L`enfant stressé

Transcription

L`enfant stressé
Les résumés de lecture
de l’AQM sur le multiâge
L’enfant stressé
Celui qui grandit trop vite et trop tôt1
De David Elkind (1981).
Ce résumé de lecture, fait par Jean-Marc Lopez, est paru dans Grandir en
multiâge, le journal de l’AQM, vol. 5, n° 3, septembre 2009, p 8-9 et vol.
5, n° 4, décembre 2009, p 4-6.
Résumé de lecture
David Elkind, est professeur et détenteur de la chaire Eliot-Pearson du développement de l’enfant à
l'université Tufts, aux USA. Après son doctorat, il a travaillé sur les théories de Jean Piaget, à l’Institut
d'Épistémologie génétique à Genève, en Suisse. Il a fait des recherches étendues dans les domaines de la
perception, de la cognition et du développement social de l’enfant.
Il est un auteur et conférencier renommé qui a écrit une douzaine de livres et plus de 400 articles, en
particulier concernant l’éducation en multiâge. Il est membre d’une dizaine d’organismes professionnels
et conseiller pour des départements de l'éducation, des cliniques, des centres médico- sociaux mentaux,
des organismes gouvernementaux, et privés. Tout comme Lilian Katz, il a été président de l'Association
Nationale pour l'Éducation des Jeunes Enfants (NAEYC).
Parmi ses écrits, on peut citer All Grow Up and No Place to Go (1984), Miseducation : Preschoolers At
Risk (1987). Son dernier livre, The Power of Play, est paru en 2007.
Avec L’enfant stressé, David Elkind a été le premier à tirer la sonnette d’alarme pour dire que les
enfants étaient, tout autant que les adultes, victimes du stress. Lors de sa sortie, ce livre a eu un
grand retentissement parmi les éducateurs et les enseignants. En effet, très bien documenté et
appuyé sur de nombreuses études pertinentes, l’auteur démontre de façon implacable combien les
enfants sont poussés à grandir trop vite et quelles en sont les conséquences pour leur
développement et leur vie future. Bien que le livre de David Elkind ait été publié en 1981, il est
frappant de constater combien ce qu’il y a écrit est toujours criant d’actualité.
Les enfants ne sont pas des adultes en miniature
Dès leur plus jeune âge, les tout-petits sont priés de tout faire vite et plus tôt. Cela se traduit par
des exigences académiques toujours plus précoces. Par exemple, on demande à l’enfant de savoir
lire et écrire toujours plus tôt. On assiste à un retour de ce qui avait cours au Moyen-Age :
l’enfant est considéré comme un adulte miniature.
Par exemple, les enfants sont habillés avec des reproductions de vêtements d’adulte. Et Elkind
fait remarquer que « lorsque les enfants se vêtent comme des adultes, ils ont tendance à se
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comporter comme eux et à imiter leurs gestes ». Les médias, et principalement la télévision mais
aussi la musique et le cinéma, envoient des images d’enfants précoces et incitent à grandir vite, à
lire vite, à penser vite et à avoir des comportements d’adultes. Le hic est qu’il y a un écart chez
l’enfant entre son comportement d’imitation et les sentiments qu’il ressent. Il en résulte des
troubles de plus en plus importants chez les enfants ou les adolescents. Ces troubles sont autant
physiques que reliés au comportement. L’enfant peut avoir des maux de tête ou de ventre, perdre
l’appétit, adopter des comportements violents ou apathiques, se tourner vers la drogue, ne pas
vouloir aller à l’école ou même tenter de se suicider. On peut constater que l’ampleur de ces
troubles va en augmentant.
L’enfant a des besoins qui lui sont propres
Contrairement à ce que beaucoup pensent, les enfants ont besoin de temps pour se développer. Ils
passent par des étapes qui ont bien été expliquées par Piaget. Et les forcer à grandir vite constitue
pour eux la plus grande source de stress. Ils ont le sentiment d’être exploités, utilisés par les
parents et de perdre leur identité. Il faut considérer que les enfants ont des besoins qui leur sont
propres et qu’ils n’apprennent pas, ne pensent pas et ne sentent pas comme des adultes. Ils n’ont
donc pas besoin que les adultes les stressent avec leurs problèmes et escamotent leur enfance en
les faisant participer trop hâtivement à des prises de décision inapropriées. En effet, l’enfant est
stressé parce que ses parents le sont et ces derniers ont tendance à le bousculer pour satisfaire
d’abord leurs propres besoins.
