17 octobre 1961 - Thomas Belhalfaoui
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17 octobre 1961 - Thomas Belhalfaoui
Paris-Match - 28 octobre 1961 17 octobre 1961 La violence oubliée D’une répression sanglante Le poids des manifestations algériennes dans les accords d’Évian Archives L’Humanité HISTOIRE 17 OCTOBRE 1961 La répression sanglante des manifestations algériennes à Paris Retour sur une page méconnue de l’histoire française Thomas Belhalfaoui 20 octobre 1961. Français musulmans d’Algérie détenus au « centre d’identification » du Palais des sports. Dalmas - Sipa-press Le 17 octobre 1961 au soir, entre vingt et trente mille Algériens et Français d’origine algérienne se préparent à converger vers les artères parisiennes. Cinquante ans après, retour sur la violence de la répression par laquelle se solda cette manifestation, ainsi que sur le poids qu’elle eut dans les accords d’Évian, signés cinq mois plus tard, qui conclurent la guerre d’Algérie. Décret du préfet de police Maurice Papon « Dans le but de mettre un terme sans délai aux agissements criminels des terroristes, des mesures nouvelles viennent d’être décidées par la préfecture de police. En vue d’en faciliter l’exécution, il est conseillé de la façon la plus pressante aux travailleurs algériens de s’abstenir de circuler la nuit dans les rues de Paris et de la banlieue parisienne, et plus particulièrement de 20h30 à 5h30 du matin. […] D’autre part, il a été constaté que les attentats sont la plupart du temps le fait de groupes de trois ou quatre hommes. En conséquence, il est très vivement recommandé aux Français musulmans de circuler isolément, les petits groupes risquant de paraître suspects aux rondes et patrouilles de police. Enfin, le préfet de police a décidé que les débits de boissons tenus et fréquentés par les Français musulmans d’Algérie doivent fermer chaque jour à 19h. »1 5 octobre 1961 V éritable massacre ou simple répression d’une manifestation interdite ? Les points de vue ne manquent pas de diverger quant à la qualification de l’événement, certainement l’un des plus controversés de l’histoire de France récente. Alors que, et c’est toujours le cas aujourd’hui, les autorités ont nié toute exaction, le FLN (Front de Libération National algérien), lui, affirme que des dizaines, voire des centaines de morts algériens sont imputables à la police. Cinquante ans après, comment faire la part de la vérité et celle de la propagande dans chacun des discours ? Difficile tâche, d’autant que les avis neutres ne sont pas légion dans le domaine, et que la vérité se situe certainement entre les deux – entre diabolisation et idéalisation. Peut-on toutefois imaginer que le FLN n’eût pas prévu l’ampleur de la 3 répression policière ? Pourquoi alors avoir livré les Algériens désarmés à la violence policière ? Pourquoi, en outre, la police française, devait-elle – fût-ce au prix d’une violence aveugle – empêcher les manifestants d’entrer dans Paris ? Toutes ces questions peinent à admettre une réponse rationnelle si on oublie le poids des accords d’Évian, dont chacune des parties savait à ce moment-là qu’ils étaient inévitables. 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Archives L’Humanité Thomas Belhalfaoui » La « bataille de paris » L e plan d’action, décidé par grands axes de la capitale [...] afin de le comité fédéral du FLN manifester pacifiquement contre les réuni à Cologne, s’articule récentes mesures préfectorales. » Ce en trois phases : manifestations de télégramme, reçu par tous les services masse dans la soirée du 17 octobre, de la préfecture de Police, précise égagrève des cafés, commerces et hôtels le 18, et manifestation de femmes et d’enfants le 20. Il n’est divulgué qu’à la dernière minute, le FLN comptant sur l’effet de surprise, et voulant absolument éviter toute fuite. En ce qui concerne le 17 octobre, les Algériens et Français d’origine algérienne habitant majoritairement en banlieue – dans des bidonvilles notamment, les cortèges doivent affluer vers Paris et sont pour cela répartis en trois grands secteurs : l’Étoile pour les habitants de la banlieue ouest, Saint-Michel et Saint-Germain En gris : les lieux de manifestation pour ceux de la banlieue sud, et En blanc : les lieux de détention les Grands boulevards pour ceux 2 des banlieues nord et nord-est. lement que les hommes manifestant « Le FLN ordonne à tous les doivent être arrêtés et conduits au FMA [NDLR : Français Musulmans « centre d’identification » installé au d’Algérie] de sortir ce soir 17 octobre Palais des sports (porte de Versailles). en fin d’après-midi et en soirée sur les Pour cela, 1 658 membres des forces de l’ordre sont déployés – à peine plus que pour certaines manifestations