................................................................................................ 11
Hypothèse SPIC : ....................................................................................................................... 11
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Introduction
Alors que les missions de service public étaient originellement prises en charge
exclusivement par les Administration d’Etat ou locales, l’expansion de l’interventionnisme public
conduisit ces dernières, incapables d’assumer seules l’ensemble des nouveaux besoins collectifs, à
associer, de plus en plus fréquemment, des personnes privées à l’exécution de celles-ci. Ce fut
d’abord le cas par le biais d’habilitations contractuelles, telles que la concession, puis très
rapidement sous la forme d’habilitations unilatérales, qu’elles soient législatives ou règlementaires
(voir pour cette dernière hypothèse : CE, ass., 13/05/1938, Caisse primaire « Aide et Protection »).
La question s’est, alors, posée de savoir si de tels organismes pouvaient, dans le cadre de leur
mission, édicter des actes administratifs unilatéraux. Au premier abord, la réponse à cette
interrogation semblait devoir être négative. En effet, l’acte administratif unilatéral se définit
essentiellement par son versant organique, lequel implique qu’une décision ne puisse être
administrative que si elle est prise par une personne publique. Un autre élément devait compliquer
les choses. Il tient à l’existence, depuis le célèbre arrêt Bac d’Eloka (TC, 22/01/1921, Société
commerciale de l’Ouest africain), de deux catégories de services publics : les services publics
administratifs (SPA), majoritairement soumis au droit administratif et à la compétence du juge
administratif, et les services publics industriels et commerciaux (SPIC) qui relèvent majoritairement
du droit privé et du juge judiciaire. Dès lors, à côté de l’obstacle lié au critère organique, se
surajoutait, dans le cas d’un acte pris par une personne privée gérant un SPIC, celui induit par le
régime essentiellement privé de ces services publics.
Les juges ne se laissèrent, cependant, pas freinés par ces principes. En effet, quel qu’en fut le
poids, d’autres arguments devaient plaider en faveur de la reconnaissance du caractère administratif
de certains des actes unilatéraux pris par ces personnes. Ils tiennent principalement à la volonté du
Conseil d’Etat et du Tribunal des conflits de soumettre une partie de l’activité de ces entités aux
mêmes exigences que celles qui s’appliquent aux autres services publics. En effet, si ces organismes
sont privés et si, dans le cas des SPIC, le contentieux est majoritairement judiciaire, il n’empêche que
ces personnes interviennent, d’une façon ou d’une autre, dans le champ de la sphère publique. Il
parait, alors, logique qu’une partie de leurs actes, les plus importants, soit jugée de la même façon
que ceux pris par n’importe quelle autorité administrative. Pour qu’il en aille, ainsi, ceux-ci doivent,
dès lors, relever de la compétence du juge administratif, dont on sait qu’il est, dans l’application du
principe de légalité, plus sévère que le juge judiciaire.
Une fois le principe admis, il convenait, ensuite, de circonscrire le champ des actes pouvant
être considérés comme administratifs. De ce point de vue, la jurisprudence se montra peu novatrice
puisque c’est en recourant aux deux notions cardinales du droit administratif qu’elle opéra cette
délimitation : le service public et la puissance publique. Cette ligne directrice, commune aux SPA et
aux SPIC, est somme toute logique puisqu’il s’agit là des notions utilisées traditionnellement pour
déterminer la compétence du juge administratif. Au regard plus précisément de la problématique qui
nous occupe, cette démarche fait pleinement sens : il est, en effet, parfaitement cohérent qu’un acte
touchant à ces deux traits caractéristiques du droit administratif échappe à la compétence du juge
judiciaire
Il n’est donc pas étonnant que la jurisprudence fasse de ces notions les deux critères
principaux de l’administrativité des actes unilatéraux pris par des personnes privées gérant un service
public. Lorsque l’un et l’autre seront remplis, l’acte sera regardé comme administratif et le juge
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administratif sera compétent pour en apprécier tant la légalité, au travers du recours pour excès de
pouvoir, que les conséquences dommageables à l’occasion d’actions en responsabilité.
