Baisse des dotations - Maire-Info

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Baisse des dotations - Maire-Info
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Baisse des dotations : un « coup
de massue » pour les élus
La baisse des dotations de l’État aux collectivités de , milliards d’euros sur la
période - provoque des réactions très vives de la plupart des associations d’élus.
I
ls sont venus à trois pour présenter la facture. Le ministre délégué au Budget, Jérôme
Cahuzac, la ministre de la Réforme de
l’État, de la décentralisation et de la fonction
publique, Marylise Lebranchu, et sa ministre
déléguée à la Décentralisation, Anne-Marie
Escoffier, se sont exprimés le 12 février devant le
Comité des finances
locales, lors de sa réunion
traditionnellement
consacrée à la répartition
de la dotation globale de fonctionnement (DGF,
voir encadré). La loi de programmation des
finances publiques (LPFP) pour les années 2012
à 2017, votée fin décembre dernier, prévoyait
pour 2013 un gel de « l’enveloppe normée » des
concours financiers de l’État (comme en 2012),
puis une baisse de 750 millions d’euros en 2014,
suivie d’une nouvelle diminution de 750 millions en 2015 ; au total, une perte de 2,25 milliards
d’euros pour les collectivités sur la période 20132015. « L’effort additionnel » annoncé le 12 février
par le gouvernement porte ce chiffre à 4,5 milliards : gel toujours en 2013, puis baisse d’1,5 milliard en 2014, et d’1,5 milliard supplémentaire en
2015 (voir l’infographie). Cela reviendrait à une
enveloppe de 47,5 milliards d’euros en 2015,
contre 50,5 aujourd’hui.
Il s’agit pour le gouvernement de faire payer
aux collectivités une part des 10 milliards
d’euros d’économies budgétaires que l’État doit
trouver pour financer son crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), voté dans la dernière loi
de finances rectificative pour 2012. « L’effort additionnel demandé, soit 15 % des économies qui
financeront le CICE, est proportionné par rapport
au poids des administrations locales dans l’ensemble des dépenses publiques (20 %) », ont
assuré les ministres dans un communiqué suivant la réunion du CFL.
On ne sait pas encore comment pourrait
être répartie cette baisse
inédite des ressources des
collectivités, même si les
trois ministres ont assuré
que « l’architecture de la
dotation générale (sic) de
fonctionnement (DGF) ne
serait pas bouleversée en
2014 afin de ne pas effectuer de changements
importants sans prendre le temps de la concertation », et que la « contribution » des collectivités
territoriales serait « équitablement répartie »entre
régions, départements et bloc communal « selon
des modalités qui seront discutées au CFL ».
L’annonce gouvernementale a soulevé une
fronde immédiate parmi les élus. L’AMF l’a aus-
« On n’a pas encore
mesuré l’ampleur
des traumatismes que
ça va causer »
8 MAIRES DE FRANCE MARS 2013
sitôt qualifiée de « coup de massue sans précédent contre les collectivités territoriales ». « On n’a
pas encore mesuré l’ampleur des traumatismes
que ça va causer », affirmait André Laignel, président du CFL, au sortir de la réunion. Le maire
d’Issoudun et premier vice-président délégué de
l’AMF, a parlé de réactions « unanimes » de
« déception et de mécontentement » chez les élus
du CFL, qui ont dénoncé un « effort historique »,
un « recul exagéré », et une « rupture » (voir encadré ci-dessous).
Coût global : « Entre ,
et  milliards »
En effet, si la baisse des dotations sera de 4,5 milliards d’euros sur la période 2013-2015, les ressources diminueront d’autant plus que, selon les
calculs de l’AMF, « c’est près de deux milliards de
charges qui s’imposeront en 2014 ». Ces charges
incluent le surcoût occasionné par la réforme des
p LA COLÈRE DES ÉLUS
« Nous allons résister au maximum », a lancé
Jacques Pélissard, le président de l’Association des
maires de France, qui a demandé au Premier
ministre, lors des questions d’actualité à
l’Assemblée nationale, de « suspendre cette
décision non concertée » de la nouvelle baisse des
dotations, et un engagement au plus vite de la
négociation du « pacte de confiance et de
solidarité » annoncé par le chef de l’État en
octobre dernier. Michel Destot, président de
l’Association des maires de grandes villes, a
demandé « fermement une concertation
interministérielle ». L’absence de concertation a
été vivement critiquée par toutes les autres
associations d’élus : l’Assemblée des départements
de France a parlé d’une « vive émotion, voire de la
colère chez un certain nombre d’élus », tandis
que l’Association des régions de France a appelé à
« un dialogue loyal et franc ». Même désapprobation à la Fédération des villes moyennes,
qui n’a pas caché sa « surprise » et a « accueill(i)
ces orientations avec la plus grande gravité ».
rythmes scolaires, la hausse des cotisations
retraite patronales, les cofinancements de politiques nationales, le relèvement des taux de
TVA... Si on prend en compte l’inflation, qui
aura pour conséquence, dès 2013, une diminution effective de l’enveloppe normée en euros
constants, celle-ci étant gelée, le coût global pour
les collectivités se chiffrera « entre 6,5 et 7 milliards » d’euros sur les trois années à venir, a
déclaré André Laignel.