étudiantes, comme le note Jean-Paul Brunet.4 La mobilisation est au rendez-vous, et dépasse largement les estimations de la préfecture de police, laquelle se retrouve prise de court : 20 000 manifestants selon cette dernière, 80 000 selon les documents de communication du FLN – mais 28 000 selon une note interne du même FLN. Bien qu’il faille garder à l’esprit que les Algériens et Français d’origine algérienne étaient contraints par le FLN d’aller manifester – sous peine de lourdes sanctions –, il n’en demeure pas moins que les manifestations du 17 octobre sont une réussite politique pour le FLN, qui affirme non seulement son emprise sur la population, mais également sa crédibilité politique, en vue notamment de futures négociations. Eugène Claudius-Petit, député « Palais des sports. […] Je ne raconterai que ce qu’a vu la troisième équipe [médicale], celle qui a pris son service entre mercredi [dix-sept octobre] dix-huit heures et jeudi neuf heures. Elle a examiné 210 blessés à elle seule et établi nombre de diagnostics, ce qui montre ce qu’ont pu faire les autres. […] Le mercredi, dans la nuit, ceux qui ont été arrêtés le mardi n’ont ni bu ni mangé. Ils ont été abandonnés. […] La plupart des blessés avaient le cuir chevelu fendu, les mains brisées. Ils s’étaient protégé la tête. Il y eut quelques fractures de jambes. Bousculés dans escaliers, les hommes sont tombés, en masse. Certains sont passés deux fois devant le médecin car ils furent frappés après avoir été soignés, et leurs plaies refermées par des points de suture. Pour prodiguer leurs soins, les médecins du Palais des sports ne disposaient que de deux douches situées dans la salle où les boxeurs se rendent après leur combat. Aucun lavabo. C’est avec l’eau de la douche qu’ils tentaient, tant bien que mal, de laver les plaies et même leurs instruments avant de recoudre les chairs. »3 30 octobre 1961 « Intervenir avec fermeté et sans brutalité »5 Maurice Papon, préfet de police P eu relayée, peu appliquée et rapidement oubliée, la consigne donnée par le préfet de police de Paris à ses hommes, en cette fin d’après-midi du 17 octobre 1961, contraste avec le déroulement effectif des opérations policières. 4 Et cela est d’autant plus vrai que l’on connaît les conditions dans lesquelles, durant la journée et la nuit du 17 octobre, près de 11 500 Français musulmans d’Algérie (chiffre de la préfecture de police6) ont été arrêtés et placés dans les « centres d’identification ». Au nombre de trois – celui de Vincennes (94), celui du Palais des Sports (XVe arr.), et celui du stade de 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui Coubertin (XVIe arr.) – ils accueillent toute la nuit durant les manifestants qui affluent, entassés dans des cars de police et dans des autobus de la RATP, réquisitionnés par la préfecture.7 chiffre est une sous-estimation de la réalité, puisqu’il ne prend en compte ni les autres hôpitaux de la région parisienne, ni les personnes non hospitalisées – dont les témoignages des médecins officiant notamment dans les bidonville de Nanterre permettent d’affirmer qu’ils ne sont pas en nombre négligeable. Archives de l’Humanité « centres d’identification », plusieurs jours durant, sans autres soins que ceux dispensés par des médecins militaires débordés, sans matériel adéquat et dans des conditions d’hygiène déplorables. Soit ces personnes ont Les manifestants arrêtés, dont été blessées lors de leur détention, certains arrivent couverts de sang – ce plusieurs jours après les manifestaqu’attestent les nombreuses tâches de tions – alors que l’on peut difficilesang retrouvées a posteriori ment imaginer qu’elles aient dans les autobus de la RATP alors pu être en mesure de Plus de 30 morts et par les employés8 –, sont parreprésenter un quelconque qués dans des conditions d’hy230 blessés hospitalisés danger pour la sécurité et giène indécentes, sans couverl’ordre au sein des centres. Il parmi les manifestants ture, sans eau ni nourriture, apparaît en fait que ces deux vingt-quatre heures durant, et hypothèses sont absolument sont au surplus victimes de nombreux Les hypothèses invoquant la compatibles, et tout porte à croire que sévices.9 Le journaliste du Figaro Denis nécessité du maintien de l’ordre public les deux situations ont coexisté. Périer-Daville déclare en outre que les ne sont, elles non plus, pas réalistes, personnes détenues dans les « centres ou du moins largement insuffisantes. Comment alors justifier ces séd’identification » « n’ont pu prendre de Nombre de blessures, indiquent les vices manifestement gratuits et cette repos depuis plusieurs jours et, privées registres, ont en effet une double ori- absence de soins autrement que par de sommeil, sont épuisées ».10 gine, c’est-à-dire qu’elles sont dues à une haine et une « volonté de vendeux séries de coups successifs, dont geance envers une communauté [alPour preuve de ces sévices, le la seconde ne peut à l’évidence en rien gérienne] assimilée au FLN, et rendue travail d’enquête de Jean-Paul Brunet, être justifiée par un éventuel compor- collectivement responsable des attenqui a dépouillé les tats » – selon la registres d’admisformule de Jeansion de cinq hôpitaux Paul Brunet ? de l’Assistance publique – Vaugirard et Ce lourd Boucicaut (XVe arr.), bilan humain côté Corentin Celton (Issyalgérien contraste les-Moulineaux), par ailleurs avec l’Hôtel-Dieu (IVe celui concerarr.) et Cochin (XIVe nant les forces de arr.) – du 17 au 21 ocl’ordre. Seuls 14 tobre (inclus).11 de leurs membres souffrent de blesCes derniers sures légères, recensent 234 hospicomme l’atteste talisations de Nordcette note interne Africains – telle était de la préfecture de la dénomination ofpolice : ficielle, abrégée N.A. sur les registres. « Un O.P. Concernant la gra[officier de police, vité des blessures, les NDLR], 2 brigaregistres indiquent diers, 10 gardiens 17 octobre, 21h40. Carrefour Richelieu-Drouot. 17 traumatismes ont été plus ou crâniens avec perte moins blessés ou de connaissance, mais également des contusionnés par jets de projectiles dicontusions abdominales, des trauma- tement violent du blessé. vers, coups de pied ou de poing. Un gar12 tismes thoraciques, des fractures de En outre, 88 blessés sont en- dien cesse son service. » côtes, des fractures du cubitus, etc. trés entre le 19 et le 21 octobre – et De plus, le FLN avait donné la Parmi ces 234 hospitalisations, d’autres plus tard encore. Or les ma- consigne d’une manifestation entièreon peut raisonnablement, avec Jean- nifestations postérieures au 18 n’ont ment pacifique, allant même jusqu’à Paul Brunet, considérer – en regar- rassemblé que peu de personnes, fouiller les manifestants pour s’asdant les mêmes registres à des dates parmi lesquelles en majorité des surer qu’ils ne possédaient ni arme à femmes – que la police n’a pas viofeu ni arme blanche. Ce bilan très postérieures ou très antédisproportionné montre que rieures – que celles n’ayant pas de rapport avec les manifesta- Un bilan disproportionné cette consigne a été très suivie, et rend la violence de la tions sont en nombre marginal. lentées –, et n’ont occasionné que très répression policière d’autant moins En outre, les hypothèses évo- peu d’arrestations, en attestent aussi justifiable. quant des maltraitances de la part du bien les sources de la police que celles FLN ne sont pas plausibles. Le mode du FLN. opératoire du FLN était en effet très On peut donc formuler deux hyclair et invariable : tout Nord-Africain considéré comme « traître » était exé- pothèses. Soit ces personnes, blessées cuté par balle. La quasi-totalité de ces dans la soirée du 17 ou dans la nuit, blessures est donc directement impu- dans un état grave pour certaines, table à la police, d’autant plus que ce ont été laissées par la police dans les 5 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui » Un contexte de tensions croissantes D Il apparaît en effet clairement contraire à la Constitution de 1958, dans la mesure où il revient en fin de compte à une interdiction pure et simple, formulée à l’encontre d’une partie de la population, explicitement identifiée par son origine. Perçu par la population parisienne d’origine algérienne comme une mesure discriminatoire – une véritable entrave à la liberté de circulation – il ne manque pas d’attiser sa colère. Ayant pour but d’affaiblir le FLN en empêchant ses membres de se déplacer – leurs réunions étant en effet la plupart du temps nocturnes –, il atteint partiellement son but.13 Mais – et ceci indépendamment de toute considération légale ou morale – il est permis de s’interroger sur l’efficacité de ce couvre-feu.14 N’a-t-il pas été contreproductif, en rendant plus obscurs encore, et donc plus difficiles à saisir pour la police, les agissements d’un FLN qui se cachait déjà ? N’a-t-il pas également joué en défaveur du maintien de l’ordre, en exacerbant des tensions déjà très fortes, et donc en encourageant les Algériens à se rallier au FLN ? La pertinence de cette mesure dans la gestion à court terme du conflit n’est donc pas évidente. En revanche, elle revêt une forte dimension stratégique à moyen Cité des Pâquerettes, Nanterre. Louis Molinier - Rapho ans le contexte de tensions croissantes entre la police parisienne et le FLN qui est celui d’octobre 1961, marqué par de nombreux assassinats de policiers par le FLN, ce couvre-feu – car c’est bien ainsi que le « conseil » de Maurice Papon fut interprété, aussi bien par la police que