L’importance des émotions dans le développement de l’enfant
Concernant les apprentissages, les parents croient que si leur enfant apprend à lire tôt, cela lui
donnera un avantage dans sa vie scolaire ou d’adulte et lui permettra ainsi de trouver un bon
emploi plus tard. Dans les faits, la recherche démontre que des avantages académiques acquis
précocement ne sont généralement pas durables et disparaissent vers la quatrième année scolaire.
L’étude des enfants dits « surdoués » est particulièrement frappante. La plupart des petits génies
éprouvent ensuite de grandes difficultés dans leur vie d’adulte. Ils préfèrent passer inaperçus et
finissent souvent leur vie malheureux, éprouvant des difficultés à vivre socialement. Bien qu’il
soit reconnu que les émotions jouent un grand rôle dans le développement des enfants, les adultes
continuent d’agir avec eux comme si ces émotions étaient secondaires.
Pousser les enfants à brûler les étapes cognitives cause de nombreux dommages. Ceux qui ne
peuvent suivre le rythme en subissent des séquelles car ils sont parfois confrontés à des échecs
successifs. la difficulté à lire : « Je ne peux pas lire, je pense que je suis un raté dans la vie ».
L’enfant peut apprendre à lire ou à compter très tôt mais sa structure de pensée, elle, ne suit pas.
Il ne comprend pas vraiment le sens de ce qu’il lit ou compte. Ce n’est en effet qu’au stade
suivant de son développement, vers 6 ou 7 ans, qu’il est capable de faire davantage de liens entre
les choses. Il est alors aussi en mesure de comprendre la structure syntaxique et de décoder le
sens des mots. Cette nouvelle étape permet également l’apprentissage des règles sociales, établi
par tradition orale depuis des siècles. Manipuler les symboles nécessite du temps et il faut donc
en laisser à l’enfant. L’être humain a en effet besoin, tout comme les animaux, de pouvoir
contrôler les situations, faute de quoi il devient passif et ne fait plus d’effort pour maîtriser son
environnement.
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L’enfant doit comprendre ce qu’il fait
Si l’enfant de 6 ou 7 ans est capable de raisonner, son niveau de raisonnement est loin de celui de
l’adolescent qui manipule des symboles d’un ordre plus élevé. La capacité de l’enfant de faire
certaines choses ne signifie pas qu’il peut les comprendre et en parler intelligemment. Il convient
donc d’en tenir compte et de ne pas accabler l’enfant avec des charges ou des problèmes qu’il ne
peut maîtriser. Par exemple, le parent ne doit pas confier de trop lourdes tâches aux enfants, sous
prétexte de les responsabiliser ou de leur faire faire une juste part des travaux ménagers ou
autres. Il doit aussi veiller à ne pas donner des choix déchirants aux enfants, comme celui, dans le
cas de parents séparés, de déterminer avec quel parent il veut passer les fêtes de fin d’année.
L’enfant a besoin de temps pour grandir
Lorsque l’adolescent est en quête de la formation de son identité, là encore il a besoin de temps.
Si on accélère ce processus, il peut sauter une étape importante de sa vie et cela aura des
répercussions sur sa vie d’adulte. Il peut aussi, si on le force à prendre des décisions sans relation
avec son âge, lui donner une perception distortionnée de ses pouvoirs et de ses capacités.
L’une des autres conséquences de l’accélération de la croissance des enfants est qu’ils la
perçoivent comme la violation d’un droit fondamental de grandir à leur rythme. Ce droit fait
habituellement partie d’un contrat plus ou moins tacite passé entre les parents et eux au sujet de
leur liberté et de leur responsabilité. Ce contrat évolue avec les années et se fonde sur des
principes moraux et éthiques et les lois plus larges de la société. Les parents qui travaillent ont
tendance à modifier le contrat avec leur enfant en fonction de leurs besoins personnels. Ils
peuvent avoir tendance à donner des libertés inappropriées aux enfants et à exiger d’eux qu’ils
réussissent au-delà de leurs limites. Ils se trouvent de cette façon à bousculer le rythme de
croissance de l’enfant.
Le parent célibataire peut, lui, avoir tendance à se tourner vers ses enfants pour obtenir du soutien
ou de l’écoute. Mais le fait de lier liberté et responsabilité est une fonction d’adulte. Lorsque
l’enfant se trouve dans la situation de devoir se comporter comme un adulte, il ressent de la
pression et ça le stresse. Ce type d’enfant se comporte unilatéralement avec ses pairs et de la
même façon, plus tard dans sa vie d’adulte, il aura tendance à être exigeant avec son conjoint,
sans lui offrir nécessairement de réciprocité. Le fait de forcer l’enfant dans sa croissance lui
cause le plus souvent un conflit générateur de détresse.