Il convient donc d’étudier, dans une première partie, ces critères (I), puis d’analyser, dans
une seconde partie, leur raison d’être (II).
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I – Les critères
d’administrativité des actes
unilatéraux des personnes
privées gérant un service
public
Ces critères, communs, bien qu’affectés de légères variations, aux SPA (A) et aux SPIC (B)
tiennent principalement au lien de l’acte avec le service public, à la mise en œuvre de prérogatives
de puissance publique et à la nature de l’acte.
A – L’hypothèse des SPA
Pour être administratif, l’acte unilatéral d’une personne privée gérant un SPA doit se
rattacher à la mission de service public de l’organisme (1) et traduire la mise en œuvre de
prérogatives de puissance publique (2). Ce principe bénéficie tant aux actes règlementaires qu’aux
actes individuels (3).
Ces deux conditions, qui présentent un caractère cumulatif, ont été, initialement, posées par
deux arrêts : CE, ass., 31/07/1942 , Monpeurt; CE, ass., 02/04/1943, Bouguen. Ceux-ci s’avéraient,
cependant, insuffisants en raison des incertitudes entourant la nature publique ou privée des
organismes en cause dans ces affaires et de l’absence de référence explicite à l’exigence de mise en
œuvre de prérogatives de puissance publique. Il faudra attendre l’arrêt Magnier (CE, sect.,
13/01/1961) pour que les règles applicables en la matière soient figées avec suffisamment de
certitudes.
1 – Un acte qui se rattache à la mission de SPA
En posant cette condition, l’arrêt Magnier confirme le rôle central et historique de la notion
de service public lorsqu’il s’agit de délimiter le champ d’application du droit administratif et de la
compétence du juge administratif (voir l’arrêt fondateur : TC, 08/02/1873, Blanco).
Contrairement à la jurisprudence sur les SPIC, le lien avec la mission de service public est ici
apprécié de manière assez large. En effet, ce critère est considéré comme satisfait aussi bien lorsque
l’acte touche à son organisation que lorsqu’il contribue à son exécution, ce qui est, là, une exigence
moindre. Il suffit, ainsi, plus généralement, que l’acte soit accompli dans l’exercice d’une mission de
service public.
Pour autant, la portée de cette jurisprudence n’est pas illimitée. En effet, toutes les décisions
afférentes au fonctionnement interne, telles que celles relatives aux rapports avec le personnel,
restent des décisions purement privées relevant de la compétence des juridictions judiciaires, le juge
considérant, ici, que le pouvoir de décision n’est pas mis en œuvre au titre de l’exécution du service
public, mais des rapports internes à l’institution.
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2 – Un acte qui traduit la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique
Les prérogatives de puissance publique peuvent être définies comme des pouvoirs
exorbitants du droit commun, c’est-à-dire des pouvoirs qui dépassent par l’ampleur et l’originalité de
leurs effets ce qui est courant dans les relations de droit privé. Elles donnent à celui qui les possède
un pouvoir de contrainte que ne saurait, habituellement, posséder une personne de droit privé.
Les illustrations les plus saillantes restent le pouvoir d’imposer unilatéralement des
obligations aux administrés ou, encore, le monopole puisqu’ici la personne qui en est bénéficiaire
dispose du pouvoir d’intervenir de manière exclusive dans un secteur donné, situation qui ne se
rencontre pas à l’état naturel des choses.
L’exemple du pouvoir disciplinaire des fédérations sportives, organismes de droit privé, est,
s’agissant de l’hypothèse du monopole, des plus éclairants. La loi du 16/07/1984 a, ainsi, distingué
fédérations délégataires et fédérations agréées : les premières disposent d’un monopole, les
secondes non. Le Conseil d’Etat a, alors, logiquement, considéré que ne devaient être regardées
comme des décisions administratives que les sanctions disciplinaires prises par les fédérations
délégataires. A l’inverse, confronté à une sanction prise par une fédération agréée, il s’estima
incompétent au motif que le pouvoir disciplinaire de ces fédérations n’était pas, étant donné qu’il en
existe plusieurs par discipline, différent de celui de n’importe quelle association.