par la population – a été l’un des éléments déclencheurs des manifestations du 17 octobre. terme. En effet, en 1961, il est clair pour les deux parties que des accords d’indépendance sont inévitables. Un couvre-feu est donc une réelle offensive, qui a pour but de donner l’image d’un gouvernement puissant et actif, garant de l’ordre public, et ainsi de faire basculer le rapport de force en sa faveur, en vue des négociations à venir. policière qui fait suite aux attentats ? Probablement aucune de ces deux relations de causalité ne décrit fidèlement la réalité. C’est vraisemblablement l’interaction entre les deux parties, qui se répondent et surenchérissent par la violence, qui mène à l’affrontement sanglant du 17 octobre 1961. Ainsi, sans justifier ces réponses à la violence Mais il par la violence, convient avant Une forte dimension nous pouvons tout de raptenter de les stratégique peler que le expliquer et couvre-feu n’est qu’un symbole – l’élé- de comprendre les motivations de ment déclencheur d’une violence déjà chacun. omniprésente. D’une part le FLN perpètre des attentats de plus en plus Depuis janvier 1961, on assiste nombreux, visant des policiers fran- à une recrudescence des attentats du çais, et plus encore des membres de FLN contre les forces de police – 29 la FPA – Force de Police Auxiliaire, morts et 76 blessés entre janvier et créée en 1959 en France et formée octobre – qui n’est pas sans provoquer d’Algériens. D’autre part, on assiste à un malaise profond au sein de la proune augmentation et à une banalisa- fession. Au début, les attentats sont tion de la violence policière envers les le plus souvent décidés par comité Algériens. fédéral de la Fédération de France du FLN – réfugié en Allemagne – et préLes attentats du FLN sont-ils sentés par celui-ci comme des exécuune réponse à la violence policière, tions faisant suite à une « décision de ou est-ce à l’inverse cette violence Note de la Fédération de France du FLN « Nous donner des précisions sur les policiers abattus, les circonstances, les mobiles, les noms et les lieux où ils ont été abattus. Dans une directive datée du 27/8/61, nous vous avons posé la question, à savoir sur quel principe ou directive se base-t-on pour abattre de simples gardiens de la paix ? Nous vous demandons : A) De cesser toute attaque contre les policiers et s’il y a légitime défense et qu’un policier est abattu, nous fournir un rapport circonstancié. […] »15 7 octobre 1961 6 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui justice ». Il s’agit alors clairement pour le FLN de punir les policiers les plus violents envers les Algériens et, pour cela, il n’hésite pas à se documenter et à dresser un véritable réquisitoire envers ses cibles. En revanche, dès le début de l’année 1961, il semble que les exécutions, échappant à l’appareil central du FLN, soient décidées de plus en plus à l’échelon de la région, puis de la ville, voire du district, et deviennent de plus en plus arbitraires. La note précédente, émanant de la Fédération de France du FLN, illustre non seulement la difficulté pour cette dernière à contrôler ces exécutions, mais aussi sa forte volonté à le faire. On ne peut s’empêcher de penser que cette dernière est due à la forte connotation politique que revêtent de tels attentats. Des exécutions ciblées permettent en effet au FLN de gagner en puissance et en crédibilité politique, en vue des négociations, que chacun sait inévitables. avocates Mes Nicole Rein et MarieClaude Radziewsky. Ce sentiment de laxisme est au surplus alimenté par la certitude d’un abandon des poursuites judiciaires à l’égard des membres du FLN dès la signature des accords d’indépendance – ce qui renforce le ressentiment de la profession. Ce profond malaise au sein de la police est amplifié par une justice qu’elle estime laxiste à l’égard des Français musulmans d’Algérie – dont un grand nombre est défendu par les « Des violences gratuites chez les policiers qu’animait une volonté de vengeance envers une communauté qu’ils assimilaient au FLN et qu’ils rendaient collectivement responsable des attentats. »16 Jean-Paul Brunet, Historien I l va sans dire que cette vague d’attentats provoque chez les forces de police un sentiment de peur et alimente une volonté de vengeance. Cela est-il néanmoins suffisant pour expliquer les sévices infligés par les policiers aux Algériens ? Certainement pas, mais il s’agit néanmoins là d’un élément d’explication. Car ce qui frappe, c’est à la fois la violence de ces sévices et leur généralisation. Bien souvent, chaque Algérien de région parisienne était considéré comme activiste du FLN, et à ce titre pouvait se voir infliger divers sévices, que ce soit lors de contrôles effectués dans la rue, ou dans les commissariats – vols d’argent et de papiers d’identité, insultes racistes, humiliations, passage à tabac, etc. – qui ne sont pas sans rappeler les tortures pratiquées alors en Algérie. De ces exactions témoignent les registres des hôpitaux parisiens, qui font état de nombreux patients algériens souffrant de contusions multiples, de fractures, voire ayant perdu connaissance. Paul Rousseau, Syndicat Général de la Police Français musulmans d’Algérie arrêtés à la sortie du métro Opéra. 