Paris compte 5000 sans-abri concentrés au nord et à l`est

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Paris compte 5000 sans-abri concentrés au nord et à l`est
Paris compte 5000 sans-abri
concentrés au nord et à l'est
Mots clés : Sans-Abri, SDF, Figaro Paris, PARIS
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Philippe RomainMis à jour le 22/11/2011 à 14:09 | publié le 21/11/2011 à 14:04 Réactions (14)
Nombre de SDF préfèrent le bitume parisien, endroit de passage, plutôt que la promiscuité de certains
lieux d'accueil. Crédits photo : Sébastien SORIANO/Le Figaro
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L'Apur publie la première cartographie des SDF sur la base des signalements de la
Préfecture de police et des travailleurs sociaux. Ces derniers la décryptent.
Les coordinateurs des maraudes d'intervention sociale pour chacun des quatre secteurs de Paris
commentent le document de l'Atelier parisien d'urbanisme (Apur), basé sur un recensement d'avril
2010. La population de SDF évoluant sans arrêt, il s'agit d'une photographie à un instant T.
Au nord : Véronique Otchoumou, Emmaüs
«Dans le X e , nous avons des points de fixation autour du canal Saint-Martin, du square Villemin
et de la place Raoul-Follereau, avec notamment de nombreux demandeurs d'asile afghans,
présents aussi sous le métro aérien Jaurès. Sous celui de La Chapelle, on trouve surtout des
Érythréens, des Somaliens et des Soudanais. C'est un point de rendez-vous pour les réfugiés
africains, on a pu en compter jusqu'à une soixantaine. Porte de Pantin, il existait un campement de
Roumains. L'installation a disparu mais d'autres peuvent apparaître de temps à autre le long du
périphérique. Beaucoup de SDF sont concentrés gare du Nord et gare de l'Est. Depuis l'an dernier,
nous travaillons avec des référents sociaux nommés et rémunérés par la SNCF. Ils disposent d'un
numéro pour remonter des signalements importants : couples, femmes enceintes, personnes
handicapées, etc. Nous trouvons aussi dans le secteur des gens cassés, résignés, souvent
toxicomanes. Le nord de Paris abrite plusieurs points d'ancrage du trafic de stupéfiants, tandis que
de nombreuses associations d'aide procèdent à des maraudes de réduction des risques en
distribuant seringues propres et produits de substitution comme le Subutex. Dans le bois de
Vincennes, on recense en moyenne 200 personnes. C'est un vrai village, on peut y trouver des
couples installés depuis une dizaine d'années et disposant de cabanes relativement confortables.»
À l'est : Alice Tan, Aux captifs, la libération
«On remarque un point de fixation autour des Halles, mais cela est en train de changer. À cause du
chantier, les sans-abri se sont déployés dans les parcs et jardins alentour ainsi que dans les
arrondissements limitrophes (II e , III e , IV e ). À République, cela va aussi évoluer avec les
travaux qui débutent en janvier. Il existe aussi une volonté de l'État, pour des raisons d'hygiène,
de ne plus laisser de grands groupes s'installer. Par ailleurs, nous observons de plus en plus de
femmes à la rue. Elles représentent environ 17 % du public. Le phénomène n'a pas du tout été
anticipé et nous avons un gros déficit de structures adaptées. Dans l'ensemble, le nombre de SDF
augmente, on ressent qu'un filet de sécurité est en train de tomber et on est loin du compte en
termes de places d'hébergement. On a des gens dans la nature ou qui dorment aux urgences de
l'hôpital Saint-Antoine pour se sentir plus en sécurité. De nombreux sans-abri sont aussi regroupés
autour de Bastille et de Nation. Les gens qui vivent de la mendicité ont besoin de se mettre à des
endroits où il y a beaucoup de passage. Sur mon secteur, on a environ 1 300 SDF, avec 50 %
d'hommes entre 40 et 60 ans. Comme sur l'ensemble de Paris, une moitié des sans-abri est
française et l'autre étrangère - dont une bonne partie issue de l'UE. Nous avons aussi de plus en
plus de jeunes - entre 15 et 20 % des SDF ont entre 18 et 25 ans - à cause de la décomposition
des structures familiales et de la précarité.»
Au sud : Pierre-Yves Laurent, Les enfants du canal
«Il y a une grosse concentration autour de la place d'Italie. Le XIII e regroupe en effet 25 % des
places d'hébergement parisiennes, ainsi que de nombreux dispositifs d'accueil de jour. L'Arche
d'Avenirs, par exemple, permet de se doucher, prendre un café et rencontrer un travailleur social.
Dans les autres arrondissements, faute de moyens, il n'existe pas de maraudes d'intervention
sociale, ce sont des zones blanches où on a juste pu effectuer des repérages. En raison de la
présence policière assez forte, les SDF ont de plus en plus tendance à se cacher, dans les soussols, au niveau des arches sur les quais, et sur les talus près du périphérique où existait un vrai
bidonville en 2010. Sur mon secteur, on a tout le panel des populations à la rue, avec par exemple
de plus en plus de personnes âgées dont la retraite ne suffit plus à payer le loyer. On a recensé
environ 900 SDF - 30 % en moyenne sont atteints ou développent des troubles psychologiques sans compter ceux qui dorment dans le métro. Cela peut toucher tout le monde, on a eu une
famille du sud de la France venue chercher du travail à Paris qui a dormi trois mois sous une tente
avec un enfant en bas âge près de la gare d'Austerlitz. Ce qui est aussi récent, c'est qu'on voit de
plus en plus l'exaspération des riverains monter.»
À l'ouest : Michel Dorin, Aurore
«À l'époque, il n'y avait que 20 à 30 personnes dans le bois de Boulogne. Là, on a eu un pic à 80 il
y a un mois avec notamment l'arrivée massive de Tunisiens sortis des structures d'hébergement.
On peut aussi voir un point de fixation en face du Musée Guimet, regroupant des migrants
polonais. On compte moins de SDF dans mon secteur qu'ailleurs. Mais beaucoup sont là en journée
pour faire la manche dans le XVIe, le XVe ou sur les Champs-Élysées avant de repartir le soir. En
plus, l'Ouest concentre le manque de moyens, avec une seule grosse structure d'accueil.
Historiquement, les résidents ont aussi plus de difficultés à accepter l'idée que des SDF vivent sur
ces arrondissements. Plus globalement, nous cherchons à humaniser l'accueil avec des petites
structures et des chambres individuelles, mais l'immobilier coûte très cher et on se contente
souvent de locaux qui nous sont prêtés l'espace de quelques mois.»