La réponse d’un individu au stress passe habituellement par un processus commun à tous les
êtres humains. Le corps mobilise tout d’abord l’énergie et il se met à la brûler dans une activité
physique. Le corps recherche ensuite un retour à l’équilibre.
Ce qui est stressant dans ce qui est exigé des enfants n’est pas le travail en lui-même mais plutôt
la responsabilité qui en découle. Les lourdes responsabilités exigées des enfants les obligent à
faire sans cesse appel à leurs réserves d’énergie d’adaptation. Lorsque l’enfant doit s’adapter à
des changements importants ou des responsabilités trop lourdes pour lui, il souffre d’une
surcharge émotive. Par exemple, le fait d’être confié à une gardienne, de devoir aller à l’école,
que les parents se séparent ou qu’il y ait de la mortalité d’un très proche parent sont des sources
de stress. Il peut en résulter une perte d’innocence dans la croyance que le monde, surtout
familial est un endroit stable où il fait bon vivre et où on sera toujours en sécurité. Contrairement
à ce que l’on croyait dans le passé, le départ du père lors de la séparation des parents est un
puissant facteur de stress pour les enfants.
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L’école contribue à stresser les enfants
Les parents ne sont pas les seuls à stresser leurs enfants. L’école y contribue également
grandement sinon davantage. Le fonctionnement de l’école présente de nombreuses anomalies
qui perturbent le cycle normal de croissance des enfants. Les exigences de performance imposées
aux enfants sont élevées, si bien que tous ne peuvent les rencontrer. L’école, dont le
fonctionnement est basé sur le rendement, calque son fonctionnement sur celui de l’industrie, se
met alors à étiqueter ceux qui ne peuvent suivre le rythme imposé et, au lieu de répondre à leurs
besoins particuliers, elle les confine dans des classes ou des programmes qui les ostracisent.
L’école considère les enfants comme des bouteilles vides sur une chaîne de montage que l’on
remplit un peu plus chaque année. Les tests scolaires contrôlent la qualité du produit et
déterminent désormais les programmes scolaires. La pratique de l’enseignant ressemble à celle
d’un contremaître d’usine. Il en résulte que l’attention individuelle accordée à un élève n’excède
pas quelques heures par année et le temps consacré à la discipline dépasse de beaucoup le temps
d’enseignement qui atteint tout juste 90 minutes par jour. Afin de couvrir la matière, les
enseignants portent leur attention sur les bons élèves, c’est à dire environ le tiers de la classe.
Un haut pourcentage d’échec fait partie de ce qui est attendu par l’école. Il en résulte que les
enfants n’arrivent pas, pour la plupart, à acquérir le sens de l’achèvement, ce qui leur crée une
situation stressante. L’ennui se rajoute aussi à l’échec pour créer des situations peu propices à
l’apprentissage.
Elkind cite un adolescent pour qui l’école « est un endroit où passer le temps. C’est une grosse
invention pour empêcher les enfants de devenir quelqu’un ». Ce qui est observable avec l’école
est qu’elle est toujours en retard sur la société. Alors que de nombreuses entreprises ont compris
l’importance de ne pas traiter leurs employés comme des robots, l’école continue à le faire avec
les enfants. Si le travailleur a besoin de motivation, de défi, d’engagement, de reconnaissance de
son statut, il en va de même des enfants. Traités comme des objets, les enfants ont de moins en
moins de scrupules moraux et ils ne peuvent en être tenus pour responsables.
Les médias comme facteur supplémentaire de stress
Les médias comme la télévision contribuent aussi à stresser les enfants. Elle leur donne une
grande quantité d’informations mais la plupart d’entre elles sont destinées à un public d’adulte.
L’enfant sait beaucoup de choses mais il ne peut en comprendre qu’une infime partie. L’écart
entre ce qu’il reçoit et ce qu’il assimile est luiaussi générateur de stress. Devant constamment
s’adapter aux quantités considérables d’informations reçues de la télévision, les enfants sont
privés du temps de jouer qui est un facteur important soulageant le stress. Le fait de voir des
images de guerre, de violence et d’adultes perturbés et déviants donne aux enfants l’image que
les adultes n’ont aucun contrôle sur des pulsions qu’eux-même essaient de maîtriser. Cela leur
suggère qu’ils ne pourront pas non plus arriver à maîtriser ces pulsions et c’est une source de
stress.