15 octobre 1961 Cette déclaration, qui sonne comme un aveu, montre que certains membres de la police – des syndicalistes de gauche pour la plupart – étaient conscients des exactions pratiquées, mais aussi qu’ils s’y opposaient fermement. On peut dans ce contexte parler de « délit de faciès », dans la mesure où toute personne maghrébine était susceptible de se faire arrêter et de faire les frais de cette violence. En atteste le cas d’un sénateur gaulliste de Sétif-Batna (Algérie), officier de police en congé, qui fut interpellé pistolet 7 sur la tempe et fouillé par un brigadier boulevard Saint-Michel le 16 octobre, avant de pouvoir enfin sortir sa carte de parlementaire.18 La lettre d’un directeur d’usine indigné, présentée cicontre, illustre également la banalisation et l’ampleur de cette violence. 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui L’Aurore « Camarades du SGP [NDLR : Syndicat Général de la Police], ne vous laissez pas aller à des actes qui ne sont pas en accord avec votre manière de penser ; groupez-vous autour de vos cadres syndicaux, agissez comme des hommes représentant la justice, et non comme des justiciers. […] »17 Témoignage de S.A., gar dé à vue du 19 au 23 octobre « Le jeudi 19 octobre à 22 heures, j’étais assis dans un café, en face du cinéma Rex avec ma femme, rue Poissonnière. La police a fait irruption dans le bar. Quand ils ont vu que j’étais algérien, ils m’ont emmené dans le car. J’ai été frappé et obligé de m’asseoir par terre. Arrivé au métro Réaumur-Sébastopol, le car s’est arrêté. Les policiers sont descendus pour rafler deux Algériens qui allaient prendre le métro. En montant, les deux nouveaux venus ont été injuriés et frappés à leur tour, ils ont été eux aussi obligés de s’asseoir par terre. Les policiers ont voulu les obliger à passer sous les banquettes mais c’était impossible, la place n’était que de quinze à vingt centimètres. A notre arrivée au poste de police du IIe arrondissement, mes deux camarades étaient méconnaissables. Ils étaient ensanglantés, le cuir chevelu fendu, les arcades sourcilières ouvertes. Au poste, nous avons été alignés contre le mur, les mains sur la tête pendant un quart d’heure. Chacun son tour, quelques policiers enragés venaient nous distribuer coups de pied et coups de poings. Nous avons été conduits un à un dans une cellule par quatre gardiens qui nous matraquaient autant qu’ils pouvaient. L’Humanité, 30 octobre 1961 Algériens arrêtés à Puteaux. Archives L’Humanité L’un d’entre nous est tombé à terre, un agent déchaîné l’a encore frappé en lui disant : « T’as pas fini de me regarder comme ça ? ». Finalement ils ont dû s’y mettre à deux pour le jeter dans la cellule où la plupart de ceux qui y étaient déjà étaient couverts de sang. Puis un autre est venu en nous disant : « On va vous refroidir les idées » et il a dirigé un jet d’eau vers nous et nous a trempés. »19 17 octobre à minuit. File des cars de police et des bus de la RATP réquisitionnés. Lefebvre - Paris-Match 8 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui » Un lourd bilan L quels il ajoute vingt autres morts possiblement dus à la police.21 Si ce nombre est bien en-deçà des quelques centaines parfois évoquées, il est bien entendu inséparable du nombre d’Algériens blessés par les policiers – dont nombre de blessés graves – qui est lui de plus de 230. S’il est impossible de déterminer le nombre exact de victimes, on peut néanmoins en donner une fourchette basse. Jean-Paul Brunet s’est ainsi livré à une analyse des registres de l’Institut Médico-Légal de Paris (IML), par lequel transite une grande majorité des corps retrouvés à Paris (registres datés du 19 au 31 octobre)20. Il a tenté de déterminer, au cas par cas, la cause de ces décès – dus à la police, dus au FLN, ou cause autre. Il faut en effet savoir que le FLN possédait un important appareil répressif, visant ceux des Algériens qu’il désignait comme « traîtres » – il pouvait aussi bien s’agir de membres de la Force de Police Auxiliaire que de personnes ne s’étant pas acquittées de leur cotisation au parti, ou encore de personnes hostiles aux idées de ce dernier. Ces « traîtres » étaient le plus souvent exécutés par balle. De son étude, Jean-Paul