3 – Un acte règlementaire ou individuel
Contrairement à la solution applicable aux SPIC, la portée de la jurisprudence Magnier est
relativement large puisque les actes concernés peuvent être aussi bien réglementaires
qu’individuels.
Les actes règlementaires sont des actes à portée générale et impersonnelle. Impersonnelle
signifie que l’acte doit s’adresser à une catégorie de personnes désignées, non de façon nominative,
mais de façon abstraite, par leur qualité ou leur fonction. L’acte doit, de plus, viser tous les agents de
cette catégorie ; c’est, là la signification du terme général.
A l’inverse, les actes individuels visent leurs destinataires de manière nominative. Cela ne
signifie pas, pour autant, qu’une décision individuelle ne peut concerner qu’une seule personne. Bien
au contraire, une telle décision peut viser une pluralité d’individus, mais ce qui la distingue, alors, des
actes règlementaires est que ces personnes sont désignées de façon nominative et non par leur
qualité ou fonction.
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B – L’hypothèse des SPIC
Là encore, les deux conditions centrales pour qu’un acte unilatéral édicté par une personne
privée en charge d’un SPIC soit administratif tiennent au lien avec le service public, même si, ici, ce
lien est apprécié de manière plus exigeante (1), et à la mise en œuvre de prérogatives de puissance
publique (2). Tels sont les principes posés par l’arrêt Epx.Barbier du Tribunal des conflits du
15/01/1968. En revanche, cette jurisprudence ne bénéficie qu’aux actes règlementaires (3).
1 – Un acte relatif à l’organisation du service public
Le lien de l’acte avec le service public est, en matière de SPIC, plus exigeant que dans
l’hypothèse des SPA : il faut, en effet, que celui-ci soit relatif à l’organisation même du service public
et non pas seulement qu’il concerne, de manière générale, la mission de service public. Définir cette
notion est, alors, capital dans la mesure où de son appréciation plus ou moins souple dépendra le
périmètre d’application de la jurisprudence Epx. Barbier. De ce point de vue, deux périodes peuvent
être distinguées.
La première, que nous qualifierons de classique, a donné lieu de la part des juridictions à une
appréciation particulièrement extensive de cette notion. Le juge y a, ainsi, inclus des mesures qui
avaient trait non à l’organisation du service public lui-même, mais à l’organisation interne de
l’établissement en charge de celui-ci. Autrement dit, les juridictions ont assimilé organisation de
l’activité et organisation de l’organe en charge de cette activité. C’est sur cette base que de
nombreuses décisions afférentes à la gestion des ressources humaines ont été qualifiées
d’administratives.
Cette assimilation entre organisation du service public et organisation du gestionnaire a,
cependant, été contestée à partir des années 2000 (voir : CE, 23/06/2010, Comité mixte à la
production de la direction des achats d’EDF ; TC, 09/02/2015, Union interprofessionnelle CFDT de
Saint-Pierre-et-Miquelon ; C. Cass., Ch. So., 10/07/2013, Société RTE-EDF Transport).
Cette ligne de partage sera consacrée par le Tribunal des conflits dans sa décision du
11/01/2016, Comité d’établissement de l’Unité « Clients et Fournisseurs Ile-de-France ». Celui-ci
juge, en effet, que « la juridiction administrative a compétence pour apprécier la légalité d’une
décision touchant à l’organisation du service public lui-même et non à la seule organisation interne
de la société chargée de le gérer ».
Concrètement, une mesure peut être regardée comme administrative tout en touchant à
l’organisation interne du gestionnaire, mais elle ne doit pas le faire de manière exclusive. Il faut, en
effet, qu’elle vise en plus, et à titre principal dirons-nous, l’organisation du service public lui-même.
Le rapporteur public, Mme. Escaut, sous la décision de 2016, estime que cette condition sera
satisfaite si la mesure a une incidence directe sur la façon dont le service public est assuré. Il faut
comprendre, par-là, que la mesure doit toucher à ce qui en constitue le cœur, la raison d’être.
