Cartel des vitamines
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Cartel des vitamines
Le cartel des vitamines Analyse de la décision de la Commission Européenne du 21 novembre 2001 Prof. Bertrand Quélin [email protected] © Bertrand Quélin - Groupe HEC 1 Le canevas d’une analyse exhaustive Analyse des produits Analyse de la structure des marchés Substituables vs complémentaires B to B vs grands publics Locaux vs globaux Concentration 9 Nombre d’acteurs par segments 9 Leader en part de marché 9 Concurrence oligopolistique Comportements de prix par segments Demande 9 Élasticité-prix Ententes Formation Période 1 Période 2 9 Sans rétorsion 9 Avec rétorsion Calcul de la rente Fin de l’entente © Bertrand Quélin - Groupe HEC 2 Contexte 21 novembre 2001 : décision de la Commission européenne Un cas d'entente dans l'industrie des vitamines Condamnation de 13 entreprises productrices de vitamines 9 d'entre elles se sont vu infliger des amendes de 9 à 462 millions d'euros Cas d'application de règles de concurrence © Bertrand Quélin - Groupe HEC 3 Les faits Cartel des vitamines : une entente impliquant treize producteurs de vitamines couvrant les principales vitamines entrant dans l’alimentation animale et humaine : A, E, B1, B2, B5, B6, C, D3, H, acide folique, bêta-carotène, et caroténoïdes 1er novembre 2001, la Commission Européenne a infligé à huit entreprises des amendes d’un montant total de 855,23 millions d’euros Motif : participation à huit différentes ententes secrètes ayant pour objet le partage des marchés et la fixation des prix dans le secteur des produits vitaminiques Le nombre d’entreprises impliquées et la durée de l’entente varient selon les vitamines en question © Bertrand Quélin - Groupe HEC 4 Le cartel Le cartel : a duré près de 10 ans (de 1989 à 1999) a relativement bien fonctionné a généré des gains substantiels Une idée des surprofits : le chiffre d’affaires généré en Europe par la vitamine C est passé de 250 millions d’euros en 1995 (dernière année de fonctionnement du cartel) à 120 millions d’euros en 1998 La société suisse Hoffmann-La Roche a joué un rôle d’instigateur et a participé à toutes ces ententes Elle reçu l’amende la plus élevée, d’un total de 462 millions d’euros © Bertrand Quélin - Groupe HEC 5 Les différents cartels ‘ Vitamines ’ Chaque groupe de vitamines fait l’objet d’un accord distinct © Bertrand Quélin - Groupe HEC 6 Les cartels (suite) © Bertrand Quélin - Groupe HEC 7 Nombre de participations Triple objectif Stabilisation des parts de marché Prix plancher Lutte contre de nouveaux concurrents © Bertrand Quélin - Groupe HEC 8 Prix de cartel et gonflement de la valeur du marché Surprofits Comparés (1997) © Bertrand Quélin - Groupe HEC importants pendant l’entente (1994) à une situation de concurrence 9 Le coût social du cartel Qm représente la quantité offerte par un monopole privé Qc est la quantité offerte en concurrence limitée (oligopolistique) Q* est la production socialement optimale © Bertrand Quélin - Groupe HEC Le triangle le plus foncé représente la perte de surplus social due à la concurrence limitée ; la zone grisée claire représente la perte de surplus social supplémentaire due au monopole. La zone hachurée vers le bas en traits épais représente les profits du monopole, par hypothèse plus élevés que la somme des profits engendrés en concurrence limitée (zone hachurée vers le haut, traits fins). La zone pointillée représente le surplus des consommateurs. 10 Facteurs favorisant la collusion Facteurs de nature à favoriser l'établissement et la stabilité de la collusion : Demande très inélastique Faibles coûts d'organisation Faible nombre de producteurs Transparence et capacité à détecter les tricheurs Pouvoir de rétorsion Faible nombre de firmes Même taille des firmes, ou au contraire présence d'un leader © Bertrand Quélin - Groupe HEC 11 Le fonctionnement Qui devrait trahir ? la firme qui a les coûts les plus faibles a plus intérêt à trahir que l'autre 9 son “ seuil de δ " est plus bas 9 Qu’est-ce que δ ? : taux d’escompte, seuil de sensibilité… cela impacte donc la stabilité du cartel En revanche, fixer des parts de marché qui tiennent compte de la structure de coûts de chaque entreprise empêche la déstabilisation du cartel Entreprises du secteur des vitamines dans chacun des cartels considérés, reproduction des parts de marché sensiblement identiques à celles observées sur les périodes précédentes parts de marché constatées : tiennent compte des asymétries entre les firmes Présence d'un leader clair : Roche Reproduire les parts de marché : tenter d'inclure les asymétries de coûts dans la répartition des profits, et donc, tenter de stabiliser le cartel © Bertrand Quélin - Groupe HEC 12 La tricherie 1période Free rider face au cartel Acteur Free rider Respecte Augmente sa production Acteurs coalisés Respecte Augmente sa prod. Π2FR, Π2c ΠFR, ΠC Π3FR, Π3c Π∗FR, Π∗c (coop./coop.) : Profit joint: ΠFR + ΠC = profit maximum (coop./ triche) : Profit joint: Π2FR + Π2FR < ΠFR + ΠC (profit joint maximum) Et Π2FR < ΠFR et Π2c > ΠC (triche/coop.) : Profit joint: Π3FR + Π3FR = Π2FR + Π2FR < ΠFR + ΠC (profit joint maximum) Et Π3FR > ΠFR et Π2c < ΠC (triche/triche) : ΠFR + ΠC > Π2FR + Π2FR > Π∗FR+ Π∗FR Pourtant, (Π∗FR, Π∗FR) est un équilibre de Nash dans un jeu à une période © Bertrand Quélin - Groupe HEC 13 Rétorsion et équilibre Les ententes sur les marchés des vitamines B, B4, B6 et H ont pris fin en juin 1994 Vitamines B6 : la Commission explique que c'est Daiichi, l'un des producteurs, qui a refusé de continuer à coopérer à partir de début 1994 Daiichi aurait donc décidé unilatéralement de baisser ses prix et d'augmenter ses volumes de production Comportement supposé de Daiichi : observation d’une demande nulle (ou trop faible) pendant une ou plusieurs périodes Donc, incitations à trahir le cartel nécessairement devenues plus fortes que ses incitations à coopérer Le plus probable : 9 Daiichi estimait que la répartition des profits lui était trop défavorable 9 elle avait plus à gagner, notamment dans le futur, d'une autre répartition des parts de marché © Bertrand Quélin - Groupe HEC 14 B6 : Evolutions possibles Hypothèse : en l'absence d'enquête de la Commission européenne, quelques années après cette rupture de cartel, la trahison (suivie de la punition des autres entreprises) n'aurait sans doute pas été de durée infinie du fait de la fréquence des contacts entre les mêmes firmes sur les autres produits, Daiichi aurait très certainement pu tenter de renégocier les termes d'un nouveau cartel sur la vitamine B6 avec une nouvelle répartition des parts de marché, accord que toutes les firmes auraient eu intérêt à accepter Rôle des punitions de durée finie © Bertrand Quélin - Groupe HEC 15 Instabilité Croiser ‘durée du cartel’ (en mois) et nombre de participants Facteurs externes Entreprises hors de l’entente Nouveaux entrants potentiels Facteurs internes tricherie © Bertrand Quélin - Groupe HEC 16 Pistes Concurrence Intégration multi-contact verticale et Double squeeze Premix © Bertrand Quélin - Groupe HEC 17