Brunet conclut ainsi au chiffre d’une trentaine de morts algériens directement causés par les forces de police – aux- Armée Secrète (OAS). Organisation d’extrême-droite fondée en février 1961, militant pour l’Algérie française, son slogan est : « L’Algérie est française, et le restera ». La complexité réside dans le fait qu’un certain nombre de membres ou de sympathisants de l’OAS sont des policiers. élie Kagan e mutisme de la préfecture de police au sujet de la « bataille de Paris » – comme l’appellent certains historiens en référence à la bataille d’Alger – a largement contribué à la diffusion de rumeurs. Parmi celles-ci, le fait que la police aurait noyé des Algériens dans la Seine, ou le fait qu’elle aurait causé des centaines de morts. 17 octobre. Non loin du pont de Neuilly. En outre, si le nombre d’Algériens noyés par la police dans la Seine est vraisemblablement faible, il n’en demeure pas moins que les policiers ont jeté à la Seine de très nombreux Algériens – en particulier du pont de Neuilly. Et que beaucoup en aient réchappé ne retire rien à la brutalité de ces actes. La question de la responsabilité de la police dans les manifestations du 17 octobre est d’autant plus complexe qu’une entité supplémentaire est à prendre en compte : L’Organisation On assiste ainsi à la création de commandos constitués de policiers qui, le plus souvent lors de rondes nocturnes, enlèvent des Algériens pour leur faire subir des sévices ou pour les exécuter. Cette violence s’ajoute, mais aussi se mêle à celle des policiers en service, dans la mesure où certains ont quitté leur uniforme pendant leur service pour commettre ces exactions. En outre, des témoignages portent à croire à l’existence d’une collaboration entre police et OAS : certains Algériens auraient ainsi été appréhendés par des policiers en service, pour être ensuite livrés à ces commandos. Revenons cependant un instant sur le titre de l’ouvrage de Jean-Paul Brunet, Police contre FLN, pour nous poser une question : peut-on placer la police française et le FLN sur le même plan ? Oui si on considère qu’il s’agit des deux protagonistes de la « bataille de Paris », laquelle fait partie intégrante de la guerre d’Algérie. Mais en fait de guerre, il n’existe officiellement que la dénomination pudique d’ « événements d’Algérie », l’Algérie étant alors un département français. Lettre d’un directeur d’usine au préfet de police « Depuis un mois, ils sont successivement tous arrêtés, battus et libérés au bout de trois ou quatre jours. Certains vont voir un médecin et obtiennent des arrêts de travail variant de dix jours à un mois. Hier soir, on a arrêté, à dix heures du soir il est vrai, l’un d’eux, employé chez moi depuis quatre ans, dans l’intérieur d’un bar où il buvait un café avec sa femme. Il pensait que ses services dans l’armée le mettaient à l’abri d’une arrestation. Le patron du bar m’a confirmé qu’il a produit ses feuilles de paie, son livret militaire, son certificat de domicile. On l’a quand-même enlevé dans un car de police. Je le reverrai sans doute comme tous les autres le visage tuméfié et des marques de coups sur le corps. Je suis Français aussi loin que remontent les souvenirs de ma famille. Depuis cent-cinquante ans en ligne directe, nous avons fait la guerre pour notre patrie. J’ai honte. »22 24 octobre 1961 9 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui La police est alors l’organe de maintien de l’ordre de l’État démocratique qu’est la France. Le FLN, quant à lui, ne prétend pas à la démocratie – du moins tel qu’il est constitué en France en 1961. Si les attentats commis par ce dernier sont bien entendu injustifiables, comment un État prônant l’égalité de ses citoyens peut- il, lui, permettre une telle violence gratuite et haineuse de la part de ses forces de police ? D’autre part, cette opposition entre police et FLN n’est peut-être pas tout à fait exacte. L’assimilation par la police de l’ensemble de la population française d’origine algérienne au FLN pourrait en effet conduire à proposer deux titres, qui représentent deux points de vue sur l’événement : Gouvernement français contre FLN – opposition entre deux organisations – et Policiers contre Algériens – confrontation entre des hommes. » Une hiérarchie coupée de la base, qui couvre les exactions Boutet, policier délégué syndical « En ce qui concerne les arrestations, [Maurice Papon] nous a donné carte blanche […]. Il nous a recommandé la vigilance, il nous a dit que lorsqu’on se sentait menacé, il ne fallait pas attendre et tirer les premiers ; vous serez couverts, a-til dit. »23 3 octobre 1961 Dalmas - sipa-press Garofalo - Paris-match 18 octobre. Palais des sports, devenu « centre d’identification ». Maurice