La conséquence de cette dissociation entre organisation du service public et organisation
interne du gestionnaire est que des décisions jadis considérées comme administratives seront,
désormais, regardées comme purement privées. Deux ensembles de mesures semblent
particulièrement visés : les décisions relatives à ce que l’on nomme les fonctions support et celles
afférentes à la gestion des ressources humaines.
2 – Un acte qui traduit la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique
Dans l’arrêt Epx. Barbier, le Tribunal des conflits ne mentionne pas explicitement la nécessité
de la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique (voir I-A-2 pour une définition). Mais, il
faut bien reconnaitre, au regard des données de l’affaire, qu’elles irriguent pleinement sa décision et
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constituent, de fait, une condition à part entière de l’administrativité d’un acte édicté par une
personne privée gérant un SPIC.
Ainsi, dans l’affaire ayant donné lieu à cette solution de principe, la règlementation
applicable au personnel d’Air France, et donc les droits et obligations qui en découlent, ne résulte
pas d’une négociation dans le cadre d’une convention collective comme le veut le droit commun du
travail, mais d’un acte unilatéral du conseil d’administration de la compagnie : celui-ci s’impose,
donc, au personnel unilatéralement, c’est-à-dire par la seule volonté de l’organe de direction qui se
trouve être habilité, à cet effet, par les pouvoirs publics. Il s’agit là de la mise en œuvre d’un pouvoir
unilatéral de règlementation, créant droits et obligations pour les salariés d’Air France, qui n’est rien
d’autre que la manifestation la plus remarquable de ce que peuvent être les prérogatives de
puissance publique.
3 – Un acte règlementaire
A l’inverse de la jurisprudence sur les SPA, l’acte se doit, lorsqu’est en cause un SPIC, de
présenter une nature règlementaire (voir I-A-3 pour une définition). Sont, dès lors, exclues du champ
de la jurisprudence Epx. Barbier les décisions individuelles (idem) qui, conformément à une
jurisprudence classique, présentent une nature privée et demeurent de la compétence de juge
judiciaire.
Par exemple, dans l’arrêt Epx. Barbier, le règlement d’Air France vise non tel ou tel agent
nominativement désigné, mais le service du personnel navigant commercial de la compagnie. Et, il le
fait sans exclusive, ce qui signifie que l’ensemble des agents dudit service est concerné. L’on
retrouve, là, les deux traits caractéristiques d’une mesure règlementaire.
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II – La raison d’être des
critères posés par les
jurisprudences Magnier et
Epx. Barbier
Les critères choisis, dont l’appréciation fait l’objet de variations selon la nature du service
public concerné (B), s’avèrent particulièrement pertinents pour justifier l’entorse à certains principes
bien établis (A).
A – Des critères qui justifient l’entorse à certains principes
Le choix des notions de service public et de puissance publique comme principaux critères
n’est pas innocent de la part du Conseil d’Etat et du Tribunal des conflits. C’est, en effet, ces notions
qui justifient le mieux les atteintes portées à deux principes bien établis.
Le premier d’entre eux est lié à la prééminence du critère organique lorsqu’il s’agit de définir
l’acte administratif unilatéral : concrètement, un tel acte ne peut, en principe, être pris que par une
personne publique. Cela signifie, a contrario, qu’un acte édicté par une personne privée ne peut, en
principe, être administratif. Avec les jurisprudences Magnier et Epx. Barbier, c’est donc une entorse
majeure qui est portée à ce principe.
Le second principe veut que le contentieux des SPIC relève majoritairement des juridictions
judiciaires. Telle est la règle consacrée par le célèbre arrêt Bac d’Eloka (TC, 22/01/1921, Société
commerciale de l’Ouest africain). Avec l’arrêt Epx. Barbier, la primauté du droit privé en la matière se
trouve donc significativement ébranlée.
Quoi de mieux, alors, que les notions les plus classiques du droit administratif, en
l’occurrence celles de service public et de puissance publique, pour justifier les atteintes à ces deux
principes. Ces notions sont, en effet, celles que le juge utilise traditionnellement pour déterminer le
champ d’application du droit administratif et de la compétence du juge administratif. Il n’y a là rien
de bien surprenant dans la mesure où elles constituent les deux traits caractéristiques de toute
activité publique : l’on trouve d’abord la finalité de ces activités au travers du service public, puis les
moyens mis en œuvre pour réaliser cette finalité par le biais des prérogatives de puissance publique.