Les changements contribuent à stresser l’enfant
Si les émissions de télévision et les films créent de l’angoisse latente chez l’enfant, les
changements y contribuent également, comme par exemple lorsque l’enfant est bousculé de chez
la gardienne au centre de jour, etc. Cette angoisse se traduit par de la fatigue, de l’irritabilité,
l’incapacité de se concentrer et de la dépression.
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Les enfants s’adaptent au stress de différentes façons. Certains, à qui l’on qualifie un
comportement dit de « type A » s’engagent dans la compétition ou la combativité. D’autres
manifestent de l’impatience, de l’agressivité verbale ou physique. En fait ces manifestations sont
semblables à celles des adultes du même type. Ils présentent généralement des taux de
cholestérol importants et sont sujets à 2 fois plus de maladies coronariennes que les enfants dits
de « type B ». En fait les enfants conservent leur « type » dans la vie adulte. Ce qui est surprenant
est que les modèles de réaction au stress établis dans l’enfance se retrouvent habituellement dans
la vie adulte.
Curieusement, certains enfants « type B », ne développent pas du tout les mêmes réactions face
au stress que les enfants de « type A ». Il semble que même les parents ont des attentes
différentes face à leurs enfants. Ils sont beaucoup plus exigeants envers ceux du « type A » et ils
les encouragent moins.
L’usure de l’école
L’école est comme l’emploi des enfants et ils peuvent ressentir les même symptômes d’usure
face à l’école que leurs parents face au travail. Pour ces jeunes, l’école est comme un mauvais
emploi. Ils détestent aller à l’école, invoquent souvent la maladie, sont souvent en retrait ou font
l’école buissonnière. Plusieurs commencent à abuser de l’alcool, prennent de la drogue et
commettent des actes de vandalisme. La pression scolaire est trop forte pour eux et ils
décrochent.
Pourtant, au départ, ces enfants sont heureux d’aller à l’école et ils en ont de grandes attentes.
Mais très vite, ils déchantent, la compétition brûle leurs réserves d’énergie et ils manifestent alors
de l’insatisfaction face à l’école. Les soupapes habituelles de sécurité face au stress ne
fonctionnent plus.
Ils sont fatigués, prennent de mauvaises habitudes et connaissent des troubles du sommeil.
Faisant face à des échecs consécutifs, ces enfants développent des troubles chroniques, physiques
ou psychologiques. Ils peuvent avoir des maux de tête, des ulcères et des coliques. D’autres ont
des troubles du comportement et deviennent brutaux ou introvertis. Ils peuvent développer le «
syndrome de l’alibi » en inventant sans cesse des excuses à leurs échecs scolaires répétés ou aussi
se mettre à tricher.
Le sentiment d’impuissance comme facteur de stress
Lorsque l’enfant manifeste de l’impuissance face aux évènements de sa vie quotidienne, il
ressent le sentiment d’un danger imminent et la conscience qu’il n’y a rien à faire pour sauver la
situation. L’impuissance est le stress de ne pas pouvoir répondre au stress. Fait surprenant, cette
impuissance peut être apprise. Les enfants apprennent en effet à se sentir impuissants,
menacés ou incapables d’agir, même lorsque que ce n’est pas justifié. Ils deviennent alors
renfermés, apathiques, indifférents. Ils perdent leur motivation d’entrer en contact avec les autres
et d’apprendre. Le problème est que lorsque l’enfant est placé dans l’une de ces situations, il
garde cette attitude pour d’autres situations. Un bon nombre des enfants acquièrent
malheureusement cette impuissance à l’école. Ce peut être parce qu’ils sont confrontés à des
tâches d’apprentissage trop difficiles ou que les programmes ou les méthodes sont inadéquats
pour eux. L’impuissance acquise survient comme réponse au stress. Elles est à l’opposé du
comportement de l’enfant de « type A ». Alors que l’enfant de ce type extériorise son vécu,
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l’enfant qui vit l’impuissance acquise se retire et abandonne.
Les enfants qui résistent bien au stress
Alors que certains enfants éprouvent de la difficulté à la maison ou à l’école, d’autres paraissent
invulnérables et s’en sortent bien. On les appelle aujourd’hui les enfants « résilients2 » On sait
cependant que ces enfants sont à l’aise avec les autres, y compris les adultes et qu’ils savent les
mettre à l’aise. Ils sont capables de se percevoir comme étant attrayants et charmants. Ils sont
conscients de leur compétence et de leur capacité à maîtriser les situations stressantes. Ils sont
aussi indépendants, créatifs et sont des personnes d’action.