Papon, préfet de police, à ses hommes « Nos ripostes auront d’autant plus d’effet qu’elles s’appliqueront aux seuls coupables, suspects et auxiliaires de la rébellion, et c’est pourquoi j’ai appelé l’attention de vos cadres sur la nécessité de procéder avec discrimination aux contrôles de police, afin de couvrir, dans notre mission de protection, les travailleurs nord-africains – algériens, marocains ou tunisiens – qui se refusent d’être complices des exactions du FLN. L’énergie n’exclut ni le sang-froid, ni l’équité. Soyez fermes et vigilants. Je compte sur vous. »24 22 septembre 1961 10 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui « Pour un coup porté, nous en rendrons dix », telle est la phrase prononcée devant ses hommes par le préfet de police Maurice Papon, le 3 octobre 1961, lendemain des obsèques du brigadier Demoën. Ayant pour but de rassurer les policiers excédés, qui sont alors la cible régulière des attentats du FLN, elle vise surtout à rétablir la cohésion entre la hiérarchie et la base de la police, pour éviter la désolidarisation de policiers, qui iraient alimenter des commandos. Cependant, elle est interprétée par beaucoup comme une carte blanche donnée à la répression – ou du moins une couverture des exactions policières. Néanmoins, en atteste la note précédente, Maurice Papon n’a de cesse de rappeler à l’ordre ses hommes et de les mettre en garde contre toute tentative d’exaction. A l’opposé de ce rappel à la légalité, la brutalité de la répression, elle, prouve combien le fossé Un cadre d’entreprise de Genevillier s qui s’était creusé entre la hiérarchie et la base de la police était profond. Le préfet de police tient donc un double discours : tout à la fois il couvre les exactions de ses hommes, et il les rappelle à la légalité et au calme. S’il est clair qu’il n’a pas excité une police qui par ailleurs n’en avait nullement besoin, et qu’il a agi dans le but de conserver le peu de contrôle qu’il exerçait encore sur elle, n’a-t-il pas néanmoins encouragé les exactions en les absolvant ? Pier re Giraud, conseiller municipal de Paris « Avez-vous décidé, Monsieur le Préfet, de jeter ces gens-là dans les bras du FLN ? On ne peut pas mieux faire pour les y pousser. J’admire leur patience. […] Je vous prie, dans l’intérêt de l’entente nécessaire entre Français et Algériens, empêchez ces brutalités stupides. En assassinant lâchement vos agents, le FLN ne cherche que ça. Et vous donnez dans le panneau. »25 « On ne peut pas à la fois prétendre que ces milliers de manifestants étaient de libres travailleurs entraînés par la terreur et la pression des meneurs du FLN qui les encadraient, et les traiter, après capture, comme si tous étaient de dangereux terroristes. »26 27 octobre 1961 20 octobre 1961 A u-delà de la ques- « A la fois une faute et une erreur » tion de la Jean-Paul Brunet, historien répression des maniCette stratégie est cependant sance de l’adversaire festations du 17 octobre, il est permis de s’interroger sur la pertinence stra- critiquable, dans la mesure où elle a combattre. tégique de la politique d’arrestation incité nombre d’Algériens à adhérer systématique décidée par la préfecture de police. L’immense majorité des manifestants était en effet constituée d’Algériens et de Français d’origine algérienne sans lien direct avec le FLN. Seuls quelques petits cadres étaient présents, les principaux responsables ayant, eux, reçu la consigne de ne pas manifester. Dalmas - sipa-press Le préfet de police n’aurait-il pas prévu cette éventualité, en ordonnant l’arrestation systématique des manifestants ? Il est difficile de l’imaginer. Vraisemblablement s’agissait-il donc de prouver le bon fonctionnement de l’appareil de maintien de l’ordre, en affirmant l’autorité des forces de police. Sachant que chacune des deux parties était alors consciente que des accords d’indépendance étaient inévitables, on peut penser que l’un des buts de cette démonstration de force était d’affirmer la puissance du gouvernement français, afin de jouer sur le rapport de force au moment des négociations. aux idées du FLN, renforçant par làmême la puisqu’elle visait à 17 octobre, 21h35. Non loin du carrefour Richelieu-Drouot. 