Il est donc logique qu’un acte pris par une personne privée, même gestionnaire d’un SPIC, soit
regardé comme administratif lorsqu’il poursuit cette finalité en recourant à ce type de moyens. En
pareille hypothèse, en effet, la personne privée se comporte matériellement comme une autorité
administrative. Il apparait, alors, normal que ses actes relèvent de la compétence du juge
administratif.
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B – Des critères modulés selon la nature du service public
Bien que les jurisprudences Magnier et Epx. Barbier soient proches, l’on peut relever deux
différences sensibles qui tiennent à la nature du service public en cause.
La première concerne le critère tiré du lien avec le service public. Dans le cas d’un SPA, le
juge se contente, ainsi, d’un simple rattachement à la mission de service public, alors que, dans
l’hypothèse d’un SPIC, il requiert un lien plus étroit puisque la mesure doit affecter l’organisation du
service public. Cette solution apparait logique dans la mesure où, à côté du versant organique du
problème commun aux deux services publics, se surajoute, lorsqu’est en cause un SPIC, la
problématique du régime majoritairement privé. Il est donc normal que, face à des services publics,
les SPIC, « doublement privés », de par leur organe et leur régime, le juge se montre plus exigeant
sur le lien avec le service public que vis-à-vis des SPA, dont le caractère privé ne concerne que
l’organe.
Les mêmes remarques peuvent être faites concernant le champ d’application de la
jurisprudence Epx. Barbier : à l’inverse de la jurisprudence Magnier, cette dernière ne trouve, en
effet, à s’appliquer qu’aux seules mesures règlementaires. Cette restriction du champ des mesures
pouvant être considérées comme administratives est directement liée à la nature plus exigeante du
lien devant exister entre l’acte et le service public, lorsque celui-ci est industriel et commercial. En
effet, cette exigence ne peut être caractérisée que par des mesures d’une ampleur autre que de
simples mesures individuelles, lesquelles ne peuvent, alors, être que règlementaires. D’où le choix du
Tribunal des conflits de limiter la jurisprudence Epx. Barbier à ces seules mesures.
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Commentaires d’arrêts liés
Hypothèse SPA :
Une application de la jurisprudence Magnier aux Ass. communales de chasse agréées (TC,
09/07/2012, ACCA d'Abondance)
http://www.fallaitpasfairedudroit.fr/droit-administratif/actes-administratifs/la-notion-d-acteadministratif-unilateral/394-une-application-de-la-jurisprudence-magnier-aux-ass-communales-dechasse-agreees-tc-09-07-2012-acca-d-abondance
L’Afnor et ses normes devant le Conseil d’Etat (CE, 17/02/1992, Société Textron)
http://www.fallaitpasfairedudroit.fr/droit-administratif/actes-administratifs/la-notion-d-acteadministratif-unilateral/78-la-nature-des-normes-edictees-par-lafnor-ce-17021992-societe-textron
Hypothèse SPIC :
Les ressorts de la jurisprudence Epx. Barbier (TC, 15/01/1968, Epx. Barbier)
http://www.fallaitpasfairedudroit.fr/droit-administratif/actes-administratifs/la-notion-d-acteadministratif-unilateral/187-les-actes-administratifs-des-personnes-privees-gerant-un-spic-tc15011968-epx-barbier
La notion d’organisation du service public dans la jurisprudence Epx. Barbier (TC, 11/01/2016, Comité
d’établissement de l’Unité « Clients et Fournisseurs Ile-de-France »)
http://www.fallaitpasfairedudroit.fr/droit-administratif/actes-administratifs/la-notion-d-acteadministratif-unilateral/393-la-notion-d-organisation-du-service-public-dans-la-jurisprudence-epxbarbier-tc-11-01-2016-comite-d-etablissement-de-l-unite-clients-et-fournisseurs-ile-de-france
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