L erreur

Transcription

L erreur
Olivia Franco
Fiche de niveau 4. Le droit des contrats / Les conditions de validité / Les vices du
consentement /
2007
L’erreur
L’erreur est un vice du consentement. Elle est évoquée à l’article 1109 du Code civil et
définie de façon plus précise aux articles 1110 et suivants du Code civil.
L’erreur peut être définie comme une fausse représentation de la réalité : la réalité ne
correspond pas à ce qu’a cru la victime de l’erreur, appelée aussi l’errans. C’est pour
cette raison qu’il faut réserver un sort particulier à l’erreur dite obstacle. Plus que d’une
erreur, il s’agit plutôt d’une absence totale de consentement (par exemple, une partie
pensait prendre à bail, tandis que l’autre entendait vendre).
L’erreur qui a été à l’origine d’un vice du consentement s’apprécie au moment de la
formation du contrat. Les juges peuvent toutefois se fonder sur des éléments postérieurs
pour apprécier l’erreur au moment de la formation du contrat.
Les erreurs admissibles
L’erreur doit porter sur les qualités substantielles de la chose. Ces qualités peuvent être
appréciées de façon objective (la matière dont est fait l’objet) ou subjective (toutes les
qualités qui ont été déterminantes pour l’errans).
L’appréciation de l’erreur peut être délicate lorsqu’il y a un doute sur la réalité. La
jurisprudence relative à l’authenticité des œuvres d’art a permis de dégager une solution
claire.
Ainsi, lorsque les contractants ont une certitude quant à l’authenticité de l’œuvre
(l’œuvre ne peut pas être une œuvre authentique), il y a bien erreur. La Cour de
cassation a en effet estimé dans l’affaire Poussin que les juges du fond auraient dû
rechercher si le consentement des vendeurs n’avait pas été vicié par leur conviction
erronée que le tableau ne pouvait être une œuvre de Nicolas Poussin (Civ. 1ère, 22 février
1978, Bull. civ. I, n°74).
Au contraire, lorsque les contractants ont un doute quant à l’authenticité d’une œuvre
(on ne sait pas si l’œuvre est authentique), on estime qu’ils ont accepté l’existence d’un
aléa, et qu’il ne peut y avoir nullité du contrat. L’aléa chasse l’erreur (affaire Fragonard,
Civ. 1ère, 24 mars 1987, Bull. civ. I, n° 105).
L’erreur sur la personne n’est en principe pas une cause de nullité, sauf lorsque la
considération de la personne a déterminé le consentement (art. 1110 al. 2 du C. civ.).
On dit alors que le contrat a été conclu intuitu personae, en considération de la personne.
Les erreurs non admissibles
L’erreur sur la valeur est toujours indifférente. Elle peut être définie comme une
appréciation économique erronée alors qu’elle était pourtant fondée sur des données
exactes.
Il a également été jugé que l’erreur sur la rentabilité économique ne constitue pas une
erreur sur la substance de nature à vicier le consentement d’une partie.
L’erreur sur les motifs est en principe indifférente. Les motifs sont les raisons qui ont
poussé une personne à conclure. L’erreur sur les motifs ne peut être une cause de nullité
qu’à la condition que ces motifs soient entrés dans le champ contractuel, c’est-à-dire
qu’ils aient été érigés en condition du contrat par le biais d’une stipulation expresse. Il ne
suffit pas que l’autre partie ait eu connaissance de ces motifs (Civ. I, 13 février 2001,
Bull. civ. I, n°31).
Les conditions de l’erreur
L’erreur doit avoir été déterminante du consentement : sans cette erreur, l’errans
n’aurait pas accepté de conclure, ou aurait à tout le moins contracté à d’autres
conditions.
L’erreur doit être commune. Cette condition ne signifie pas que l’erreur devait être
partagée par tous les contractants, mais simplement que le cocontractant de l’errans
connaissait les qualités recherchées par ce dernier.
L’erreur doit être excusable. Si, au moment de la formation du contrat, l’errans n’avait
aucun moyen de s’informer, alors l’erreur sera excusable. Ce caractère s’apprécie in
concreto en fonction de l’âge et de la condition des personnes.
La sanction de l’erreur
Lorsque l’erreur revêt toutes ces conditions, elle entraîne la nullité du contrat. Il s’agit
d’une nullité relative qui ne peut être soulevée que par l’errans. La prescription est de 5
ans et court à partir du jour où l’erreur a été découverte.
Bibliographie
J. Ghestin, La notion d’erreur dans le droit positif actuel, LGDJ, 1971.
J. Ghestin, « L’authenticité, l’erreur et le doute », in Etudes P. Catala, Litec, 2001, p.
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J. Mouly, « Des rapports entre la réticence dolosive et l’erreur inexcusable », D. 2003,
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G. Vivien, « De l’erreur déterminante et substantielle », RTD civ.. 1992, p. 305.