Cette coupe drastique risque d’avoir des
conséquences directes sur la mise en œuvre de
la péréquation. « On ne peut pas baisser massivement les ressources et ensuite nous demander de les répartir entre nous », a relevé le maire
d’Issoudun ; « plus on baissera les ressources
des collectivités, et moins il y aura de péréquation ». C’est pour cette raison qu’un groupe de
travail sur la péréquation devrait être « réactualisé et réuni très prochainement » au sein du
CFL, a ajouté son président, qui a par ailleurs mis
en garde sur une autre conséquence probable de
la baisse des dotations : la « mise en panne des
investissements ». « Les départements et les
régions ont déjà ralenti leurs dépenses d’investissement. Pour les communes, elles devraient
se maintenir en 2013, car cela tient au cycle électoral ; mais elles pourraient baisser dès l’année
des élections, en 2014 », a estimé André Laignel,
rappelant que les collectivités locales portent
plus de 70 % des investissements publics en
France.
« Devant ce constat, le souhait unanime du
CFL a été de ne pas avaliser l’annonce du gouvernement, et de demander l’ouverture très
rapide d’une véritable négociation » sur les
conditions de la baisse des dotations. Un groupe
de travail destiné à dessiner les contours d’un
« pacte de confiance et de responsabilité », reprenant les termes du président de la République
François Hollande lors des États généraux de la
démocratie territoriale, avait été mis en place à
l’automne dernier suite à la première annonce
d’une baisse des dotations. Mais après deux
réunions, les élus n’ont « pas eu de réponses du
gouvernement » à leurs demandes, a rappelé
André Laignel. L’AMF avait par conséquent, en
janvier dernier, demandé au Premier ministre
« l’élaboration urgente d’un pacte financier entre
l’État et les collectivités locales », sans plus de
réponse.
Toutefois, immédiatement après la réunion
du 12 février, les ministres présents ont annoncé
une concertation à venir avec les associations
d’élus, « notamment dans le cadre du CFL ». Celleci explorera « d’ici à la fin du premier semestre,
avec l’objectif de les inclure dans le projet de loi de
finances 2014 », des « orientations permettant
d’améliorer les relations financières entre l’État et
les collectivités territoriales ». Parmi ces orientations, le groupe de travail État-départements sur
le financement des allocations de solidarité individuelles, inauguré en janvier par Jean-Marc
Ayrault, le renforcement de l’autonomie fiscale
des régions, la révision des valeurs locatives, l’amélioration de l’accès au crédit des collectivités.
Emmanuel GUILLEMAIN D’ÉCHON
La répartition de la DGF 
Dans la mesure où « l’enveloppe normée »,
dont elle représente environ  %, est gelée
pour 2013, il a fallu financer les augmentations de certains composants de la dotation
globale de fonctionnement (DGF) par des
prélèvements sur d’autres composants. Le
CFL a ainsi choisi de ponctionner les 221 millions d’euros nécessaires pour moitié sur
la dotation de compensation de la part
salaires, en diminution de 1,86 %, et pour
l’autre moitié sur le complément de garantie de la DGF, soit une baisse de 2,25 %. Ces
ponctions iront alimenter l’augmentation
de la péréquation « verticale » : dotations de
solidarité urbaine (DSU, + 120 millions d’euros, soit + 8,75 %) et rurale (DSR, + 78 millions d’euros, soit + 8,75 %), la dotation nationale de péréquation (DNP, + 10 millions
d’euros, soit + 1,31 %), l’augmentation de la
population (+ 35 millions) et le financement
des nouvelles intercommunalités. En 2013,
le nombre de communes dont le complément de garantie est écrêté dépassera
14 000, dont environ 6 000 le seront au plafond de 6 %. Le CFL a également choisi de
répartir l’augmentation de la DSR à égalité
entre ses trois parts, ce qui aura un impact
plus important (+ 58 %) sur la part « cible »,
plus récente et moins bien dotée, qui bénéficie aux 10 000 communes rurales les plus
défavorisées. Les fractions bourgs-centres
et péréquation évolueront respectivement
d’environ 7 % et 5 %.
En ce qui concerne la DNP, les parts principale et majoration progresseront de + 0,8 %
et + 2,8 %.
MARS 2013 MAIRES DE FRANCE 9