11 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui Le FLN n’avait-il, quant à lui, pas prévu que, étant donné le ressentiment du corps policier envers la population algérienne, une manifestation interdite serait violemment réprimée ? Il est également difficile de l’imaginer, d’autant plus que l’on sait que le FLN était extrêmement bien organisé et informé. La décision de cette manifestation apparaît donc éminemment politique, et doit vraisemblablement être envisagée à l’aune des accords d’indépendance à venir. Elle était en effet une opportunité pour le FLN de réaffirmer sa crédibilité sur la scène nationale, dans l’espoir de sortir gagnant des négociations. Peut-on finalement parler de massacre du 17 octobre ? A proprement parler, et au vu du nombre de morts causés par la répression policière – une trentaine au moins – probablement pas. Mais cela ne retire rien à la brutalité et à la violence gratuites dont ont fait preuve de nombreux policiers le 17 octobre 1961 et les jours qui ont suivi – en témoigne le lourd bilan d’au moins 230 blessés, dont nombre de blessés grave. Si la hiérarchie n’a nullement incité de manière directe les policiers à ces brutalités, elle n’en revêt pas moins une part importante de la responsabilité, puisqu’en couvrant les exactions, elle les a indirectement encouragées. N’est-il pas alors permis d’espérer, de la part de l’Etat de droit qu’est la France, une reconnaissance de sa responsabilité dans cette répression ? Jean-Paul Br unet, historien « Non seulement la police se rendit quasi collectivement coupable d’une violence inconcevable, indigne d’une démocratie, mais elle manqua largement son but qui était de démanteler l’appareil du FLN. Car la plupart des responsables de ce mouvement n’avaient pas été pris dans les mailles du filet, ils étaient restés dans les cités et les bidonvilles. La police n’avait pris que du menu fretin. En cela, son comportement le 17 octobre fut à la fois une faute et une erreur. »27 1999 12 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui Dalmas - Sipa-press sous les initiales de S.A. 1. [D] http://17octobre1961.free.fr/pages/dossiers/ CommuniquePref.htm 20. [A] p. 324-345. 2. [A] p. 185. 21. [A] p. 329-330. 3. Eugène Claudius-Petit, Journal officiel de la République 22. Lettre d’un directeur d’usine, Le Monde, 24 octobre Française, « Débats parlementaires - Assemblée Nationale », 30 1961. octobre 1961. 23. Conseil syndical Gardiens, 1961, procès verbal de la 4. [A] p. 165-180. réunion du 3 octobre, p. 7-22, déclaration du policier délégué syndical Boutet. 5. [A] p. 183. 24. Archives de la préfecture de police, registre relié 6. [A] p. 218. « Cabinet du Préfet. 1960 à 1965 » (ordres du jour, notes de 7. [A] p. 219. service), ordre du jour du 22 septembre 1961. 8. [A] p. 223. 25. Archives de la préfecture de police, 4560-149, 20 9. [A] p. 237. octobre 1961. 10. Denis Périer-Daville, Le Figaro, 23 octobre 1961, 26. [A] p. 331. 11. [A] p. 242-246, 27. [A] p. 250-251. Registres disponibles sur dérogation aux Archives de l’AP-HP. 12. Dossier 4562 des archives de la préfecture de police, note FA/413, « Journée du 17 octobre 1961. Effectifs, consignes, instructions », pièce 9. 13. [A] p. 163. 14. [A] p. 251. 15. Note intitulée « Directives générales – n°2 », émanant du comité fédéral de la Fédération de France du FLN, réfugié en Allemagne, 7 octobre 1961. 16. [A] p. 222. 17. Police parisienne SGP, Paul Rousseau, 15 octobre 1961. 18. Le Monde, Coupole du Palais des sports, devenu « centre 19 octobre 1961, p.6. d’identification ». Elle resta fermée aux journalistes du 19. [B] p. 79, L’Humanité, témoignage publié 17 au 20 octobre. » Pour en savoir plus [A] Police contre FLN, le drame d’octobre 1961 Jean-Paul Brunet Éditions Flammarion, 1999 C’est un précieux travail d’enquête sur les manifestations du 17 octobre et sur leur contexte auquel se livre Jean-Paul Brunet, un des trois historiens ayant eu accès aux archives de la préfecture de police concernant la Guerre d’Algérie lors de leur ouverture en 1997. En tentant de s’abstraire des rumeurs, il croise différentes sources pour tenter de mieux cerner les ingrédients de ce drame d’octobre 1961. [B] Le silence du fleuve, octobre 1961 Anne Tristan (texte), Cécile Urbain (iconographie), Agnès Denis, Mehdi Lallaoui Éditions Au nom de la mémoire, 1991 A travers ces photos poignantes, la journaliste Anne Tristan nous livre un point de vue engagé sur un événement trop rapidement oublié par les médias et par la mémoire collective. Selon sa propre formule : « un ensemble de silences que nous vous donnons à écouter ». [C] Pour la réhabilitation de Maurice Papon [D] 17 octobre 1961 : contre l’oubli http://www.maurice-papon.net Sur son site, Jacques Villette, affichant explicitement son soutien à Maurice Papon et à ses actions, notamment dans les événements d’octobre, offre un point de vue original, au rebours de la pensée dominante. Il porte notamment un œil critique sur l’ouvrage de Jean-Paul Brunet. [A] http://17octobre1961.free.fr C’est à la fois un point de vue engagé et un recueil de témoignages que présente l’association éponyme, rappelant le visiteur à son devoir de mémoire. 13 17 octobre 1961 : la violence oubliée d’une répression sanglante Thomas Belhalfaoui