David Elkind considère que les enfants stressés d’aujourd’hui ressemblent davantage à des
victimes d’une guerre que les enfants névrotiques d’autrefois. La précipitation est aux enfants ce
que la guerre est aux adultes : un énorme stress qui apporte beaucoup de douleur.
Que pouvons faire pour aider les enfants stressés forcés de grandir hâtivement?
À cette question, Elkind répond qu’il convient tout d’abord de savoir ce qu’il ne faut pas faire. Si
l’accélération de la croissance se fait au détriment des besoins des enfants, le résultat sera négatif
pour l’enfant. Les besoins des parents ne doivent pas primer sur ceux des enfants et les attentes
des parents doivent être raisonnables. Les adultes pensent souvent que enfants sont comme eux
dans leurs pensées et leurs sentiments mais en fait, c’est exactement l’inverse. Nous devons
davantage répondre au sentiment de l’enfant qu’à son intellect.
Par exemple, si on doit laisser son enfant à la gardienne, on pourrait lui dire: « tu vas vraiment
me manquer aujourd’hui et j’aimerais que tu sois avec moi ». Il faut répondre au sentiment de
l’enfant, être honnête avec lui et le lui démontrer de façon simple, directe et lui dire qu’on se
préoccupe de ses sentiments. Le respect est l’un des moyens les plus simples de soulager le stress
de l’enfant. L’enfant veut jouer à être grand mais il ne veut pas qu’on le prenne trop au sérieux.
Quant aux adolescents, leur faire face est quelque chose de compliqué car ce sont des adversaires
redoutables dans n’importe quelle discussion. L’adolescent ne pense pas de la même façon que
l’adulte et argumenter avec lui l’amène plutôt à se retrancher sur ses positions. On peut
cependant lui dire : « qu’est-ce qui, d’après toi, constituerait des responsabilités raisonnable
pour une personne de ton âge dans les circonstances actuelles? ». Souvent dans ce cas,
l’adolescent va établir une liste plus exigeante que celle que les parents auraient proposée.
Quelque soit l’âge de l’enfant, il faut que l’adulte reconnaisse sa façon particulière de percevoir
les pressions en tout genre. Lorsque nous sommes stressés, nous devenons égocentrique et nous
avons de la difficulté à comprendre que les autres puissent avoir un point de vue différent du
nôtre.
Nous devons partir de la vision du monde qu’ont les enfants pour établir la base de nos relations
avec eux. À l’école, il convient de traiter les enfants comme des êtres humains, les rendre fiers de
leur travail, ne pas les confiner à la même routine, leur donner l’occasion d’exprimer leurs
opinions et les prendre sérieusement en considération.
Le jeu comme anti-stress
Il est important de reconnaître le jeu comme un puissant antidote au stress. C’est une soupape de
sécurité pour affronter les difficultés. Les rèves, les blagues et le jeu théatral sont des formes de
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jeu au sens large. Ils permettent de se décharger socialement des désirs. Le jeu permet une
transformation de la réalité afin de satisfaire les besoins personnels. Le jeu symbolique a une
grande importance. Par exemple, lorsque les enfants jouent avec des dinosaures, cela leur fournit
un moyen symbolique et sûr d’affronter les géants, en fait, les adultes. À tous les niveaux de leur
développement, les enfants ont besoin de jouer, que ce soit à la maison ou à l’école.
Le rôle primordial des parents
Les enfants vivent dans le présent et ne se soucient pas du passé ou de l’avenir. Il convient donc
d’en tenir compte et d’être disponibles pour eux maintenant. Lorsque les parents s’aménagent des
soupapes au stress, ils communiquent à leurs enfants des stratégies semblables. En nous servant
nous-même, nous servirons aussi les autres.
David Elkind conclut en disant que tout le monde a besoin d’une philosophie de la vie, d’une
façon de l’envisager en perspective et globalement. La vie, lorsque considérée comme un tout,
permet aux enfants de mieux l’apprivoiser. L’enfance, période de la vie importante, est aussi le
droit humain le plus fondamental et les enfants y ont pleinement droit.
Note de l’AQM
1- Traduit de l’anglais par Paul Paré. Paru en français aux éd. de L’Homme, Montréal, 204 p. Le titre original
anglais «The Hurried Child : Growing Up Too Fast Too Soon », est paru en 1981 aux éd. MA: Addison-Wesley.
2- Le concept des enfants résilients ou "l'art de naviguer dans les torrents", a été développé par Boris Cyrulnik et
Claude Seron : La résilience ou comment renaître de sa souffrance, éd. Fabert, coll. « Penser le monde de l'enfant »,
2004.
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